La Montagne Pelée s’agite à la Martinique // Unrest at Mount Pelée (Martinique)

Avec 4 925 secousses enregistrées entre le 28 août et le 28 septembre 2025, la Montagne Pelée connaît une activité sismique hors norme.

Photo: C. Grandpey

Dans le détail, l’Observatoire indique qu’entre le 19 septembre 2025 et le 26 septembre 2025 on a enregistré 2203 séismes de type volcano-tectonique. La plupart de ces séismes, de faible énergie, ont été identifiés comme provenant de l’une des zones sismiquement actives bien connues à la Montagne Pelée, situées entre 1,0 et 1,4 km de profondeur sous le sommet du volcan. Cependant, 130 séismes de plus forte énergie ont été localisés plus profondément, entre 2,4 km et 4,3 km de profondeur sous le sommet du volcan.

L’Observatoire explique que la sismicité superficielle de type volcano-tectonique est associée à de la micro-fracturation dans l’édifice volcanique, en lien avec la réactivation globale du volcan observée depuis 2019.

On a aussi enregistré 57 séismes de type hybride superficiel, dont 13 localisés entre 1 km et 2 km de profondeur sous les dômes de la Montagne Pelée. Ces événements de type hybride sont associés à la circulation de fluides pressurisés dans l’édifice volcanique et participent à la micro-fracturation.

Enfin, 5 séismes longue-période (LP) superficiels, de faible énergie, ont été localisés dans la même zone que les séismes de type volcano-tectonique.

Aucun séisme n’a été ressenti par la population. Cependant, l’Observatoire précise que plusieurs séismes volcaniques ont une magnitude qui s’approche de celle de séismes susceptibles d’être ressentis par des randonneurs sur la Montagne Pelée.

Habituellement, la moyenne mensuelle de séismes ne dépasse pas la trentaine. La population de localités comme le Morne-Rouge n’est pas inquiète car les habitants ne ressentent pas les secousses dont une avait récemment une magnitude de M2 avec un hypocentre à 3 kilomètres de profondeur. Pour autant, il n’y pas d’alerte immédiate. Les séismes restent localisés à faible profondeur, entre 1 et 3 km. Les réservoirs magmatiques, eux, se situent à 6-9 km. Il n’y a donc actuellement aucun signe de remontée de magma.

On se trouve un peu dans la même situation que sur les Champs Phlégréens où un seul paramètre attire actuellement l’attention des scientifiques. Pour déclencher une alerte éruption, il faudrait que le gonflement de la montagne, l’apparition de fumerolles et l’évolution de la chimie des gaz se modifient, ce qui n’est pas le cas en ce moment.

Depuis 2020, la montagne Pelée est classée en vigilance Jaune éruption. Déjà en 2019 et 2020, des essaims sismiques avaient été observés (600 à 1 000 secousses par mois), mais le niveau actuel est sans précédent depuis plus d’une décennie. Une douzaine de sismomètres sont disséminés sur la Pelée, et une vingtaine sont répartis sur toute la Martinique. Ils permettent de mesurer en continu magnitudes et profondeurs des secousses.

L’Observatoire appelle la population à signaler tout séisme ressenti sur le site franceseisme.fr.

Source : Observatoire volcanologique et sismologique de la Martinique (OVSM).

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With 4,925 earthquakes recorded between August 28 and September 28 2025, Mount Pelée is experiencing exceptional seismic activity.
In detail, the Observatory indicates that between September 19, 2025, and September 26, 2025, 2,203 volcano-tectonic earthquakes were recorded. Most of these low-energy earthquakes were identified as originating from one of the well-known seismically active zones on Mount Pelée, located between 1.0 and 1.4 km deep below the volcano’s summit.
However, 130 higher-energy earthquakes were located deeper, between 2.4 km and 4.3 km deep below the volcano’s summit.

The Observatory explains that the shallow volcano-tectonic seismicity is associated with micro-fracturing in the volcanic edifice, linked to the overall reactivation of the volcano observed since 2019.

57 shallow hybrid earthquakes were also recorded, including 13 located between 1 km and 2 km deep beneath the domes of Mount Pelée. These hybrid events are associated with the circulation of pressurized fluids in the volcanic edifice and contribute to micro-fracturing.

Finally, five shallow, low-energy long-period (LP) earthquakes were located in the same area as the volcano-tectonic earthquakes.
No earthquakes were felt by the public. However, the Observatory specifies that several volcanic earthquakes had a magnitude approaching that of events likely to be felt by hikers on Mount Pelée.

