Nouveau système de surveillance volcanique // New volcano monitoring system

Un nouveau système de surveillance des volcans par radar mis au point par l’Université d’Alaska Fairbanks (UAF) et l’U.S. Geological Survey (USGS) va être adopté à travers les États-Unis et même au-delà. Ce nouveau système, financé par la NASA, pourrait permettre une détection plus précoce des signes d’activité volcanique. Reste à savoir si les coupes budgétaires décidées par l’Administration Trump permettront une utilisation efficace de ces nouveaux équipements.
L’Observatoire Volcanologique d’Alaska basé à l’UAF utilise un prototype de ce système, appelé VolcSARvatory, depuis début 2022. Son utilité est devenue immédiatement évidente lorsqu’un essaim sismique s’est produit sur le mont Edgecumbe, près de Sitka, en Alaska, le 11 avril 2022. Cela faisait longtemps que ce volcan ne se manifestait pas.

Vue du cratère du Mont Edgecumbe (Crédit photo : AVO)

Le VolcSARvatory utilise un radar à synthèse d’ouverture interférométrique, ou InSAR, pour détecter des variations de petits mouvements du sol de seulement un centimètre. Il fonctionne en combinant deux ou plusieurs images radar satellite de la même zone prises à des moments différents. Les variations de surface sur une longue durée peuvent être enregistrés en collectant des images répétées pour créer une série chronologique de données à partir d’un seul endroit. Selon des scientifiques américains, l’extension du système à tous les observatoires volcaniques de l’USGS permettra d’adopter une approche cohérente de surveillance des volcans actifs.
Le système VolcSARvatory permet de traiter et d’analyser de vastes volumes de données en quelques jours seulement là où un processus classique nécessiterait plusieurs semaines. Comme indiqué plus haut, le système s’est avéré utile pour étudier l’activité inattendue du mont Edgecumbe. En 2022, une équipe de l’Alaska Volcano Observatory et de l’Alaska Satellite Facility a commencé à analyser les données des 7 années et demie d’activité du mont Edgecumbe à l’aide du prototype VolcSARvatory. Les scientifiques ont découvert que la déformation de ce volcan avait commencé 3 ans et demi plus tôt, en août 2018. Une modélisation informatique ultérieure a révélé que c’était une nouvelle intrusion magmatique qui avait provoqué la déformation du sol.

Image InSAR montrant la déformation du sol sur l’île Kruzof dans le sud-est de l’Alaska. Elle permet de voir l’élévation du sol autour du mont Edgecumbe depuis août 2018. Les cases à droite de la carte indiquent, en centimètres, le soulèvement du sol sur les sites numérotés de l’île. (Source : AVO)

L’InSAR est utilisé depuis longtemps pour contrôler la déformation des volcans aux États-Unis, mais jusqu’à présent le travail a été effectué de manière fragmentaire. VolcSARvatory fournira désormais une connaissance situationnelle du comportement des volcans et identifiera peut-être des signes d’activité volcanique avant l’apparition d’autres paramètres, comme l’activité sismique.
L’utilisation de données satellite de type InSAR permettra d’améliorer la surveillance des volcans équipés de capteurs au sol et de surveiller les nombreux autres édifices qui ne disposent pas de stations au sol.
Le nouveau système de surveillance utilise de nombreuses autres observations par satellite, telles que la télédétection de gaz, thermique et visuelle pour surveiller ces volcans. La déformation de surface est un plus pour analyser l’activité volcanique. La déformation de surface peut révéler l’emplacement et le volume de nouveau magma et de gaz. Elle peut également indiquer si la pression augmente en raison de ce nouveau magma ou de ce gaz, ou si le système se dépressurise lorsque le magma et le gaz se déplacent en profondeur ou s’approchent de la surface et annoncent une prochaine éruption.
Le projet de l’UAF fait partie des sept projets sélectionnés par la NASA parmi les 60 autres dans le cadre du Disaster Program de l’agence spatiale. Les sept projets gagnants, annoncés le 20 décembre 2025, se partageront 6,3 millions de dollars sur deux ans.
Source : University of Alaska Faitbanks.

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A new radar-based volcano monitoring system developed by the University of Alaska Fairbanks (UAF) and U.S. Geological Survey (USGS) will expand across the U.S. and beyond. The expansion, funded by NASA, could lead to earlier detection of volcanic unrest. It remains to be seen whether the budget cuts decided by the Trump administration will allow for the effective use of this new equipment.

