Crues glaciaires et inondations catastrophiques au Pakistan // Glacial outbursts and Pakistan’s disastrous floods

Depuis le mois de juin 2022, les inondations au Pakistan causées par le réchauffement climatique, les pluies de mousson, la négligence des autorités locales et la fonte des glaciers ont tué plus de 1 100 personnes. Il s’agit des inondations les plus meurtrières au monde depuis celles de 2017 en Asie du Sud. Le 25 août 2022, le gouvernement pakistanais a déclaré l’état d’urgence.
Les glaciers des chaînes de montagnes du nord du Pakistan (Hindu Kush, Himalaya et lKarakorum) fondent rapidement en raison de la hausse des températures, et quelque 3 044 lacs glaciaires se sont formés dans ces zones de montagnes. Parmi ces lacs, 33 sont exposés à des crues glaciaires dangereuses. Il s’agit d’événements soudains qui peuvent provoquer le déferlement de millions de mètres cubes d’eau et de matériaux, avec à la clé la perte de vies, de biens et de moyens de subsistance dans les villages de montagne isolés et souvent très pauvres. Plus de 7,1 millions de personnes sont vulnérables dans une région où 25% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté.
Les lacs glaciaires sont des étendues d’eau naturelles qui sont retenues par de la glace ou des moraines. Un débordement de ces lacs peut être causé par une foule de facteurs : des avalanches de glace ou de roche, l’effondrement du barrage morainique dû à la fonte de la glace à l’intérieur, des séismes ou des arrivées soudaines d’eau dans le lac, à cause de fortes pluies ou la vidange soudaine de lacs. en amont sur le glacier.
Une étude récente a donné plus de détails sur les effets du réchauffement climatique sur les crues glaciaires. Selon des analyses détaillées s’appuyant sur 40 ans de mesures satellitaires, les glaciers ont perdu l’équivalent de près de 45 centimètres de glace par an depuis l’an 2000. Il s’agit de l’analyse récente la plus fiable sur l’influence du réchauffement climatique sur les glaciers de l’Himalaya. . On peut lire que « si une population réside à moins de 20 kilomètres en aval d’un lac glaciaire, le danger est bien réel. Ces endroits nécessitent une bonne surveillance et un important travail de prévention pour éviter des drames. »
Les inondations causées par des débordements de lacs glaciaires ne sont pas un phénomène nouveau au Pakistan. De tels phénomènes se sont souvent produits dans la partie nord du pays au cours des vingt dernières années. Une jeune fille a été tuée et 11 autres personnes ont été blessées à Chitral en 2020 lorsqu’une crue glaciaire a emporté six maisons et endommagé 16 autres. L’inondation ainsi provoquée a également dévasté les champs de blé et de haricots, ce qui a entraîné des pertes financières importantes pour la population locale.
La vidange brutale d’un lac glaciaire affecte les régions en aval avec des crues soudaines et des coulées de boue et de matériaux. Le Pakistan compte environ 7 000 glaciers, dont 3 044 ont donné naissance à des lacs glaciaires. Beaucoup d’autres sont considérés comme dangereux en raison de la hausse des températures. Au moins 7 millions de personnes dans le Gilgit Baltistan et le Khyber Pakhtunkhwa sont menacées par les futurs lacs glaciaires.La principale mesure à prendre pour éviter une crue glaciaire consiste à réduire le volume d’eau dans le lac afin de limiter le débit maximum en cas de crue. Des mesures devraient également être prises en aval, dans la zone exposée aux crues glaciaires, afin de protéger les infrastructures.
Source: Environmental News and Articles from Pakistan (ENVPK).

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Since June 2022, floods in Pakistan caused by global warming, monsoon rains, negligence of local authorities, and melting glaciers have killed more than 1,100 people. It is the world’s deadliest flood since the 2017 South Asian floods. On August 25th, 2022, Pakistan declared a state of emergency.

Glaciers in Pakistan’s northern mountain ranges (Hindu Kush, Himalayas, and Karakorum) are melting quickly due to rising temperatures, and a total of 3,044 glacial lakes have formed in these mountains. Of them, 33 glacial lakes have been identified as being vulnerable to dangerous glacial lake outburst floods (GLOF). GLOFs are abrupt events that can cause the release of millions of cubic meters of water and debris, resulting in the loss of lives, property, and livelihoods in isolated and impoverished mountain villages. Over 7.1 million people are vulnerable in this region where 25 percent of the population is living below the poverty line.

