L’éruption de White Island (2019) au cinéma // A movie after the 2019 White Island eruption

Le 9 décembre 2019, une explosion soudaine s’est produite à White Island (Nouvelle-Zélande). Elle a tué 21 personnes et blessé 26 autres. Parmi les 47 victimes, il y avait 24 Australiens, 9 Américains, 5 Néo-Zélandais, 4 Allemands, 2 Chinois, 2 Britanniques et un Malaisien. La plupart de ces touristes ne portaient que des T-shirts et des shorts. 38 étaient des passagers d’un navire de croisière – l’Ovation of the Seas – qui effectuait un voyage de 12 jours autour de la Nouvelle-Zélande. Ils avaient acheté l’excursion sur White Island auprès d’une agence de voyage néo-zélandaise. J’ai décrit l’événement et ses conséquences dans plusieurs notes de ce blog. Dans les jours et semaines qui ont suivi la catastrophe, il s’est agi de trouver qui était responsable de la sécurité des touristes et de savoir si des manquements étaient constatés, bref, qui pouvait être tenu pour responsable du drame.
Un film intitulé « The Volcano : Rescue From Whakaari » vient de sortir. Il a été réalisé par Rory Kennedy. Pour autant que je sache, il ne peut être vu que sur Netflix. On peut lire qu’il s’agit d’« un récit précis de l’éruption volcanique de Whakaari / White Island. […] Le film raconte viscéralement une journée où des gens ordinaires ont été appelés à faire des choses extraordinaires, tout en plaçant cet événement tragique dans le contexte plus large de la nature, de la résilience et du pouvoir de notre humanité commune. »
À en juger par la bande-annonce, il s’agit d’un film catastrophe américain typique qui s’appuie sur des événements réels. J’ai décrit avec détail ce qui s’est passé sur l’île que j’ai moi-même visitée en janvier 2009.

Au final, la tragédie a montré qu’on ne sait pas prévoir les éruptions volcaniques, encore moins sur ce type de volcans explosifs de la Ceinture de Feu du Pacifique. Je pense que tenir les volcanologues néo-zélandais responsables de la mort de ces personnes serait un non-sens. De la même manière, le navire de croisière et l’agence de voyage doivent-ils être tenus responsables? Je ne le pense pas. Le niveau d’alerte volcanique n’était pas particulièrement élevé et aucune éruption n’était envisagée par les agences volcanologiques néo-zélandaises. La suite se résume à une bataille d’avocats et une question d’argent. Il était clair que les participants blessés et ceux – ou leurs familles – qui avaient perdu un être cher voulaient des compensations financières.
Voici la bande-annonce du film:
https://youtu.be/hnxGV9RQutE

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On Dcember 9th, 2019, a sudden explosion occurred at White Island (New Zealand). It killed 21 people and injuring 26 others. The 47 people were identified as twenty-four Australians, nine Americans, five New Zealanders, four Germans, two Chinese, two Britons and one Malaysian. Many of them were just wearing T-shirts and shorts for the day. Of these people, 38 were passengers on a shore excursion from the cruise ship Ovation of the Seas which was on a 12-day voyage around New Zealand. I described the event and its consequences in several posts on this blog. Questions were asked about who was responsible for the safety of tourists and, if failings are found, who would be held accountable

A film entitled “The Volcano: Rescue From Whakaari” has just been released. It was directed by Rory Kennedy. As far as I know it can only be seen on Netflix. It is supposed to be « a close examination of the Whakaari / White Island volcanic eruption. […] The film viscerally recounts a day when ordinary people were called upon to do extraordinary things, placing this tragic event within the larger context of nature, resilience, and the power of our shared humanity. »

Judging from the trailer, it is a typical American disaster movie based on real events. I carefully described what happened on this island I personally visited in January 2009. In the end, the tragedy showed that we cannot predict eruptions, even less on this type of explosive volcanoes of the Pacific Ring of Fire. I think that holding NZ volcanologists responsible for these people’s deaths would be a nonsense. In the same way, should the cruise ship and the travel agency be held resposible ? I don’t think so. The alert level for the volcano was not very high and no eruption was predicted by the NZ volcanological agencies. The rest was just battle of lawyers and a matter of money. It was clear to me that the participants who were injured and those – or their families – who lost a dear person wanted financial compensations.

