Dernier rapport du GIEC : mesures insuffisantes contre le réchauffement climatique // IPCC’s latest report : insufficient measures to fight global warming

Le Groupe Intergouvernemental d’Experts sur l’Evolution du Climat (GIEC) a publié le 20 mars 2023 la synthèse de son sixième rapport. Sans surprise, il ressort que « les tendances actuelles ne sont pas du tout compatibles avec la stabilisation du réchauffement climatique. […] Des efforts ont été faits, mais ils n’atteignent pas l’échelle suffisante pour une baisse suffisamment rapide des émissions de gaz à effet de serre. « 

Comme je le fais régulièrement, le GIEC rappelle lui aussi que la concentration du CO2 dans l’atmosphère est « la plus élevée depuis au moins 2 millions d’années ». Cela a provoqué un réchauffement de la température moyenne sur Terre de +1,1°C par rapport à la période 1850-1900, ainsi qu’une hausse du niveau de la mer de 20 centimètres entre 1901 et 2018. Il n’est donc pas étonnant que l’on assiste à de plus en plus d’événements météorologiques extrêmes, avec des effets de plus en plus dangereux sur la nature et les populations dans toutes les régions du monde..

Pour faire face à ce réchauffement, les plans d’adaptation et les politiques d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre se sont multipliés dans tous les secteurs et toutes les régions du monde. Toutefois, selon le GIEC, « le rythme et l’ampleur des mesures prises jusqu’à présent, ainsi que les projets actuels, sont insuffisants. » Alors que les émissions de gaz à effet de serre devraient baisser dès maintenant pour maintenir le réchauffement à +1,5°C, elles ont continué d’augmenter.

De nombreux pays ont déclaré leur intention d’atteindre la neutralité carbone au milieu du siècle, mais peu de politiques sont en place actuellement pour tenir cette promesse. Si cette situation devait persister, elle nous ferait franchir la barre des +1,5°C au cours du siècle et nous conduirait vers un réchauffement de 3,2°C en 2100.

Le rapport du GIEC explique que certains effets du réchauffement climatique se manifesteront sur le très long terme. On peut lire que l’élévation du niveau de la mer « est inévitable pendant des siècles, voire des millénaires, en raison de la poursuite du réchauffement des océans profonds et de la fonte des calottes glaciaires, et le niveau de la mer restera élevé pendant des milliers d’années. La hausse pourrait atteindre 2 à 3 mètres dans les 2000 prochaines années si le réchauffement est maintenu en-dessous de 1,5°C, et 2 à 6 mètres pour un réchauffement limité à 2°C. Avec une température moyenne globale à +2°C, « les calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique occidental disparaîtront presque complètement et de manière irréversible sur plusieurs millénaires. »

Le rapport du GIEC fait également état du déséquilibre dans la responsabilité et l’exposition aux conséquences du réchauffement climatique. En effet, ce sont les communautés vulnérables, qui ont historiquement le moins contribué au changement climatique actuel, qui sont touchées de manière disproportionnée. On ne peut que regretter la réticence des Etats industrialisés à accorder des compensations à ces populations (elles représentent 3,3 à 3,6 milliards de personnes) lors des dernières COP.. Le rapport précise qu' »au cours de la dernière décennie, les décès dus aux inondations, aux sécheresses et aux tempêtes ont été 15 fois plus nombreux dans les régions très vulnérables. »

Dans son rapport, le GIEC répète que la décennie en cours est « essentielle » pour lutter contre le réchauffement climatique. Si l’on veut le limiter à +1,5°C, il faudrait avoir réduit de 48% nos émissions de CO2 d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 2019. Sans cela, le réchauffement climatique menacera de plus en plus les écosystèmes, la biodiversité, les moyens de subsistance, la santé et le bien-être des actuelles et futures générations.

Parmi les solutions pour améliorer la situation, le GIEC cite en premier lieu la transition « des énergies fossiles vers des sources non ou peu émettrices en gaz à effet de serre », mettant en avant l’énergie solaire et l’éolien. Il évoque également – entre autres – une transition vers une alimentation plus végétale, la reforestation, mais aussi la mise en place d’outils financiers, comme « supprimer les subventions aux énergies fossiles ».

