Péninsule de Reykjanes (Islande) : et maintenant? // Reykjanes Peninsula (Iceland) : what now?

Comme je l’ai indiqué précédemment, on a enregistré ces derniers jours une hausse de la sismicité sur la péninsule de Reykjanes (Islande) avec plus de 3000 événements au cours de la semaine écoulée. Ils avaient une magnitude parfois supérieure à M 3,0 et deux événements ont culminé à M 4,2 et M 4,3 le dimanche 15 mai 2022. Il est intéressant de noter que les hypocentres de ces séismes se trouvaient à 4-6 km de profondeur. A partir du 16 mai, l’essaim a commencé à s’essouffler.

Parallèlement à cette sismicité, une inflation a été détectée à l’ouest du Mt Thorbjörn, probablement provoquée par une intrusion magmatique.

Au vu de ces différents événements et par précaution, la couleur de l’alerte aérienne est passée au Jaune.

S’agit-il d’un simple essaim sismique comme cela se produit fréquemment dans cette partie de l’Islande? Sismicité et inflation annoncent-elles une éruption à plus ou moins long terme? Personne ne le sait. Comme l’a déclaré un géophysicien islandais, « il y a eu une activité sismique dans d’autres systèmes volcaniques de la région et le soulèvement du sol à Svartsengi ou au Mt Þorbjörn est le quatrième depuis 2020. Non loin de Krýsuvík, la terre s’est soulevée en 2020 et une certaine activité a été détectée dans d’autres secteurs de la Péninsule de Reykjanes. Mais il est impossible de prévoir quand, ou même si, des éruptions se produiront. »

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As I put it previously, an increase in seismicity has been recorded in recent days on the Reykjanes peninsula (Iceland) with more than 3000 events during the past week. They had magnitudes sometimes greater than M 3.0 and two events peaked at M 4.2 and M 4.3 on Sunday May 15th, 2022. Interestingly, the hypocenters of these earthquakes were 4-6 km deep. From May 16th, the swarm began to decline.
Along with this seismicity, inflation was detected west of Mt Thorbjörn, likely caused by magma intrusion.
In view of these various events and as a precaution, the aviation colour code changed to Yellow.
Is it a simple seismic swarm as frequently occurs in this part of Iceland? Do seismicity and inflation announce an eruption in the long or short term? No one knows. Said one Icelandic geophycist : « There has been seismic activity in other volcanic systems in the area and the land rising in Svartsengi or Þorbjörn is the 4th one since 2020. Not far from the area in Krýsuvík land rose in 2020 and some activity has been detected in other areas in the Reykjanes peninsula. But it is impossible to predict when or if some eruptions occur. »

Source: IMO

Plage de Reynisfjara (Islande) et belvédère du Maïdo (Ile de la Réunion) : danger de mort !

On le dit et on le redit, mais apparemment cela ne sert à rien. La plage de Reynisfjara sur la côte sud de l’Islande est particulièrement dangereuse avec des déferlantes qui peuvent surprendre les touristes qui s’approchent trop près du rivage, comme on peut le voir sur cette vidéo où les rires des gens montrent qu’ils n’ont pas compris le danger du site:

https://youtu.be/L2HKFz4GkIs

On ne peut pas reprocher aux autorités islandaises de ne pas avoir prévenu les gens car de nombreux panneaux mettent en garde sur la dangerosité du site.

Malgré cela, des imbéciles continuent à mettre leur vie en péril. Le dernier de la liste est un Espagnol qui, après avoir retiré ses vêtements est entré dans l’eau qui ne titre que quelques degrés. Le risque d’une hypothermie très rapide est donc évident. L’homme a vite été confronté aux courants et autres lames de fond et il s’en est fallu de peu pour qu’il soit emporté et connaisse le même sort qu’une touriste chinoise en 2021. Certaines personnes qui se trouvaient à proximité ont essayé de l’aider, en se mettant elles aussi en danger. D’autres touristes, craignant qu’un drame se produise, avaient tenu les enfants bien à l’écart de la scène. Une fois sorti de cette situation périlleuse, l’Espagnol a été pris en charge par les services médicaux; il était saint et sauf et souffrait d’un début d’hypothermie.

Photos: C. Grandpey

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Il n’y a pas qu’en Islande que l’on déplore des comportements imbéciles. Sur l’île de la Réunion, le belvédère du Maïdo offre l’un des plus beaux panoramas de l’île. C’est le deuxième site le plus visité après le Pas de Bellecombe et la vue sur le Piton de la Fournaise.