Here is the trailer :

https://youtu.be/hnxGV9RQutE

White Island avant et après l’éruption (Photos: C. Grandpey, GeoNet)

Eruption de White Island (Nouvelle Zélande) : GNS Science devant la justice ! // White Island eruption : GNS Science in court !

En 2019, une soudaine éruption explosive à White Island (Nouvelle-Zélande) a causé la mort de 22 touristes qui visitaient le volcan et en a blessé 25 autres. Aujourd’hui, GNS Science est poursuivie en justice et est accusée de ne pas avoir prédit l’événement. L’agence de recherche scientifique néo-zélandaise plaide non coupable.
Les agences scientifiques ont rarement fait l’objet d’accusations criminelles à la suite de catastrophes naturelles. Certains scientifiques craignent qu’une plainte contre une telle agence à propos des informations qu’elle diffuse ait un effet paralysant sur la capacité des organisations scientifiques à fournir des conseils pour gérer les risques naturels. D’autres scientifiques pensent que l’issue du procès pourrait clarifier le rôle et la responsabilité de GNS Science et de ses coaccusés pour assurer la sécurité des habitants et les informer des dangers potentiels. Un avocat néo-zélandais a déclaré : « L’une des questions que soulève cette affaire est de savoir jusqu’où une organisation scientifique doit aller pour présenter des informations d’une manière accessible au public, et comment évaluer si elle l’a fait correctement. »
Selon un vulcanologue australien, la tragédie de 2019 était « une catastrophe inévitable ». Il signale qu’une éruption semblable s’était produite en avril 2016, mais de nuit, alors que personne n’était présent dans le cratère.
En novembre 2020, WorkSafe New Zealand, organisme qui régit et réglemente la santé et la sécurité au travail en NZ, a porté deux accusations contre GNS Science. Elles couvrent une période allant d’avril 2016 à décembre 2019 et les deux dernières éruptions. Chacune de ces accusations est passible d’une amende pouvant aller jusqu’à 1,5 million de dollars néo-zélandais (1 million de dollars américains).
C’est la première fois qu’une agence scientifique est inculpée en vertu de la loi néo-zélandaise de 2015 sur la santé et la sécurité au travail. Cette loi s’applique en général aux lieux de travail tels que les usines. Les responsables de WorkSafe New Zealand expliquent que même si l’éruption a été soudaine, elle n’était pas imprévisible. Toute organisation ou personne impliquée dans l’envoi de personnes sur l’île avait le devoir de protéger les personnes dont elle avait la charge.
Les co-accusés dans cette affaire comprennent sept voyagistes et la NEMA (National Emergency Management Agency) qui gère les situations d’urgence en NZ. La première accusation allègue que GNS Science n’a pas assuré la sécurité des pilotes d’hélicoptère embauchés pour conduire son personnel sur l’île. La seconde accusation allègue que GNS Science aurait dû consulter et collaborer avec d’autres agences et voyagistes, et examiner et « analyser le contenu et la diffusion de ses bulletins d’alerte volcanique » pour s’assurer qu’ils « informent réellement sur les conséquences de l’activité volcanique ».
GNS Science publie via le service GeoNet des bulletins d’alerte volcanique pour les 11 volcans actifs de Nouvelle-Zélande et le champ volcanique qui sommeille sous la ville d’ Auckland. GeoNet diffuse ces bulletins auprès des médias et de la NEMA, mais aussi du public. Les bulletins contiennent des observations sur l’activité volcanique et incluent le niveau d’alerte volcanique qui comprend une échelle de 0 à 5.
Le public pense souvent, à tort, que le niveau d’alerte volcanique fournit une prévision éruptive, mais ce n’est pas le cas en Nouvelle-Zélande. Il fournit uniquement une indication sur la situation volcanique à un moment donné. Il n’indique pas de risque futur. On ne sait pas actuellement à qui incombe la responsabilité d’évaluer les risques associés aux visites et aux travaux effectués sur White Island. Ce point va être éclairci devant les tribunaux.
Si GNS Science devait être déclaré coupable, cela pourrait conduire d’autres agences scientifiques qui fournissent des informations sur les risques naturels, tels que les séismes, les inondations et les incendies de forêt, à se demander quelles informations elles peuvent fournir sans être traînées devant la justice, et comment les communiquer.
Ce qui se passe en ce moment en NZ rappelle la situation en Italie à la suite du séisme de L’Aquila qui a fait 309 morts en 2009. Six scientifiques ont été reconnus coupables d’homicide involontaire avant d’être acquittés en appel. L’affaire a conduit la communauté géoscientifique internationale à réfléchir sur la meilleure façon de communiquer les risques au public.
Au Japon, contrairement aux États-Unis, en Nouvelle-Zélande ou en Italie, la Japan Meteorological Agency (JMA) émet des alertes volcaniques qui lient explicitement l’alerte à des niveaux de danger bien précis. Les alertes comprennent également des mesures, telles que l’évacuation, que la population doit respecter.
En Italie, suite à l’affaire de L’Aquila, les rôles et les responsabilités des scientifiques et de la Protection Civile en matière de gestion et communication des risques sont désormais clairement définis.
Les visites de White Island sont suspendues depuis l’éruption de 2019, et il y a un débat sur leur reprise.
Source : Nature.

