Réchauffement climatique : la grande sécheresse de la Corne de l’Afrique // Global warming: The great Horn of Africa drought

De plus en plus de régions du monde doivent faire face à de graves sécheresses à cause du réchauffement climatique. L’Afrique de l’Est est l’une d’elles. La région est confrontée à la pire sécheresse depuis au moins 40 ans. Elle a déplacé plus d’un million de personnes et poussé des millions d’autres au bord de la famine. Une étude récente de la World Weather Attribution, un ensemble de scientifiques qui analysent le rôle du réchauffement climatique dans les événements météorologiques extrêmes, confirme que cette situation désastreuse ne se serait pas produite sans le réchauffement climatique d’origine anthropique.
Les chercheurs expliquent que la hausse des températures à l’échelle mondiale, en grande partie à cause de la combustion de combustibles fossiles, a perturbé les conditions météorologiques qui apportent généralement des précipitations en Éthiopie, au Kenya et en Somalie. L’automne dernier, les pluies saisonnières ont fait défaut, pour la cinquième saison consécutive, un record. La hausse des températures a également entraîné l’évaporation d’une plus grande quantité d’humidité, ce qui a entraîné un dessèchement des terres cultivées et affamé des millions de têtes de bétail.
Avec des températures globales supérieures d’environ 1,2 °C à la moyenne préindustrielle, les scientifiques affirment que des sécheresses comme celle qui sévit en ce moment sont 100 fois plus probables qu’elles ne le seraient dans un monde moins chaud. Cette situation souligne les effets dévastateurs du réchauffement climatique dans les pays en voie de développement. Comme leurs responsables ne cessent de le répéter lors des Conférences des Parties (COP), ils ne contribuent pas, ou peu, au problème du réchauffement de la planète et disposent de beaucoup moins de ressources que les pays industrialisés – les plus pollueurs – pour y faire face. Les auteurs de l’étude espèrent qu’elle contribuera à galvaniser le soutien financier aux nations les plus vulnérables alors qu’elles sont confrontées à des dommages climatiques irréversibles.
La Corne de l’Afrique connaît généralement deux saisons des pluies : les « longues pluies » de mars à mai et les « courtes pluies » en octobre et novembre. Entre l’automne 2020 et la fin de l’année 2022, chacune de ces saisons a été bien inférieure à la moyenne et plusieurs bassins fluviaux connaissent leurs plus faibles cumuls de précipitations depuis 1981.
Le réchauffement climatique a été particulièrement problématique pour les ‘longues pluies’. Elles sont générées par la Zone de convergence intertropicale (ITCZ), une bande de nuages qui encercle la Terre autour de l’équateur. Au printemps, l’ITCZ suit généralement le soleil vers le nord, ce qui apporte des pluies saisonnières indispensables à l’Éthiopie, au Kenya et à la Somalie. La ceinture de pluie commence à fluctuer à mesure que les températures augmentent. Un rapport récent du GIEC a révélé que l’ITCZ devient probablement plus étroite avec des précipitations plus intenses, ce qui entraîne des inondations en Afrique de l’Ouest et la sécheresse à l’Est. Les chercheurs estiment que le réchauffement climatique a pratiquement doublé le risque d’une saison de ‘longues pluies’ plus réduite.
Plus problématique que la réduction des pluies, le paysage s’est asséché avec les températures plus chaudes. Pour chaque degré Celsius de réchauffement, les scientifiques ont découvert que l’atmosphère peut absorber environ 7 % d’humidité en plus. Dans ces conditions, l’atmosphère a littéralement aspiré l’eau des plantes et des sols de la région, plongeant de vastes zones dans une sécheresse exceptionnelle.
Dans une région où la plupart des gens sont employés dans l’agriculture et où peu de communautés disposent de systèmes d’irrigation ou de stockage de l’eau à long terme, les conséquences sont désastreuses. Les agriculteurs dont les récoltes sont mauvaises n’ont souvent pas les moyens d’acheter de nouvelles semences pour la saison suivante. La plupart des éleveurs n’ont pas accès à une assurance ; lorsque leur bétail meurt, ils sont forcés d’abandonner les moyens de subsistance qui ont permis à leurs familles de vivre pendant des générations.
À la fin de 2022, le Programme alimentaire mondial a révélé qu’environ 23 millions de personnes en Éthiopie, au Kenya et en Somalie étaient en « grave insécurité alimentaire », ce qui signifie qu’elles étaient à court de nourriture et passaient un jour ou plus sans manger. Près d’un million d’enfants souffraient de malnutrition aiguë. Un autre million de personnes ont été forcées de quitter leur foyer à la recherche de nourriture, d’eau et de travail.
La pluie est enfin revenue dans la Corne de l’Afrique ce printemps 2023. Mais au lieu d’apporter l’eau nécessaire au paysage aride, les fortes précipitations ont noyé les terres agricoles et inondé les pâturages. Les cours d’eau en crue ont débordé les berges et emporté la couche arable. Ces pluies exceptionnellement intenses n’ont donc pas permis à la région à se remettre de la sécheresse historique.
Alors que les émissions globales de gaz à effet de serre continuent d’augmenter et que les températures moyennes augmentent elles aussi chaque année, les conditions météorologiques dans la Corne de l’Afrique devraient devenir encore plus aléatoires. On peut lire dans l’étude : « Il y aura des années très sèches probablement suivies de fortes inondations. Il y aura beaucoup plus d’événements extrêmes auxquels les gens devront faire face. »
Source : médias d’information internationaux.