L’intégralité du rapport (en anglais) peut être lue en cliquant sur ce lien :

https://www.ipcc.ch/

Confirmant le rapport du GIEC, on apprend que la température moyenne sur les 12 premiers jours de mars 2023 a atteint les niveaux les plus élevés sur cette période depuis mars 2016, année où un épisode El Niño exceptionnel avait conduit la température globale à des niveaux record.

On peut d’ores et déjà dire que mars 2023 sera l’un des mois de mars les plus chauds des annales.

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The Intergovernmental Panel on Climate Change (IPCC) published the summary of its sixth report on March 20th, 2023. Unsurprisingly, it emerges that « current trends are not at all compatible with the stabilization of global warming. […] Efforts have been made, but they do not reach the sufficient scale for a sufficiently rapid decline in greenhouse gas emissions.”
As I do regularly, the IPCC also recalls that the concentration of CO2 in the atmosphere is « the highest for at least 2 million years ». This caused an average temperature rise on Earth of +1.1°C compared to the period 1850-1900, as well as a rise in sea level of 20 centimeters between 1901 and 2018. It is therefore not no wonder we are witnessing more and more extreme weather events, with increasingly dangerous effects on nature and people in all parts of the world.
To cope with this warming, adaptation plans and policies for mitigating greenhouse gas emissions have multiplied in all sectors and all regions of the world. However, according to the IPCC, « the pace and scale of action taken so far, as well as current plans, are insufficient. » While greenhouse gas emissions were expected to drop now to keep warming to +1.5°C, they have continued to rise.
Many countries have declared their intention to achieve carbon neutrality by mid-century, but few policies are currently in place to deliver on this promise. If this situation were to persist, it would take us beyond the +1.5°C mark during the century and lead us to a warming of 3.2°C in 2100.
The IPCC report explains that some effects of global warming will be seen in the very long term. Sea level rise « is inevitable for centuries, if not millennia, due to continued warming of deep oceans and melting ice caps, and sea levels will remain high for thousands of years. The rise could reach 2 to 3 meters in the next 2000 years if the warming is kept below 1.5°C, and 2 to 6 meters for a warming limited to 2°C. global average temperature at +2°C, « the ice sheets of Greenland and West Antarctica will disappear almost completely and irreversibly over several millennia. »
The IPCC report also mentions the imbalance in responsibility and exposure to the consequences of global warming. Indeed, it is vulnerable communities, which have historically contributed the least to current climate change, that are disproportionately affected. We can only regret the reluctance of industrialized States to grant compensation to these populations (they represent 3.3 to 3.6 billion people) during the last COPs. The report specifies that « over the last decade, deaths from floods, droughts and storms were 15 times higher in highly vulnerable regions. »
In its report, the IPCC repeats that the current decade is « essential » in the fight against global warming. If we want to limit it to +1.5°C, we should reduce our CO2 emissions by 48% by 2030 compared to 2019 levels. Without this, global warming will increasingly threaten ecosystems. , biodiversity, livelihoods, health and well-being of current and future generations.
Among the solutions to improve the situation, the IPCC cites in the first place the transition « from fossil fuels to sources with little or no greenhouse gas emissions », highlighting solar and wind energy. He also mentions – among other things – a transition to a more plant-based diet, reforestation, but also the implementation of financial tools, such as “removing fossil fuel subsidies”.
The full report can be read by clicking this link:
https://www.ipcc.ch/

Confirming the IPCC report, we learn that the average temperature over the first 12 days of March 2023 has reached the highest levels over this period since March 2016, when an exceptional El Niño episode drove global temperature to record highs. .
We can already say that March 2023 will be one of the hottest months of March on record.

De toute évidence, les glaciers et la banquise vont continuer à fondre… (Photo: C. Grandpey)

Réchauffement climatique : 2022 une année de catastrophes // Global warming : 2022 a disaster year

L’année 2022 restera dans les annales aux États-Unis pour ses inondations et ses tempêtes dévastatrices, ainsi que pour ses vagues de chaleur et ses sécheresses extrêmes. 2022 s’est terminée avec une tempête de neige encore jamais vue dans certaines régions du pays.
En octobre 2022, les États-Unis avaient connu depuis le début de l’année 15 catastrophes causant chacune plus d’un milliard de dollars de dégâts.

