La mafia napolitaine met le feu au Vésuve // The Neapolitan mafia sets Mt Vesuvius on fire

En regardant la photo ci-dessous, on a l’impression que le Vésuve est entré en éruption. D’épais panaches de fumée s’élèvent de ses flancs avant de recouvrir Naples et se propager à l’est jusqu’à la mer Adriatique.
Ces nuages impressionnants sur la montagne ne sont pas provoqués par une catastrophe naturelle; il s’agit d’une catastrophe d’origine humaine. Des dizaines d’incendies font rage sur le Vésuve depuis plusieurs jours. Le 11 juillet, plusieurs de ces feux se sont regroupés pour créer une catastrophe majeure en avançant sur les décharges de produits toxiques gérées par la Camorra, la mafia napolitaine.
La zone autour du Vésuve a été baptisée « la terre des feux » par la population, par référence aux incinérateurs clandestins construits par la Camorra qui y brûle des déchets toxiques depuis des années. L’ensemble de la zone est un danger pour la santé ; on y observe un nombre de cancers plus élevé que dans les autres régions d’Italie. En février 2017, huit enfants âgés de 7 mois à 11 ans sont morts d’un cancer au cours d’une période de seulement 20 jours. La mère d’une jeune victime a pris la tête d’une manifestation de protestation pour tenter d’empêcher la Camorra d’utiliser la région comme décharge illégale. L’année dernière, un médecin a fait du porte-à-porte pour mener une enquête sur le nombre de cancers dans la « terre des feux ». 80 pour cent des personnes interrogées avaient au moins un membre de leur famille atteint d’un cancer.
Les opérations clandestines de la Camorra comprennent l’enfouissement et la combustion de déchets toxiques que les installations médicales et les usines doivent éliminer. Au cours de la dernière décennie, plus de 400 entreprises ont été poursuivies parce qu’elles vendaient leurs déchets dangereux à la mafia au lieu de s’en débarrasser de manière écologique et légale. Les déchets sont souvent déversés dans des décharges improvisées sur le Vésuve. Lorsqu’elles sont trop pleines, les déchets sont brûlés.
Le service des Eaux et Forêts a déclaré que certains des incendies hors de contrôle sur le Vésuve ont été allumés intentionnellement, probablement pour se débarrasser des déchets toxiques ou pour protester contre l’interdiction prononcée par les autorités locales contre des sites de construction illégaux. Il m’a été dit que la Camorra utilise une technique bien particulière pour allumer les incendies: ses membres atteignent en voiture la fin des routes en cul-de-sac sur les pentes du volcan. Ensuite, ils utilisent des chats sur lesquels ils déversent de l’essence et mettent le feu au carburant sur les animaux. Les chats avec les flammes sur le dos s’enfuient très rapidement et atteignent souvent des zones inaccessibles où les feux sont allumés. D’autres feux peuvent avoir été allumés par des mégots qui enflamment la végétation rendue sèche par la vague de chaleur actuelle. Au cours des derniers jours, beaucoup de ces incendies se sont connectés les uns aux autres, créant une situation incontrôlable pour les pompiers. Le plus grand incendie présente une longueur de 2 kilomètres. Jusqu’à présent, des centaines d’habitants ont été évacués de leurs maisons ; des hôtels et des restaurants ont été fermés. C’est un coup dur pour le tourisme en Campanie.
Source: Médias italiens.

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Looking at the photo below, you get the impression Mt Vesuvius is erupting again. Thick plumes of smoke are billowing from its flanks, causing a cloud of smoke to settle over Naples and spread east with the wind as far as the Adriatic Sea.

Fortunately, the smoke on the mountain is not caused by a natural disaster; it is a human one. Dozens of fires have been raging on Vesuvius for days. On July 11th, several joined together to create a major disaster as they tear through the Camorra crime syndicate’s toxic-dump wasteland.

The area around Vesuvius is already called “the land of fires”, named for the illegal incinerators built by the Camorra in which they have been burning toxic waste for years. The whole area is a health hazard with incidences of cancer higher than anywhere else in Italy. In February 2017, eight children between the ages of 7 months and 11 years old died from cancer in a period of just 20 days. At the time of the deaths, one of the mothers of a young victim led locals in a protest to try to stop the Camorra from using the territory for illegal dumping. Last year, a local doctor went door-to-door to conduct a survey of the prevalence of cancer within the land of fires. 80 percent of the people he interviewed had at least one cancer patient in their family.

The Camorra’s racket includes burying and burning toxic waste that medical facilities and factories need to get rid of. Over the last decade, more than 400 companies have been investigated in the area for selling their dangerous trash to the crime group rather than getting rid of it in an environmentally friendly and legal way. The waste is often discarded in makeshift dumps on Vesuvius which, when they get too full, are burned.

