Faut-il cacher les données sismiques?

Dans un article de la revue Science publié au début du mois de septembre, on peut lire qu’Enzo Boschi – directeur de l’INGV – envisagerait la possibilité de ne plus divulguer les données sismiques des zones sensibles auprès des médias et du public afin, semble-t-il, de réduire les risques de panique au sein de la population ou de déformation de l’information par les journalistes. Par la suite, Boschi aurait affirmé que sa suggestion n’était pas vraiment sérieuse. Sa déclaration pourrait venir du fait que la commission italienne d’évaluation des risques majeurs (dont il fait partie) a été accusée de ne pas avoir su prévoir le séisme de L’Aquila qui a secoué le centre de l’Italie l’année dernière.

 

Il n’empêche qu’il n’y a pas de fumée sans feu et on peut se demander si le fait d’occulter la publication des données sismiques serait une bonne solution. Personnellement, je suis contre à 100%. En effet, je suis persuadé que leur diffusion permet de garder la population en état de vigilance, sans pour autant déclencher des mouvements de panique. Il suffit de voir ce qui se passe à la Réunion, aux Etats Unis, à Montserrat ou encore en Amérique latine. Grâce à ces informations, les gens sont informés et savent – surtout dans le cas des volcans explosifs – qu’une évacuation peut être décrétée à tout moment. Que je sache, aucun mouvement de panique n’est survenu à la suite de la diffusion de telles informations. Si panique il y a, c’est lorsque le volcan commence à gronder et à émettre des panaches de cendre menaçants. Si les autorités refusaient de publier ces données, on pourrait les accuser de rétention d’informations et les tenir pour responsables de catastrophes, faute d’avoir su avertir le public.

 

Une autre hypothèse serait que les scientifiques ne veulent pas divulguer ces données et leurs conclusions afin de ne pas être accusés de s’être trompés dans leurs prévisions. Je pense que ce risque est faible. Tout le monde a compris que la volcanologie – au même titre que la météorologie – n’est pas une science exacte. Lorsque les météorologues français n’ont pas su prévoir que les vents allaient s’accélérer en entrant dans notre pays lors de la tempête de fin 1999, personne ne les a accusés de s’être trompés. Il en va de même de la volcanologie. Tout récemment, les volcanologues indonésiens n’ont pas su prévoir l’éruption du Sinabung et personne n’a demandé qu’ils aillent en prison !

 

Restons modestes. Acceptons nos faiblesses face à la Nature. La science progresse lentement, mais elle progresse. Ce n’est pas en cachant des données sismiques – qui ne sont d’ailleurs pas les seules à prendre en compte dans le cas d’une éruption volcanique – que l’on fera avancer l’étude des tremblements de terre et des éruptions volcaniques. Prenons modèle sur les Américains et le site web du Pacific Northwest Seismic Network (http://www.pnsn.org/WEBICORDER/VOLC/welcome.html) qui permet de contrôler quasiment en temps réel les soubresauts des volcans de la Chaîne des Cascades.

Piton de la Fournaise (Ile de la Réunion)

drapeau francais.jpgDans son dernier bulletin en date du 18 septembre, l’Observatoire indique que le niveau de la sismicité reste élevé et que l’inflation du volcan est stable.
Dans la journée du 17 septembre, on a enregistré 51 séismes volcano-tectoniques d’une magnitude maximale inférieure à 1,4, donc non ressentie par la population. Les foyers sismiques sont toujours localisés à l’aplomb du Piton de la Fournaise (secteur ouest du Dolomieu ; limite Bory – Dolomieu). Un petit nombre d’éboulements est détecté dans le cratère du Dolomieu (8 événements par jour).

