La foudre.
Pour étudier la foudre qui a accompagné l’éruption du Hunga Tonga-Hunga Ha’apai, les scientifiques ont utilisé les données de GLD360, un réseau de détection de foudre au sol. Ces données ont révélé que, sur les quelque 590 000 coups de foudre détectés lors de l’éruption, environ 400 000 se sont produits dans les six heures qui ont suivi la puissante explosion du 15 janvier.
Avant l’éruption du Hunga Tonga-Hunga Ha’apai, le plus grand événement de foudre volcanique s’était produit en Indonésie en 2018, lorsque l’Anak Krakatau est entré en éruption et a généré environ 340 000 éclairs en une semaine. Environ 56% de la foudre produite par l’éruption des Tonga a frappé la surface de la terre ou de l’océan, et plus de 1 300 impacts ont été recensés sur Tongatapu, l’île principale des Tonga.
Source : Tonga Geological Services
Le faible effet de refroidissement.
A noter que que l’effet de refroidissement de l’éruption du Hunga Tonga Hunga Ha’apai a été très faible. Il n’a pas dépassé 0,004°C dans l’hémisphère nord et 0,01°C dans l’hémisphère sud. La clé de l’impact d’une éruption volcanique sur la température de la Terre est la quantité de dioxyde de soufre (SO2) qui a été émise par le volcan. Par exemple, l’éruption du Pinatubo en 1991 a entraîné un refroidissement d’environ 0,6°C qui a duré près de deux ans. La différence avec l’éruption aux Tonga, c’est que les cendres rejetées dans l’air par le Pinatubo contenaient environ 50 fois plus de dioxyde de soufre.
Effet sur la couche d’ozone.
Selon les scientifiques, l’éruption du Hunga Tonga-Hunga Ha’apai pourrait agrandir le trou dans la couche d’ozone dans les années à venir. En effet, l’eau émise par le volcan a provoqué un important refroidissement de la stratosphère aux latitudes moyennes dans l’hémisphère sud. Des températures plus froides dans la stratosphère accélèrent le processus de dégradation de l’ozone. Lorsque la stratosphère est plus froide et qu’il y a beaucoup d’eau présente à ces altitudes, on observe une formation plus fréquente de nuages stratosphériques polaires pendant les mois d’hiver, lorsque les températures dans la stratosphère sont les plus froides. Ils fournissent un environnement chimique favorable aux substances à base de chlore qui appauvrissent la couche d’ozone. Elles ont été interdites par le Protocole de Montréal en 1989, mais elles persistent toujours dans l’air au-dessus de notre planète. Une fois que la stratosphère se réchauffe avec l’arrivée de l’été antarctique, le trou dans la couche d’ozone commence à se refermer et disparaît généralement à la fin du mois de novembre.
Selon les scientifiques, les matériaux émis par le Hunga Tonga ne sont pas encore entrés dans le trou de la couche d’ozone au-dessus de l’Antarctique cette année, mais il l’atteindront certainement l’année prochaine. Il ne faut cependant pas trop s’inquiéter de cette situation. La couche d’ozone, située à des altitudes comprises entre 15 et 35 km, est en train de se remettre de l’appauvrissement causé par les produits chimiques utilisés dans les aérosols et les réfrigérants depuis les années 1950. Elle ne devrait donc être affectée que temporairement par l’éruption du Hunga Tonga-Hunga Ha’apai.
Cartographie du cratère.
Des chercheurs ont réalisé une cartographie du cratère du Hunga Tonga Hunga Ha’apai. La caldeira mesure maintenant 4 km de large et descend à 850 m sous le niveau de la mer. Avant l’éruption, la base du volcan était à une profondeur d’environ 150 m. Le volume de matière émis est estimé à au moins 6,5 km3.
Cartographie du plancher océanique avec le volcan qui se dresse à plus de 1,5 km de hauteur (Source: NIWA)
En plus d’un approfondissement général de la caldeira, de grosses parties des parois intérieures de la falaise ont disparu, en particulier à l’extrémité sud du cratère. Cependant, le cône du volcan tel qu’il se présente aujourd’hui semble structurellement solide. La caldeira est un peu plus grande en diamètre et un peu moins profonde à cause des effondrements des côtés vers l’intérieur. Le côté nord-est semble un peu mince et fragile; s’il lâchait prise, un tsunami mettrait en danger les îles Ha’apai, mais la structure du volcan semble globalement assez robuste.