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More and more regions of the world have to face severe droughts because of global warming. East Africa is one of them. The region is confronted with the worst drought in at least 40 years. It has displaced more than a million people and pushed millions more to the brink of famine. A recent study from the World Weather Attribution, a coalition of scientists who analyze the role of climate change in extreme weather events, confirms that this disastrous situation would not have happned without human-caused global warming.

The researchers explain that rising global temperatures, largely from burning fossil fuels, have disrupted the weather patterns that typically bring rainfall to Ethiopia, Kenya and Somalia. Last autumn, the seasonal rains failed for a never seen before fifth season in a row. Hotter conditions have also caused more moisture to evaporate from the landscape, desiccating croplands and causing millions of livestock to starve.

With global temperatures about 1.2°C higher than the preindustrial average, scientists say that droughts like the current one are 100 times more likely than they would be in a cooler world. This situation underscores the devastating effects of global warming in developing countries. As their leader keep repeating during the Conferences of Parties (COP), they did little to contribute the problem and have far fewer resources to cope. The authors of the study hope it will help galvanize financial support for the world’s most vulnerable nations as they face irreversible climate harms.

The Horn of Africa typically experiences two rainy seasons : the “long rains” from March to May and the “short rains” in October and November. From the autumn of 2020 to the end of 2022, each of these seasons has been far below average, with several river basins having to face their lowest rainfall totals since 1981.

Global warming has been particularly problematic for the long rains. These are generated by the Intertropical Convergence Zone (ITCZ), a band of clouds that encircles the Earth around the equator. In springtime, the ITCZ usually follows the sun northward, providing Ethiopia, Kenya and Somalia with much-needed seasonal rains. Yet the rain belt starts fluctuating as temperatures rise. A recent report from the IPCC found that the ITCZ is likely getting narrower and more intense — leading to floods in West Africa and drought in the East. The researchers estimate that human-caused warming has roughly doubled the chance of a weak long rain season.

More problematic than the weakened rains is the way the landscape dried out amid higher temperatures. For every degree Celsius of warming, scientists have found, the atmosphere can hold about 7 percent more moisture. This warmer, thirstier atmosphere literally sucked water out of the region’s plants and soils, pushing large swaths of the region into an exceptional drought.

In a region where most people are employed in agriculture and few communities have irrigation systems or long-term water storage, the consequences have been profound. Farmers whose crops fail often cannot afford to purchase new seed for the next season’s planting. Most herders have no access to insurance; when their cattle die, they are forced to abandon the livelihood that has sustained their families for generations.

By the end of 2022, the World Food Program said that roughly 23 million people in Ethiopia, Kenya and Somalia were “severely food insecure”, meaning they had run out of food and gone a day or more without eating. Nearly a million children suffered from acute malnutrition. Another million people were forced to leave their homes in search of food, water and work.

Rain finally returned to the Horn of Africa this spring. But instead of quenching the parched landscape, the storms drowned farm fields and deluged pastures. Floodwaters overtopped riverbanks and washed away topsoil. As a consequence, these unusually intense rains did not help the region recover from the historic drought.

With global greenhouse gas emissions still increasing, and average temperatures getting hotter every year, the weather in the Horn of Africa is expected to become even more erratic. One can read in the study : « There will be very dry years probably followed by heavy floods. There will be a lot more extreme events people have to be able to deal with. »

Source : International news media.