Glacial lakes are natural water reservoirs that have been dammed by ice or moraines. A lake outburst can be caused by a variety of factors: ice or rock avalanches, the collapse of the moraine dam due to the melting of buried ice, earthquakes, or sudden inputs of water into the lake, such as heavy rains or drainage from lakes further up the glacier.

A recent study has given more details about the effects of climate change on glacial outbursts. According to detailed research based on 40 years of satellite measurements, glaciers have lost the equivalent of almost 45 centimeters of the ice per year since 2000. The research represents the most recent trustworthy analytical result on the influence of climate change on the glaciers of the Himalayas. One can read that « if a population resides fewer than 20 kilometers downstream of a glacier lake, the hazard is greater. These places require careful monitoring and preparation to avoid casualties. »

Flooding caused by glacial lake outbursts is not a new phenomenon in Pakistan. Such glacier outbreaks have occurred often in the northern sections of the nation over the previous two decades. A young girl was killed and 11 others were injured in Chitral in 2020 when a glacier flood washed away six houses and damaged 16 others. The glacier flood also devastated wheat and bean fields, resulting in significant financial losses for local households.

A glacier lake’s unexpected eruption affects downstream regions with flash floods and debris flow. Pakistan has around 7,000 glaciers, 3,044 of which have generated glacial lakes. Many others have been identified as a possible concern as a result of rising temperatures. At least 7 million people in Gilgit Baltistan and Khyber Pakhtunkhwa are at risk from future glacial lakes. The most essential mitigating method for minimising GLOF risk is to minimize lake capacity in order to limit peak surge discharge. Measures should be done downstream in the GLOF prone area to safeguard infrastructure from the devastating powers of the GLOF surge.

Source: Environmental News and Articles from Pakistan (ENVPK).

 

Ces deux images prises par le satellite Landsat 8 de la NASA montrent l’apparition d’un lac glaciaire devant le front du glacier Shishpar dans le nord du Pakistan. La photo de gauche a été réalisée en avril 2018, celle de droite un an plus tard…

Nouvelles d’Islande // News from Iceland

Le Met Office islandais (IMO) a indiqué dans un récent bulletin que le sol autour de l’ Askja, dans le centre de l’Islande, s’est soulevé augmente à raison de 5 centimètres par mois. Cela est probablement dû à une nouvelle ascension de magma vers la surface. Un tel événement peut déboucher sur une éruption volcanique mais le magma peut également se refroidir et se durcir sans jamais atteindre la surface. Il n’y a actuellement aucune indication qu’une éruption est imminente.

Les observations GPS et les cartes de déformation du sol obtenues grâce au satellite Sentinel-1 révèlent que l’Askja a commencé à montrer des signes d’inflation début août 2021. Le signal a été localisé en bordure ouest de l’Öskjuvatn et correspond à environ 5 cm/mois de mouvement vertical. La modélisation géodésique indique que la source de cette inflation se trouve à une profondeur d’environ 3 km et correspond à un apport de volume magmatique d’environ 0,001 km³/mois.

La dernière éruption de l’Askja a eu lieu en 1961 et a duré 5 à 6 semaines. En 1970-1972, les mesures géodésiques ont montré une période de soulèvement du sol, mais lorsque les mesures ont repris en 1983, la terre avait commencé à s’affaisser. Depuis cette époque, une déflation d’environ 1 cm/an a été’ détectée jusqu’à la phase d’inflation actuelle.

Source : OMI.

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Une nouvelle crue glaciaire, ou jökulhlaup, a commencé le 6 septembre 2021, avec sa source dans le chaudron oriental du Skaftárketill dans le Vatnajökull. En conséquence, une alerte a été décrétée dans la région. Cependant, les habitants auront le temps de réagir en cas d’urgence Ils savent exactement comment se déroulent les crues glaciaires de la Skaftá. Il se peut que les routes de la région soient inaccessibles et qu’une grande quantité de limon et de boue se répande sur la plaine côtière, avant d’être transportée par le vent une fois que les dépôts se sont asséchés. Cette dernière crue glaciaire intervient à la suite d’une autre crue dont la source était le chaudron occidental du Skaftárketill, le 2 septembre dernier (voir ma note sur cet événement). Aucune crue en provenance du chaudron oriental ne s’était produite depuis 2018. La crue de 2015 était beaucoup plus importante et a causé davantage de dégâts.

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Aucune lave n’est sortie du cratère de Fagradalsfjall depuis plusieurs jours. Le tremor éruptif est stable avec des valeurs faibles. Il est impossible de faire des prévisions sur la suite de l’éruption. Ce n’est peut-être qu’une pause, avec une reprise d’activité dans les prochains jours. Il pourrait aussi s’agir de la fin de l’éruption qui a débuté le 19 mars 2O21. Une preuve supplémentaire venant confirmer que nous ne savons pas prévoir une éruption volcanique.