Source: NIWA.
Le processus éruptif.
Les scientifiques commencent à avoir une bonne idée du processus éruptif qui s’est déroulé le 15 janvier 2022. Au fur et à mesure que la caldeira s’est fracturée, l’eau de mer a commencé à interagir avec le magma à haute température qui se décompressait en remontant des profondeurs. Il y a eu des explosions assourdissantes causées par des interactions entre le magma et l’eau à grande échelle.
Les données recueillies indiquent qu’au moins 9,5 kilomètres cubes de matériaux ont été déplacés au cours de l’événement. Le NIWA explique qu’il s’agit d’un volume quasi équivalent à celui de 4 000 pyramides égyptiennes. Les deux tiers des matériaux étaient constitués de cendres et de roches éjectées par la caldeira du volcan.
Ce transport de matériaux a pris la forme de coulées pyroclastiques. Dans l’eau, leur température très élevée les a enveloppées d’un coussin de vapeur grâce auquel elles ont pu se déplacer sans frottement à très grande vitesse. C’est ainsi que ces coulées pyroclastiques ont réussi à franchir des obstacles de plusieurs centaines de mètres de hauteur. Cela explique, par exemple, la section du câble sous-marin reliant les Tonga au réseau Internet. Une grande partie du câble a été coupée, bien qu’elle se trouve à 50 km au sud de Hunga-Tonga et au-delà d’une grande colline sur le plancher océanique.
L’équipe du NIWA explique que l’eau a pu se déplacer de quatre façons pour générer ces tsunamis : 1) déplacement de l’eau sous l’effet des coulées pyroclastiques; 2) puissance explosive de l’éruption qui a fait se déplacer l’eau ; 3) affaissement de 700 mètres du sol de la caldeira; 4) ondes de pression du souffle atmosphérique avec effet sur la surface de la mer. Au cours de certaines phases de l’éruption, ces mécanismes ont probablement agi ensemble. Un bon exemple est la principale vague de tsunami qui a frappé l’île de Tongatapu à 65 km au sud du Hunga-Tonga. L’événement s’est produit un peu plus de 45 minutes après la première explosion majeure du volcan. Un mur d’eau de plusieurs mètres de hauteur s’est abattu sur la péninsule de Kanokupolu, détruisant au passage plusieurs stations balnéaires. Une anomalie de la pression atmosphérique peut avoir contribué à augmenter la hauteur des vagues du tsunami.
Le Hunga Tonga-Hunga Ha’apai après l’éruption du 15 janvier 2022 (Source : MAXAR technologies)
Et maintenant?
Des scientifiques de l’Université d’Auckland (Nouvelle-Zélande) ont publié un rapport qui formule des recommandations pour la résilience future.
Bien qu’il soit peu probable que le Hunga-Tonga Hunga-Ha’apai produise une éruption semblable avant plusieurs siècles, il ne faudrait pas oublier qu’il existe au moins 10 volcans sous-marins dans cette région du Pacifique sud-ouest. Eux aussi pourraient entrer violemment en éruption sur une échelle de temps plus brève.
L’Institut national de recherche sur l’eau et l’atmosphère (NIWA) de Nouvelle-Zélande a publié une carte bathymétrique de la zone autour du volcan. Une comparaison avec les cartes de la caldeira, réalisées en 2015 et 2016, donc avant l’éruption, montre des changements majeurs.
Source: NIWA
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Lightning.
To study the lightning that accompanied the Hunga Tonga-Hunga Ha’apai eruption, the scientists used data from GLD360, a ground-based lightning detection network. This data revealed that, of the approximately 590,000 lightning strikes detected during the eruption, around 400,000 occurred within six hours that followed the powerful January 15th explosion.
Prior to the Hunga Tonga-Hunga Ha’apai eruption, the largest volcanic lightning event occurred in Indonesia in 2018, when Anak Krakatau erupted and generated around 340,000 lightning strikes in a week. About 56% of the lightning produced by the Tonga eruption struck the land or ocean surface, and more than 1,300 strikes were recorded on Tongatapu, the main island of Tonga.
The low cooling effect.
