Une récente étude effectuée par des scientifiques du Fish and Wildlife Service et publiée dans le Journal of Mammalogy, révèle que les grizzlis dominent les ours polaires, pourtant de plus grande taille, pendant la recherche de nourriture au sein des carcasses de baleines laissées sur la plage de Kaktovik (petit port du district de North Pole sur la côte nord de l’Alaska) par les baleiniers Inupiat.
L’étude s’appuie sur des observations détaillées réalisées entre 2005 et 2007 par des biologistes qui se sont relayés jour et nuit devant une carcasse de baleine. En sécurité dans leurs véhicules, ils ont pris des notes détaillées sur le comportement des ursidés qu’ils éclairaient la nuit à l’aide d’un projecteur, comme on peut le voir dans cette vidéo :.
https://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=GrMAZiWiSm0
Dans la plupart des 137 rencontres qu’ils ont observées entre les deux espèces d’ours, les ours polaires ont réagi avec soumission, même si les grizzlis ne présentaient pas un comportement ouvertement agressif. En fait, même s’ils sont beaucoup moins nombreux et plus petits, les grizzlis faisaient fuir les ours polaires de la carcasse dans environ la moitié des situations observées. Même si les ours polaires agissaient parfois agressivement entre eux, ils se tolèraient globalement assez bien. En revanche ils ont presque toujours essayé d’éviter les grizzlis. Ce comportement a été confirmé par des observations les plus récentes en septembre dernier.
Cette étude surprenante arrive au cœur d’une période d’incertitude sur l’avenir de l’ours polaire qui est de plus en plus chassé de son habitat par le rétrécissement de la banquise. Au cours des dernières années, avec la diminution de l’étendue de la banquise pendant l’été et l’automne, de plus en plus d’ours polaires en provenance du sud la mer de Beaufort ont été contraints à trouver refuge sur terre, en particulier à Kaktovik, où les carcasses des baleines boréales sont devenues importantes pour leur alimentation. En 2012, l’année du record de rétrécissement de la banquise, 80 ours polaires ont été observés autour des carcasses de baleines à Kakotvik.
Pour les grizzlis du district de North Pole – les plus petits ours bruns d’Alaska – les carcasses de baleines représentent également une source de nourriture alléchante. Pendant la plus grande partie de l’année, ils dépendent des plantes et de petits animaux ; la viande grasse des baleines est donc un changement de nourriture bienvenu.
Les biologistes ne pensent pas que les grizzlis agissent uniquement pour provoquer la fuite des ours polaires. Il se peut que le comportement d’intimidation joue un rôle, ainsi que l’odeur. Il y a même eu un cas où un cadavre de grizzli déposé par les villageois à côté de la carcasse d’une baleine a suffi pour effrayer les ours polaires.
Une raison de cette situation peut être la nature agressive naturelle des grizzlis. Ils ne grognent pas comme le font les loups et les chiens ; ils montrent leur agressivité par leur attitude, la position de leurs oreilles ou simplement leur façon de marcher.
Les grizzlis de North Pole sont relativement éparpillés dans le district et leur comportement agressif est peut-être la conséquence d’un habitat où la nourriture est rare. Les ours polaires, en revanche, sont habitués à vivre dans un environnement marin et loin des animaux terrestres qui pourraient être des concurrents pour la nourriture.
En outre, les grizzlis de North Pole ont probablement un besoin plus pressant de viande à cette époque de l’année où ils engraissent en vue de l’hibernation. Dans le même temps, les ours polaires, qui n’hibernent pas, conservent de l’énergie en attendant le retour de la banquise et ils peuvent se permettre de laisser aux grizzlis des morceaux de carcasses de baleines. Ce n’est pas la peine qu’ils dépensent leur énergie en rivalisant avec les grizzlis, surtout à cette époque de l’année.
D’autres observations seront effectuées pour parvenir à des conclusions fiables sur le comportement des deux espèces d’ursidés quand elles se retrouvent face à face.
Adapté d’un article dans l’Alaska Dispatch News.
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A recent study by U.S. Fish and Wildlife Service scientists, published in the Journal of Mammalogy, found that the smaller grizzly bears dominate the larger polar bears during foraging sessions at the bone pile left on the beach by Inupiat whalers from Kaktovik.
The study is based on detailed observations recorded from 2005 to 2007 by biologists stationed in shifts at the bone pile. From the safety of their vehicles, they worked three-hour shifts from dusk to dawn and make detailed notes of all the interactions they saw with the help of a spotlight, as can be seen in this video:
https://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=GrMAZiWiSm0
In most of the 137 encounters they observed between the two bear species, polar bears reacted submissively, even though the grizzlies did not exhibit overtly aggressive behaviour. In fact, though they are far fewer and smaller, the grizzly bears completely displaced the polar bears from the bone pile in about half the encounters. Though polar bears sometimes acted aggressively among themselves, they mostly tolerated each other. But they almost always tried to avoid the grizzlies. This behaviour was confirmed by more recent observations in last September.
The surprising finding comes amid uncertainty about polar bears’ future, as they are increasingly driven from their shrinking sea ice. In recent years, as summer and fall sea ice has dwindled, more Southern Beaufort Sea polar bears have been spending time on land, especially in Kaktovik, where bowhead scraps have become important to their diet. In 2012, the year of the record-low ice minimum, 80 polar bears were spotted around the Kakotvik bone pile.
For North Slope grizzlies – the smallest of Alaska’s brown bears – the bone pile is also an enticing food source. For most of the year, they depend on plants and lean prey animals, so fatty whale meat is a welcome change.
Biologists don’t think the grizzlies are specifically acting to cause polar bears to flee. There is possibly a “stare-down,” and scent likely plays a role. In one instance, even the carcass of a grizzly bear that was dumped by villagers at the bone pile was enough to spook the polar bears.
A reason may be the grizzly bears’ natural aggressive nature. They don’t snarl in the way that wolves and dogs do, but they show their aggression in their stances, their ear positions and just the way they walk.
North Slope grizzlies are sparsely distributed and may have got their aggressive behaviour out of necessity in a habitat where food is scarce. Polar bears, in contrast, evolved to thrive in a marine environment, swimming away from land-based animals that might be competitors for food.
Besides, North Slope grizzlies may have a more pressing need for meat at that time of the year, as they are fattening up for hibernation. Meanwhile, polar bears, which do not hibernate, are conserving energy as they wait for sea ice to return and may be able to afford to cede first dibs at the bone pile to the grizzlies. It may not be not worthwhile for polar bears to spend the energy competing with grizzlies, especially at that time of the year.
More observations will be made to reach reliable conclusions about the behaviour of both species when they are confronted with one another.
Adapted from an article in the Alaska Dispatch News.
Photos: C. Grandpey