Réchauffement climatique : des sécheresses de plus en plus inquiétantes // Global warming : increasingly worrying droughts

Une grande partie de l’hémisphère nord est aux prises avec la sécheresse ou la menace de sécheresse. L’Europe connaît un hiver exceptionnellement doux et sans précipitations tandis que de vastes parties de l’Ouest américain restent confrontées à une sécheresse de grande ampleur.
Au Texas, 2022 a été une catastrophe pour la récolte du coton, ce qui a entraîné une pénurie d’approvisionnement et des prix élevés. Suite aux pires pertes jamais enregistrées, les agriculteurs du Texas ont abandonné 74% de leurs plantations à cause de la chaleur et du sol desséché. Les abondantes précipitations observées ces derniers temps en Californie n’ont pas sorti l’État de la sécheresse car le déficit pluviométrique est particulièrement important. Le niveau du lac Powell, le deuxième plus grand réservoir des États-Unis, a atteint un nouveau record. Si le réservoir descend beaucoup plus bas, l’eau ne pourra plus l’alimenter suffisamment. Des millions de personnes qui dépendent du Colorado perdraient alors l’accès à leur approvisionnement en eau., avec des conséquences pour l’agriculture et pour des villes comme Los Angeles, San Diego et Phoenix. La centrale hydroélectrique du barrage Hoover cesserait également de fonctionner. Lorsque la sécheresse actuelle a commencé dans l’Ouest américain il y a 23 ans, le lac Powell et le lac Mead étaient remplis à 95 %. Aujourd’hui, ils sont remplis au quart de leur capacité.
S’il veut empêcher un scénario apocalyptique, le ministère de l’Intérieur devra imposer des restrictions d’eau aux utilisateurs en aval du lac. Les conditions actuelles sont exacerbées par le réchauffement climatique. En effet, des températures plus chaudes provoquent l’évaporation d’une plus grande quantité d’eau, ce qui rend les sécheresses et les fortes précipitations encore plus extrêmes.

En Europe, un hiver inhabituellement doux et sec a contraint les stations de ski des Alpes à fermer faute de neige et a asséché les canaux de Venise (Italie). L’Europe a connu le troisième mois de janvier le plus chaud de son histoire, et la France a connu une période de sécheresse record de 31 jours sans pluie. Jusqu’à présent, les Alpes ont reçu moins de la moitié de leurs chutes de neige normales cet hiver. En Grande Bretagne, le National Drought Group a averti qu’une période chaude et sèche ramènerait l’Angleterre aux conditions de sécheresse qu’elle a endurées l’été dernier.
La menace va au-delà du tourisme : une étude publiée en janvier 2023 par des chercheurs de l’Université de Technologie de Graz (Autriche) a expliqué que l’approvisionnement en eau potable en Europe était devenu « très précaire ». Une grande partie de l’Europe est en état de sécheresse depuis 2018. Les données satellitaires sur les eaux souterraines confirment de graves pénuries dans certaines parties de la France, de l’Italie et de l’Allemagne.
Cette situation fait suite à un été 2022 ponctué de vagues de chaleur et de sécheresse record qui ont fait des milliers de morts à travers le continent. Ce fut aussi la pire saison d’incendies de forêt jamais enregistrée. L’été chaud et sec en Europe a coïncidé avec des sécheresses sévères aux États-Unis et en Asie. La baisse du niveau d’eau a révélé des artefacts enfouis, notamment l’épave d’un navire de guerre allemand de la Seconde Guerre mondiale en Serbie, des cadavres dans le lac Mead et d’anciennes statues bouddhistes dans le fleuve Yangtze en Chine.
La probabilité d’une sécheresse pendant l’été 2022 dans l’hémisphère Nord a été largement accentuée par le réchauffement climatique. Les pires effets de la sécheresse en cours se font sentir dans la Corne de l’Afrique où des millions d’habitants en Éthiopie, au Kenya et en Somalie sont confrontés à l’insécurité alimentaire en raison de mauvaises récoltes. La région fait face ce printemps à la prévision d’une sixième saison consécutive de faible pluviosité.
Pendant ce temps, c’est l’été dans l’hémisphère sud et les rendements des cultures sont également réduits par la sécheresse. L’Argentine est l’un des principaux exportateurs de soja et de maïs, mais sa production est considérablement réduite cette année, car des températures extrêmement élevées aggravent la sécheresse.
Les climatologues affirment que l’adaptation aux sécheresses liées au réchauffement climatique est essentielle, notamment en réduisant la consommation d’eau et en construisant de nouvelles infrastructures pour mieux gérer les ressources en eau.
Source : Yahoo Actualités.