The Alaska Volcano Observatory at UAF has been using a prototype of this system, named VolcSARvatory, since early 2022. Its usefulness was immediately apparent when a swarm of earthquakes occurred at long-quiet Mount Edgecumbe volcano, near Sitka, Alaska, on April 11, 2022.

VolcSARvatory uses interferometric synthetic aperture radar, or InSAR, to detect ground movement changes as small as one centimeter. It works by combining two or more satellite radar images of the same area taken at different times. Long-duration surface changes can be chronicled by collecting repeated images to build a time series of data from a single location. According to US scientists, expanding the system to all USGS volcano observatories will provide a consistent approach to monitoring active volcanoes.

The VolcSARvatory system allows the processing and analysis of vast volumes of data in only a handful of days. The process would otherwise require several weeks. The system proved valuable in studying Mount Edgecumbe’s unexpected activity. In 2022, a team from the Alaska Volcano Observatory and Alaska Satellite Facility began analyzing the previous 7 1/2 years of Mount Edgecumbe data using the VolcSARvatory prototype and found deformation began 3 1/2 years earlier, in August 2018. Subsequent computer modeling indicated an intrusion of new magma caused the ground deformation.

InSAR has long been used to track deformation at volcanoes in the USA, but the work has been done in a piecemeal fashion to this point. VolcSARvatory will provide situational awareness of volcano behavior and possibly identify volcanoes that are becoming restless before other indications, like earthquake activity, show up. Using InSAR-type satellite data will enhance the monitoring of volcanoes that have been fitted with ground sensors and will allow for the monitoring of the many others that don’t have ground-based stations.

The new monitoring system uses a lot of other observations that are satellite-based, such as gas, thermal and visual remote sensing to monitor those volcanoes, and surface deformation adds an important indicator of volcanic activity. Surface deformation can reveal the location and volume of new magma and gases. It can also indicate whether pressure is building due to that new magma or gas, or whether the system is depressurizing as magma and gas either move to other underground locations or approach an eruption at the surface.

The UAF project is one of seven NASA selected from 60 submitted as part of the space agency’s Disasters Program. The seven winning proposals, announced December 20, will share 6.3 million dollars over two years.

Source : University of Alaska Faitbanks.

Utilisation de l’Interférométrie radar à synthèse d’ouverture en Alaska // Interferometric synthetic aperture radar in Alaska

Au cours de ma conférence « Volcans et Risques volcaniques », j’explique qu’aujourd’hui les satellites sont d’une grande aide pour surveiller l’activité volcanique, en particulier sur les volcans dont l’accès est très difficile, comme ceux qui s’alignent le long de la Chaîne des Aléoutiennes en Alaska.
L’InSAR – abréviation de Interferometric synthetic aperture radar, interférométrie radar à synthèse d’ouverture – est une technique utilisée en géodésie et en télédétection. Elle utilise deux ou plusieurs images radar à synthèse d’ouverture (SAR) pour générer des cartes de déformation de surface ou d’élévation du sol, en utilisant les différences de phase des ondes de retour vers un satellite ou un avion. Cette technologie peut mesurer des fluctuations de déformation à l’échelle millimétrique sur des périodes allant de quelques jours à plusieurs années. Il existe des applications pour la surveillance géophysique des risques naturels, par exemple les séismes, les volcans et les glissements de terrain, ou encore la surveillance de l’affaissement et de la stabilité structurelle.
Il existe un endroit dans le sud-est de l’Alaska où la technologie InSAR s’est récemment avérée essentielle pour détecter la déformation d’un volcan jusqu’alors considéré comme inactif.
Le 11 avril 2022, les scientifiques de l’Observatoire Volcanologique de l’Alaska (AVO) ont observé une activité sismique sur le Mont Edgecumbe, sur l’île Kruzof près de la ville de Sitka.