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The Icelandic Met Office (IMO) has indicated in a recent bulletin that land by Askja volcano in central is rising at a rate of 5 centimetres per month,. This is likely due to new magma flowing towards the surface. Such an event can end in a volcanic eruption but magma may also cool and harden without ever reaching the surface. There are currently no indications that an eruption is imminent.

GPS observations and ground deformation maps derived from Sentinel-1 satellite data reveal that Askja volcano began inflating at the beginning of August 2021. The uplift signal is centered on the western edge of Öskjuvatn, and corresponds to about 5 cm/month of vertical motion. Geodetic modelling indicates that the source of this inflation is located at a depth of about 3 km and corresponds to a volume change of approximately 0.001 km³/month.

The last eruption at Askja was in 1961 and lasted 5-6 weeks. In 1970-1972, geodetic measurements showed a period of uplift, but when measurements resumed in 1983 the land had begun sinking again. Since then, continued subsidence of a rate of 1 cm/year was detected until the current inflation phase.

Source : IMO.

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A new glacial outburst flood, or jökulhlaup, from the Eastern Skaftárketill cauldron in Vatnajökull glacier started on September 6th, 2021.. As a result, an alert phase was declared in the area. However, residents have time to react. The people who live in the region know precisely where the Skaftá glacial outburst floods have an effect. Roads in the area could close, and a great deal of silt and mud could spread around the area and be carried with the wind once the area dries.

The glacial outburst flood from the Eastern Skaftárketill cauldron comes in the wake of another flood from the western one, which began September 2nd (see my previous post about this event).

A flood from the eastern cauldron has not occurred since 2018. The flood in 2015 was considerably larger and caused more damage.

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No lava has been seen emerging from the Fagradalsfjall crater for several days. The eruptive tremor is stable at low values. It is impossible to make predictions about the future of the eruption. It may just be a pause, with new activity in the next days. It could also be the end of the eruption that started on March 19th, 2021. This is one more proof that we are unable to predict a volcanic eruption.

Le cratère de Fagradalsfjall se contente de dégazer (Capture écran webcam)

Réchauffement climatique : la menace des lacs glaciaires // Global warming : the threat of glacial lakes

Une nouvelle étude basée sur des données satellitaires révèle que le volume des lacs formés par la fonte des glaciers dans le monde a bondi de 50% en 30 ans en raison du changement climatique.
On sait que toutes les eaux de fonte n’atteignent pas immédiatement les océans, mais jusqu’à présent, on était incapable d’estimer le volume d’eau stocké dans les lacs ou les nappes phréatiques.

La nouvelle étude, publiée dans Nature Climate Change, permettra aux scientifiques et aux gouvernements d’identifier les dangers potentiels pour les localités situées en aval de ces lacs souvent instables. Cela améliorera également la précision des estimations de l’élévation du niveau des océans grâce à une meilleure compréhension de la manière et de la rapidité avec laquelle l’eau de fonte des glaciers parvient à la mer.
Des études antérieures ont montré qu’entre 1994 et 2017 les glaciers dans le monde, en particulier dans les régions de haute montagne, ont perdu environ 6,5 trillions (1018) de tonnes. Au cours du dernier siècle, 35% de l’élévation du niveau des océans dans le monde provenait de la fonte des glaciers. Les autres principales sources de cette hausse sont les calottes glaciaires et l’expansion de l’eau des océans à mesure qu’elle se réchauffe.
La température moyenne de la surface de la Terre a augmenté de 1°C depuis l’époque préindustrielle, mais les régions de haute montagne sur la planète se sont réchauffées deux fois plus vite, ce qui a accéléré la fonte des glaciers.
Contrairement aux lacs traditionnels, les lacs glaciaires sont instables parce qu’ils sont souvent retenus par des moraines instables composées de glace ou de sédiments. Lorsque l’eau accumulée éventre ces fragiles retenues, des inondations catastrophiques peuvent se produire en aval. Connu sous le nom de crue ou débâcle glaciaire, ce type d’inondation a été responsable de milliers de morts au cours du siècle dernier, ainsi que de la destruction de villages, d’infrastructures et de bétail. L’événement le plus récent est l’inondation provoquée par la libération d’un lac glaciaire ; elle a traversé la vallée de la Hunza au Pakistan en mai 2020. En janvier de cette même année, le Programme de développement des Nations Unies a estimé que plus de 3000 lacs glaciaires se sont formés dans la région de l’Hindu Kush-Himalayan, et 33 constituent une menace imminente pour sept millions de personnes.
La nouvelle étude, basée sur 250 000 relevés fournis pat le satellite Landsat de la NASA, estime le volume actuel de l’ensemble des lacs glaciaires à plus de 150 kilomètres cubes, ce qui équivaut à un tiers du volume du lac Érié aux États-Unis ou à deux fois le volume du lac Léman.
Source: The Japan Times.