 

Carte montrant la sécheresse dans la Corne de l’Afrique entre octobre 2022 et janvier 2023. Les zones en orange sont en état de crise, celles en rouge en urgence alimentaire (Source : Famine Early Warning System)

Nouvelles conséquences du réchauffement climatique // More consequences of global warming

Bien que souvent occulté par la pandémie de Covid-19 dans le monde, le changement climatique affecte toujours durement notre planète Voici deux exemples de ses conséquences.

Le premier est vraiment tragique. Il s’agit de Madagascar qui est sur le point de connaître la première « famine liée au changement climatique » dans le monde. L’alerte vient des Nations Unies qui expliquent que des dizaines de milliers de personnes souffrent de « niveaux catastrophiques de faim et d’insécurité alimentaire après quatre années sans pluie. »
La sécheresse – la pire depuis quatre décennies – a dévasté des communautés agricoles isolées dans le sud du pays où les familles en sont réduites à manger des insectes pour survivre. Dans certains villages, les gens n’ont que les criquets comme seule nourriture. Un villageois dit que sa famille n’a plus rien à manger à part les feuilles de cactus.
Contrairement à d’autres pays, la famine à Madagascar est provoquée par le climat et non par des conflits armés. L’ONU estime que 30 000 personnes connaissent actuellement le niveau d’insécurité alimentaire le plus élevé – le niveau cinq – et il est à craindre que le nombre de personnes affectées augmente fortement alors que Madagascar entre dans la traditionnelle « saison de vache maigre » avant les récoltes.
L’impact de la sécheresse actuelle se fait également sentir dans les grandes villes du sud de Madagascar où de nombreux enfants sont contraints de mendier dans les rues pour obtenir de la nourriture. Les prix du marché s’envolent. Certains paysans vendent leur terre pour avoir de l’argent pour acheter de la nourriture. D’autres ont décidé de dormir dans leurs champs de manioc pour essayer de protéger leurs récoltes des vols par des personnes désespérées en quête de nourriture.

Google Maps

Un autre exemple des conséquences du réchauffement climatique est celui du Parc National du Denali (Alaska) où les glissements de terrain sont de plus en plus fréquents avec le dégel du pergélisol.
L’unique route qui traverse le parc national s’étire sur 148 kilomètres. Près de la moitié a été fermée le 24 août 2021 aux véhicules, piétons et vélos en raison des conditions dangereuses causées par un glissement de terrain.
Selon les autorités du parc, un glissement de terrain affecte le secteur depuis au moins les années 1960, mais il ne nécessitait alors qu’un entretien tous les deux ou trois ans.

Au cours des années 1990, le glissement de terrain, qui se produit sous la chaussée, ne provoquait que de petites fissures à la surface de la route.

En 2018, on est passé à des fractures de près de 1 centimètre par jour, puis à 9 centimètres par jour en août 2020.
Les pluies récentes semblent avoir contribué à intensifier le glissement de terrain qui atteint maintenant plus de 25 centimètres par jour.
A cause du changement climatique, un problème qui était auparavant résolu par le personnel d’entretien du parc ne peut plus l’être par des solutions à court terme. Les autorités du parc devront travailler avec d’autres organismes pour trouver une solution à long terme pour maintenir l’accès routier à travers lle parc du Denali qui a accueilli plus de 601 100 personnes en 2019.
Source : Yahoo News.

Photo: C. Grandpey

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Although hidden by the Covid-19 pandemic around the world, climate change is still severely affecting our planet Here are two examples of its consequences.

The first one is really tragic. It concerns Madagascar which is on the brink of experiencing the world’s first « climate change famine ». The warning comes from the United Nations which says tens of thousands of people are already suffering catastrophic levels of hunger and food insecurity after four years without rain.

The drought – the worst in four decades – has devastated isolated farming communities in the south of the country, leaving families to scavenge for insects to survive.In some villages, people are eating locusts to survive. One villager said they have absolutely nothing to eat except cactus leaves.

Unlike other countries, famine-like conditions in Madagascar are being driven by climate not conflict. The UN estimates that 30,000 people are currently experiencing the highest internationally recognised level of food insecurity – level five – and there are concerns the number affected could rise sharply as Madagascar enters the traditional « lean season » before harvest.

The current drought’s impact is now being felt in larger towns in southern Madagascar too, with many children forced to beg on the streets for food. The prices in the market are going up. Some people are selling their land to get some money to buy food. Many others have taken to sleeping in their cassava fields to try to protect their crops from people desperate for food.