Source: AVO

Si l’on se réfère aux archives géologiques, ce volcan est resté silencieux pendant environ 4 000 ans. Les histoires racontées par la population locale, les Tlingit, font état d’ « une montagne faisant jaillir du feu et de la fumée ». Il s’agit peut-être d’une petite éruption avec fontaines de lave qui se serait produite il y a seulement 800 à 900 ans. Il est toutefois très difficile de dater cette histoire populaire. De petits séismes peu profonds détectés en avril 2022 étaient répartis sur une zone au nord-est du sommet. Les scientifiques de l’AVO ont tenté de comprendre la source cette sismicité. Malheureusement, ce volcan n’a pas d’instruments au sol localement; les séismes les plus importants sont détectés par des sismographes éloignés appartenant au réseau sismique régional de l’Alaska Earthquake Center pour surveiller l’activité tectonique. Aucun sismographe et aucun instrument géodésique n’existe à proximité de l’édifice volcanique pour détecter et interpréter l’activité souterraine.
En l’absence d’instruments au sol à proximité du volcan, des techniques de télédétection par satellite ont été utilisées pour étudier les changements potentiels. Une série chronologique InSAR a été utilisée pour rechercher des variations de surface sur le Mont Edgecumbe. Les scientifiques de l’AVO ont utilisé des interférogrammes séquentiels pour obtenir une série chronologique des changements sur plusieurs années. La création d’une série chronologique InSAR a permis de générer une carte des mouvements du sol cumulés, comme on peut le voir sur le document ci-dessous, où chaque pixel de couleur représente la déformation à cet endroit au cours des 7 années de cette étude rétrospective. Ce travail a permis d’identifier avec succès la déformation de l’édifice volcanique qui a commencé bien avant le dernier essaim sismique. L’analyse rétrospective de la sismicité à Sitka, sur le sismographe le plus proche, montre une augmentation de l’activité sismique de faible amplitude au milieu de l’année 2019.
Les résultats de cette étude ont incité l’Observatoire Volcanologique de l’Alaska à lancer la phase suivante de surveillance sur le Mont Edgecumbe. Àu cours de l’été 2022, une station sismique et GNSS (Global Navigation Satellite System, qui comprend le GPS) a été installée près du volcan pour une surveillance active. L’instrument GNSS donne une estimation plus précise de la déformation tridimensionnelle de l’édifice volcanique, sans qu’il soit nécessaire d’attendre (environ 12 jours) un nouveau passage du satellite SAR. Ensemble, GNSS et InSAR peuvent donner une image très claire des processus magmatiques, sans avoir à se trouver à proximité du volcan pendant de longues périodes.
Une intrusion magmatique dans un édifice volcanique tel que le Mont Edgecumbe n’indique pas forcément qu’une éruption est imminente. C’est simplement une indication qu’il y a une certaine activité magmatique en profondeur. Les scientifiques expliquent qu’il y aura davantage de changements au niveau de la déformation, une sismicité plus élevée et la présence de gaz volcaniques avant toute éruption du Mont Edgecumbe. Au cours de l’été 2023, d’autres instruments seront installés sur le volcan, avec également des études des gaz et de la géologie.
Source : USGS / HVO.

Le Mont Edgecumbe a déjà fait l’objet sur ce blog le 1er novembre 2022 : Du magma sous les Mont Edgecumbe

Du magma sous le Mont Edgecumbe (Alaska) // Magma beneath Mt Edgecumbe (Alaska)

A lire aussi : une note diffusée sur ce blog le 13 novembre 2022 et intitulée La technologie InSAR au service des volcans :

https://claudegrandpeyvolcansetglaciers.com/2022/11/13/la-technologie-insar-au-service-des-volcans-insar-technology-to-monitor-volcanoes/

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During my conference « Volcanoes and Volcanic Hazards », I explain that today satellites are of a great help to monitor volcanoic activity, especially volcanoes whose access is very difficult, like those that align along the Aleutian Islands in Alaska.

InSAR – short for Interferometric synthetic aperture radar – is a radar technique used in geodesy and remote sensing. It uses two or more synthetic aperture radar (SAR) images to generate maps of surface deformation or digital elevation, using differences in the phase of the waves returning to the satellite or aircraft. The technique can potentially measure millimetre-scale changes in deformation over spans of days to years. It has applications for geophysical monitoring of natural hazards, for example earthquakes, volcanoes and landslides, and in structural engineering, in particular monitoring of subsidence and structural stability.

One place where InSAR recently proved instrumental in detecting deformation of a volcano previously considered inactive was in Southeast Alaska.

On April 11th, 2022, Alaska Volcano Observatory (AVO) scientists observed seismic activity at Mount Edgecumbe on Kruzof Island near the town of Sitka. This volcano has remained quiet for around 4,000 years based on its geologic record. Oral history of the local Tlingit tells about “a mountain blinking, spouting fire and smoke,” which perhaps describes a small eruption with lava fountaining. This is possible as recent as 800-900 years ago; however, the timing of this oral history is uncertain.

Shallow, small earthquakes detected in April 2022 were broadly distributed to the northeast of the summit. AVO scientists tried to understand the source of the earthquakes. Unfortunately, this volcano had no existing local ground-based geophysical instruments; the larger earthquakes were detected on distant seismographs of the regional seismic network used by the Alaska Earthquake Center to monitor tectonic activity. No seismographs or geodetic instrumentation existed close to the volcanic edifice that would be useful in detecting and interpreting subsurface activity.

