Le 6 juin 1912, le volcan Novarupta est entré en éruption en Alaska et a envoyé de volumineux nuages de cendre autour du globe. Ce fut la plus importante éruption du vingtième siècle. La cendre est retombée aux États-Unis, au Canada et en Afrique. A l’époque, le trafic aérien était nul dans cette partie du monde. Aujourd’hui, la situation a bien changé !
Le Pacifique Nord est l’un des couloirs aériens les plus fréquentés au monde. L’éruption de l’Eyjafjallajökull (Islande) en avril 2010 a démontré à quel point une éruption volcanique peut mettre à mal le trafic aérien. L’Europe a été quasiment paralysée. Au troisième jour de l’éruption, 17 000 vols étaient annulés en Europe. L’éruption islandaise, relativement mineure, a soulevé des questions sur les effets possibles d’une éruption de plus grande envergure, en particulier dans des régions où le trafic aérien est vital, comme l’Alaska et le nord du Canada.
Dans le sillage de l’éruption islandaise, Rebecca Anne Welchman, une étudiante britannique, a étudié quels seraient aujourd’hui les effets d’une éruption semblable à celle du Novarupta. Le titre de son travail de recherche est «Le monde à l’arrêt: Etude des effets actuels sur l’industrie aéronautique d’une éruption volcanique comme celle du Novarupta ».
Le nuage de cendre de l’éruption de 1912 – qui a duré environ 60 heures – s’est élevé à plus de 32 000 mètres, et le jet stream a emporté la cendre vers l’est. L’éruption a façonné la Vallée des 10.000 Fumées. On estime qu’elle a provoqué plus de retombées de cendre que toutes les autres éruptions des volcans d’Alaska réunies. La poussière et les aérosols soufrés ont été détectés en Californie, en Europe et en Afrique du Nord pendant les deux semaines qui ont suivi l’éruption. Il a également été fait état de retombées de cendre en Grèce. Cette cendre a également été repérée dans des carottes de glace prélevées au Groenland.
Les chercheurs estiment que 5 principaux secteurs de l’Alaska souffriraient d’une nouvelle éruption du Katmai: 1) le couloir aérien de l’Alaska; 2) Les ports et les bases militaires de la région; 3) L’industrie de la pêche et voies de navigation ; 4) La faune; 5) Les installations touristiques.
Aujourd’hui, plus de 200 vols par jour passent à proximité des volcans de l’Alaska. Le fret aérien est la principale source de revenus de cet Etat et un grand nombre de petites localités dépendent des aéroports locaux pour leur approvisionnement. 5% du fret aérien international des États-Unis est passé par l’aéroport international Ted Stevens d’Anchorage en 2008. Le trafic aérien sur l’ensemble du Pacifique Nord, de l’Alaska, du Canada et des États-Unis pourrait être affecté par une éruption, avec interruption du commerce aérien national et international.
Des simulations ont été effectuées entre 2005 et 2009 par les chercheurs pour examiner l’impact des nuages de cendre sur une longue période. Elles ont été ensuite importées dans un programme informatique géographique, ce qui a permis une évaluation visuelle de la répartition de la cendre. Une fois toutes ces informations rassemblées, il a été possible de comptabiliser pour chaque simulation le nombre d’aéroports directement affectés par les nuages de cendre. Les totaux et les moyennes ont été calculés pour chaque semaine afin d’établir le pire scénario. Sur la base du nombre de passagers et de la durée de la présence du nuage de cendre à proximité de l’aéroport, on a estimé les pertes totales sur sept jours.
Les simulations ont révélé que dans le pire des scénarios une éruption comme celle du Novarupta affecterait directement 43 aéroports par jour en Alaska, ainsi qu’environ 7 aéroports situés à proximité de la trajectoire empruntée par le nuage de cendre. Le coût total des retards et annulations de vols a été estimé à plus de 322 millions de dollars. Les gens seraient bloqués jusqu’à ce que les dépôts de cendre aient été nettoyés.
L’Alaska dépend du reste des Etats-Unis pour son approvisionnement en nourriture. L’Etat s’appuie sur l’aviation pour approvisionner les villages les plus éloignés et n’est pas en mesure d’offrir un transport alternatif. L’aviation est particulièrement vitale pendant l’hiver lorsque les routes sont impraticables en raison de la neige. Les approvisionnements de ces régions deviendrait rapidement impossible, ce qui entraînerait forcément des problèmes de santé et mettrait la vie des gens en danger.
En outre, l’Alaska est une escale obligée pour le ravitaillement des navires et des avions qui traversent le Pacifique ou l’Arctique. Leur immobilisation pendant plusieurs jours serait une perte financière importante pour l’économie de l’Alaska.
Tous les vols long courrier entre les États-Unis et l’Asie, l’Australasie et certains pays du Moyen-Orient passent au-dessus de l’Alaska. Le tourisme serait fortement impacté dans le monde entier. De nombreuses industries perdraient probablement confiance à l’égard de l’aviation pour le transport des marchandises avec des conséquences désastreuses pour les compagnies aériennes et les aéroports. En seulement 20 jours, la cendre recouvrirait l’hémisphère nord ainsi que le sud de l’Inde. Si la cendre venait à traverser l’équateur, la situation deviendrait catastrophique. Si le Katmai, ou n’importe quel autre volcan, devait connaître une nouvelle éruption de cette ampleur, cela causerait des perturbations sur toute la planète. La simulation montre qu’une éruption de cette envergure ne se dissiperait pas rapidement et pourrait mettre le monde à genoux.