Usually, the monthly average of earthquakes does not exceed 30 events. The population of minicipalities like Morne-Rouge is not worried because they do not feel the tremors, one of which recently had a magnitude of M2 with a hypocenter 3 kilometers deep. However, there is no immediate alert. The earthquakes remain localized at shallow depths, between 1 and 3 km. The magma reservoirs are located 6-9 km down. There is therefore currently no sign of magma ascent.
We are in a similar situation to the Phlegraean Fields, where a single parameter is worrying scientists. To trigger an eruption alert, the inflation of the mountain, the appearance of fumaroles, and the evolution of the gas chemistry would have to change, which is not currently the case.
Since 2020, Mount Pelée has been classified as Yellow Eruption Alert. Seismic swarms had already been observed in 2019 and 2020 (600 to 1,000 tremors per month), but the current level is unprecedented in over a decade. A dozen seismometers are scattered across La Pelée, and around twenty are spread throughout Martinique. They continuously measure the magnitude and depth of tremors.
The Observatory urges the public to report any earthquakes felt on the website franceseisme.fr.
Source: Martinique Volcanological and Seismological Observatory (OVSM).

La suppression du 8 mai choque la Martinique !

En présentant les grandes lignes du budget 2026, le Premier Ministre François Bayrou a évoqué la suppression de deux jours fériés, citant notamment le lundi de Pâques et le 8 mai. Cette annonce a été particulièrement mal accueillie en Martinique, car le 8 mai commémore l’éruption meurtrière de la montagne Pelée en 1902.

Chaque 8 mai, la Martinique ne commémore pas uniquement la fin de la Seconde Guerre Mondiale, mais aussi les victimes de l’éruption de la Montagne Pelée. Le 8 mai 1902 à 8h02, Saint-Pierre, alors capitale économique et culturelle de l’île, a été anéantie par une nuée ardente. En quelques instants, près de 30 000 personnes ont péri dans les flammes et les cendres.

Depuis plus d’un siècle, chaque 8 mai, la mémoire de cette catastrophe est honorée à Saint-Pierre et dans toute la Martinique. La perspective de voir disparaître ce jour férié provoque aujourd’hui l’indignation. Le maire de Saint-Pierre a exprimé son désaccord : « Effacer cette date qui trace la plus grande tragédie naturelle du 20ème siècle, ce serait incompréhensible pour nous. Ce n’étaient pas seulement 28 000 Pierrotins, mais 28 000 Martiniquais. 28 000 Français. » Selon le premier magistrat de Saint-Pierre, cette date devrait même faire l’objet d’une reconnaissance nationale plus marquée, tant elle est méconnue dans l’Hexagone. Il appelle à une mobilisation des élus locaux et des parlementaires pour rappeler l’importance de cette mémoire collective.

Dans les rues de Fort-de-France, les réactions sont tout aussi défavorables à la proposition du Premier Ministre.. Comme l’a déclaré une habitante, « ce sont des propositions abusives. Le 8 mai, en Martinique une date très particulière qu’on ne saurait oublier pour un caprice politique. »

La proposition de François Bayrou réveille en Martinique des douleurs anciennes et soulève une question plus large : quelle place accorde-t-on aux mémoires ultramarines dans l’histoire nationale ?

Source : Martinique la 1ère.

La Montagne Pelée et Saint-Pierre (Photo: C. Grandpey)

Îles volcaniques : Antilles, Polynésie, Réunion

On a pu lire le 30 novembre 2024 sur le site Guadeloupe la 1ère un article consacré à la surveillance des volcans des Petites Antilles, de l’archipel de la Société en Polynésie ou de l’île de La Réunion. Au travers de leurs éruptions, ils ont influencé la géographie, l’histoire et l’identité de ces régions. Aujourd’hui, les scientifiques cherchent à anticiper les éventuels aléas déclenchés par ces géants. Nous ne savons pas prévoir mes éruptions, mais les instruments dont sont truffés ces volcans permettent de mieux comprendre, voire d’anticiper, leur comportement.

L’article rappelle que dans l’arc insulaire des Petites Antilles, émergé il y a plusieurs millions d’années grâce à la subduction de la plaque Amérique sous la plaque Caraïbe, tous les sommets sont d’origine volcanique. Près de vingt volcans sont considérés comme actifs dans les Petites Antilles.

On se souvient que l’île de Montserrat a été profondément affectée par le réveil du volcan Soufrière Hills en 1995, avec l’évacuation d’une partie de la population. En 1997, plusieurs éruptions ont ravagé l’aéroport. Plymouth, la capitale a été détruite et recouverte de cendres à 80%. Une grande partie de l’île est désormais une zone d’exclusion. En février 2010, une explosion a provoqué des nuées ardentes et un panache de cendres qui a atteint les îles voisines de la Guadeloupe et d’Antigua.

Crédit photo: Wikipedia

Une autre Soufrière domine la Guadeloupe. Le volcan a connu sa dernière activité importante en 1976-1977. En 1976, 70 000 personnes ont été déplacées à tort par ordre préfectoral, sur recommandation de Claude Allègre qui avait profité de l’absence d’Haroun Tazieff, alors en Équateur, pour interpréter faussement les résultats de l’équipe du volcanologue français. 25 000 avaient anticipé une possible catastrophe et trouvé refuge sur Grande-Terre. Beaucoup ne reviendront pas.