With no ground-based instruments installed near the volcano, satellite remote sensing techniques were used to investigate potential changes. An InSAR time series was utilized to search for shallow changes at Mount Edgecumbe. AVO scientists used sequential unwrapped interferograms to create a time series of change from several years of interferograms. Creating an InSAR time series allowed them to produce a cumulative displacement map, as shown below, where each colored pixel represents the total deformation at that location over the 7 years of this retrospective study. The results successfully identified deformation that started long before the recent earthquake swarm. Retrospective analysis of seismicity at the nearest seismograph in Sitka showed an increase in low-magnitude seismic activity in mid-2019.

Results of this analysis prompted the Alaska Volcano Observatory to start the next phase of monitoring on Mount Edgecumbe. In the summer of 2022, a seismic and GNSS station (Global Navigation Satellite System, which includes GPS) station was installed near the volcano for active monitoring. The GNSS instrument gives a more precise 3-dimensional deformation estimate for the volcanic edifice, without the need to have to wait for a SAR satellite repeat visit (about 12 days). Together, GNSS and InSAR can give a very clear picture of magmatic processes, without having to be anywhere near the volcano for extended periods.

An influx of magma into a volcanic edifice such as Mount Edgecumbe does not indicate the potential of an eruption. This merely is the indication that there is some magmatic activity at depth. Scientists expect more changes in deformation, higher rates of seismicity, and detection of volcanic gases prior to any eruption at Mount Edgecumbe. During the summer 2023, more instruments will be set up on the volcano, togetheer with gas and geologic studies.

Source : USGS / HVO.

A post xas already published about Mt Edgecumbe on November 1st, 2022 :

Du magma sous le Mont Edgecumbe (Alaska) // Magma beneath Mt Edgecumbe (Alaska)

You can also read a note published on this blog on November 13th, 2022 and entitled InSAR technology at the service of volcanoes 

https://claudegrandpeyvolcansetglaciers.com/2022/11/13/la-technologie-insar-au-service-des-volcans-insar-technology-to-monitor-volcanoes/

La longue légende du document se trouve sur cette page du HVO :

https://bigislandnow.com/2023/06/02/volcano-watch-volcano-monitoring-from-space-insar-time-series-success-in-alaska/

Du magma sous le Mont Edgecumbe (Alaska) // Magma beneath Mt Edgecumbe (Alaska)

Le 6 avril 2021, j’ai écrit une note intitulée « La fausse éruption du Mont Edgecumbe (Alaska) ». L’histoire qui s’est déroulée à Sitka (Alaska) le 1er avril 1974 s’inscrit dans la longue tradition des tours que les gens ont l’habitude de jouer le 1er avril.

https://claudegrandpeyvolcansetglaciers.com/2021/04/06/la-fausse-eruption-du-mont-edgecumbe-alaska-mt-edgecumbes-fake-eruption-alaska/

