Le 25 juillet 2020 a marqué le premier anniversaire du petit lac qui est apparu ce même jour de 2019 au fond du cratère de l’Halema’uma’u, au sommet du Kilauea. Au cours des douze derniers mois, l’Observatoire des Volcans d’Hawaii (HVO) a scruté cette surprenante étendue d’eau qui, après avoir été une petite mare est devenue un petit étang puis un véritable lac, le premier observé dans la caldeira du Kilauea depuis au moins 200 ans.
Le HVO observe et analyse attentivement ce lac en utilisant plusieurs méthodes. Des caméras classiques et thermiques suivent l’évolution de la couleur et de la température à la surface du lac. La couleur est changeante et la température de surface se situe généralement entre 70°C et 85°C. Les mesures effectuées au télémètre laser permettent de suivre l’évolution du niveau du lac qui s’élève régulièrement d’environ 75 centimètres chaque semaine. De plus, deux missions d’échantillonnage de l’eau ont été effectuées à l’aide d’un drone.
On observe de nombreux lacs de cratère sur les volcans de la planète, mais très peu d’entre eux se trouvent sur des volcans basaltiques comme le Kilauea. Le cratère de l’Halema’uma’u, qui s’est effondré lors de l’éruption de 2018, est si profond (environ 500 m) que le plancher se trouve en dessous de la nappe phréatique. En tant que tel, il offre au HVO une fenêtre unique sur une partie du volcan normalement invisible.
Les eaux souterraines n’ont pas rempli tout de suite le cratère de l’Halema’uma’u. C’est normal car il faut du temps pour que l’eau pénètre lentement à travers les pores et les fissures de la roche environnante, et aussi parce que la chaleur du volcan peut faire s’évaporer les eaux souterraines comme elle le fait avec les eaux de surface. Avec le temps, les eaux souterraines ont réussi à se frayer un chemin et le sous-sol s’est refroidi suffisamment pour que l’eau puisse rester à l’état liquide. De la sorte, l’eau peut maintenant s’infiltrer dans le cratère qui continuera à se remplir jusqu’à ce qu’un point d’équilibre soit atteint.
Pendant les premiers mois, l’origine de cette eau est restée un mystère. Les scientifiques du HVO ne savaient pas si elle provenait des eaux souterraines, elles-mêmes alimentées par les précipitations, ou si elle provenait de la condensation de la vapeur d’eau émise par le magma. La réponse a été apportée par les missions d’échantillonnage à l’aide du drone. L’analyse des isotopes a indiqué que l’eau était d’origine météorique, et provenait donc des précipitations. Alors qu’une petite quantité de pluie tombe directement dans le cratère de l’Halema’uma’u, la majeure partie de l’eau provient des eaux souterraines (des précipitations qui ont percolé à travers le sol) qui s’infiltrent jusqu’au niveau où la nappe phréatique rencontre le cratère.
Avec le temps, les minéraux et les gaz volcaniques se dissolvent dans l’eau et la chimie du lac évolue. Au début, lorsque le lac s’est formé, l’eau était de couleur bleu-vert clair, une couleur que l’on peut encore voir dans certaines zones du lac où l’apport d’eau est le plus important. La surface du lac montre aujourd’hui surtout des nuances d’orange et de marron, probablement en raison des minéraux sulfatés dissous qui sont riches en fer. L’eau n’est pas brassée uniformément et des poches de couleurs, de chimie et de température différentes circulent à l’intérieur du lac.
En plus d’être rare en raison de son existence même, ce lac montre la particularité d’avoir une faible acidité, avec un pH d’environ 4,0, tandis que la plupart des lacs volcaniques sont soit fortement acides (comme le Kawah Ijen en Indonésie, dont le pH est voisin de 0), soit fortement alcalins. A titre de comparaison, le jus d’orange est également légèrement acide avec un pH de 3,5. Il se peut que l’acidité de l’eau soit modérée à ce stade précoce du développement du lac et qu’elle augmentera par la suite.
Au bout d’une année d’existence, le lac couvre désormais une superficie de plus de 2,5 hectares et atteint une profondeur de plus de 40 m.
Source: USGS / HVO.
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July 25th, 2020 was the first anniversary of the water pond that appeared on that same day of 2019 at the bottom of Halema‘uma‘u at the summit of Kilauea Volcano. Over the past twelve months, the Hawaiian Volcano Observatory (HVO) has watched this surprising body of water grow from a tiny pond into a real lake, the first ever observed within the Kilauea caldera in at least 200 years.
HVO closely monitors the lake using a variety of methods. Visual and thermal cameras track the lake’s surface colour and temperature. Colour is variable and the lake surface temperature is hot, usually between 70°C and 85°C. Laser rangefinder measurements track the surface level, which has risen steadily by about 75 centimetres each week. Moreover, two water-sampling missions have been flown using unoccupied aircraft systems.
Crater lakes occur at volcanoes around the world, but very few of those crater lakes occur at basaltic volcanoes like Kilauea. Halema‘uma‘u, which collapsed and deepened during Kilauea’s 2018 eruption, is so deep (about 500 m) that the bottom is actually below the local water table, providing HVO with a unique window into a realm that is normally hidden from direct view.
Groundwater did not rush in and fill the crater immediately because it takes time for water to squeeze through the pores and cracks of the surrounding rock, and because volcanic heat can evaporate groundwater just as it does surface water. With time, the surrounding groundwater slowly squeezed through the voids, and the subsurface cooled enough for water to be able to remain in liquid form and accumulate within this newly exposed subaerial space. Water will continue to flow into the crater, and the lake will continue to get deeper until a point of equilibrium is reached.
For the first few months, the source of the water was not known. HVO scientists did not know whether it came from groundwater, in turn, fed by rainfall, orif it came from the condensation of water vapour released directly from magma. Thee answer was brought by the water sampling missions. Analysis of the isotopes in the water indicated that it was meteoric in origin, meaning that it originally came from rainfall. While a small amount of rain falls directly into the crater, most of the water is coming from groundwater (that started off as rainfall that percolated into the ground) seeping in where the water table intersects the crater.
With time, minerals and volcanic gases dissolve into the water and the lake’s chemistry changes. When the lake first formed it was light blue-green in colour, a colour that is still seen in parts of the lake where there is a higher influx. The surface water is mostly shades of orange and brown now, likely due to dissolved iron-rich sulfate minerals. The water within the lake is not uniformly mixed, and cells of water with different colours, chemistry and temperature are seen to circulate.
Besides being uncommon because of its very existence, this lake is unique in that it is only mildly acidic, with a pH of about 4.0, while most volcanic lakes are either strongly acidic or strongly alkaline. For reference, orange juice is also mildly acidic with a pH of 3.5. The water’s acidity is likely to be moderated at this early stage of development, and it may become more acidic in the future.
Following a year of steady growth, the lake now covers an area of more than 2.5 hectares and reaches a depth of more than 40 m.
Source: USGS / HVO.

Graphique montrant l’évolution du niveau de l’eau dans le lac au cours de l’année écoulée. Les mesures par télémètre laser ont été effectuées 2 à 3 fois par semaine. Les photos permettent de comparer le lac entre le 27 août 2019, alors qu’il avait une profondeur d’environ 7 mètres, et le 7 juillet 2020, jour où il présentait une profondeur d’environ 40 mètres. (Source: USGS).