NB: Comme je l’ai expliqué dans des notes précédentes (voir en particulier celles du 14 juin et du 3 décembre 2020) , l’affaire de White Island est aussi une affaire de gros sous. Les familles des personnes disparues pendant la catastrophes ainsi que les personnes blessées ont attaqué en justice les différents protagonistes.

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In 2019, a sudden explosive eruption of White Island (New Zealand) caused the deaths of 22 tourists who were visiting the volcano and injured 25 others.Today, GNS Science is going to court and is accused of not having predicting the event. The science research agency has pleaded not guilty to the criminal charges laid in the wake of the eruption.

Science agencies have rarely faced criminal charges following natural disasters. Some experts fear that pressing charges against a science agency in relation to the information it releases could have a chilling effect on the ability of scientific organizations to provide advice used to manage natural hazards. Others say that the trial’s outcome might clarify the roles and responsibilities of GNS Science and its co-defendants in keeping people on the island safe and informed of potential dangers. A NZ lawyer said : “One of the questions this case raises is how far a scientific organization has to go in terms of presenting information in a manner that is accessible to the public, and how you would assess if they have done so.”

According to an Australian volcanologist, the 2019 tragedy was “a disaster waiting to happen”. He points to an eruption in April 2016 that was comparable in size, but happened to occur at night, when no one was present.

In November 2020, the country’s workplace health and safety regulator, WorkSafe New Zealand, laid two charges against GNS Science. They cover a period from April 2016 until December 2019, spanning both recent eruptions. Each carries a penalty of a fine of up to NZ$1.5 million (US$1 million).

This is the first time a scientific agency has been charged under New Zealand’s Health and Safety at Work Act of 2015, which is usually applied in workplaces such as factories. WorkSafe New Zealand officials explain that although the eruption was unexpected, it was not unforeseeable, and any organization or individual involved in getting people to the island had a duty to protect those under their care.

Co-defendants in the case include seven tour operators and the National Emergency Management Agency (NEMA). The first charge alleges that GNS Science failed to ensure the health and safety of helicopter pilots it hired to take its employees to the island. The second alleges that GNS Science should have consulted and coordinated with other agencies and tour operators, and reviewed “the structure, content and delivery of its volcanic alert bulletins” to ensure that they “effectively communicated the implications of volcanic activity”.