La note que j’écris aujourd’hui est très sérieuse. En lisant une étude publiée le 10 octobre 2022 dans la revue Geophysical Research Letters. nous apprenons qu’en utilisant une nouvelle méthode, les scientifiques de l’Observatoire Volcanologique de l’Alaska (AVO) ont observé une ascension du magma sous le Mont Edgecumbe, un volcan endormi depuis longtemps. Une modélisation informatique basée sur l’imagerie satellite montre que le magma est remonté jusqu’à environ 10 km sous la surface depuis sa source à une profondeur d’une vingtaine de kilomètres. Cette ascension a provoqué des séismes et d’importantes déformations en surface. Les scientifiques disent que c’est « la déformation volcanique la plus rapide qu'[ils] ont actuellement observé en Alaska. Et bien qu’il ne soit pas rare que les volcans se déforment, l’activité de l’Edgecumbe est intéressante car la réactivation des systèmes volcaniques en sommeil est rarement observée ».
L’AVO a collaboré avec l’Alaska Satellite Facility, une autre unité de l’Institut de Géophysique, pour traiter les données dans le cloud. Le cloud computing utilise des serveurs à distance pour stocker des données et fournir des services informatiques afin qu’un chercheur n’ait pas à télécharger et à trier des données pour les traiter, ce qui peut prendre des semaines ou des mois.
L’équipe scientifique a commencé ses travaux dès qu’un essaim sismique a été détecté sur le Mont Edgecumbe le 11 avril 2022. Les chercheurs ont analysé la déformation du sol pendant les 7,5 années précédentes à l’aide des données radar des satellites. Le 15 avril, ils avaient déjà un résultat préliminaire : c’était une intrusion de nouveau magma qui provoquait les séismes. Un petit nombre de secousses ont commencé sous l’Edgecumbe en 2020, mais la cause est restée floue jusqu’à ce que les résultats des déformation soient connus. L’AVO a informé le public le 22 avril, moins de deux semaines après la détection du dernier essaim sismique sur l’Edgecumbe.
Le Mont Edgecumbe culmine à 976 m sur l’île Kruzof, dans la partie ouest du Détroit de Sitka. Il fait partie du Champ volcanique du Mont Edgecumbe. Ce qui a le plus étonné les chercheurs, c’est une zone de soulèvement du sol au sud de l’île Kruzof; elle avait 17 km de diamètre et était centrée à 2,5 km à l’est du volcan. Le soulèvement a commencé brusquement en août 2018 et s’est poursuivi à un rythme de 8,5 cm par an, pour atteindre 27 cm au début de l’année 2022. Une modélisation informatique ultérieure a indiqué que la cause du soulèvement était l’intrusion d’un nouveau magma.
La dernière analyse basée sur la déformation du sol permettra une détection plus précoce de l’activité volcanique. En effet, la déformation du sol est l’un de ses premiers indicateurs de cette activité. Elle peut se produire sans s’accompagner d’activité sismique. L’AVO applique désormais la nouvelle approche à d’autres volcans de l’Alaska, comme le volcan Trident, à environ 50 km au nord de Katmai Bay. Le volcan a récemment montré des signes d’activité (voir ma note du 30 septembre 2022).
Le Mont Edgecumbe ne montre actuellement aucun signe d’éruption imminente. L’intrusion magmatique dure depuis plus de trois ans maintenant. Avant une éruption, on observera une plus forte sismicité, plus de déformations, ainsi que des fluctuations dans les schémas de sismicité et de déformation.
Les chercheurs pensent que le magma a atteint probablement une chambre supérieure en empruntant un conduit presque vertical. Ils pensent également que le magma est empêché de se déplacer plus haut par un magma épais déjà présent dans la chambre supérieure.

Source: Alaska Volcano Observatory information Statement, USGS – 22 Avril 2022.

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On April 6th, 2021, I wrote a post entitled « Mt Edgecumbe’s fake eruption (Alaska). » The story that happened in Sitka (Alaska) on April 1st, 1974 belongs to the long tradition of playing tricks on April 1st, also called April Fools’ Day by the Anglo-Saxons.

https://claudegrandpeyvolcansetglaciers.com/2021/04/06/la-fausse-eruption-du-mont-edgecumbe-alaska-mt-edgecumbes-fake-eruption-alaska/

Today, my post is quite serious. According to research published on October 10th, 2022 in the journal Geophysical Research Letters. we learn that, using a new method, Alaska Volcano Observatory (AVO) scientists revealed that magma beneath long-dormant Mount Edgecumbe volcano has been moving upward through Earth’s crust. Computer modeling based on satellite imagery shows magma is rising up to about 10 km from a depth of about 20 km. This ascent caused earthquakes and significant surface deformation. Scientists say it is « the fastest rate of volcanic deformation that [they] currently have in Alaska. And while it is not uncommon for volcanoes to deform, the activity at Edgecumbe is unusual because reactivation of dormant volcanic systems is rarely observed. »

The Alaska Volcano Observatory collaborated with the Alaska Satellite Facility, another Geophysical Institute unit, to process data in the cloud. Cloud computing uses remote servers to store data and provide computing services so a researcher does not have to download and sort data to process it, something that can take weeks or months.

The research team began its work as soon as a swarm of earthquakes was noticed at Mount Edgecumbe on April 11th, 2022. Researchers analyzed the previous 7.5 years of ground deformation detected in satellite radar data. On April 15th, they had a preliminary result : An intrusion of new magma was causing the earthquakes. A small number of earthquakes began under Edgecumbe in 2020, but the cause was ambiguous until the deformation results were produced. The Alaska Volcano Observatory informed the public on April 22nd, less than two weeks after the latest series of Edgecumbe earthquakes was reported.

Mount Edgecumbe, at 976 m, is on Kruzof Island on the west side of Sitka Sound. It is part of the Mount Edgecumbe Volcanic Field. Most striking for the researchers was an area of ground uplift on southern Kruzof Island 17 km in diameter and centered 2.5 km east of the volcano. The upward deformation began abruptly in August 2018 and continued at a rate of 8.5 cm annually, for a total of 27 cm through early 2022. Subsequent computer modeling indicated the cause was the intrusion of new magma.