Source : NOAA

L’année a commencé et s’est terminée par de violentes tempêtes hivernales du Texas au Maine, affectant des dizaines de millions de personnes et causant des dégâts importants. Le mois de mars a établi le record du nombre de tornades avec 233 événements.
Au cours d’une période de cinq semaines au cours de l’été 2022, cinq événements majeurs de précipitations se sont produits à Saint-Louis, dans l’est du Kentucky, dans le sud de l’Illinois, dans la Vallée de la Mort en Californie et à Dallas (Texas), provoquant des crues dévastatrices et parfois mortelles. De graves inondations dans le Mississippi ont perturbé l’approvisionnement en eau pendant des semaines dans certaines régions. Une inondation historique dans le Montana, provoquée par de fortes pluies et la fonte des neiges a entraîné l’évacuation de plusieurs portions du Parc national de Yellowstone.
À l’automne, les ouragans Ian et Fiona ont provoqué des précipitations extrêmes et des ondes de tempête meurtrières en Floride et Porto Rico. Ian est devenu l’un des ouragans les plus destructeurs de l’histoire des États-Unis. Sans oublier le typhon qui a frappé 1 600 km de côtes en Alaska.
Alors que l’on observait un excès de précipitations dans certaines régions, une chaleur extrême et trop peu de précipitations étaient enregistrées ailleurs. Des vagues de chaleur persistantes ont persisté dans de nombreuses régions des Etats Unis, avec des records de température. Des incendies de végétation ont fait rage en Arizona et au Nouveau-Mexique. La sécheresse a également fait baisser le niveau du Mississippi à un tel point près de Memphis en automne que les barges ne pouvaient pas passer sans un dragage préalable et des envois d’eau en amont. Le long du fleuve Colorado, les autorités ont envisagé un renforcement des restrictions d’utilisation de l’eau qui atteignait un niveau critique dans les principaux réservoirs.
Au Pakistan, des pluies de mousson record ont inondé plus d’un tiers du pays, tuant plus de 1 500 personnes. En Inde et en Chine, des vagues de chaleur et des sécheresses prolongées ont asséché les rivières, perturbé les réseaux électriques et menacé la sécurité alimentaire de milliards de personnes. Des inondations à grande échelle et des glissements de terrain provoqués par des pluies torrentielles ont également tué des centaines de personnes en Afrique du Sud, au Brésil et au Nigeria.
En Europe, les vagues de chaleur ont fait apparaître des températures record en Grande-Bretagne et dans d’autres parties du continent, avec de graves sécheresses et des incendies de forêt dans de nombreuses régions comme le sud-ouest de la France. Une grande partie de l’Afrique de l’Est est toujours en proie à une sécheresse pluriannuelle, la pire depuis plus de 40 ans, selon les Nations Unies. Des millions de personnes se retrouvent exposées aux pénuries alimentaires et à la famine.
Contrairement à ce que pensent et ce qu’affirment certains, y compris sur ce blog, 2022 n’a pas été une année exceptionnelle. Ces événements extrêmes se produisent avec une fréquence et une intensité croissantes. Ils sont intensifiés par le réchauffement climatique qui affecte l’ensemble de la planète. La plus récente évaluation du climat dans le monde par le Groupe Intergouvernemental d’Experts sur l’Evolution du Climat (GIEC) a révélé une augmentation significative de la fréquence des températures extrêmes et de l’intensité des précipitations, ce qui entraîne davantage de sécheresses et d’inondations.
Selon une étude publiée en 2022, les inondations et les sécheresses extrêmes deviennent également plus meurtrières et plus coûteuses, malgré une amélioration de notre capacité à gérer les risques climatiques. Cela s’explique en partie par le fait que les événements extrêmes d’aujourd’hui, accentués par le réchauffement climatique, dépassent souvent les capacités de gestion des autorités responsables.
Une grande partie de ce qui se passe aujourd’hui apparaît de manière cohérente dans les modèles climatiques. À mesure que le climat se réchauffe, un changement dans la répartition des températures conduit à davantage d’extrêmes. Par exemple, à l’échelle mondiale, une augmentation de 1 degré Celsius de la température moyenne annuelle correspond à une augmentation de 1,2 °C à 1,9 °C de la température maximale annuelle.
De plus, le réchauffement climatique entraîne des changements de comportement de l’atmosphère et de l’océan. La différence de température entre l’équateur et les pôles est ce qui induit la force des vents. Comme les régions polaires se réchauffent beaucoup plus vite que l’équateur, la plus faible différence de température provoque un affaiblissement global des vents et un jet-stream qui devient plus sinueux.
Certains de ces changements peuvent créer des conditions telles que des systèmes de hautes pressions persistants et un blocage atmosphérique qui entraînent des vagues de chaleur plus intenses. Les dômes de chaleur au-dessus des plaines du sud des États-Unis en juin et dans l’ouest en septembre en sont deux exemples.
Le réchauffement peut également être amplifié encore davantage par des rétroactions positives. Par exemple, des températures plus élevées ont tendance à assécher le sol. Le manque d’humidité du sol réduit la capacité calorifique de la terre, ce qui facilite son réchauffement. Des vagues de chaleur plus fréquentes et persistantes entraînent une évaporation excessive qui, combinée à une diminution des précipitations dans certaines régions, provoque des sécheresses plus intenses et des incendies de forêt plus fréquents
Les températures plus élevées augmentent la capacité de l’atmosphère à retenir l’humidité à un taux d’environ 7 % par degré Celsius. Cette augmentation de l’humidité entraîne des précipitations plus importantes. Même s’il est difficile de lier directement des événements extrêmes spécifiques au réchauffement climatique, lorsque ces événements soi-disant rares se produisent avec une plus grande fréquence dans un monde qui se réchauffe, il est difficile d’ignorer le changement que subit notre climat. 2022 est probablement un aperçu de ce qui nous attend dans un avenir proche car les événements climatiques extrêmes deviennent de plus en plus fréquents.
Source : médias d’information américains.