GNS Science issues volcanic alert bulletins for New Zealand’s 11 active volcanoes and the volcanic field that sits beneath Auckland, through a service called GeoNet, which disseminates them to registered media and emergency-response agencies and to the public. The bulletins contain observations about volcanic activity and include the volcanic alert level which includes a scale from 0 to 5.

One common public misconception is that volcanic alert level systems provide a forecast, but that’s not the case in New Zealand. They are simply a measure of what’s going on with a volcano at the time. New Zealand’s volcanic alert level system does not indicate future risk, and it is currently unclear where the responsibility lies for assessing risks associated with visiting or working on White Island. This point is going to get tested in court.

A guilty verdict for GNS Science could leave other scientific agencies that provide information about natural hazards, such as earthquakes, floods and wildfires, questioning what information they can provide without incurring liability, and how to communicate it.

The current case brings to mind what happened in Italy following the 2009 L’Aquila earthquake which killed 309 people. Six scientists and one government official were initially convicted of manslaughter. The scientists’ convictions were overturned on appeal, but the case led to a reckoning in the international geoscience community over how best to communicate risk to the public.

In Japan — unlike the United States, New Zealand or Italy — the national meteorological agency issues volcanic warnings that explicitly link the alert to specified danger levels. The warnings also include measures, such as evacuation, that residents and others must take.

In Italy, the upshot of the L’Aquila case was that the roles and responsibilities of scientists and the Department of Civil Protection in regards to managing and communicating risk are now clearly defined, says.

Tours of White Island have been suspended since the 2019 eruption, and there is debate about whether they should resume.

Source : Nature.

NB: As I explained in previous posts (see in particular those of June 14th and December 3rd, 2020), the White Island case is also a matter of big money. The families of people who died during the disaster as well as those injured took legal action against the various protagonists.

Photo: C. Grandpey

Une sordide affaire de fric // A sordid matter of money

J’ai expliqué dans plusieurs notes que WorkSafe – le principal organisme de réglementation de la santé et de la sécurité au travail en Nouvelle-Zélande – a engagé des poursuites contre 13 parties suite à l’éruption de White Island en 2019. Royal Caribbean, la plus grande compagnie de croisières au monde, fait partie des parties tenues pour responsables de la mort de 22 touristes et des blessures graves de 25 autres visiteurs de l’île. En effet, la plupart des victimes voyageaient à bord du navire de croisière Ovation of the Seas qui appartient à la compagnie.

Aujourd’hui, Royal Caribbean tente d’empêcher les victimes de l’éruption d’engager des poursuites en justice aux États-Unis. Les familles américaines et australiennes qui ont perdu de leurs membres à cause de l’éruption ont intenté des procès contre Royal Caribbean, affirmant que la compagnie n’avait pas correctement expliqué les dangers de la visite de White Island. Leurs avocats affirment que la Royal Caribbean aurait dû savoir que le volcan pouvait entrer en éruption avant de permettre à ses passagers de visiter White Island. Ces mêmes avocats expliquent «qu’un certain nombre d’organisations géologiques et scientifiques avaient alerté sur l’activité volcanique sur l’île. […] En conséquence, la Royal Caribbean savait ou aurait dû savoir que le volcan était dangereux, mais a quand même vendu des billets pour l’excursion d’une journée afin de réaliser le maximum de profit.» Les avocats ont ajouté que leurs clients souffraient de «détresse émotionnelle grave, d’angoisse mentale, de douleur physique, de perte de jouissance de la vie, de stress post-traumatique et d’autres troubles mentaux».

Faisant fi de ces déclarations, la Royal Caribbean Cruises a demandé la semaine dernière à la Cour fédérale australienne de bloquer les poursuites. Entre autres arguments, la société a affirmé que les procédures relèvent uniquement des tribunaux locaux de Nouvelle-Galles du Sud en vertu d’une clause figurant dans les billets de croisière. L’avocat australien a déclaré que la famille «n’avait pas reçu de contrat précisant le lieu  où les poursuites devaient être engagées».

À suivre.

Source: The Telegraph, The New Zealand Herald.