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Much of the Northern Hemisphere is struggling with drought or the threat of drought, as Europe experiences an unusually warm, precipitation-free winter and swaths of the American West remain mired in a huge megadrought.

In Texas, 2022 was a disaster for upland cotton, leading to short supplies and high prices. In the biggest loss on record, Texas farmers abandoned 74 percent of their planted crops because of heat and parched soil.

Even recent heavy storms in California have not brought the state out of drought, because the precipitation deficit is so big. Lake Powell, the second-largest U.S. reservoir, has dropped to a new record low, and if the reservoir goes much lower, water won’t be able to pass through it. Millions of people who rely on the Colorado would then lose access to their water supply. That includes agriculture, cities like Los Angeles, San Diego and Phoenix. The hydroelectric power plant for which the dam was constructed would also cease to function. When the current 23-year megadrought affecting the American West began, Lake Powell and Lake Mead were 95% full. Now, they are one-quarter full.

In order to prevent a doomsday scenario, the Department of the Interior will have to impose reductions in water allotments for downriver users. The current conditions are being exacerbated by climate change. Warmer temperatures cause more water to evaporate, making both droughts and heavy precipitation more extreme.

In Europe, an unusually warm, dry winter has forced ski resorts in the Alps to close for lack of snow, and left the canals of Venice running dry in Italy. Europe experienced its third-warmest January on record, France has seen a record dry spell of 31 days without rain, and the Alps have received less than half their normal snowfall so far this winter. Britain’s National Drought Group warned that one hot, dry spell would return England to the severe drought conditions it endured last summer.

The threat goes beyond tourism: A study published in January 2023 by researchers from Graz University of Technology in Austria warned that Europe’s drinking water supply has become “very precarious.” Much of Europe has been in a drought since 2018, and a review of satellite data of groundwater confirmed acute shortages in parts of France, Italy and Germany.

This situation follows a summer of record-breaking heat waves and droughts that left thousands dead across the continent, as well as the worst wildfire season on record. Europe’s hot, dry summer coincided with acute droughts in the U.S. and in Asia. The dropping water levels revealed buried artifacts, including the wreckage of a German World War II warship in Serbia, dead bodies in Lake Mead and ancient Buddhist statues in China’s Yangtze River.

The drought in the summer 2022 across the Northern Hemisphere was made 20 times more likely by global warming. The worst impacts of the ongoing drought are being felt in the Horn of Africa, where millions of residents in Ethiopia, Kenya and Somalia are contending with food insecurity due to poor harvests. The region faces a forecast of a sixth consecutive low rainy season this spring.

Meanwhile, it is summer in the Southern Hemisphere, and crop yields are being diminished by drought there as well. Argentina is a leading exporter of soy and corn, but its production is being drastically reduced this year as extremely high temperatures exacerbate a drought.

Climate scientists say that adaptation to climate change-related droughts is essential, including reducing water usage and building new infrastructure to better manage water resources.

Source : Yahoo News.

Hoover Dam et lac Powell (Photos: C. Grandpey)

Hiver 2022-2023 : un cruel manque d’eau et de neige

Quand on évoque le problème de l’eau à Venise, c’est en général au moment de l' »acqua alta », une marée particulièrement haute qui inonde régulièrement la célèbre place Saint-Marc. Comme je l’ai expliqué sur ce blog, depuis octobre 2020, un système de digues artificielles baptisé MOSE est déclenché dès que la montée des eaux de la mer Adriatique atteint une cote d’alerte de 110 cm.

Aujourd’hui, la Cité des Doges est confrontée à un phénomène inverse. Les basses marées de ces derniers jours dans la lagune ont mis à sec certains canaux.

Officiellement, le spectacle insolite de gondoles échouées sur des bancs de vase n’est pas lié au réchauffement climatique ; c’est du moins ce qu’affirme le Centre de prévision des marées de Venise. Son directeur reconnaît tout de même que la région est sous l’influence, depuis une vingtaine de jours, d’un anticyclone qui fait barrage aux précipitations. Les perturbations hivernales, accompagnées de vent et de pluie, amplifient habituellement l’amplitude des marées, ce qui n’est pas le cas cette année. Il est indéniable que la présence de plus en plus fréquente de hautes pressions sur l’Europe – et le manque de précipitations que cela génère – est liée au réchauffement climatique.

