Alors que la phase phréato-magmatique de l’éruption de l’Eyjafjöll – mais probablement pas l’éruption proprement dite – est sur le déclin et que le transport aérien est en passe de reprendre normalement, on peut tirer quelques leçons des événements de ces derniers jours.
Le premier enseignement, c’est qu’une éruption volcanique mineure peut créer de sérieuses difficultés. En effet, comme je le faisais remarquer dimanche soir sur France 3 Limousin, l’Eyjafjöll n’a rien d’un monstre si on le compare à des volcans comme le Mont St Helens aux Etats-Unis ou le Pinatubo aux Philippines. Si le vent avait transporté son panache vers le nord-est, personne n’en aurait parlé ! Au cours des derniers jours, le problème est venu du fait que le nuage de cendre a traversé l’espace aérien européen. En France, le chaos a été d’autant plus ressenti que beaucoup de gens étaient en vacances et qu’une grève perturbait sérieusement le trafic ferroviaire. D’un point de vue économique, les conséquences ne sont pas négligeables. Les compagnies aériennes en particulier prétendent avoir subi des pertes d’environ 200 millions de dollars par jour.
On retiendra de cet événement qu’il n’a fait aucune victime et que le système de prévention a bien fonctionné. Même si les autorités ont parfois été critiquées, je pense qu’il était raisonnable de bloquer le trafic aérien le temps que s’évacue le nuage de cendre dont les particules, riches en verre volcanique, ne font pas bon ménage avec les fuselage et surtout les réacteurs des avions. De sérieux problèmes ont été observés dans les années 1980 et il ne s’agit pas de mettre en péril les vies de milliers de personnes qui voyagent dans les airs.
Toujours au niveau de la prévention, les progrès de la technologie – les satellites en particulier – ont permis de suivre l’évolution du nuage de cendre et de prendre des mesures en conséquence. On a assisté à une belle coopération entre les services météorologiques de tous les pays européens.
La prévision a toutefois ses limites. Comme je l’indique souvent lors de mes interventions en public, nous ne savons pas prévoir une éruption volcanique et nous ne sommes pas capables de dire comment une éruption va évoluer. D’ailleurs, la deuxième phase de l’éruption islandaise au col de Fimmvörduháls a surpris tout le monde et il a fallu évacuer dans l’urgence une cinquantaine de personnes qui se trouvaient sur place. Il est donc très difficile d’anticiper. On ne peut pas arrêter le trafic aérien toutes les fois qu’une crise sismique laisse supposer qu’un volcan va entrer en éruption ! Il faut agir en fonction des événements, en sachant résister aux pressions. Il est bien évident qu’une interruption de l’activité économique fait perdre de l’argent et perturbe la vie de milliers, voire de millions, de personnes, mais il faut savoir ce que l’on veut : protéger des gens ou faire du fric !
Au final, une autre conclusion s’impose. Aussi avancée que puisse être la technologie, aussi rapide que puisse être le progrès, c’est la Nature qui commande ! Elle nous l’a fait comprendre il y a quelques semaines par l’intermédiaire de la tempête Xynthia ; elle nous le fait savoir à nouveau au travers de l’éruption islandaise et il ne fait aucun doute qu’elle nous rappellera sa domination dans les prochains mois ou les prochaines années…
La superbe chute d’eau de Skogafoss n’a, semble-t-il, pas été trop affectée par l’éruption de l’Eyjafjöll.
(Photo: C. Grandpey)