 

Another example of the consequences of global warming can be seen in Denali National Park (Alaska) where landslides are getting more and more frequent with the thawing of permafrost.

The lone road through Denali National Park and Preserve spans148 kilometres. Nearly half it closed on August 24th, 2021 to nonessential vehicles, pedestrians and bikes because of unsafe conditions caused by a landslide.

According to the park authorities, slides have affected the area since at least the 1960s but used to require maintenance every two to three years.

During the 1990s, the landslide, which occurs below the roadbed, only caused small cracks in the road surface.

However, by 2018 the slumping increased to almost 1 centimetre per day, and then to 9 centimetres per day by August 2020.

Recent rains appear to have caused the rate to increase significantly, with much of the landslide moving downhill at over 25 centimetres per day.

Climate change has taken what was previously a problem solved by maintenance staff performing road repairs and made a challenge too difficult to overcome with short-term solutions. Park authorities will have to work with other agencies on a long-term solution to maintain road access through the Park which welcomed more than 601,100 people in 2019.

Source: Yahoo News.

Une éruption de l’Asama (Japon) au 12ème siècle a-t-elle provoqué une famine en Europe ? // Did an eruption of Asama (Japan) in the 12th century trigger famine in Europe ?

Dans une note publiée le 27 juin 2020, j’écrivais que le volcan Okmok en Alaska avait peut-être contribué à l’avènement de l’Empire Romain, suite à de mauvaises récoltes, la famine et des maladies qui ont exacerbé l’agitation sociale à cette époque. J’ai également évoqué l’éruption du Laki en Islande qui, de la même manière, a pu contribuer au déclenchement de la Révolution Française de 1789
Un article sur l’excellent site Web The Watchers nous apprend que l’éruption du volcan Asama au Japon en 1108 a probablement provoqué un événement météorologique extrême qui aurait déclenché une grave famine en Europe. C’est la conclusion d’une nouvelle étude basée sur l’analyse des carottes extraites de la glace du Groenland et confirmée par d’autres carottes de glace prélevées en Antarctique.
Lorsqu’une éruption volcanique majeure se produit, des gaz comme le dioxyde de soufre (SO2) sont rejetés en même temps que la cendre dans l’atmosphère, parfois jusque dans la stratosphère. Ces gaz bloquent la lumière du soleil, ce qui peut affecter le climat pendant plusieurs mois. On a observé ce phénomène lors de l’éruption du Pinatubo (Philippines) en 1991.
Vers le 12ème siècle, l’Europe a connu des anomalies climatiques, telles que des étés froids consécutifs et des périodes de fortes pluies. On a longtemps pensé que ces événements étaient provoqués par l’éruption de l’Hekla (Islande) en 1104. Les travaux des chercheurs ont été compliqués car les carottes de glace indiquaient la survenue de plusieurs éruptions volcaniques de source inconnue, étroitement espacées, entre 1108 et 1110.

Cependant, les chercheurs ont constaté que l’augmentation des dépôts de sulfates d’origine volcanique se concentrait essentiellement entre 1108 et 1113, ce qui ne correspondait pas à l’éruption de l’Hekla.

Par la suite, ils ont mis la main sur un document décrivant l’éruption de l’Asama au Japon en 1108. Selon un journal intimel écrit par un noble vivant à la cour impériale japonaise à la fin de la période Heian, l’Asama est entré en éruption le 29 août 1108. On peut lire dans le journal que les rizières et les champs ne pouvaient plus être cultivés car une épaisse couche de cendre les avait recouverts. Les auteurs de l’étude ont conclu que le dépôt de sulfates dans les carottes de glace au Groenland provenait très probablement de l’éruption d’Asama cette année-là.
Référence de l’étude: « Impacts climatiques et sociétaux d’un cluster » oublié « d’éruptions volcaniques en 1108-1110 CE » – Guillet, S. et al. – Rapports scientifiques – https://doi.org/10.1038/s41598-020-63339-3

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In a post released on June 27th, 2020, I wrote that Okmok volcano in Alaska may have helped the rise of the Roman Empire with crop failures, famine and disease that exacerbated social unrest. I also mentioned the Laki eruption in Iceland which, in the same way, may have contributed to triggering the French Revolution of 1789

Reading an article on the excellent website The Watchers, we learn that the eruption of Japan’s Asama volcano in the year 1108 may have led to an extreme weather event that triggered severe famine in Europe. This is the conclusion of a new study is based on the analysis of ice cores extracted from glaciers in Greenland and confirmed by more ice cores from Antarctica.