Il y aura toujours des gens pour dire que les événements extrêmes ne sont pas liés au réchauffement climatiques et ce seront ces mêmes personnes qui brailleront le plus fort le jour où elles en seront elle-mêmes victimes.

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The year 2022 will be remembered across the U.S. for its devastating flooding and storms—and also for its extreme heat waves and droughts. It came to an end with a snowstorm never seen before in some parts of the country.

By October 2022, the U.S. had already seen 15 disasters causing more than $1 billion in damage each. (see map above)

The year started and ended with widespread severe winter storms from Texas to Maine, affecting tens of million of people and causing significant damages. Then, March set the record for the most reported tornadoes in the month, with 233 events.

During a period of five weeks over the summer, five 1,000-year rainfall events occurred in St. Louis, eastern Kentucky, southern Illinois, California’s Death Valley and Dallas, causing devastating and sometimes deadly flash floods. Severe flooding in Mississippi troubled water supply for weeks in some areas. A historic flood in Montana, brought on by heavy rain and melting snow, forcing large areas of Yellowstone National Park to be evacuated.

In the autumn, hurricanes Ian and Fiona deluged Florida and Puerto Rico with extreme rainfall and deadly, destructive storm surges. Ian became one of the most expensive hurricanes in U.S. history. And a typhoon pounded 1,600 km of the Alaska coast.

While too much rainfall threatened some regions, extreme heat and too little precipitation worsened risks elsewhere. Persistent heat waves lingered over many parts of the country, setting temperature records. Wildfires raged in Arizona and New Mexico. Drought also left the Mississippi River so low near Memphis in autumn that barges couldn’t get through without additional dredging and upstream water releases. Along the Colorado River, officials discussed tightening water-use restrictions as water levels neared dangerously low levels in the major reservoirs

In Pakistan, record monsoon rains inundated more than one-third of the country, killing over 1,500 people. In India and China, prolonged heat waves and droughts dried up rivers, disrupted power grids and threatened food security for billions of people. Widespread flooding and mudslides brought on by torrential rains also killed hundreds of people in South Africa, Brazil and Nigeria.

In Europe, heat waves set record temperatures in Britain and other parts of the continent, leading to severe droughts, and wildfires in many parts of the continent. Much of East Africa is still in the grips of a multiyear drought—the worst in over 40 years, according to the United Nations—leaving millions of people vulnerable to food shortages and starvation.

This is not an exceptional year. Such extreme events are occurring with increasing frequency and intensity. They are intensified by the global warming that is affecting the whole planet. The most recent global climate assessment from the United Nations Intergovernmental Panel on Climate Change (IPCC) found significant increases in both the frequency and intensity of extreme temperature and precipitation events, leading to more droughts and floods.

According to a study published in 2022, extreme flooding and droughts are also getting deadlier and more expensive, despite an improving capacity to manage climate risks. Part of the reason is that today’s extreme events, enhanced by global warming, often exceed communities’ management capabilities.