Selon les experts, la situation devrait revenir à la normale rapidement. Cette « marée basse » à l’avantage de permettre de faire un ‘check-up’ de l’état des immeubles.

Voici une vidéo qui résume assez bien la situation à Venise :

https://youtu.be/Thu0jEqHGp8

Après Venise, c’est au tour du Lac de Garde d’inquiéter les autorités italiennes qui ne peuvent que constater les effets du réchauffement climatique dans le pays. Aujourd’hui, un flot ininterrompu de visiteurs, à pied ou à vélo, se déverse sur l’étroit sentier de pierre et de sable apparu entre les rives du lac de Garde et l’Isola di San Biagio, un îlot devenu le symbole de la sécheresse frappant l’Italie du Nord cet hiver.

L’île, qui n’était joignable que par bateau dans le passé, attire des familles entières, venues constater les dégâts du réchauffement climatique. Avec la pénurie de neige sur les montagnes aux alentours, l’absence de pluie depuis six semaines et les températures douces, l’eau du Lac de Garde est descendue à son plus bas niveau depuis 30 ans en période hivernale. Elle est à 44 cm au-dessus du zéro hydrographique, son point de référence historique, contre 107 cm en 2022, et se trouve à environ 70 centimètres en dessous de la moyenne des dernières décennies.

Après une sécheresse record pendant l’été 2022, qui a décimé les récoltes, le nord de l’Italie donne à nouveau des signes inquiétants. Les eaux du Pô, le plus grand fleuve italien, sont au plus bas. De plus, à l’instar du lac de Garde, le niveau de l’eau des lacs Majeur et de Côme est un sujet d’inquiétude.

Après un mois de temps excessivement sec, les stations de ski en Italie et en France souffrent d’un manque d’enneigement parfois considérable. Les deux pays subissent des conditions anticycloniques interminables, avec des records du nombre de jours sans précipitations. La pression atmosphérique dépasse souvent les 1025 hPa, et ce sur une période de 5 semaines ! Avec le baromètre aussi haut, il y a très peu de place aux précipitations et donc aux chutes de neige en montagne.

Les massifs français enregistrent un important déficit d’enneigement. Ce sont, bien sûr, les massifs de basse et moyenne montagne (Jura, Vosges, Massif Central) qui sont les plus impactés, mais l’enneigement est également fortement déficitaire dans les Alpes. La neige est un peu tombée sur le Massif Central et sur les Pyrénées ces derniers jours, ce qui aide à sauver une saison qui n’avait commencé qu’à la mi-janvier.

Alors qu’en février nous sommes censés être au pic d’enneigement de la saison, les stations alpines font grise mine. Même les domaines de Haute-Savoie n’y échappent pas, comme à Plaine-Joux où il n’y a plus de neige autour des remontées mécaniques. Pour le nord des Alpes, la situation de la fin février 2023 est parmi les pires observées depuis plusieurs décennies. Après de longues semaines de sécheresse et de grand soleil, les paysages n’ont plus grand chose à voir avec la magie hivernale.

Cette pénurie de neige a tendance à se répéter et s’accentuer depuis plusieurs années. Il faut absolument que les responsables des stations de ski sortent du déni du réchauffement climatique et se diversifient rapidement. Si elles ne le font pas, elles mettront la clé sous le paillasson….

 

Capture d’écran de la webcam de La Bresse (Vosges) le 21 février 2023.

L’urgence climatique en montagne

L’année 2022 a été la plus chaude jamais enregistrée en France et les régions de montagne sont plus touchées que les plaines par le réchauffement climatique. Le phénomène est parfaitement visible et se solde par un moindre enneigement, la fonte du permafrost de roche et le recul des glaciers. Les stations de ski sont contraintes de s’adapter à cette nouvelle donne.

Comme je l’ai indiqué dans une note précédente, la station de La Plagne (Savoie) a dû démonter sa gare d’arrivée située sur le glacier de la Chiaupe à plus de 3.250 mètres d’altitude et installer ses remontées mécaniques 200 mètres plus bas. Au total, 3 pistes sur les 130 du domaine seront supprimées.

Suite au manque de neige, plusieurs stations ont été contraintes de reporter l’ouverture de la saison, à commencer par Val Thorens. La station de Tignes s’est contentée d’ouvrir une seule piste au moment de son ouverture fin novembre 2022.