The new deformation-based analysis will allow for earlier detection of volcanic unrest, because ground deformation is one of its earliest indicators. Deformation can occur without accompanying seismic activity, making ground uplift a key symptom to watch. AVO is applying the new approach to other volcanoes in Alaska, including Trident Volcano, about 50 km north of Katmai Bay. The volcano is showing signs of elevated unrest (see my post of September 30th, 2022).

Mount Edgecumbe is not showing signs of an imminent eruption. The current magma intrusion has been going on for more than three years now. Prior to an eruption, more seismicity, more deformation, together with changes in the patterns of seismicity and deformation are observed.

The researchers think magma is likely reaching an upper chamber through a near-vertical conduit. But they also believe the magma is precluded from moving further upward by thick magma already in the upper chamber.

Source: Alaska Volcano Observatory information Statement, USGS – 22 Avril 2022.

Vue du Mt Edgecumbe (Crédit photo: Wikipedia)

Volcans du monde // Volcanoes of the world

Voici quelques nouvelles de l’activité volcanique dans le monde:

Une nouvelle éruption a été observée sur le Batu Tara (mer de Flores / Indonésie) le 26 avril 2022.
Selon l’observatoire volcanologique de Batu Tara, la première éruption a été enregistrée à 01h45 (UTC, 09h45 heure locale) le 26 avril, ce qui a conduit à une première hausse au Jaune de la couleur de l’alerte aérienne.
Une intensification du dégazage a ensuite été observée à 20h41 (UTC) avec un nuage de cendres estimé jusqu’à 2,8 km au-dessus du niveau de la mer, mais la visibilité n’était pas bonne. À 22 h 38 (UTC), le VAAC de Darwin a déclaré que la cendre n’était pas discernable sur les images satellite dans des conditions atmosphériques claires. Le Centre a élevé la couleur de l’alerte aérienne à l’Orange.
La dernière période éruptive du Batu Tara a duré de janvier 2007 au 26 novembre 2015, avec un VEI 2.
Source : Darwin VAAC, The Watchers.

 

Image satellite de l’éruption du Batu Tara le 15 mars 2010 avec les Petites îles de la Sonde au bas de l’image (Source: NASA).

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Selon l’Anak Krakatau Volcano Observatory, , l’activité du volcan (Indonésie) a augmenté au cours des dernières semaines, obligeant les autorités à relever le niveau d’alerte de 2 à 3 le 24 avril 2022.
La sismicité a fortement augmenté le 5 avril, suivie d’une déformation significative du volcan à partir du 18 avril, et encore plus prononcée depuis le 22 avril. L’activité éruptive oscille entre des explosions avec émissions de panaches de cendres et des événements de type strombolien, avec projections de lave incandescente le 17 avril. Une coulée de lave a été observée jusque dans la mer le 23 avril. Le VAAC de Darwin a estimé à 6 km la hauteur du panache de cendres. Le 23 avril, la couleur de l’alerte aérienne est passée de l’Orange au Rouge.
Une augmentation significative des émissions de SO2 a également été observée, ce qui indique un nouvel apport de magma susceptible de remonter à la surface sous forme de matériaux incandescents et de coulées de lave.
Sur la base de données visuelles et instrumentales, les volcanologues locaux affirment que le risque lié à l’activité actuelle réside dans la projection de matériaux incandescents dans un rayon de 2 km de la source de l’éruption, mais les matériaux éjectés peuvent atteindre des distances encore plus longues. En conséquence, le public n’est pas autorisé à s’approcher de l’Anak Krakatau dans un rayon de 5 km.
Source : Anak Krakatau Volcano Observatory via The Watchers.

Image satellite acquise le 27 avril 2022; on voit parfaitement l’écoulement de lave sur le flanc du volcan (Source: Copenicus)

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Selon le Laboratoire de Géophysique Expérimentale, l’activité du Stromboli (Sicile) est actuellement moyenne à faible dans les cratères NE et Centre. On enregistre en moyenne 9-11 événements par heure. Les émissions de SO2 sont stables sur des valeurs faibles, tandis que les flux de CO2 affichent des valeurs moyennes.