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 I have explained in several posts that WorkSafe – New Zealand’s primary work health and safety regulator – has filed charges against 13 parties following the eruption on White Island in 2019. Royal Caribbean, the world’s largest cruise company, is among the parties held responsible for the deaths of 22 tourists and the severe injuries of 25 other visitors of the island. Indeed, most of the victims were travelling on board the company’scruise ship Ovation of the Seas

Today, Royal Caribbean is trying to prevent victims of the eruption from suing in the US.

US and Australian families who lost members because of the eruption, filed separate lawsuits against Royal Caribbean claiming that the cruise line did not properly explain the dangers of visiting White Island. Their lawyers explained that Royal Caribbean should have known that the volcano could erupt before allowing its passengers to visit White Island. They said “there were a number of geological and scientific organisations that were ringing alarm bells about volcanic activity on the island. […] Royal Caribbean either knew or ought to have known that the volcano was dangerous but went ahead and sold tickets to the day trip anyway in order to maximise its profit.” The lawyers also alleged that their clients suffered “severe emotional distress, mental anguish, physical pain, loss of enjoyment of life, post-traumatic stress and other mental disorders.”

However, the Royal Caribbean Cruises last week applied to the Australian Federal Court to seek a ruling to block the lawsuits concerning the Australian victims. Among other arguments, the company claimed that proceedings can only be heard in local New South Wales courts due to a clause in their cruise ticket contract. The Australian lawyer said the family « didn’t get a contract that said anything about where suits should be litigated ».

To be continued.

Source: The Telegraph, The New Zealand Herald.

Photo : C. Grandpey

L’Everest et le réchauffement climatique // Mt Everest and global warming

Comme je l’ai écrit dans des notes précédentes, bien qu’étant la plus haute montagne du monde, l’Everest (8 848,86 m) subit lui aussi les effets du changement climatique. Les glaciers fondent et rendent les cadavres d’alpinistes qui ont été pris dans des avalanches ou sont tombés dans de profondes crevasses. Une récente mission scientifique a révélé que la situation est encore plus inquiétante que prévu.

Selon deux nouvelles études publiées en novembre 2020 dans iScience et One Earth, la pression atmosphérique près du sommet de l’Everest tend à augmenter, avec plus d’oxygène pour pouvoir respirer, tandis les glaciers fondent à une vitesse encore jamais observée et laissent échapper de plus en plus d’eau de fonte. En conséquence, ces changements auront un impact sur les alpinistes qui escaladent la montagne et les populations locales dans les vallées himalayennes.

Pour obtenir plus d’informations sur l’Everest, une expédition a été organisée en 2019. Elle regroupait 34 scientifiques dont la mission était de collecter des données glaciologiques et météorologiques en installant les stations météorologiques les plus hautes du monde.

Dans une étude publiée dans iScience, l’équipe scientifique explique que la pression atmosphérique sur l’Everest fluctue depuis les années 1970. Jusqu’à présent, seule une poignée d’alpinistes a réussi à gravir l’Everest sans avoir recours à des bouteilles d’oxygène. Mais cela pourrait changer dans les prochaines années car le changement climatique provoque une plus grande densité de l’air, avec davantage d’oxygène disponible à très haute altitude. Les scientifiques expliquent que lorsque la température augmente, les molécules se déplacent plus rapidement. Lorsqu’elles commencent à entrer en collision, la pression augmente. Une hausse de la pression signifie plus de molécules, avec davantage d’oxygène disponible pour pouvoir respirer.

Pour analyser les changements atmosphériques, les chercheurs ont collecté des données fournies par les stations météorologiques qu’ils ont installées lors de l’expédition sur l’Everest en 2019. Ils ont couplé les dernières données fournies par les stations aux analyses fournies par le Centre européen de prévisions météorologiques à moyen terme. Ainsi, ils ont pu reconstituer le climat de l’Everest de 1979 à 2020. Les scientifiques ont ensuite utilisé les données climatiques pour modéliser l’évolution de l’atmosphère autour de l’Everest au fil du temps et voir comment elle continuera à changer avec le réchauffement de la planète. Les modèles montrent que si les températures globales augmentent de 2 degrés Celsius au-dessus des niveaux préindustriels – une situation probable dès 2050 – la disponibilité en oxygène sur l’Everest augmentera de 5%. Cela suffit à faire la différence entre la vie et la mort pour un alpiniste qui escalade les dernières pentes de la montagne.