Much of what is happening today is well understood and consistently reproduced by climate models. As the climate warms, a shift in temperature distribution leads to more extremes. For example, globally, a 1 degree Celsius increase in annual average temperature is associated with a 1.2°C to 1.9°C increase in the annual maximum temperature.

In addition, global warming leads to changes in how the atmosphere and ocean move. The temperature difference between the equator and the poles is the driving force for global wind. As the polar regions warm at much higher rates than the equator, the reduced temperature difference causes a weakening of global winds and leads to a more meandering jet stream.

Some of these changes can create conditions such as persistent high-pressure systems and atmospheric blocking that bring more intense heat waves. The heat domes over the U.S. Southern Plains and South in June and in the West in September were both examples.

Warming can also be further amplified by positive feedbacks. For example, higher temperatures tend to dry out the soil, and less soil moisture reduces the land’s heat capacity, making it easier to heat up. More frequent and persistent heat waves lead to excessive evaporation, combined with decreased precipitation in some regions, causing more severe droughts and more frequent wildfires

Higher temperatures increase the atmosphere’s capacity to hold moisture at a rate of about 7% per degree Celsius. This increased humidity leads to heavier rainfall events.

Even though it is difficult to link specific extreme events directly to climate change, when these supposedly rare events occur with greater frequency in a warming world, it is hard to ignore the changing state of our climate. 2022 might provide a glimpse of our near future, as these extreme climate events become more frequent.

Source : U.S. News media.

There will always be people who will say that extreme events are not linked to global warming and it will be these same people who will shout the loudest the day when they are victims of these events. .

Evolution des températures (Sources : NOAA, NASA, ERA5, Berkeley Earth)

Le dernier rapport du GIEC // The latest IPCC report

  Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a publié le 4 avril 2022 son dernier rapport qui se veut alarmiste et explique que les pays ne tiennent pas leurs promesses de réduire les émissions de gaz à effet de serre afin d’éviter une catastrophe climatique.

Alors que la technologie existe pour rester en dessous de 1,5°C d’augmentation moyenne de la température – l’objectif défini par l’accord de Paris sur le climat de 2015 – les politiques actuelles envoient le monde vers un réchauffement au moins deux fois plus important.
Selon le Secrétaire Général des Nations Unies, le rapport du GIEC est « une litanie de promesses climatiques non tenues. C’est un dossier honteux qui nous envoie forcément vers un monde invivable. »
Le rapport du GIEC est le résultat d’un travail effectué par 278 auteurs de 65 pays qui ont examiné plus de 18 000 articles scientifiques. Voici quelques-unes de leurs conclusions. Vous trouverez tous les rapports du GIEC à cette adresse : https://www.ipcc.ch/
Selon les conclusions du dernier rapport, pour atteindre l’objectif de 1,5 °C, les émissions de gaz à effet de serre à l’échelle de la planète doivent commencer à baisser en 2025 et diminuer de 43 % par rapport aux niveaux actuels d’ici 2030, et de 84 % d’ici 2050. Pour y parvenir, il faut des actions ambitieuses de la part des grands émetteurs tels que les États-Unis, l’Union européenne et la Chine dans les prochaines années. Si on attend plus longtemps, on devra faire face à des pertes économiques dues aux impacts du changement climatique tels que la sécheresse, les incendies de forêt et l’élévation du niveau de la mer. Le seul fait de limiter le réchauffement à 2 °C suppose d’atteindre les émissions maximales d’ici 2025 et de les réduire d’environ un quart d’ici 2030.
Sans un changement radical de politique, le Secrétaire Général de l’ONU avertit que « nous sommes sur la voie rapide de la catastrophe climatique : de grandes villes seront sous l’eau, nous assisterons à des vagues de chaleur sans précédent, des tempêtes terrifiantes, des pénuries d’eau généralisées et l’extinction d’un million d’espèces de plantes et d’animaux.”
Le rapport du GIEC explique que la solution pour éviter une catastrophe est facile à comprendre et à réaliser sur le plan technologique. Il faut repenser rapidement le secteur de l’électricité pour qu’il repose sur les énergies renouvelables, passer du transport et du chauffage aux systèmes électriques et capturer le dioxyde de carbone des cheminées d’usines dans les secteurs les plus difficiles à décarboner comme les cimenteries et les aciéries. Pour les situations où cela est irréalisable, comme le transport aérien, les émissions de carbone peuvent être compensées grâce à la technologie émergente consistant à éliminer le carbone de l’atmosphère.
Un problème majeur est que les distributeurs d’énergie, les constructeurs automobiles, les compagnies aériennes, les producteurs d’acier et d’autres industries ne reçoivent aucune incitation financière à agir et les gouvernements n’offrent ni récompenses ni pénalités pour encourager la participation.
Le seul fait d’exploiter l’infrastructure existante de combustibles fossiles – gisements de pétrole et de gaz, mines de charbon et centrales électriques au charbon ou au gaz – jusqu’à leur fin de vie met l’objectif de 1,5 °C hors de portée. De plus, si tous les projets de combustibles fossiles actuellement prévus sont menés à leur terme, cela conduira à un monde qui se réchauffera de plus de 2°C. Selon le GIEC, pour rester en dessous de 1,5°C, l’utilisation du charbon doit être quasiment éliminée d’ici 2050, et l’utilisation du pétrole doit diminuer d’au moins 60 % et celle du gaz de 45 %.
Le GIEC déclare également que des réductions rapides et profondes des émissions de méthane sont essentielles pour atteindre l’objectif de réduction du réchauffement. Pour rester en dessous de 1,5°C, les émissions de dioxyde de carbone doivent baisser de 48 % d’ici 2030 et de 80 % d’ici 2040 ; les émissions de méthane doivent baisser de 34 % d’ici 2030 et de 44 % d’ici 2040.
Le GIEC est plus optimiste sur l’énergie éolienne et solaire que sur les autres technologies énergétiques à faible émission de carbone telles que l’énergie nucléaire et l’hydroélectricité, notant que les coûts ont baissé plus rapidement dans les domaines éolien et solaire. On peut lire dans le rapport que « de 2010 à 2019, il y a eu des baisses significatives des coûts de l’énergie solaire (85%), de l’énergie éolienne (55%) et des batteries lithium-ion (85%). » [Note personnelle : il est surprenant de voir que le GIEC ne condamne pas les batteries lithium-ion au vu des dégâts causés par l’extraction du lithium, notamment en Amérique du Sud]
Source : GIEC.