S’agissant de l’accès au volcan, le sommet reste interdit car l’activité explosive peut devenir violente sans prévenir. On peut accéder librement à la cote 300 m et avec les guides au niveau 400m, là où on pouvait grimper sans problème il y a quelques années, mais il faut bien que les guides travaillent…

Des restrictions sont également en place sur l’île de Vulcano (Iles Eoliennes) où l’accès au cratère de La Fossa et aux bains de boue reste interdit.

On observe actuellement sur l’Etna (Sicile) une faible activité strombolienne, localisée essentiellement dans le secteur Bocca Nuova / Voragine, et dans une moindre mesure dans le secteur cratère SE / NSE. Cette activité s’accompagne d’un dégazage continu de tous les cratères sommitaux.

Source: Laboratorio Geofisico Sperimentale.

Le Stromboli vu depuis la Cima…quand l’accès au sommet était autorisé (Photo: C. Grandpey)

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La situation reste stable sur le Sabancaya (Pérou) et, selon l’IGP, ne devrait guère évoluer au cours des prochains jours. On observe une quarantaine d’explosions chaque jour, avec des panaches de cendre qui montent jusqu’à 2-3 km au-dessus du sommet du volcan.

Episode explosif sur le Sabancaya (Source: IGP)

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Le Ruapehu (Nouvelle-Zélande) continue de s’agiter avec des épisodes significatifs de tremor volcanique. La température du lac de cratère reste stable à 37 °C. Le niveau d’alerte volcanique reste à 2.
L’épisode d’activité dure depuis cinq semaines maintenant. S’agissant du tremor volcanique, c’est l’épisode le plus long et le plus intense jamais observé au cours des 20 dernières années.
Les analyses chimiques d’un échantillon de l’eau du lac prélevé le 15 avril n’ont montré aucun changement depuis le 31 mars.
Comme je l’ai écrit précédemment, la nature de l’activité volcanique, le tremor volcanique qui reste élevé, les émissions de gaz et la température du lac révèlent un processus généré par l’interaction du magma avec le système hydrothermal à faible profondeur à l’intérieur du volcan.
Selon des scientifiques néo-zélandais, l’activité volcanique actuelle ne devrait pas se solder par une éruption car aucun événement de ce type n’a fait suite à de tels signes d’activité au cours des 15 dernières années. Le risque d’un épisode éruptif prolongé ou d’une éruption plus importante reste très faible.
Source : GNS Science.

Photo: C. Grandpey

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L’essaim sismique qui avait débuté près du Mont Edgecumbe (Alaska) le 11 avril 2022 (voirma note précédente) a ensuite décliné et la sismicité a retrouvé un niveau normal le 22 avril. Les données satellitaires montrent une vaste zone de soulèvement, d’environ 17 km de diamètre, à environ 2,5 km à l’E d’Edgecumbe. Le soulèvement a commencé en août 2018 et la déformation a atteint 8,7 cm par an au centre de la zone, avec au final 27 cm de soulèvement. L’analyse des données sismiques montre que la sismicité a commencé en 2020, même si le dernier essaim sismique était inhabituel. La déformation et les données sismiques laissent supposer un mouvement de magma sous le volcan, avec une intrusion à environ 5 km sous le niveau de la mer. Le volcan ne dispose pas d’un niveau d’alerte volcanique, ni d’une couleur d’alerte aérienne en raison de l’absence d’instruments sur le site.
Source : AVO.

Source: AVO

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Une anomalie thermique a été observée sur les images satellites du Karymsky (Kamtchatka) entre le 15 et le 22 avril 2022. Les explosions ont généré des panaches de cendres qui ont atteint 7,5 à 11 km d’altitude. La couleur de l’alerte aérienne est passée au Rouge le 20 avril en raison d’une explosion plus forte, avant de revenir à Orange quelques heures plus tard.
Source : KVERT.

Crédit photo: KVERT

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Ces informations ne sont pas exhaustives. Vous en trouverez d’autres (en anglais) en lisant le bulletin hebdomadaire de la Smithsonian Institution :
https://volcano.si.edu/reports_weekly.cfm

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Here is some news of volcanic activity around the world :

A new eruption was observed at Batu Tara volcano (Flores Sea / Indonesia) on April 26th, 2022.

According to the Batu Tara Volcano Observatory, the first eruption was recorded at 01:45 (UTC, 09:45 local time) on April 26th, which led to a first incresase of the Aviation Color Code to Yellow.

An increase in degassing was later observed at 20:41 (UTC) with an ash cloud estimated up to 2.8 km above sea level, but visibility was not good. At 22:38 (UTC), the Darwin VAAC said volcanic ash was not discernable on satellite imagery in clear atmospheric conditions. The Center raised the Aviation Color Code to Orange.