Fragilisé depuis l’incendie de 2020, l’accès au belvédère Nord du Maïdo est interdit au public et sécurisé par des rubalises installées par les agents de l’ONF. La roche est très friable et le site est sous surveillance renforcée du BRGM qui mesure les mouvements du relief. Ces derniers jours, le dispositif de veille a enregistré une alerte, avec un écartement important des fissures sur le rempart. Le risque d’un effondrement majeur est donc bien réel. C’est pour cela que les autorités ont interdit l’accès au belvédère Nord, mais en laissant libre le reste du point de vue.

Les rubans de chantier ne semblent pas suffisants pour indiquer le danger et il va donc falloir installer des barrières métalliques. En effet, de nombreux indisciplinés franchissent le ruban pour réaliser des selfies qui pourraient être les derniers de leurs vies…

En parodiant Jean Gabin (et Michel Audiard) dans Le Pacha, on pourrait dire : Quand on mettra les cons sur orbite, ces gens-là n’ont pas fini de tourner!

Photo: C. Grandpey

Rebond isostatique et baisse du niveau de la mer // Isostatic rebound and sea level drop

Un article paru dans le quotidien Ouest France en avril 2002 se demande pourquoi le niveau de la mer baisse en Islande, alors qu’il est en hausse partout dans le monde. En fait, la réalité est un peu différente. Comme je l’explique au cours de ma conférence « Glaciers en péril », ce n’est pas vraiment le niveau de la mer qui baisse en Islande, mais la terre qui se soulève. Les scientifiques prennent souvent l’exemple du petit port d’Höfn sur la côte sud de l’île pour illustrer ce phénomène.

Dans l’article diffusé par le quotidien, une climatologue à l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) explique que le niveau moyen de la mer a augmenté d’une vingtaine de centimètres depuis le début du 20ème siècle, mais il s’agit d’un niveau moyen. Autrement dit, il y a des endroits où la hausse est plus importante qu’à d’autres, avec des variations de quelques centimètres. Par exemple, le niveau de l’eau augmente deux à trois fois plus vite qu’ailleurs dans l’océan Pacifique parce que les courants océaniques ne distribuent pas la chaleur de manière homogène. A contrario, il existe d’autres zones où aucune élévation du niveau de la mer n’est enregistrée et parfois même une légère baisse est constatée, comme en Islande. Le Groenland et d’autres pays, essentiellement dans l’Arctique, sont concernés. C’est aussi le cas de quelques zones proches du pôle Sud.

En fait, plus que d’une baisse du niveau de la mer, il s’agit d’une élévation de la terre. Il s’agit d’un phénomène appelé rebond post-glaciaire ou rebond isostatique qui a déjà été observé au cours de la dernière glaciation, il y a environ 20 000 ans. D’énormes calottes de glaces se sont alors formées au nord des États-Unis, du Canada ou encore de l’Europe. Sous leur poids, le sol s’est enfoncé dans les zones concernées. Au terme de cette période glaciaire – il y a entre 20 000 et 10 000 ans – le climat s’est réchauffé et a entraîné la fonte des calottes glaciaires qui ont pesé moins lourd sur le plancher océanique et terrestre. Sous cet effet, le sol s’est soulevé, et c’est ce qui se passe aujourd’hui en Islande où les glaciers fondent sous les coups de butoir du réchauffement climatique.

La climatologue de l’IRD ajoute que la baisse apparente du niveau de la mer en Islande s’explique aussi par la gravité. En effet, une grosse calotte glaciaire a tendance à attirer la mer, un peu comme l’attraction exercée par la Lune sur nos mers. En conséquence, si la calotte fond et disparaît petit à petit, elle attire moins la mer. Plus la calotte glaciaire disparaîtra, plus la surface de la mer sera basse. Cet effet est, lui aussi, assez local.

Les scientifiques ne pensent pas que la baisse du niveau de la mer en Islande va se poursuivre. Elle sera compensée, puis dépassée, par l’élévation globale du niveau des océans dans le monde. Les projections d’ici la fin du siècle prévoient une hausse du niveau de la mer importante, si bien qu’en 2100, les conséquences du rebond isostatique existeront toujours mais seront globalement compensés par la dilatation thermique de l’océan et l’apport d’eau douce à la mer par la fonte des glaciers continentaux et des calottes polaires.

Source: Ouest France.