L’équipe scientifique a été surprise de constater avec quelle vitesse la pression atmosphérique pouvait varier sur l’Everest. Un jour, l’air au sommet peut être respirable sans apport d’oxygène supplémentaire; quelques jours plus tard, la pression atmosphérique peut plonger de façon spectaculaire, rendant la montagne impossible à gravir.

Si les changements atmosphériques sur l’Everest ne sont pas visibles à l’œil nu, l’impact du changement climatique sur les glaciers est impressionnant. Les sommets qui montraient une belle blancheur avec la neige et la glace sont maintenant tous noirs. En outre, les inondations causées par la fonte des glaciers – rares dans le passé – se produisent désormais plus fréquemment et sont imprévisibles.

L’étude publiée en novembre 2020 dans One Earth explique que les glaciers ont beaucoup reculé depuis les années 1960, parfois de 150 mètres dans certaines régions. Les scientifiques de la dernière expédition ont étudié 79 glaciers, dont le glacier de Khumbu, le plus haut glacier du monde. Ils ont constaté qu’entre 2009 et 2018, les glaciers ont reculé presque deux fois plus vite que dans les années 1960. Certaines observations révèlent qu’ils ont parfois perdu la moitié de leur épaisseur depuis les années 1960.

La fonte des glaciers himalayens est provoquée par une augmentation d’un degré Celsius de la température moyenne de 2000 à 2016, par rapport à la moyenne entre 1975 et 2000. Bien que la hausse des températures soit la principale cause du recul et de l’amincissement des glaciers himalayens, d’autres facteurs majeurs doivent être pris en compte. Au fur et à mesure que les glaciers reculent, ils laissent souvent derrière eux des débris rocheux et mettent à nu leur encaissant. Les roches ainsi exposées absorbent plus de rayonnement solaire, ce qui fait fondre la glace à proximité. L’eau de fonte s’infiltre ensuite dans les orifices creusés par le recul des glaciers, ce qui donne naissance à de petits étangs En fin de compte, ces petits étangs se regroupent et forment de vastes lacs glaciaires. C’est ainsi que plus de 400 nouveaux lacs se sont formés entre 1990 et 2015. Comme je l’ai déjà écrit, ces lacs sont parfois maintenus en place par des moraines fragiles qui peuvent s’éventrer et déclencher des inondations dévastatrices.

En plus des 18 communautés qui vivent au pied de l’Everest, près de deux milliards de personnes dépendent de la chaîne himalayenne pour leur approvisionnement en eau. La fonte accélérée des glaciers met en péril cette source en eau et menace la vie et les moyens de subsistance de près d’un cinquième de la population mondiale. Bien qu’une fonte plus rapide des glaciers puisse signifier plus d’eau, cela ne sera que temporaire.

Source: Smithsonian Magazine.

L’étude n’en parle pas, mais il est bien évident que si le sommet de l’Everest est accessible sans apport d’oxygène supplémentaire dans les prochaines années, de plus en plus d’expéditions auront envie d’atteindre le toit du monde, avec la pollution que cela suppose. J’ai déjà attiré l’attention sur les tonnes de détritus que les sherpas redescendent dans les vallées chaque année…

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As I put it in previous posts, although being the highest mountain in the world, Mt Everest (8,848.86 m) undergoes the effects of climate change. The glaciers are melting and giving back the corpses of climbers who were caught in avalanches or fell into deep crevices. However, a recent scientific mission has revealed that the situation is more worrisome than predicted.