The last eruptive period of this volcano lasted from January 2007 to November 26, 2015, with a VEI 2.

Source: Darwin VAAC, The Watchers.

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According to the Anak Krakatau Volcano Observatory, activity at Anak Krakatau (Indonesia) increased over the past weeks, forcing authorities to raise the alert level from Level 2 to 3 on April 24th, 2022.

Seismicity at the volcano increased sharply on April 5th, followed by notable deformation starting on April 18th and even more pronounced since April 22nd. Eruptive activity fluctuates from ash-dominant eruptions to strombolian type events, producing incandescent lava on April 17th. A lava flow was observed entering the sea on April 23rd. The Darwin VAAC estimated volcanic the ash cloud rose up to 6 km. On April 23rd, the Aviation Color Code was raised from Orange to Red.

A significant increase in SO2 was also observed, which indicates a new magma supply which mlay come out to the surface in the form of incandescent material and lava flows.

Based on visual and instrumental data, local volcanologists say that the potential hazard from the current activity is the ejection of incandescent material within a radius of 2 km from the center of the eruption, but the material may reach even longer distances. As a consequence, the public is not allowed to approach Anak Krakatau within a 5 km radius.

Source: Anak Krakatau Volcano Observatory via The Watchers.

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According to the Laboratorio Geofisico Sperimentale, volcanic activity at Stromboli (Sicily) is currently medium to low in the NE and Center craters. On average, 9-11 events are recorded per hour. SO2 emissions are stable at low values, while CO2 flows show medium values.
Regarding access to the volcano, the summit remains prohibited because the explosive activity can become violent without warning. You can freely access the 300m level and reach the 400m level with the guides.
Restrictions are also in place on the island of Vulcano (Aeolian Islands) where access to La Fossa and the mud baths remains prohibited.

Weak Strombolian activity is currently observed on Mt Etna (Sicily), mainly in the Bocca Nuova / Voragine area, and to a lesser extent in the SE / NSE crater area. This activity is accompanied by a continuous degassing of all the summit craters.

Source : Laboratorio Geofisico Sperimentale.

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The situation remains stable at Sabancaya (Peru) and, according to IGP, should hardly change over the next days. About 40 explosions are observed each day, with ash plumes rising up to 2-3 km above the summit of the volcano.

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Elevated volcanic unrest continues at Ruapehu (New Zealand) volcano and is dominated by strong volcanic tremor. The Crater Lake temperature remains stable at 37 °C and the Volcanic Alert Level remains at 2.

The curent episode of unrest has lasted for five consecutive weeks. The tremor episode now represents the combined longest-strongest period of tremor recorded over the past 20 years.

The laboratory analyses of a lake sample collected on April 15th have shown no changes in water chemistry since March 31st.

As I put it previously, the sustained nature of the volcanic unrest, coupled with the strong volcanic tremor signals, elevated gas output and hot lake remain indicative of processes being driven by magma interacting with the geothermal system within the volcano at shallow depth.

According to NZ scientists, the most likely outcome of this unrest episode within the next four weeks is still that no eruptive activity occurs, as no eruptions have followed unrest in the past 15 years. The chances of a prolonged eruptive episode or a larger eruption, remain very unlikely.

Source: GNS Science.

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The seismic swarm near Mt Edgecumbe (Alaska) that began on April 11th, 2022 (see my previous post) declined to background levels by April 22nd. Satellite data showed that a broad area of uplift, about 17 km in diameter, was located about 2.5 km E of Edgecumbe. The uplift began in August 2018 and deformed at a rate of up to 8.7 cm per year in the center of the area, totaling 27 cm of uplift; the deformation was ongoing. Retrospective analysis of seismic data revealed that earthquakes started occurring in 2020, though the recent swarm was unusual. The deformation and seismic data together suggested magma movement beneath the volcano, consistent with an intrusion at about 5 km below sea level. Both the Volcano Alert Level and Aviation Color Code remain at Unassigned due to the lack of dedicated, local instrumentation.

Source: AVO.

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A thermal anomaly over Karymsky (Kamchatka) was visible in satellite images between April 15th and 22nd, 2022. Explosions generated ash plumes that rose as high as 7.5 – 11 km a.s.l. KVERT raised the Aviation Color Code to Red on April 20th due to a stronger explosion, then lowered it to Orange again.

Source: KVERT.

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This information is not exhaustive. You can find more by reading the Smithsonian Institution’s weekly report:

https://volcano.si.edu/reports_weekly.cfm