When a major volcanic eruption occurs, gases like sulfur dioxide (SO2) are being released together with the ash into the atmosphere, sometimes as high as the stratosphere These gases block out the sunlight and may affect the climate for several months. This is what happened with the Pinatubo eruption (Philippines) in 1991.

Around the 12th century, Europe was plagued with climate anomalies, such as consecutive cold summers and torrential rains. These events were previously believed to have been caused by the eruption of Hekla (Iceland) in 1104. The researchers work mas made all the more difficult as the analysis of ice core records points to the occurrence of several closely spaced volcanic eruptions between 1108 and 1110 CE. The sources of these eruptions remain unknown

However, the researchers found that the increased volcanic sulfate deposition took place between 1108 and 1113, which did not correspond with the eruption of Hekla. They later found a document describing the eruption of Japan’s Mount Asama in 1108.

According to a journal written by a court noble in the late Heian Period, Asama erupted on August 29th, 1108. One can read in the diary that rice paddies and fields could not be farmed afterward because a thick layer of ash engulfed the fields.

The authors of the study concluded that the sulfate deposition in the ice cores in Greenland could have been formed by the Asama eruption that year.

Reference of the study : « Climatic and societal impacts of a “forgotten” cluster of volcanic eruptions in 1108-1110 CE » – Guillet, S. et al. – Scientific Reports – https://doi.org/10.1038/s41598-020-63339-3

Vue du volcan Asama (Crédit photo : Wikipedia)

Une éruption de l’Okmok (Alaska) a-t-elle contribué à l’avènement de l’Empire Romain? // Did an eruption of Okmok (Alaska) help the rise of the Roman Empire?

Plusieurs organes de presse internationaux nous apprennent que des chercheurs du Desert Research Institute de Reno (Nevada) ont identifié un volcan d’Alaska dont l’éruption a peut-être contribué à l’avènement de l’Empire Romain. Leur étude a été publiée le 22 juin 2020 dans les Proceedings of the National Academy of Sciences.
Dans les années qui ont suivi l’assassinat de Jules César en l’an 44 avant notre ère, les récits historiques décrivent un froid inhabituel, des pénuries alimentaires, des maladies et une période de famine qui auraient accompagné ce moment charnière de l’histoire occidentale.
Les historiens ont longtemps pensé que cette météo exécrable pouvait être liée à une éruption volcanique, mais ils n’en avaient pas la preuve et n’étaient pas en mesure de déterminer où et quand elle s’était produite, ni avec quelle ampleur.
Après avoir analysé les cendres piégées dans des carottes de glace prélevées au Groenland et en Russie, un groupe de scientifiques et d’historiens pense maintenant que le volcan Okmok (Alaska), qui est entré en éruption en l’an 43 avant notre ère, est le coupable de cette situation. La puissante éruption a creusé un cratère de 10 kilomètres de diamètre. Le volcan se trouve sur l’île d’Umnak dans la chaîne des Aléoutiennes: il est toujours en activité aujourd’hui. Il s’est manifesté pour la dernière fois en 2008.
L’assassinat de César par les sénateurs romains a déclenché une lutte pour le pouvoir qui a mis fin à la République romaine, avec le passage d’une gouvernance démocratique à la dictature de l’Empire Romain. Cet événement a également conduit à la chute du royaume ptolémaïque en Egypte qui s’est trouvée sous la domination romaine.
L’étude scientifique nous explique que les mauvaises récoltes, la famine et les maladies résultant de l’éruption ont probablement exacerbé l’agitation sociale et contribué aux chamboulements politiques. [Note personnelle : une influence semblable d’une éruption volcanique a été observée lors de celle du Laki (Islande) qui a peut-être contribué à déclencher la Révolution française de 1789.]
Dans le cas de l’avènement de l’Empire Romain, l’équipe scientifique a analysé des tephra bien conservés, piégés dans les carottes de glace de l’Arctique pour mettre en relation la période de mauvaises conditions climatiques en Méditerranée et la puissante éruption du volcan Okmok. Les chercheurs ont comparé l’empreinte chimique laissée par les tephra trouvés dans la glace à ceux projetés par d’autres volcans en éruption à cette époque. Il ne faisait aucun doute que la source des retombées de l’an 43 était le volcan Okmok. Les chercheurs ont également identifié une éruption de l’Etna (Sicile) en l’an 44 avant notre ère, mais elle était moins forte et plus limitée en retombées que celle de l’Okmok.
L’éruption d’Okmok a produit des retombées volcaniques qui ont duré deux ans et abaissé la température dans l’hémisphère nord de parfois 7°C. La chute de température est visible sur les cernes d’arbres en Scandinavie et en Autriche. Un pin bristlecone dans les White Mountains de Californie montre un anneau de gel qui révèle des températures inférieures à 0°C au début du mois de septembre 43 avant notre ère. De même, les données climatiques fournies par des grottes en Chine montrent une baisse de température au cours des trois années qui ont suivi l’éruption. Les modèles réalisés par les chercheurs montrent que le temps était probablement beaucoup plus humide que la normale au cours de l’été et de l’automne qui ont suivi l’éruption de l’Okmok. Dans la région méditerranéenne, ces conditions humides et extrêmement froides ont probablement réduit les rendements des cultures et entraîné des problèmes d’approvisionnement pendant les bouleversements politiques qui ont eu lieu au cours de cette période.
Les chercheurs ont déclaré que cette éruption d’Okmok pourrait permettre d’expliquer des phénomènes inhabituels décrits dans les semaines qui ont suivi la mort de César et qui ont été décrits par des auteurs comme Virgile: des halos solaires, le soleil s’assombrissant dans le ciel ou trois soleils apparaissant dans le ciel. A l’époque, ces phénomènes ont été interprétés comme des mauvais présages.
Source: KESQ-TV.