Crédit photo: Wikipedia

L’éruption la plus dramatique a été celle de la Montagne Pelée en 1902 à la Martinique. Ce réveil tragique a détruit Saint-Pierre et tué pas moins de 28 000 personnes. C’est l’éruption la plus meurtrière du 20ème siècle. À noter qu’elle a occulté une éruption du Santa Maria qui a eu lieu au même moment au Guatemala et qui a tué quelque 5 000 personnes. L’éruption de la Pelée a été remarquablement narrée par Alfred Lacroix dans son ouvrage Les éruptions de la Montagne Pelée. Il a été le premier à décrire avec précision le déroulement des coulées pyroclastiques. De nos jours, le volcan est surveillé par les scientifiques de l’Observatoire volcanologique et sismologique de la Martinique (OVSM).

Photo: C. Grandpey

La Dominique héberge neuf volcans actifs, dont le Morne aux Diables et le Morne Trois Pitons. L’activité volcanique a créé des sources chaudes. Le Boiling Lake est l’un des rares cratères bouillonnants au monde. Ravagée par d’autres catastrophes naturelles telles que les ouragans, « l’île nature des Caraïbes » se reconstruit. Les habitants acceptent avec fatalisme une prochaine catastrophe inéluctable.

Crédit photo: Geology Science

S’agissant de la Caraïbe, j’ajouterai Kick ’em Jenny, volcan sous-marin actif situé au fond de la mer des Caraïbes, à 8 km au nord de l’île de Grenade. L’édifice s’élève à 1 300 m au-dessus du fond de la mer. La première éruption historique ce volcan date de 1939 avec un nuage de vapeur et de débris et une série de tsunamis d’environ deux mètres de hauteur qui ont frappé les côtes du nord de la Grenade et du sud des Grenadines. Les habitants de la Caraïbe sont intrigués par ce volcan et m’ont posé plusieurs questions à l’issue de ma dernière conférence au CDST de Saint Pierre.

Source: Smithsonian Institution

L’île de La Réunion dans l’océan Indien et les îles de l’archipel de la Société en Polynésie française connaissent un autre contexte géologique. Elles sont situées sur des zones de points chauds où le magma remonte du manteau terrestre et perce la croûte océanique, créant ainsi des volcans qui émergent de l’océan et qui, peu à peu avec l’aide de l’érosion, disparaissent sous la surface de l’océan. Les récifs coralliens qui les entourent forment un anneau de corail créant un atoll.

Le Piton de la Fournaise entre régulièrement en éruption à La Réunion. C’est l’un des volcans les plus actifs de la planète. Les éruptions peuvent s’observer de loin – de trop loin selon beaucoup de gens – et elles attirent des foules de spectateurs fascinés par la beauté des colères de la Terre.

Photo: C. Grandpey

La Montagne Pelée au Patrimoine mondial de l’UNESCO !

Ça y est ! Les Volcans et Forêts de la Montagne Pelée et des Pitons du nord de la Martinique sont désormais inscrits au Patrimoine mondial de l’UNESCO. La décision a été prise le samedi 16 septembre 2023 lors de la 45ème session du comité du patrimoine mondial qui s’est tenue à Riyad (Arabie Saoudite). Cette annonce du comité vient récompenser des années de travaux en coulisses et aura des répercussions importantes pour la Martinique. Un travail diplomatique a été nécessaire pour sensibiliser les 21 états qui composent le comité.

Avec cette inscription à la première tentative, la Martinique a fait mieux que la métropole où la Chaîne des Puys et la Faille de la Limagne n’ont été récompensés qu’au troisième essai….

Le président du conseil exécutif de la collectivité territoriale de Martinique a souligné que la Montagne Pelée, volcan de classe mondiale, comme celui de Pompéi ou de Hawaii ne faisait toujours pas partie du patrimoine mondial de l’Unesco. Une lacune selon lui, constatée par les membres de l’UICN depuis 2009. Ces propos ont été soutenus par Philippe Franc, ambassadeur, délégué permanent de la France auprès de l’UNESCO. Le représentant du Rwanda a aussi souligné « l’influence de la Montagne Pelé sur l’œuvre artistique d’Aimé Césaire, mettant en évidence sa valeur universelle ».

Selon les autorités martiniquaises, la Montagne Pelée et ses forêts, les Pitons du nord, le Morne Jacob et le Mont Conil sont de véritables richesses en biodiversité et en géologie. Ils feront désormais partie des 1157 sites déjà inscrits. Les retombées pour le territoire devraient être importantes. En effet, par cette inscription au Patrimoine mondial de l’UNESCO, ces sites auront une visibilité internationale prestigieuse, avec à la clé une augmentation de la fréquentation touristique de 30 à 40%. Encore faudra-t-il que la campagne destinée à mieux faire connaître ces sites au public soit performante, ce qui n’est pas forcément le cas en Auvergne…

Source : Martinique la 1ère.

Photo: C. Grandpey