Il y a quelques semaines, je consacrais une note au projet d’extraction et d’exploitation du méthane qui sommeille au fond du Lac Kivu. Ce lac, dont les eaux baignent la ville de Goma, recèle de très importantes quantités de méthane (estimées à 65 km3) et de gaz carbonique (estimées à 256 km3). Tout le monde a en mémoire la catastrophe du Lac Nyos au Cameroun en 1986 et les scientifiques s’accordent pour dire que si les eaux du Lac Kivu étaient déstabilisées par une coulée de lave du Nyiragongo (comme en janvier 2002), ou par un séisme, le CO2 maintenu sous pression en profondeur pourrait sortir brusquement en surface et tuer des milliers de personnes. Le méthane, quant à lui, n’exploserait pas spontanément en arrivant à la surface, mais il existe bon nombre de sources autour du lac susceptibles de l’enflammer.
Afin d’éviter ces catastrophes potentielles, mais aussi pour des raisons économiques, le gouvernement rwandais envisage de pomper l’eau en profondeur et d’en extraire les gaz dissous. Une grosse barge équipée dans ce but est actuellement en train d’être installée à quelque 13 kilomètres de la berge.
Comme on peut le voir sur le schéma ci-dessous, quatre tubes sont enfoncés verticalement dans le lac jusqu’à une profondeur de 350 mètres. Ils serviront à aspirer l’eau et les gaz seront ensuite séparés au moment de leur arrivée en surface. Le méthane sera acheminé vers le rivage où servira à alimenter une centrale électrique. Le gaz carbonique sera réinjecté dans le lac, d’une part pour ne pas accélérer l’effet de serre, d’autre part parce que le seul fait d’extraire le méthane permet de rendre le lac plus sûr en éloignant le point de saturation et donc le risque d’explosion.
Le projet présente à la fois des avantages et des inconvénients. La production d’électricité à partir du méthane du Lac Kivu permettrait de réduire la dépendance de la région vis-à-vis des énergies fossiles. Actuellement, l’électricité rwandaise au coût fort élevé est produite à partir de centrales fonctionnant au pétrole qui doit être acheminé par camion.
S’agissant des risques, les consultants en matière d’environnement font remarquer que si l’extraction du méthane n’est pas gérée correctement, il existe un risque d’explosion ou d’échappement du gaz à la surface du lac. Il y a aussi le risque de voir l’eau du Kivu devenir plus acide, ce qui favoriserait le développement des algues et réduirait le nombre de poissons, l’une des principales ressources pour les villages autour du lac.
C’est la raison pour laquelle le projet débute à petite échelle, avec un début de production d’électricité à partir du méthane dans les mois à venir.
L’idéal serait, bien sûr, de pouvoir concilier la pêche et la production d’électricité.
Source : BBC News.