A l’issue du 13ème paroxysme de l’Etna, j’ai eu un échange d’idées avec Boris Behncke (INGV Catane). Après avoir plaisanté en disant que les paroxysmes devenaient monotones, nous avons abordé des sujets plus graves.
Boris m’a dit qu’il commençait à se concentrer de plus en plus sur l’impact de cette activité sur les gens qui vivent autour de l’Etna, impact qui est de plus en plus visible et spectaculaire. «Beaucoup de villes et villages, notamment dans les secteurs du sud-est, est et nord-est de l’Etna ont reçu à plusieurs reprises d’importantes retombées de tephra et, lorsque l’on traverse ces secteurs en voiture, on est peu à peu envahi par une sensation de tristesse. Tout est noir et poussiéreux, il y a des quantités incroyables de scories et cendre entassées le long des routes, les couleurs du printemps sont anéanties et les gens n’ont plus tellement envie de nettoyer parce que trop de fois ce qu’ils viennent de nettoyer est recouvert quelques heures plus tard d’une nouvelle couche noire de lapilli. »
Boris ajoute que les derniers paroxysmes sont différents de la plupart de ceux du passé : un grand nombre d’entre eux ont été beaucoup plus explosifs et aussi beaucoup plus intenses que ceux, par exemple, de l’année 2000. […] «On attend avec une certaine inquiétude de voir comment les choses vont évoluer ; l’Etna ne semble pas vouloir changer son comportement dans un avenir prévisible … »
J’ai répondu à Boris que « aussi longtemps que le volcan se comportera de cette façon, ce sera une bonne chose pour les gens qui vivent à Santa Venerina, Zafferana, Nicolosi etc. Certes, le volcan est sale et oblige les gens à balayer la cendre et nettoyer leurs maisons, mais ce serait bien pire si une éruption se produisait sur les basses pentes du volcan! La situation actuelle confirme la conclusion de mes observations à la fin des années 1990. J’étais alors convaincu qu’il y avait une chambre magmatique peu profonde sous la partie SE de la zone sommitale. Ce que je crains le plus aujourd’hui, c’est que l’activité actuelle fragilise le flanc SE du volcan et réactive, par exemple, la fracture qui traverse la route SP 92. Si c’était le cas, la situation serait très différente.» Croisons les doigts pour que les paroxysmes ou les éruptions restent concentrés dans la zone sommitale. Ce serait un vrai problème si des bouches ou des fissures s’ouvraient à des altitudes inférieures. Les coulées de lave pourraient rapidement devenir une menace pour les zones habitées. L’Etna a une histoire éruptive qui montre que de tels événements ne doivent pas être exclus. Il suffit de penser à l’éruption de 1928 qui a détruit Mascali, ou bien celle de 1991-1994 qui a commencé sur la paroi supérieure de la Valle del Bove et entraîné des journées de peur et d’angoisse pour les habitants de Zafferana Etnea …
After Mount Etna’s 13th paroxysm, I had an exchange of ideas with Boris Behncke (INGV Catania). After I had joked that the paroxysms were becoming monotonous, we tackled more serious matters.
Boris told me he was starting to focus increasingly on the impact of this activity on the people living around Etna, which is getting more and more dramatic. “Many towns and villages, especially in the southeastern, eastern and northeastern sectors of Etna have repeatedly received heavy tephra fallout, and driving through these areas you are gradually invaded by a sensation of sadness, it’s all black and dusty, there are incredible amounts of scoriae and ash piled up along roads, the colours of spring are suppressed, and people are reluctant to put much effort into cleaning up because too many times they had just cleaned up and a few hours later, everything was covered with a fresh layer of black pyroclastics.”
Boris added that the latest paroxysms have been different from most of those of the past, many of them have been much more explosive and also much more voluminous than those, for example, of the year 2000. […] “There is quite some concern about how things will go on, Etna is not showing the least sign of changing her behaviour in the foreseeable future …”
I answered Boris that “as long as the volcano behaves this way, it is a good thing for the people who live in Santa Venerina, Zafferana , Nicolosi and so on. The volcano is dirty and forces people to sweep away the ash and clean their houses but it would be much worse if an eruption occurred on the lower slopes of the volcano! The current situation confirms what I concluded from my observations in the late 1990s. I was then convinced there was a shallow magma chamber beneath the SE part of the summit area. What I fear most today is that the current activity weakens the SE flank of the volcano and reactivates the fracture that crosses the SP 92 road. If it did, the situation would be quite different. » Let’s cross our fingers that the paroxysms or the eruptions remain concentrated in the summit area. It would be a real problem if vents or fissures opened at lower altitudes. The lava flows would rapidly become a threat to populated areas. Mount Etna has an eruptive history which shows that such events should not be excluded. We just need to remember the 1928 eruption that destroyed Mascali or the 1991-1994 eruption that started on the upper wall of the Valle del Bove and caused days of fear and anxiety to the inhabitants of Zafferana Etnea…

Au cours de l’éruption 1991-94, la lave était venue flirter avec les pieds de vigne à quelques centaines de mètres au-dessus de Zafferana Etnea.
(Photo: C. Grandpey)