Italy’s Forestry Corps says some of the fires burning out of control on Vesuvius were intentionally set, likely to get rid of the toxic trash or to protest local authorities’ recent sequester of illegal construction sites. I have been told that the camorra uses a special technique to ignite the fires : They drive to the end of the roads that go up the volcano. Then, they use cats on which the pour petrol and set fire to the fuel. The cats with the flames on their backs run away very quickly and often reach inaccessible areas where the fires are ignited. Other fires may have been the result of discarded cigarettes that ignited tinder that has become dry during the current heatwave. Over the last few days, many of these fires have connected, creating an out-of-control situation for firefighters. The largest fire is 2 kilometers long. So far hundreds of residents have been evacuated from their homes, and hotels and restaurants have been closed.

Source : Italian news media.

  Crédit photo : Terremoti Italia

Glaciers alpins en juillet 2017 : (1) Le Glacier des Bossons

Je viens d’effectuer une petite virée dans les Alpes françaises et suisses, histoire de voir l’évolution des glaciers et l’étendue de la catastrophe glaciaire. Certains prétendent qu’elle est normale et fait partie d’un cycle climatique, vu que notre planète a traversé des périodes chaudes et d’autres froides. C’est peut-être vrai, mais l’accélération de la fonte des glaciers est tellement rapide que d’autres facteurs entrent probablement en jeu. Il serait grand temps d’arrêter de faire la politique de l’autruche et de refuser de voir la vérité.

Ma première étape se situait à Chamonix (Haute-Savoie) où j’avais séjourné pour la dernière fois en septembre 2015. Mon point de référence glaciaire dans la vallée est le Glacier des Bossons que j’ai découvert en 1956, époque où sa masse blanche surplombait la vallée. Aujourd’hui, il semble avoir pris peur et recule à toute vitesse vers le haut de la montagne. Le phénomène apparaît surtout dans les clichés que j’ai pris depuis les années 1980.

Depuis ma dernière visite en 2015, le glacier n’a pas trop reculé. La perte de glace est toutefois visible sur le flanc oriental où le rocher est de plus en plus apparent. Je ne suis pas monté au Chalet ni à la Jonction (qui n’existe plus depuis longtemps avec le Taconnaz), mais vu de profil, j’ai l’impression que le glacier a tendance à s’amincir. La morphologie du bombement frontal m’inquiète car j’ai l’impression que cette masse ne va pas tarder à se détacher de l’amont, comme cela s’est produit au mois de juin 2015. Il faudra suivre cette situation très attentivement. La faible quantité de neige tombée l’hiver dernier et la chaleur précoce au printemps ne sont guère favorables au maintien de la glace…

Voici quelques photos montrant le Glacier des Bossons en août 1956, en septembre 2015 et en juillet 2017 :

Comment l’éruption du Pinatubo a modifié la géopolitique en Mer de Chine méridionale // How the eruption of Mt Pinatubo altered geopolitics in the South China Sea

