Événements extrêmes et assurances

Depuis le 19ème siècle et la révolution industrielle, la température moyenne de la Terre s’est réchauffée de 1,1°C, avec une accélération depuis les années 1970. Il a été clairement établi que les activités humaines consommatrices d’énergies fossiles (charbon, pétrole et gaz) sont responsables de la hausse continue des températures et des émissions de gaz à effet de serre qui y sont liées. L’accélération actuelle du réchauffement climatique menace l’avenir de nos sociétés et la biodiversité. Le phénomène ne semble pas près de s’arrêter pour deux raisons majeures. D’une part les mesures susceptibles de freiner – on ne parle pas d’arrêter – les émissions polluantes ne sont pas à la hauteur de l’enjeu. D’autre part, à supposer que nous arrêtions ces émissions par un coup de baguette magique, il faudrait plusieurs décennies avant que l’atmosphère terrestre retrouve un semblant d’équilibre.

Il est bien évident que dans ces conditions les événements extrêmes vont continuer à se multiplier et causer de lourds dégâts. Aujourd’hui, leur « changement d’échelle » inquiète les compagnies d’assurance. Les catastrophes climatiques en France ont coûté 6,5 milliards d’euros aux assureurs en 2023 qui a été la troisième année la plus grave en termes de sinistres climatiques après 1999 et 2022. Au cours de cette année 2023, on a observé quinze phénomènes venteux avec des vents de plus de 150 km/h, 14 inondations majeures, le passage des tempêtes Ciaran et Domingos qui ont occasionné 517 000 sinistres pour un coût de 1,6 milliard d’euros, sans oublier les inondations dans le Nord qui ont fait 40 000 sinistrés.

 

Exemple de bulletin « Vigilance Météo » diffusé par Météo France

Les tempêtes, comme la grêle, sont couvertes dans les contrats dommages des assureurs, tandis que les inondations ou les sécheresses sont soumises au régime « Cat Nat » (pour « catastrophes naturelles »). L’Etat prend la moitié des coûts à sa charge, permettant ainsi de réduire de moitié la facture des assureurs.

Source : France Info.

Pour le moment, grâce à l’aide gouvernementale, les compagnies d’assurance tiennent le coup, mais jusqu’à quand ? Avec la multiplication des sinistres, le montant des polices ne peut qu’augmenter et on peut se demander si on ne se dirige pas, à plus ou moins long terme, vers une politique à l’américaine, ‘à la carte’, qui fixe ses tarifs en fonction de l’exposition aux risques. Certains atteignent des sommets si l’on se trouve dans des zones sensibles.

A Hawaii, par exemple, les habitants possédant des résidences susceptibles d’être affectées par une éruption volcanique ou un séisme doivent payer une somme exorbitante s’ils veulent assurer leur maison. En 2018, une puissante éruption du Kilauea a détruit quelque 700 structures, dont de nombreuses habitations. Il s’en est suivi une longue procédure judiciaire incluant les autorités fédérales et les compagnies d’assurance, et de longues batailles concernant les indemnisations.

 

Destruction de maisons par la lave en 2018 à Hawaii (Crédit photo : Protection Civile)

Une amie qui habite sur la côte ouest de la Grande Ile et se trouve à la fois sous la menace d’un séisme et d’une éruption du volcan Hualalai refuse d’être couverte contre ces risques potentiels. Le revenu de son B&B ne lui permet pas de faire face à une telle somme. Elle croise les doigts pour que sa maison soit épargnée… Si elle est détruite, elle n’aura que ses yeux pour pleurer. Une aide fédérale lui sera peut-être allouée, mais très insuffisante pour réparer ou reconstruire sa maison.

Recherche de sources géothermiques en région parisienne

La géothermie est une source d’énergie propre particulièrement intéressante. Elle est utilisée à grande échelle dans des pays comme l’Islande ou la Nouvelle Zélande.

Géothermie en Islande

 Géothermie en Nouvelle Zélande (Photos: C. Grandpey)

 Cette émergie existe dans notre pays mais elle est beaucoup plus localisée. Dans le Cantal, Chaudes-Aigues est un des berceaux de la géothermie. Les eaux chaudes chauffent les habitations et alimentent les thermes depuis le 16ème siècle.