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An article published in the French daily Ouest France in April 2002 asks why the sea level is dropping in Iceland, while it is rising all over the world. In fact, the reality is a little different. As I explain during my conference « Glaciers at Risk », the sea level is not really decreasing in Iceland, but the land is rising. Scientists often take the example of the small port of Höfn on the south coast of the island to illustrate the phenomenon.
In the article published by the daily, a climatologist at the Research Institute for Development (IRD) explains that the average sea level has risen by about twenty centimeters since the beginning of the 20th century, but it is an average number. In other words, there are places where the rise is greater than at others, with variations of a few centimeters. For example, the water level is rising two to three times faster than elsewhere in the Pacific Ocean because ocean currents do not distribute heat evenly. Conversely, there are other areas where no rise in sea level is recorded and sometimes even a slight drop is observed, such as in Iceland. Greenland and other countries, mainly in the Arctic, are concerned. This is also the case for some areas near the South Pole.
In fact, more than a drop in sea level, it is a rise in land. This is a phenomenon called post-glacial rebound or isostatic rebound that has already been observed during the last glaciation, around 20,000 years ago. Huge ice caps then formed in the north of the United States, Canada and even Europe. Under their weight, the ground sank in the affected areas. At the end of this ice age – between 20,000 and 10,000 years ago – the climate warmed up and led to the melting of the ice caps which weighed less heavily on the ocean floor and land. Under this effect, the ground rose, and this is what is happening today in Iceland where the glaciers are melting under the impact of global warming.
The IRD climatologist adds that the apparent drop in sea level in Iceland is also explained by gravity. Indeed, a large ice cap tends to attract the sea, much like the attraction exerted by the Moon on our seas. As a result, if the ice cap melts and gradually disappears, the ice cap attracts the sea less. The more the ice cap disappears, the lower the sea surface will be. This effect is also quite local.
Scientists do not believe that sea level decline in Iceland will continue. It will be compensated, then exceeded, by the global rise in the level of the oceans in the world. Projections by the end of the century foresee a significant rise in sea level, so that in 2100 the consequences of the isostatic rebound will still exist but will be globally compensated by the thermal expansion of the ocean and the contribution of water to the sea through the melting of continental glaciers and polar ice caps.
Source: Ouest France.

Schéma illustrant le rebond isostatique (Source: https://profsvt.site)

Vue du port de Höfn (Crédit photo: Wikipedia)

En fondant, le glacier islandais Vatnajökull contribue à la fois au rebond isostatique et à la hausse du niveau de la mer (Photo: C. Grandpey)

 

 

 

 

 

Du jamais vu…mais que l’on reverra!

Il fait beau, il fait chaud, ce fut un beau lundi au soleil, mais il n’y a pas vraiment de quoi se réjouir, comme ont tendance à le faire un grand nombre de personnes.En effet, le mois de mai risque d’être le plus chaud jamais observé en France, avec des températures qui ont atteint 30°C dans le sud-ouest le week-end dernier et devraient culminer à 34° dans les prochains jours. Les saints de glace ont perdu la tête et les jardiniers ne savent plus trop à quels saints se vouer. Le climat est devenu fou!

Météo-France indique qu’en milieu de semaine, certaines villes pourraient connaître au moins cinq jours de suite dépassant 30°C. Ce serait un événement rarissime pour un mois de mai et qui n’a été observé qu’une seule fois sur le dernier siècle, en mai 1945. Rarissime oui, mais le problème est que le rarissime se répète tous les quatre matins et des événements soi-disant exceptionnels ne le sont plus.

On se dirige droit vers un mois de mai record; en sachant que les premières analyses météorologiques harmonisées au niveau national datent de 1947. S’agissant des températures moyennes pour un mois de mai, seuls cinq mois de mai ont présenté des valeurs supérieures à mai 2022 dont la moyenne est en ce moment de 16,6°C. Ainsi, on a enregistré 16,88°C en 2011, mais mai 2022 fera probablement mieux. En fait, je devrais écrire que la chaleur devrait être encore pire, car il n’y a vraiment pas de quoi rigoler.

Ce n’est pas tout. Il fait chaud et la situation hydrique est inquiétante. 2022 est pour l’instant une année très sèche. Il n’a plu que 112,6 mm en moyenne sur le territoire. C’est pour l’instant la deuxième mesure la plus faible depuis que les données existent. Même si Météo-France prévoit un peu de pluie en fin de semaine, cela ne suffira pas à compenser le profond déficit qui était de 25% en avril et de 20% pour la période de septembre à mars, moment où les nappes phréatiques étaient censées se recharger.

Source: Météo-France.

Avec les températures actuelles, il ne fait guère de doute que les glaciers continuent de fondre, avec les problèmes qui accompagnent le phénomène. C’est aussi une très mauvaise nouvelle pour le permafrost de roche; les alpinistes devront redoubler de prudence dans les prochains mois.

La presse a fourni des courbes et graphiques illustrant ces nouvelles inquiétantes. Au cous de ma conférence « Glaciers en Péril », je montre deux courbes côte à côte : la hausse des températures depuis l’ère industrielle et la courbe de Keeling (concentrations de CO2 dans l’atmosphère) au cours de la même période. Le parallélisme est saisissant…