A noter qu’avec +0,587°C au-dessus de la moyenne 1981-2010, le mois de mars 2022 est le 5ème plus chaud des archives ERA5.

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The Intergovernmental Panel on Climate Change (IPCC) on April 4th, 2022 released its latest report, which warns that nations are falling short of their pledges to reduce greenhouse gas emissions in order to avert catastrophic climate change. While the technology exists to stay below 1.5°C of average global temperature increase – the goal defined by the 2015 Paris climate agreement – current policies put the world on a trajectory toward at least twice as much warming.

The IPCC report is « a litany of broken climate promises. It is a file of shame, cataloging the empty pledges that put us firmly on track towards an unlivable world,” according to the United Nations’ Secretary General.

The IPCC report includes 278 authors from 65 countries reviewing over 18,000 scientific papers. Here are some of their conclusions. You will find all the IPCC reports here : https://www.ipcc.ch/

According to their findings, to meet the 1.5°C target, global greenhouse gas emissions have to start dropping in 2025 and go down 43% from current levels by 2030, and 84% by 2050. Achieving that requires ambitious actions from large emitters such as the United States, the European Union and China in the next few years. Waiting longer, the scientific consortium warned, will mean economic losses from the impacts of climate change such as drought, wildfires and sea level rise. Even limiting warming to 2°C would require peaking emissions by 2025 and cutting them by roughly one-quarter by 2030.

Without a dramatic shift in policy, the UN SEcretary General warns that « we are on a fast track to climate disaster: Major cities under water. Unprecedented heatwaves. Terrifying storms. Widespread water shortages. The extinction of a million species of plants and animals.”

The IPCC report explains that the pathway to averting catastrophe is now clear and technologically feasible: Rapidly redesign the power sector to rely on renewable energy, switch transportation and heating to electric systems, and capture the carbon dioxide from the smokestack in the hardest-to-decarbonize sectors such as cement and steel production. For the situations where that is infeasible, such as air travel, carbon emissions can be offset with the emerging technology of actually removing carbon from the atmosphere.

A key problem is that energy utilities, car manufacturers, airlines, steel producers and other industries have no financial incentive to act without governments offering rewards or penalties to encourage participation.