Le 15 juin 1991, le Pinatubo est entré violemment en éruption aux Philippines et a involontairement profondément modifié les données géopolitiques en Mer de Chine méridionale.
En plein sur la trajectoire de l’éruption, à seulement 14,5 km du volcan, se trouvait la Clark Air Base, base aérienne américaine qui était à l’époque la plus peuplée à l’étranger. Également à proximité du Pinatubo, à environ 30 kilomètres de distance, se trouvait la base navale de Subic Bay. Ces deux bases militaires regroupaient une population de plus de 30 000 personnes. Elles avaient permis aux États-Unis d’établir leur pouvoir dans la région. Leur seule présence dissuadait les ennemis potentiels d’une éventuelle agression.
Clark et Subic Bay ont subi des dégâts majeurs au moment de l’éruption du Pinatubo. Le volcan les a recouvert d’une couche de plus de 30 centimètres d’une boue lourde, grise et grasse. Il aurait fallu dépenser plus de 500 millions de dollars pour nettoyer les bases et, de toute façon, elles seraient restées inopérationnelles pendant des années. Fin 1992, les États-Unis ont décidé de les abandonner. C’était sans compter sur la Chine qui, depuis cette date, remplit lentement le vide stratégique laissé par ce retrait américain en Mer de Chine méridionale.
L’éruption n’a pas été le seul facteur à avoir entraîné la disparition des bases américaines. Il y a eu aussi l’échec des efforts des États-Unis pour mettre fin au nationalisme croissant chez les politiciens philippins. En effet, avec l’effondrement de l’URSS en 1991, on a assisté à une recrudescence des sentiments nationalistes aux Philippines et à un désir de plus en plus grand de voir disparaître les bases américaines. Ce changement d’attitude a conduit à l’expulsion des Américains de Subic Bay environ un an après leur déménagement de la Base de Clark, malgré l’espoir de certains responsables militaires de voir la base remise en état et de nouveau opérationnelle.
Pour la Chine, l’éruption du Pinatubo d’une part et la fermeture des bases américaines d’autre part ont été l’occasion de satisfaire des ambitions en Mer de Chine méridionale. En adoptant une politique qui se poursuit jusqu’à ce jour, la Chine a procédé par petites étapes pour obtenir une bonne position stratégique dans cette mer. En février 1992, la Chine a annoncé qu’elle considérait que la plus grande partie de la Mer de Chine méridionale lui appartenait, en s’appuyant sur sa «Loi sur les eaux territoriales et leurs zones contiguës». Peu de temps après, la Chine a commencé à construire des installations militaires sur le récif Mischief dans les Iles Spratleys, un archipel de petites îles coralliennes à quelque 250 km des côtes philippines. En janvier 1995, les pêcheurs philippins de la région ont été surpris d’observer un ensemble de structures et de plateformes dans les eaux peu profondes à l’arrière des récifs. Ils ont été encore plus surpris lorsque les forces chinoises les ont accusés d’intrusion dans les eaux chinoises, même si les îles se situaient bien dans la zone économique exclusive des Philippines.
La Chine a poursuivi sa stratégie « des petits pas », ne s’octroyant jamais une portion de territoire suffisamment grande pour provoquer une réaction de ses voisins ou des États-Unis. Il y a eu néanmoins un certain nombre de conflits locaux. Par exemple, en 2012, la Chine a mis la main sur le Récif de Scarborough, à seulement 200 km de Subic Bay, après un face à face avec les forces philippines. Quelque temps après, Rodrigo Duterte est devenu président des Philippines et a adopté une politique conciliatrice avec la Chine. Il était très intéressé par le financement que Beijing lui avait proposé pour de grands projets d’infrastructures dans son pays, même si certains craignent que les Philippines s’endettent fortement à cause de ces projets.
Les Chinois jouent la montre en Mer de Chine méridionale. Ils savent que les conflits locaux ne durent jamais, que l’attention des médias s’épuisera elle aussi et qu’il faut continuer à s’implanter quand une ouverture se présente…
Source: Quartz.

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On June 15th, 1991, Mount Pinatubo erupted violently in the Philippines and became an unlikely actor that profoundly shaped today’s South China Sea power contest.

Right in the line of fire of the volcanic eruption, just 14.5 km away, was Clark Air Base, then the most populated overseas US military installation in the world. Also nearby, about 30 kilometres distant, was the Subic Bay Naval Base. Together, these military bases, with a combined population exceeding 30,000, had allowed the US to project power in the region. Just by their presence, they made would-be enemies think twice before getting too aggressive.

Both bases suffered major damage from the eruption. They were covered in 30 centimetres and more of heavy, gray, and greasy mud. It would have taken over 500 million dollars to clean up the bases, and they would have been inoperable for years. By the end of 1992, the US abandoned them. Ever since, China has slowly been filling the power vacuum that withdrawal created in the South China Sea.

The eruption was not the only thing working against the bases. So were US efforts to cut spending and rising nationalism among Philippine politicians. Indeed, with the collapse of the USSR in 1991, there was an upsurge of nationalist sentiments, with leading legislators calling for an end to American bases in the Philippines. Such sentiments led to the Americans being kicked off Subic about a year after they left Clark, despite some US hopes that Subic might be spruced up and reoccupied.

For Beijing, the eruption and US base closings were good news for its South China Sea ambitions. In a behaviour pattern that has continued until this day, China began taking small, incremental steps to gain a better strategic position in the waterway. In February 1992, Beijing announced that it considered most of the South China Sea its own territory, putting forth its “Law on the Territorial Waters and Their Contiguous Areas.” Soon after it began to build military facilities atop Mischief Reef, a formation of reefs in the Spratlys some 250 km from a Philippine coast. In January 1995, local Philippine fishermen were surprised to come across huts and platforms arising from the shallows behind the reefs. They were even more surprised when Chinese forces apprehended them on charges of trespassing—even though they were well within the exclusive economic zone of the Philippines.

China has continued with its “salami slicing” strategy, never cutting off a piece big enough to provoke a reaction from its neighbours or the US. There have, though, been occasional flareups. For instance, in 2012 China took over Scarborough Shoal, just 200 km from Subic Bay, after a standoff with Philippine forces.  Some time later, Rodrigo Duterte became president of the Philippines and adopted a conciliatory policy with China. He was more interested in the financing Beijing had offered for big infrastructure projects, though some fear it will lead the Philippines into a debt trap.

Beijing is playing the long game in the South China Sea. It knows that flareups die down, that media attention is unlikely to blow away upon the sea breeze, and that you have to be ready to push forward when an unforeseen opening presents itself.

Source: Quartz.

Vue de l’éruption du Pinatubo (Source: Wikipedia)

Mer de Chine méridionale (Source: Wikipedia)