 

La source du Par à Chaudes-Aigues a un débit de 18 m3/heure. L’eau sort à une température de 81 à 82,5°C. C’est la plus chaude de France métropolitaine. (Photo : C. Grandpey)

La géothermie représente un moyen efficace pour se chauffer l’hiver tout en réduisant notre dépendance au gaz ou à l’électricité. Mais cette ressource reste encore peu exploitée en France.

Pour favoriser le développement de nouveaux projets, trois camions vibreurs sillonnent les routes d’Île-de-France pendant la nuit, depuis plusieurs semaines. Leur mission est de cartographier le sous-sol pour identifier les réserves d’eau chaude dans le cadre de l’opération « Geoscan ».

Camio-vibreur en Ile-de-France (Crédit photo: Boris Hallier / Radio France)

Concrètement, le camion s’installe sur sa plaque vibrante et la met en action pendant huit heures. Des vibrations se produisent tous les dix mètres pendant 40 secondes, jusqu’au bout de la nuit.

En un mois, les opérateurs sont en mesure de collecter des données sur plus de 280 km, dans une centaine de communes. Un géophysicien explique que « les vibrations qui sont émises par ce camion vont se propager dans le sous-sol et chaque fois qu’on a un changement de roche, il y a une partie de cette vibration qui va remonter à la surface comme un écho. C’est un peu comme une échographie.» Cet écho est enregistré par les capteurs placés en surface et les données permettent ensuite d’obtenir des images du sous-sol.

Avec cette opération, les géologues espèrent identifier de nouvelles sources géothermiques dans l’ouest et le sud de l’Île-de-France. Elles se trouvent à différentes profondeurs, entre 500 mètres et 3 000 mètres de profondeur pendant la dernière campagne de recherche.

L’enjeu est important à l’heure de la décarbonation et de la souveraineté énergétique. En effet, il est intéressant de tirer le maximum d’énergie d’une nappe d’eau à 1 500 mètres de profondeur, avec une température entre 50 et 65 degrés.

En France, 59 réseaux de chaleur urbains sont alimentés par la géothermie profonde. L’Île-de-France reste la principale région où la géothermie profonde est utilisée avec 54 installations et près d’un million de Franciliens qui en bénéficient. Cela permet d’éviter l’émission de 400 000 tonnes de CO2 par an par rapport à une chaufferie au gaz. L’objectif est maintenant de doubler voire tripler le nombre de projets.

Source : France Info.

Ce n’est pas la première fois que des camions vibreurs sont utilisés à des fins géologiques. Dans une note publiée le 23 avril 2023, j’expliquais qu’à Hawaii, dans le cadre d’un projet d’imagerie du sommet du Kilauea, des ondes sismiques envoyées à travers le sol sont utilisées pour générer des images du sous-sol. Ces minuscules signaux sismiques sont générés par un véhicule, appelé Vibroseis. Des nodes captent les signaux ainsi créés. Le temps mis par les signaux pour les atteindre , ainsi que leur comportement, sont des paramètres importants car les ondes sismiques se déplacent différemment selon que les matériaux qu’elles traversent sont solides ou semi-solides, ou du magma en fusion.

Vous trouverez l’article dans son intégralité en cliquant sur ce lien :

https://claudegrandpeyvolcansetglaciers.com/2023/04/23/campagne-dimagerie-au-sommet-du-kilauea-hawaii-imagery-campaign-at-the-summit-of-kilauea-hawaii/

 

Camion-vibreur à Hawaii (Crédit photo: USGS)

Hawaii : calme plat sur le Kilauea et le Mauna Loa // Hawaii : dead calm on Kilauea and Mauna Loa

La situation est très calme à Hawaï ces jours-ci.
Le Kilauea n’est pas en éruption. Le HVO précise qu’en raison du faible niveau de sismicité depuis plusieurs semaines, les mises à jour quotidiennes seront remplacées par des mises à jour hebdomadaires. On a seulement enregistré une quarantaine de séismes sous le sommet au cours de la première semaine de mars 2024, à des profondeurs de 1 à 8 km sous la surface et avec des magnitudes inférieures à M2,0.
La déformation du sol reste faible.
Les émissions de SO2 restent faibles, elles aussi, depuis octobre 2023, avec environ 85 tonnes par jour au 1er mars.
La sismicité dans l’Upper East Rift Zone et dans la zone du Rift Sud-Ouest du Kilauea reste faible. Aucune activité particulière n’a été observée ailleurs le long des zones de rift.

