Vatnajökull (Islande) : Y aura-t-il une éruption ? // Will there be an eruption ?

drapeau francaisAlors que les médias trépignent dans l’espoir d’une éruption spectaculaire qui remplira journaux et magazines, la situation actuelle en Islande appelle quelques réflexions.

– Tout d’abord, les gesticulations auxquelles nous assistons en ce moment – en particulier sur les réseaux sociaux – n’auraient pas lieu si l’Eyjafjallajökull n’avait pas déclenché une panique monstre dans le trafic aérien en 2010. Depuis cette date, des alertes sismiques ont été observées ailleurs en Islande (Reykjanes, Tjornes) mais la presse ne s’en est guère préoccupée. De la même façon, quand un volcanologue islandais a cru bon annoncer une éruption imminente de l’Hekla (on l’attend toujours !), il n’y a pas eu de remous dans les médias. Cette fois, la sismicité se trouve sous un glacier, alors on repense tout de suite au nuage de cendre de 2010 qui a laissé de sérieuses traces dans les mémoires.

– Pour le moment, aucune éruption n’a été observée et personne n’est en mesure de dire ce qui se passera dans les prochaines heures ou les prochains jours. Tout le monde semble se focaliser sur la sismicité qui secoue la région. Il est toutefois bon de rappeler que la seule sismicité ne suffit pas pour prévoir une éruption. Les événements récents à El Hierro (Iles Canaries) sont là pour le prouver. On a assisté à plusieurs essaims sismiques à répétition (avec des secousses importantes) mais aucun magma n’est apparu à la surface, sauf modestement à La Restinga lors de la première crise. Là aussi, la sismicité trahissait une intrusion magmatique. De plus, il faut savoir que des intrusions magmatiques identiques se sont déjà produites en Islande (dans la région du Krafla par exemple) sans sortie de la lave à la surface. Le site de la Smithsonian Institution  consacré au Barðarbunga indique à plusieurs reprises au cours des dernières années que des éruptions ont été « uncertain », ce qui signifie que le magma n’a pas percé la surface.

D’autres paramètres doivent être pris en compte, surtout dans une région où la sismicité est déjà forte naturellement. .

Il y a la déformation. Elle est très marquée depuis que la crise sismique a commencé, sous l’effet de l’intrusion magmatique et de la propagation du dyke vers le nord.  Là encore, sismicité et déformation ne sont pas des paramètres suffisants, même s’ils sont très importants et demandent la plus grande vigilance.

En revanche, personne ne fait état des modifications thermiques pour lesquelles les satellites sont très utiles. Vu le silence sur le sujet, il semblerait qu’aucune anomalie n’ait été détectée dans la région.

On n’entend pas parler non plus de l’aspect géochimique avec les modifications qui pourraient survenir dans les sources chaudes et dans les émanations gazeuses (variations de l’hélium ou du CO2, par exemple) situées à proximité du lieu sensible. J’ai encore en tête les paroles de Maurice Krafft qui comparait les paramètres volcaniques aux  symptômes d’une maladie.

Comme je l’ai souligné précédemment, le volcanisme islandais est complexe car la tectonique vient brouiller les cartes. Les désaccords qui sont apparus entre les scientifiques islandais montrent bien que nous sommes incapables à l’heure actuelle de formuler des pronostics. Il nous faut attendre et voir !

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drapeau anglaisWhile the media are impatiently waiting for a dramatic eruption that would fill newspapers and magazines, the current situation in Iceland requires some remarks.
– First, all the commotion we are witnessing right now – especially on social networks – would not occur if Eyjafjallajökull had not triggered a monster panic in air traffic in 2010.  Since that time, seismic alerts have been observed elsewhere in Iceland (Reykjanes Tjörnes) but the media did not feel interested. Similarly, when an Icelandic volcanologist talked about an imminent eruption of Hekla (we are still waiting for it!), there was no stir in the media. This time, the seismicity is located under a glacier, so people immediately think about the ash cloud in 2010 that left serious traces in the memories.
– For the moment, no eruption has been observed and no one is able to tell what will happen in the coming hours or days. Everyone seems to focus on the seismic activity in the region. However, it is worth remembering that seismicity alone is not enough to predict an eruption. Recent events in El Hierro (Canary Islands) are there to prove it. There have been repeated several seismic swarms (with big shakes) but no magma has appeared to the surface, except at La Restinga (in a modest way) during the first crisis. Again, seismicity betrayed a magma intrusion. Besides, we should keep in mind that similar magma intrusions have already occurred in Iceland (in the Krafla region for example) without any magma ascent to the surface. The website of the Smithsonian Institution dedicated to Barðarbunga indicates repeatedly in recent years « uncertain » eruptions, which means that magma did not pierce the surface.
Other parameters must be taken into account, especially in a region where seismicity is already strong naturally.
Deformation needs to be taken into account. It has been very strong since the seismic crisis began, due to the magma intrusion. However, seismicity and deformation are not sufficient parameters, although they are very important and require to be very vigilant.
There has been no report of thermal changes for which satellites are very useful. Given the silence on the subject, it appears that no thermal anomaly was detected in the region.
We do not hear either about geochemical changes that might have occurerd in the hot springs and the gaseous emissions near the active site. I still have in mind the words of Maurice Krafft who compared volcanic parameters to the symptoms of a disease.
As I put it before, Icelandic volcanism is complex because the tectonic aspect confuses the issue. The disagreements that arose among Icelandic scientists show that we are unable at this time to make predictions. We have to wait and see!

Krafla-blog

Fracture éruptive du Krafla  (Photo:  C.  Grandpey)

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