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Several international news media inform us that researchers at the Desert Research Institute in Reno, Nevada, have identified an Alaskan volcano that may have helped the rise of the Roman Empire. Their study was published on June 22nd, 2020 in the Proceedings of the National Academy of Sciences.
In the years after the assassination of Julius Caesar in ancient Rome, historical accounts describe unusual cold, food shortages, disease and famine that accompanied a pivotal moment in Western history.
Historians had long suspected that this unexplained extreme weather could be linked to a volcanic eruption, but they had been unable to pinpoint where or when such an eruption had occurred or how severe it was.
After analyzing the ash trapped in ice cores taken from Greenland and Russia, an international group of scientists and historians now think that Okmok volcano in Alaska, which erupted more than 2,000 years ago, was the culprit. The massive explosion created a 10-kilometre-wide crater. The volcano is located on Umnak Island in the Aleutian Islands chain: it is still active today and last erupted in 2008.
Caesar’s stabbing by Rome’s senators triggered a power struggle that ultimately ended the Roman Republic, leading to a shift from a democratic governance to the dictatorship of the Roman Empire. It also ultimately led to Egypt coming under Roman rule.
The study explains that crop failures, famine and disease resulting from the eruption likely exacerbated social unrest and contributed to political realignments at this “critical juncture of Western civilization.” [Editor’s note : A similar influence of a volcanic eruption was observed when Laki erupted in Iceland and may have helped to trigger the French Revolution of 1789.]
The scientific team analyzed tephra that was trapped in Arctic ice cores to link the period of unexplained extreme climate in the Mediterranean with the massive eruption of Okmok volcano. The researchers compared the chemical fingerprint of the tephra found in the ice with tephra from volcanoes thought to have erupted about that time and it was very clear that the source of the 43 BCE fallout in the ice was the Okmok eruption. They also identified a smaller and more limited volcanic eruption in 44 BCE at Mount Etna (Italy).
The Okmok eruption produced volcanic fallout that lasted two years, lowering temperatures in the Northern Hemisphere by up to 7° C. The change in temperature can be seen in tree ring records in Scandinavia, Austria and California, with one bristlecone pine in California’s White Mountains showing a frost ring that suggested temperatures below freezing in early September 43 BCE. Similarly, climate records from caves in China also showed temperature drops in the three years after the eruption. The researchers’ models suggested it was probably much wetter than normal during the summer and autumn that followed the 43 BCE eruption of Okmok. In the Mediterranean region, these wet and extremely cold conditions during the spring through the autumn seasons probably reduced crop yields and led to supply problems during the ongoing political upheavals of the period.
The researchers said this eruption of Okmok could help explain unusual phenomena described around the immediate time of Caesar’s death by writers like Virgil : solar halos, the sun darkening in the sky or three suns appearing in the sky that at the time were interpreted as omens.
Source : KESQ-TV.

L’Okmok dans la Chaîne des Aléoutiennes (Source : AVO)

Emission de vapeur dans une zone hydrothermale sur la lèvre du Cône C de l’Okmok (Source : Alaska Volcano Observatory)