Hormis quelques fumerolles, aucune activité n’est observée sur le Kilauea (Image webcam)

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La sismicité sous le sommet et les flancs supérieurs du Mauna Loa a été relativement faible au cours du mois dernier ; une quarantaine de séismes de faible magnitude (inférieure à M3,0) ont été détectés. Il y a eu très peu de sismicité à une profondeur supérieure à 13 km.
Les données GPS sur le Mauna Loa montrent une légère tendance inflationniste suite à l’éruption de 2022 et le magma commence à remplir à nouveau le réservoir.
Les données sur les gaz et la température n’ont montré aucun changement significatif au cours du mois dernier.
Source : HVO.

Image de l’éruption de 2022 (Crédit photo: USGS)

Le Mauna Loa est également le lieu où sont enregistrées les concentrations de CO2. Elles permettent d’élaborer la courbe de Keeling. Les concentrations ne cessent d’augmenter et atteignent plus de 427 ppm à la mi-mars 2024, avec une hausse record d’environ 8 ppm en seulement un an !
Source : NOAA.

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The situation is very quiet in Hawaii these days.

Kilauea is not erupting. HVO specifies that due to continued low rates of seismicity, daily updates will be replaced by weekly ones. There were only 40 earthquakes recorded beneath the summit over the first week of March 2024, at depths of 1–8 km below the surface, and with magnitudes below M2.0.

Ground deformation remains low.

SO2 emissions have remained low since October 2023, with about 85 tonnes per day on March 1st.

Seismicity in Kilauea’s upper East Rift Zone and Southwest Rift Zone remain low. No unusual activity has been noted anywhere along the rift zones.

Shallow seismicity beneath Mauna Loa‘s summit and upper-elevation flanks has been relatively low over the past month; approximately 42 small-magnitude earthquakes (below M3.0) were detected. There were very few earthquakes deeper than 13 km.

Data from GPS instruments on Mauna Loa, record a small inflationary trend as the volcano recovers from the 2022 eruption, and magma begins to replenish the reservoir system.
Gas and temperature data show no significant changes in the past month.

Source : HVO.

Mauna Loa is also the place where CO2 concentrations are recorded. They allow to work out the Keeling Curve. The concentrations keep rising, reaching more than 427 ppm by mid-March 2024, which means a record increase of about 8 ppm in just one year !

Source : NOAA.

Ces jours-ci, les volcanophiles s’ennuient à Hawaii… // Volcano lovers getting bored in Hawaii these days…

A Hawaii, le Kilauea traverse une période creuse. Aucune coulée de lave à se mettre sous les yeux depuis le 17 septembre 2023 !

Au cours des derniers jours de 2023, les scientifiques de l’Observatoire des Volcans d’Hawaii (HVO) ont détecté une hausse de la sismicité au sud du sommet du Kilauea, à des profondeurs de 1,6 à 4 km, avec des magnitudes allant de M 1,0 à M 2,5. Ces événements faisaient suite à une forte augmentation de l’inflation du sol dans le secteur de Sand Hill. Le HVO a écrit sur son site Internet que des essaims sismiques comme celui-ci peuvent précéder les éruptions, mais la sismicité n’a pas montré de migration latérale ou ascendante laissant penser que le magma se déplaçait vers la surface. Il n’y avait aucun signe d’éruption imminente sur le Kilauea. Cependant, le HVO ajoutait qu’il fallait être très prudent dans les prévisions, car la région sommitale du volcan restait instable, avec un niveau d’inflation élevé et une activité sismique continue. Une éruption pouvait donc se produire avec peu ou pas d’avertissement.