The cooling effect of the Hunga Tonga Hunga Ha’apai eruption was very low. It did not exceed 0.004°C in the northern hemisphere and 0.01°C in the southern hemisphere. The key to the impact of a volcanic eruption on Earth’s temperature is the amount of sulfur dioxide (SO2) that was emitted by the volcano. For example, the Pinatubo eruption in 1991 caused a cooling of about 0.6°C that lasted nearly two years. The difference with the eruption in Tonga is that the ash released into the air by Mt Pinatubo contained about 50 times more sulfur dioxide.
Impact on the ozone layer.
Another possible consequence of the Hunga Tonga-Hunga Ha’apai eruption is that it may make the ozone hole larger in coming years. Indeed, the water emitted by the volcano has caused significant cooling in the stratosphere in southern mid-latitudes. Cooler temperatures in the stratosphere speed up the process of ozone degradation. When the stratosphere is cooler and there is a lot of water present at those altitudes, scientists observe more frequent formation of polar stratospheric clouds. They form during winter months when temperatures in the stratosphere are at their coldest, and provide the right chemical environment for chlorine-based ozone depleting substances, which were banned by the Montreal Protocal in 1989 but still linger in the air high above the planet. Once the stratosphere warms up when the Antarctic summer arrives, the ozone hole starts closing and usually disappears by the end of November.
According to scientists, the material from Hunga Tonga did not get into the ozone hole over Antarctica this year, but will certainly get there this coming year, Scientists, however, are not worried about this temporary increase in the ozone hole’s size as the Earth’s protective ozone layer, located at altitudes between 15 and 35 km, is recovering from the depletion caused by chemicals that had been used in aerosol sprays and refrigerants since the 1950s.
Cartography of the crater.
Researchers have mapped the Hunga Tonga Hunga Ha’apai crater. The caldera is now 4 km wide and drops 850 m below sea level. Before the eruption, the base of the volcano was at a depth of about 150 m. The volume of material emitted is estimated at at least 6.5 km3.
In addition to a general deepening of the caldera, large portions of the inner cliff walls have disappeared, particularly at the southern end of the crater. However, the volcano cone as it stands today appears structurally sound. The caldera is a bit larger in diameter and a bit shallower due to the inward side collapses. The northeast side looks a bit thin and flimsy; if he let go, a tsunami would endanger the Ha’apai Islands, but the structure of the volcano seems quite robust overall.
The eruptive process.
Scientists are beginning to get a good idea of the eruptive process that took place on January 15th, 2022. As the caldera fractured, seawater began to interact with the high-temperature magma that was decompressing as it ascended from the depths. There were deafening explosions caused by large-scale magma-water interactions.
Collected data indicates that at least 9.5 cubic kilometers of material was displaced during the event. NIWA explains that this volume is almost equivalent to that of 4,000 Egyptian pyramids. Two-thirds of the material consisted of ash and rock ejected from the volcano’s caldera.
This transport of materials took the form of pyroclastic flows. In the water, their very high temperature enveloped them in a cushion of steam thanks to which they were able to move without friction at very high speed. This is why these pyroclastic flows managed to overcome obstacles several hundred meters high. This explains, for example, the section of the submarine cable connecting Tonga to the Internet network. Much of the cable was severed, although it is 50 km south of Hunga-Tonga and beyond a large hill on the ocean floor.
The NIWA team explains that the water probablye moved in four ways to generate these tsunamis: 1) displacement of water under the effect of pyroclastic flows; 2) explosive power of the eruption which caused the water to move; 3) 700 meter subsidence of the caldera floor; 4) pressure waves from the atmospheric blast with effect on the surface of the sea. During certain phases of the eruption, these mechanisms probably acted together. A good example is the main tsunami wave that hit the island of Tongatapu 65 km south of Hunga-Tonga. The event occurred just over 45 minutes after the volcano’s first major explosion. A wall of water several meters high fell on the Kanokupolu peninsula, destroying several seaside resorts in the process. An anomaly in atmospheric pressure may have contributed to increasing the height of the tsunami waves.
And now?
Scientists from the University of Auckland (New Zealand) have published a report that makes recommendations for future resilience.
Although the Hunga-Tonga Hunga-Ha’apai is unlikely to produce a similar eruption for several centuries, it should not be forgotten that there are at least 10 submarine volcanoes in this region of the southwest Pacific. They too could erupt violently on a shorter timescale.
New Zealand’s National Institute for Water and Atmospheric Research (NIWA) has released a bathymetric map of the area around the volcano. A comparison with the caldera maps, made in 2015 and 2016, so before the eruption, shows major changes.