Just operating the existing fossil fuel infrastructure – the oil and gas wells and pipelines, the coal mines and the coal- or gas-fired power plants – for the rest of their natural lives puts 1.5°C out of reach. And if every currently planned fossil fuel project is completed, it will only guarantee that the world warms more than 2°C. According to the IPCC, to stay below 1.5°C, the use of coal must be virtually eliminated by 2050, and oil use must decrease by at least 60% and gas by 45%.

The IPCC also states that fast, deep cuts to methane emissions are essential to getting warming mitigation on target. To stay below 1.5°C, carbon dioxide emissions must fall by 48% by 2030 and by 80% by 2040; methane emissions must fall by 34% by 2030 and 44% by 2040.

The IPCC is more bullish on wind and solar energy than on other low-carbon energy technology such as nuclear energy and hydropower, noting that costs have come down faster in the wind and solar industries. One can read in the report that “from 2010–2019, there have been sustained decreases in the unit costs of solar energy (85%), wind energy (55%), and lithium-ion batteries (85%).” [Personal note : it is surprising to see that the IPCC should not condemn lithium-ion batteries in view of the damage caused by lithium extraction, espaecially in South America]

Source: IPCC.

It should be noted that with +0.587°C above the 1981-2010 average, March 2022 was the 5th hottest in the ERA5 archives.

Ne vous inquiétez pas : la banquise et les glaciers vont continuer à fondre, la glace de mer va disparaître et la population arctique avec elle, mais ce n’est pas grave…. A propos du réchauffement climatique au Groenland, je vous invite à regarder un remarquable documentaire intitulé « Carnet du Groenland » sur la chaîne USHUAIA TV. (Photo: C. Grandpey)

Changement climatique : la menace d’une extinction massive // Climate change: the threat of mass extinction

Selon un rapport du GIEC publié le 28 février 2022, le monde peut s’attendre à de nombreuses extinctions d’espèces liées au réchauffement climatique dans les décennies à venir si les températures continuent d’augmenter à l’échelle de la planète.
Si ces températures dépassent de 4 degrés Celsius les niveaux préindustriels, un scénario qui suppose des niveaux très élevés d’émissions de gaz à effet de serre, la moitié de nos espèces végétales et animales pourraient être menacées. À ce niveau de réchauffement, le monde pourrait voir des mortalités et des extinctions d’une telle ampleur que cela altérera de façon permanente les forêts tropicales, les forêts de kelp et les récifs coralliens tropicaux.
Même si les températures globales atteignent 1,5 degrés Celsius, 14 % des espèces terrestres pourraient faire face à un risque élevé d’extinction. Les émissions anthropiques ont déjà provoqué un réchauffement de la planète de 1,1 degré Celsius au cours des 170 dernières années.
Sous 2 degrés de réchauffement, jusqu’à 18% des espèces terrestres pourraient être à haut risque d’extinction. Ce risque monte jusqu’à 29 % sous 3 degrés de réchauffement, jusqu’à 39 % à 4 degrés et jusqu’à 48 % à 5 degrés.
Les espèces d’invertébrés sont confrontées à l’un des risques d’extinction les plus élevés à partir des niveaux moyens de réchauffement (3,2 degrés Celsius). Selon ce scénario, 15 % des invertébrés, dont 24 % des salamandres et 11 % des amphibiens, pourraient disparaître.
Les espèces des régions froides, que ce soit sur les hautes montagnes ou dans les régions polaires, sont confrontées à un risque d’extinction particulièrement élevé. Les animaux arctiques tels que les pingouins, les phoques et les ours polaires seraient sérieusement menacés par un réchauffement de 2 degrés ou moins. Ces animaux ont évolué pour vivre sur la glace de mer qui disparaîtra complètement en été au cours du siècle prochain. Cela signifie que certains animaux de l’Arctique pourraient disparaître dans les décennies à venir, à moins qu’ils ne soient déplacés vers de nouveaux endroits. Le déplacement des animaux vers de nouveaux habitats est toutefois délicat. Par exemple, déplacer des ours polaires vers l’Antarctique pourrait en faire des prédateurs pour les populations locales de manchots. Dans certains cas, il sera peut-être nécessaire de déplacer des espèces animales vers des zoos pour les empêcher de disparaître.
Les zones tropicales font face à leurs propres menaces, telles que les vagues de chaleur qui détruisent les récifs coralliens et les mangroves. Jusqu’à 90 % des récifs coralliens tropicaux pourraient disparaître d’ici le milieu du siècle sous un réchauffement de 1,5 degré Celsius, tandis que les récifs pourraient disparaître complètement sous un réchauffement de 2 degrés.
Les écosystèmes dépendent de la biodiversité pour les protéger de la pollution, des conditions météorologiques extrêmes et des changements de température. Si une espèce disparaît, la survie des autres devient plus compliquée. La perte de biodiversité peut, à son tour, entraîner de mauvaises récoltes et une pénurie d’eau. Un simple demi-degré de réchauffement supplémentaire peut faire la différence entre la survie d’une espèce et sa disparition.
Les auteurs du rapport du GIEC ont constaté que le risque d’extinction des espèces locales dans les points chauds de la biodiversité pourrait doubler entre 1,5 et 2 degrés de réchauffement, et être multiplié au moins par 10 de 1,5 à 3 degrés.
La disparition d’espèces animales a aussi des conséquences pour l’homme. Plus de 400 millions de personnes en Afrique et en Asie dépendent de la pêche pour les protéines. Même si le réchauffement ne dépasse pas 1,6 degrés, les zones de pêche des régions tropicales d’Afrique pourraient perdre jusqu’à 41 % de leur rendement d’ici la fin du siècle en raison de l’extinction des poissons locaux. Les poissons couramment consommés comme les sardines et les harengs pourraient également être menacés d’extinction avec le réchauffement des océans.
Il ne faut pas oublier que de nombreuses personnes dans le monde dépendent encore d’interactions très étroites avec les écosystèmes naturels qui leur fournissent de la nourriture et des moyens de subsistance.
Source : Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC).