Début février 2024, une éruption était attendue aussi bien à Hawaii qu’en Islande et on pouvait se demander où la lave allait percer la surface en premier. L’Islande a gagné la partie avec une éruption qui a débuté le 8 février. Dans le même temps, le HVO signalait que la sismicité avait diminué sur le Kilauea dans la matinée du 1er février 2024, avec 15 à 20 événements par heure. La diminution de l’activité sismique et de la déformation du sol révélaient que l’intrusion magmatique avait ralenti ou s’était arrêtée et que la probabilité d’une éruption avait diminué. Le niveau d’alerte volcanique et la couleur de l’alerte aérienne ont été abaissés. Hawaii avait perdu la partie contre l’Islande !

 
Eruption en Islande le 8 février 2024 (image webcam)

Déformation du sol sur le Kilauea avec déflation soudaine entre le 1er et le 2 février 2024 (Source: HVO)

 

Alors qu’une nouvelle éruption est attendue en Islande dans les derniers jours de février ou les premiers jours de mars 2024, la situation est actuellement calme sur le Kilauea, sur la Grande Ile d’Hawaii. Les dernières mises à jour du HVO indiquent « des niveaux de sismicité faibles à modérés au sommet et le long du système de failles de Koa’e au sud-ouest du sommet, suite à l’intrusion magmatique de la fin janvier. » La déformation du sol reste faible, les inclinomètres montrent une légère tendance déflationniste. Les émissions de SO2 sont également faibles, avec environ 100 tonnes par jour. En conséquence, aucune éruption n’est prévue à court terme à Hawaii.

Aucune lave active dans le cratère de l’Halemz’uma’u

Même si aucune lave active n’est actuellement visible, le Kilauea mérite une visite avec plusieurs sites intéressants (Sulphur Banks, Kilauea Iki, et autres). Le Mauna Loa et le Mauna Kea sont également très intéressants à visiter. Se trouver au sommet du Mauna Kea au milieu des télescopes, avec une vue sur le Mauna Loa et toute l’île d’Hawaii, est une expérience formidable. Et pourquoi ne pas faire un saut à Maui et traverser la caldeira de Haleakala ?

 

Photos: C. Grandpey

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In Hawaii, Kilauea is going through a slow period. There has been no active lava since September 17th, 2023.

In the last days of 2023, scientists at the Hawaiian Volcano Observatory (HVO) detected elevated unrest and increased seismicity to the south of Kilauea’s summit, at depths of 1.6 – 4 km, with magnitudes ranging from M 1.0 to M 2.5. These events followed a sharp increase in the rate of inflation on the Sand Hill tiltmeter. HVO wrote on its website that earthquake swarms like this can precede eruptions, but there was no lateral or upward migration of earthquakes that would have suggested magma was moving toward the surface, There were no signs of an imminent eruption at Kilauea. Hpwever, HVO added one should be very careful to make predictions as the volcano’s summit region remained unsettled, with a high level of inflation and continued seismic activity. A summit eruption could occur with little or no warning.

In early February 2024, an eruption was expected both in Hawaii and in Iceland and one could wonder where lava would pierce the surface first. Iceland won the game with an eruption that started on February 8th. In the meantime, HVO reported that seismicity had decreased on Kilauea by the morning of 1 February, 2024, with 15-20 earthquakes per hour. The decrease in seismic activity and ground deformation suggested that the intrusion of magma had slowed or stopped and that the likelihood of an eruption had decreased. Both the Volcano Alert Level and the Aviation Color Code were lowered. Hawaii had lost the game against Iceland !

While a new eruption is expected in Iceland in the last days of February or the first days of March, the situation is quiet at the moment on Kilauea on Hawaii Big Island. The latest HVO updates indicate « low to moderate rates of seismicity at the summit and along the Koaʻe fault system southwest of the summit, following an intrusion of magma into the area at the end of January. » Ground deformation remains low with tiltmeters showing a slight deflationary tendency. SO2 emissions are low too, with about 100 tonnes per day. As a consequence no eruption is predicted in the short term in Hawaii.

Even though no active lava is currently to be seen, Kilaue is worth a visit with several interesting sites (Sulphur Banks, Kilauea Iki, and others). Mauna Loa and Mauna Kea are also very interesting to visit. Standing at the summit of Mauna Kea among the telescopes is, with a view of Mauna Loa and the whole island, is a great experience. And why not pop over to Maui and cross the Haleakala caldeira ?