According to two new studies published in November 2020 in iScience and One Earth, the air pressure near Everest’s summit is rising, making more oxygen available to breathe, and glaciers are melting at unprecedented rates, leading to more meltwater. As a consequence, the changes will impact climbers scaling the mountain and local people who live in the Himalayan valleys.

To learn more about Mt Everest, an expedition was set up in 2019. It included 34 scientists whose mission was to collect glaciological and meteorological data by installing the highest weather stations in the world.

In a study published in iScience, the scientific team documented how the atmospheric pressure on Everest has fluctuated since the 1970s. Up to now, only a handful of mountaineers managed to climb the mountain without supplemental oxygen. But that may get easier in the future as climate change is causing the air to slowly thicken, which means more oxygen is available at higher altitudes. The scientists explain that when temperature rises, molecules move faster. When they start to collide with each other, pressure increases. More pressure means more molecules, making more oxygen available to breathe.

To analyze the changes in the atmosphere, the researchers collected data provided by the weather stations they installed on the Everest expedition in 2019. They coupled their latest data with analyses provided by the European Centre for Medium Range Weather Forecasting. Thus, they were able to reconstruct what the climate was like on Everest from 1979 to 2020.

The scientists then used the climate data to model how the atmosphere around Everest has changed over time and how it will continue to change as the planet warms. Their models suggest that if global temperatures increase by 2 degrees Celsius above pre-industrial levels – a situation likely as early as 2050 – the maximum rate of oxygen consumption on Everest will increase by 5 percent. This is enough to make a difference between life and death for a mountaineer climbing Mt Everest’s last hundreds of metres.

The scientific team was surprised when they saw haw fast the atmospheric pressure can vary on Everest. In the same way, the climate can vary remarkably within a span of a few days. On one day, the air at the summit can feel breathable without supplemental oxygen; a few days later, the atmospheric pressure can plunge dramatically, making the mountain impossible to climb.

If atmospheric changes on Everest are not visible to the naked eye, the impact of climate change on glaciers is impressive. Summits that used to look white with the snow and the ice are now all black. Besides, the floods caused by melting glaciers – which were rare in the past – are now happening more frequent and are unpredictable.

The study published in November 2020 in One Earth explains that glaciers have thinned dramatically since the 1960s, in some areas by as much as 150 metres. The scientists in the last expedition studied 79 glaciers, including the Khumbu Glacier, the highest glacier in the world. They found that between 2009 and 2018, glaciers thinned at nearly twice the rate that they did in the 1960s. Some estimates suggest that a few glaciers have areas that have lost half of their thickness since the 1960s.

The melting of Himalayan glaciers is caused by a one degree Celsius increase in average temperature from 2000 to 2016, compared with the average between 1975 and 2000.

Although rising temperatures are the primary drivers of glacier thinning, other major factors are at play. As the glaciers retreat, they often leave behind them rocky debris and expose bare cliffs on the mountainsides. The exposed rocks absorb more radiation from the sun, melting the adjacent ice. The melted water then seeps into the troughs created by the retreating glaciers, creating small ponds. The ponds melt the surrounding ice, and more water fills the ponds. Ultimately, clusters of ponds join up and form huge glacial lakes. As a result, more than 400 new lakes formed between 1990 and 2015. As I put it before, these lakes are sometimes kept in place by fragile moraines that can break open and trigger devastating floods.

In addition to the 18 local communities residing in the Himalayas, nearly two billion people depend on the mountain range for a source of freshwater. As melting accelerates, it puts that once-steady source of water in jeopardy, threatening the lives and livelihoods of nearly a fifth of the world’s population. Although faster melting might mean more water, this will only be temporary.  .

Source : Smithsonian Magazine.

The study does not mention it, but it is quite obvious that if the summit of Everest is accessible without an additional oxygen supply in the coming years, more and more expeditions will want to reach the roof of the world, with the pollution that this implies. I have already drawn attention to the tons of rubbish that Sherpas bring down into the valleys every year …

Vue du sommet de l’Everest (Crédit photo : Wikipedia)

Glaciers himalayens vus depuis l’espace (Source : NASA)