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According to an IPCC report released on February 28th, 2022, the world can expect many climate-related extinctions in coming decades if global temperatures continue to rise.

If global temperatures reach 4 degrees Celsius above pre-industrial levels, a scenario that assumes very high levels of greenhouse gas emissions, half of our plant and animal species could be threatened. At that level of warming, the world could see mass mortalities and extinctions that permanently alter rainforests, kelp forests, and tropical coral reefs.

Even if global temperatures reach 1.5 degrees Celsius, up to 14% of land species could face high risk of extinction. Human-caused emissions have already led the planet to warm by 1.1 degrees Celsius in the last 170 years.

Under 2 degrees of warming, up 18% of land species could be at high risk of extinction. That risk rises to up to 29% under 3 degrees of warming, up to 39% at 4 degrees, and up to 48% at 5 degrees.

Invertebrate species face one of the highest risks of extinction from mid-levels of warming (3.2 degrees Celsius). Under this scenario, 15% of invertebrates, including 24% of salamanders and 11% of amphibians, could go extinct.

Species in cold areas, including high mountains or polar regions, face a particularly high extinction risk. Arctic animals such as penguins, seals, and polar bears would be seriously threatened by 2 degrees of warming or less. The animals have evolved to live on sea ice which will completely disappear in summertime within the next century. That means some Arctic animals could go extinct in coming decades, unless they are moved to new locations. But relocating animals to foreign habitats is tricky. For instance, moving polar bears to Antarctica could lead them to prey on local penguin populations. In some cases, animal species may need to be moved to zoos to keep them from dying out.

Tropical areas face their own threats, such as heatwaves destroying coral reefs and mangroves. Up to 90% of tropical coral reefs could be lost by mid-century under 1.5 degrees of warming while the reefs could go entirely extinct under 2 degrees of warming.

Ecosystems depend on biodiversity to protect them from pollution, extreme weather, and temperature shifts. But if one species dies out, it makes it harder for others to survive. Loss of biodiversity can, in turn, lead to crop failure and water scarcity. Just a half-degree of additional warming could mean the difference between whether a species stays alive or not.

The IPCC authors found that the extinction risk for local species in biodiversity hotspots could double between 1.5 degrees and 2 degrees of warming, and increase at least 10-fold from 1.5 degrees to 3 degrees.

The death of animal species has consequences for humans, too. More than 400 million people in Africa and Asia depend on fisheries for protein. Even if warming does not exceed 1.6 degrees, fisheries in Africa’s tropical regions could lose up to 41% of their yield by the end of the century due to the extinction of local marine fish. Commonly consumed fish like sardines and herring could also face extinction as oceans warm.

One should not forget that many people around the world still rely on very close interactions with natural ecosystems to provide them with food and to provide them with livelihoods.

Source : Intergovernmental Panel on Climate Change (IPCC).

La survie des ours polaires est étroitement liée à la glace de mer (Photos : C. Grandpey)