L’étude devra être approfondie, mais elle donne un aperçu de ce qui nous attend, en Alaska et ailleurs dans le monde, si une éruption à grande échelle, comme celle du Novarupta, se produisait un jour.
Source : Alaska Park Science, Volume 11, Issue 1.
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On June 6th 1912, Novarupta erupted in Alaska, sending ash over the globe. It was the biggest eruption of the twentieth century. The ash settled over the U.S.A., Canada and as far as Africa.
Today, the North Pacific is one of the busiest air corridors in the world. The eruption of Eyjafjallajökull (Iceland) in April 2010 demonstrated how disruptive a volcanic eruption can be to the aviation industry, as Europe was almost brought to a standstill. By the third day of the eruption, 17,000 flights had been cancelled across Europe. The relatively small eruption in Iceland raised questions about the possible effects of a larger eruption, particularly in an area where air traffic is vital, such as Alaska and northern Canada.
With the Iceland eruption in mind, British graduate student Rebecca Anne Welchman investigated the possible effects of a Novarupta scale eruption. The title of the study was “Bringing the World to a Standstill: An Investigation into the Effects of a Novarupta Scale Volcanic Eruption on Today’s Aviation Industry.”
The ash cloud from the1912 eruption – which lasted approximately 60 hours – rose to over 32,000 metres, and the jet stream carried the ash eastwards. The eruption formed the Valley of 10,000 Smokes. It is estimated that it created and spread more ash fallout than all the other historic eruptions from Alaska volcanoes combined. The dust and sulphurous aerosols were detected over California, Europe and North Africa within two weeks of the eruption. It was also reported that ash reached as far as Greece. The ash and dust deposited by the eruption have also shown up in ice cores taken from Greenland.
Researchers believe 5 main sectors in Alaska would suffer from another Katmai cluster eruption: 1) Alaska’s air corridor; 2) Regional and military bases and ports; 3) Fisheries and shipping lanes; 4) Wildlife habitats; 5) Tourist facilities.
Today, over 200 flights per day pass in the range of Alaska’s volcanoes. Air freight is the primary source of aviation commerce in Alaska, and many of the smaller communities rely on local airports for supplies. About 5% of all US-international air cargo passed through Ted Stevens Anchorage International Airport in 2008. Air traffic over the entire North Pacific, Alaska, Canada and U.S.A could be affected, interrupting both national and international air commerce
Simulations from 2005 until 2009 were run by the researchers to look at how the ash would behave over a longer period. They were imported into a Geographical Information Systems program, which allowed a visual assessment of the distribution of ash. Once all this information was collated, the number of airports directly affected by the ash clouds was counted on each simulation. The totals and mean averages were calculated per week to discover a ‘worst-case’ scenario. Based on passenger numbers and how long the ash cloud was in the vicinity of the airport, a total loss figure was estimated for the seven days
The simulations revealed that in the worst-case scenario a Novarupta-like eruption in Alaska would directly affect 43 airports per day in the State, as well as an average of 7 airports close to the ash cloud path. The total cost for delayed and cancelled flights for the scenario was estimated over $322 million. People would become stranded until the eruption deposits were cleaned up.
Alaska is reliant on food from mainland U.S.A. It is dependent on aviation to supply remote villages and is not able to offer alternative transport. Aviation is particularly vital during the winter when roads are impassable due to snow. Supplies in these areas would quickly run out, causing extra health issues and putting people’s lives at risk.
Besides, Alaska is used as a midway-stop for ships and planes to refuel when travelling across the Pacific or Arctic. Having planes grounded for many days would be a significant financial strain on Alaska’s economy.
All major flights from the U.S. to Asia, Australasia and some to the Middle East fly over Alaska. The tourism industry would be heavily affected around the globe. Many industries would likely lose confidence in the reliance on aviation for the transport of goods as a result of the disruption. In this case, whilst airports would probably be affected all over the world, air traffic itself would likely not be possible throughout North America and Europe. In just 20 days, ash covered the whole of the northern hemisphere as well as southern India. If volcanic ash were to cross the equator, it would become a devastating situation. If Katmai, or even any volcano, were to erupt at this magnitude again, it would cause global disruption. The simulation showed that an eruption of this size is not likely to dissipate quickly and could bring the world to a standstill.
There is still room for many developments of the study but it gives a basic overview of what we could be dealing with, maybe in our life time, if not in Alaska, somewhere else around the world, if a large-scale eruption were to take place.
Source : Alaska Park Science, Volume 11, Issue 1.
Simulation de la dispersion de la centre au bout de 20 jours d’une éruption du Novarupta qui aurait débuté le 6 juin 2009.
L’éruption du Novarupta comparée à d’autre éruptions majeures dans le monde.