 

drapeau anglais.jpgIn its latest update (September 18th), the Observatory indicates that seismicity is still high and that the inflation of the volcanic edifice is stable. 51 volcano-tectonic earthquakes were recorded on September 17th,with a maximum magnitude of 1.4, which means they were not felt by the population. Seismic focuses are still located right below the Piton de la Fournaise (western part of the Dolomieu Crater, limit between Bory and Dolomieu). Some rockfalls (8 events per day) were detected as well inside the Dolomieu Crater.

  

Etna (Sicile / Italie)

On a pu lire ces derniers jours dans la presse italienne plusieurs articles faisant référence à l’Etna et au lent glissement de son versant est vers la Mer Ionienne. Cette information n’a rien d’un scoop car cela fait pas mal de temps (depuis les années 1990, semble-t-il) que les scientifiques ont constaté cette tendance au basculement de l’édifice volcanique.

Les articles lus dans la presse indiquent que la recherche s’appuie sur les relevés par radar satellitaire (InSAR : Interferometric Synthetic Aperture Radar) dont les données ne fournissent pas directement des informations sur le sous-sol mais permettent de mesurer avec une extrême précision l’évolution de la superficie du volcan et donc de comprendre ce qui se passe en profondeur. Ces données sont confrontées aux mesures effectuées sur le terrain. Ce travail de recherche a permis d’obtenir une vue en trois dimensions de la zone instable de l’Etna et ensuite d’évaluer l’épaisseur de la partie du volcan qui est en train de glisser dans la mer. Elle serait d’environ 4 kilomètres.

Il est intéressant d’approfondir l’étude de ce phénomène car il contient sûrement une grande partie des explications de la sismicité que l’on observe régulièrement sur le versant est du Mongibello, cisaillé par plusieurs fractures, celle de Pernicana étant sans aucun doute la plus connue. Il est également fort probable que ce phénomène n’est pas étranger au comportement éruptif du volcan, même si cette dernière relation n’a encore jamais été vraiment expliquée.

 

En ce moment, l’Etna est calme. L’activité sismique est faible et le niveau du tremor éruptif est bas. Au vu des images des webcams, des panaches de vapeur s’échappent de la bouche au pied du Cratère SE, mais on s’aperçoit que leur densité dépend de la température et de l’hygrométrie de l’air, sans être forcément le signe d’une augmentation d’activité.

L’INGV ne signale pas d’événements explosifs dans la Bocca Nuova, mais de telles colères sont susceptibles de se renouveler car la pression des gaz peut faire sauter le bouchon qui obstrue l’orifice. Toutefois, les dernières explosions de ce type ont montré que les matériaux projetés étaient anciens et n’annonçaient pas une montée de magma juvénile.   

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L’ombre de l’Etna plane sur la Mer Ionienne (Photo: C. Grandpey)

 

 

Piton de la Fournaise (Ile de la Réunion)

drapeau francais.jpgDans la journée du 15 septembre, l’Observatoire a enregistré 40 séismes volcano-tectoniques d’une magnitude maximale de 2,2. Une augmentation progressive de l’énergie des séismes est détectée. Les foyers sismiques restent localisés à l’aplomb du Piton de la Fournaise (secteur ouest du Dolomieu ; limite Bory – Dolomieu).
Evénement nouveau par rapport aux bulletins précédents : on observe une augmentation du nombre d’éboulements dans le cratère sommital du Dolomieu (11 événements par jour).
De plus, il y a confirmation de la déformation de l’édifice.
Au cours de la journée du 16 septembre, la sismicité a été de modérée à élevée.

 

drapeau anglais.jpgOn September 15th, the Observatory recorded 40 volcano-tectonic earthquakes with a maximum magnitude of 2.2 and a steady increase in seismic energy. Their epicentre wass still located right below the Piton de la Fournaise (western part of the Dolomieu Crater; limit between Bory and Dolomieu).

There is a new event compared with the previous reports: one observes an increase in the number of rockfalls inside the Dolomieu Crater (an average of 11 events per day).

Besides, the inflation of the volcanic edifice is confirmed by the instruments.

Seismicity ranged from moderate to high on September 16th.