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 A new study based on satellite data has revealed that the volume of lakes formed as glaciers melt around the world due to climate change has jumped by 50 percent in 30 years.

It is known that not all meltwater is making it into the oceans immediately, but until now there were no data to estimate how much was being stored in lakes or groundwater.

The new study, published in Nature Climate Change, will help scientists and governments identify potential hazards to communities downstream of these often unstable lakes. It will also improve the accuracy of sea level rise estimates through better understanding of how – and how quickly – water shed by glaciers makes it to the sea.

Previous research has shown that between 1994 and 2017, the world’s glaciers, especially in high-mountain regions, shed about 6.5 trillion tons in mass. In the past 100 years, 35 percent of global sea-level rises came from glacier melting. The other main sources of sea level rise are ice sheets and the expansion of ocean water as it warms.

Earth’s average surface temperature has risen 1 degree Celsius since preindustrial times, but high-mountain regions around the world have warmed at twice that pace, accelerating glacier melt.

Unlike normal lakes, glacier lakes are unstable because they are often dammed by ice or sediment composed of loose rock and debris. When accumulating water bursts through these accidental barriers, massive flooding can occur downstream. Known as glacial lake outbursts, this kind of flooding has been responsible for thousands of deaths in the last century, as well as the destruction of villages, infrastructure and livestock. The most recent recorded incident was a glacial lake outburst that washed through the Hunza Valley in Pakistan in May 2020. In January, the U.N. Development Program estimated that more than 3,000 glacial lakes have formed in the Hindu Kush-Himalayan region, with 33 posing an imminent threat that could impact as many as seven million people.

The new study, based on 250,000 scenes from NASA’s Landsat satellite missions, estimates current glacial lake volume at more than 150 cubic kilometres, which equivalent to one-third the volume of Lake Erie in the United States or twice the volume of Lake Geneva.

Source : The Japan Times.

Au Pérou, en décembre 1941, un énorme pan de glacier est tombé dans le lac Palcacocha, provoquant la rupture de la moraine qui retenait le lac. La vague a emporté un autre lac sur son passage, transportant des blocs de glace, des rochers et de la boue vers la vallée de la rivière Santa. En 15 minutes, la coulée de boue a atteint Huaraz. 400 m³ de débris ont enseveli plusieurs quartiers et tué entre 1 800 et 7 000 habitants. (Crédit photo : Wkipedia)

Katla (Islande / Iceland): Retour au Vert // Back to Green

Le niveau d’alerte du Katla vient de repasser au Vert, après avoir momentanément été élevé à la couleur Jaune. Cela signifie que l’activité volcanique a décliné et que rien ne laisse entrevoir une éruption dans le court terme. D’autre part, la crue glaciaire de la rivière Múlakvísl est maintenant terminée.

Comme je l’ai écrit précédemment, la sismicité observée sur le volcan au cours des derniers jours était certainement trop superficielle pour annoncer une possible éruption. Elle était probablement liée à des mouvements du glacier et/ou des mouvements de fluides hydrothermaux sous la surface, comme cela se produit relativement fréquemment sur les volcans couronnés d’une calotte de glace. A noter que l’IMO ne fait état d’aucune déformation de l’édifice. S’agissant de la rivière Múlakvísl, si la conductivité de l’eau a montré un pic, sa température de sortie est restée modérée avec une quinzaine de degrés Celsius.

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Katla’s alert level has been moved from Yellow back to Green. This means that volcanic activity has subsided and that there are no signs of an impending eruption. The glacial river flood at Múlakvísl is also over.

As I put it before, the seismicity observed on the volcano in the past days was certainly too shallow to announce a possible eruption. It was probably linked to movements of the ice and/ or to the movements of geothermal fluids beneath the surface, as this happens quite frequently on volcanoes topped by an ice cap. It should be noted that IMO does not indicate any deformation of the edifice. As far as the Múlakvísl River is concerned, if the water conductivity showed a peak, its temperature remained moderate with 15°C or so.

Le glacier Myrdalsjökull – qui recouvre le volcan Katla – vu depuis l’espace (Source: NASA)