Les Pyrénées françaises sont confrontées au même problème et plusieurs stations ont été contraintes de fermer en fin d’année 2022, comme Gourette ou La Pierre-Saint-Martin.

Selon Météo-France, « l’épaisseur de neige au sol, l’étendue des surfaces enneigées et la durée d’enneigement sont condamnées à diminuer petit à petit au fil des décennies. » Dans ce contexte, le recours à la neige artificielle devient inévitable. Les projets de retenues collinaires se multiplient, mais à l’heure où la ressource en eau se raréfie, l’installation de canons à neige fait polémique. Ainsi, à la Clusaz, un projet de cinquième retenue collinaire a suscité une levée de boucliers avant que la justice ne le suspende.

En constatant l’accélération du réchauffement climatique dans les zones de montagne, on peut se demander si la partie n’est pas perdue d’avance et s’il faut s’entêter à installer des enneigeurs qui risquent ne pas fonctionner avec la hausse des températures.

Il faudra que les stations de ski sortent du déni du réchauffement climatique dans le quel elles se sont enlisées et diversifient leurs activités Plutôt que de tenter de maintenir coûte que coûte l’enneigement de leurs domaines skiables, il faudra que les stations mettent en place des activités annexes pour continuer à faire venir des gens en montagne, que ce soit en hiver ou en été.

Certaines stations de moyenne altitude tentent de déployer un modèle touristique autour des quatre saisons. D’autres ont engagé une transformation profonde , comme Valloire, qui a décidé de fermer ses pistes en dessous de 2.000 mètres d’altitude. De son côté, la station Métabief dans le Haut Doubs prévoit la fin du ski à l’horizon 2030-2035 et oriente ses investissements vers la transition. Mais n’est-ce pas déjà trop tard? L’expression « urgence climatique » prend tout son sens dans nos montagnes.

Plusieurs stations comme Val d’Isère, Tignes ou les Deux-Alpes ont mis un terme au ski d’été à cause de la hausse des températures au cours de l’été 2022. (Photo : C. Grandpey)

Le réchauffement climatique dans les Alpes

Les stations de ski alpines, de l’Isère en particulier, attendent impatiemment la neige. Les températures sont très douces et les enneigeurs sont à l’arrêt. La limite pluie-neige est très haute, avec l’isotherme 0°C autour de 3000 mètres. En dessous, la pluie fait fondre la neige tombée en novembre. Le risque d’avalanche est élevé car la neige humide est lourde. On se retrouve dans le même contexte que les 26, 27 et 28 décembre 2021 avec une limite pluie neige qui était remontée jusqu’à 3000 mètres et qui avait occasionné beaucoup de dégâts, avec des épisodes de laves torrentielles en Isère.

Le redoux actuel est une preuve évidente du réchauffement climatique, deux mots restent tabou dans les Alpes. Au cous de mes différents séjours dans le massif, je me suis vite rendu compte qu’il règne un réel déni du phénomène. On essaye de se rassurer comme on peut. On rappelle que cette douceur ne bat pas des records pour un mois de décembre. Il avait fait jusqu’à 21,5°C à Grenoble en décembre 2000, 20,5°C à Bourgoin-Jallieu en décembre 1989. A la Mure, le record est de 18,6°C en décembre 1983. Aux Deux Alpes et à Chamrousse, les records de chaleur pour un mois de décembre sont respectivement de 11°C en 1995 et 17,5°C en décembre 1994. Certes, mais ces dates s’intègrent toutes dans le cadre du réchauffement climatique qui, selon les climatologues, a débuté dans les années 1970 dans les Alpes. Les photos que je possède du Glacier des Bossons depuis 1956 confirment d’ailleurs cette évolution climatique.

Il est bien évident que les stations de basse et moyenne altitude sont les plus impactées par la hausse des températures, quel que soit le massif. Certaines sont partiellement ouvertes et tentent de miser sur d’autres activités comme les randonnées ou encore la luge sur rails. Je l’ai dit et redit sur ce blog, ces stations doivent rapidement diversifier leurs activités si elles ne veulent pas se trouver confrontées à de graves difficultés.

Les conséquences du réchauffement climatique sont encore plus difficiles pour les domaines nordiques qui, pour la plupart, se trouvent en dessous de 1 500 mètres d’altitude. Quelques stations ont ouvert avec des petites boucles pour un peu animer leur site, parfois avec de la neige importée ou conservée sous la sciure depuis l’hiver précédent…