Du jamais vu, mais que l’on reverra !

Au cours de la tempête Alex, les cumuls d’eau de pluie enregistrés en l’espace de 24 heures dans les Alpes-Maritimes dépassent tous ceux jamais observés dans le département. Ainsi, 500 mm ont été enregistrés à Saint-Martin-Vésubie.

Les météorologues de Météo France expliquent que c’est une véritable « bombe météorologique » qui a explosé au-dessus de la région. Le phénomène se caractérise  par la rapidité de sa formation. Les baromètres ont parfaitement traduit la chute de pression atmosphérique d’une trentaine d’hectopascals en 12 heures, d’où l’expression « bombe météorologique ».

Le problème est que ces dépressions de petite taille et très localisées sont mal appréhendées par les modèles de simulation atmosphérique. Un décalage géographique de quelques dizaines de kilomètres peut ainsi avoir d’importantes conséquences car ces bombes météorologiques peuvent laisser derrière elles des dégâts très importants.

Les bombes météorologiques restent relativement rares. Météo France indique que la dernière s’était produite en Bretagne le 6 mars 2017, avec des rafales atteignant 193 km/h. Elle a provoqué la mort de 12 personnes.

Tous les témoins s’accordent pour dire que la catastrophe dans les Alpes-Maritimes est « du jamais vu » dans la région. Le problème est que le « jamais vu » a tendance à se répéter à travers le monde. Je me tiens au courant très régulièrement de ce type d’actualité et je ne peux que constater que la situation dramatique vécue en France affecte de nombreuses populations à travers le monde. En voici quelques exemples recensés au cours du mois de septembre :

  • Pas très loin des Alpes-Maritimes, un épisode méditerranéen a tué deux personnes dans le Gard le 19 septembre 2020, avec une hauteur de précipitations de 468 mm enregistrée en 6 heures à Valleraugue. Du jamais vu depuis l’année 1900.
  • Le 18 septembre 2020, la tempête subtropicale « Alpha », la 22ème et la plus précoce de la saison dans l’Atlantique en 2020, a frappé le Portugal en occasionnant d’importants dégâts.
  • Le 18 septembre également, au moins dix personnes ont perdu la vie quand la tempête tropicale “Noul” a frappé le Sud-est Asiatique entre le Vietnam, le Laos le Thaïlande et le Myanmar (ex-Birmanie) en causant de gros dégâts.
  • Plus de 240 000 personnes ont été affectées et 140 000 déplacées quand des inondations catastrophiques ont frappé quelque 80 localités en Ethiopie au mois de septembre. Du jamais vu selon les autorités.
  • Toujours en Afrique, de très sévères inondations ont affecté le Ghana. Le bilan est de 5 morts, avec quelque 1 700 habitations endommagées ou détruites.
  • En Indonésie, des inondations et des glissements de terrain ont frappé Jakarta et ses environs au cours du mois de septembre. On déplore deux morts et une vingtaine de blessés. Les autorités font remarquer que depuis le mois de janvier 2020, au moins 123 personnes ont péri au cours de catastrophes naturelles provoquées par des intempéries. De tels chiffres n’avaient encore jamais été atteints. Les inondations continuent d’affecter à l’heure actuelle l’ouest de l’île de Java où l’on déplore des personnes disparues et des maisons submergées.

Le mois d’octobre suit la même tendance. Outre les victimes dans les Alpes-Maritimes, on peu citer les 40 personnes qui ont péri dans les pires inondations de tous les temps au Nigeria, avec la perte de 2 millions de tonnes de riz.

La tempête tropicale “Gamma” est la 24ème de la saison à s’être formée dans l’Atlantique Nord. C’est aussi la plus précoce ; elle est apparue le 3 octobre et bat ainsi le record établi le 27 octobre 2005.  Cette tempête vient d’atteindre la Péninsule du Yukatan au Mexique avec de très fortes pluies et des inondations, en particulier dans les zones montagneuses, comme cela s’est produit dans le secteur de Saint-Martin-Vésubie. On déplore au moins 6 morts et plusieurs milliers de personnes ont dû être évacuées.

Obnubilée qu’elle est par la Covid-19, la presse française ne mentionne pas ces événements qui sont pourtant aussi dramatiques que ceux survenus dans le sud-est de notre pays.

S’agissant des causes, on est en droit de se poser des questions car la répétition et l’accélération des événements extrêmes est inquiétante. Le principal coupable semble bien le réchauffement climatique. Pourtant, je n’en ai guère entendu parler au cours des dernières heures. Il est vrai que je ne fais qu’effleurer les bulletins d’informations. L’urgence de la situation humanitaire est telle qu’il faut avant tout essayer de panser les blessures infligées par la tempête Alex.

Je remarque que, comme au Portugal et au Mexique, la tempête Alex est historiquement précoce. Aucune tempête majeure n’avait été enregistrée par Météo France avant le 15 octobre depuis 1980. Le problème, c’est que la Méditerranée est encore très chaude ce qui amplifie les précipitations. Avec le réchauffement climatique, la mer se réchauffe de plus en plus et cette température élevée joue un rôle de carburant dans les phénomènes extrêmes comme la tempête Alex

Qu’on le veuille ou non, il faudra se demander si les activités humaines et les émissions de gaz à effet de serre ne portent pas une part de responsabilité !

Du jamais vu, mais que l’on reverra !

Des épisodes pluvieux de plus en plus fréquents et intenses

(Source : Météo France)

Le point sur la situation à Hawaii // Latest news from Hawaii

drapeau francaisLa tempête tropicale Ana ne devrait pas causer de gros dégâts sur la Grande Ile d’Hawaii qui ne devrait subir que de fortes pluies (jusqu’à 30 centimètres d’eau par endroits) et peut-être des inondations jusqu’à 18 heures dimanche.
Dans le même temps, les travaux se poursuivent sur ​​la Chain of Craters Road au cas où la lave du Kilauea viendrait à couper la Highway 130. La lave n’a pas avancé de manière significative au cours des derniers jours et le front de coulée – qui s’est immobilisé – reste à 1,4 km de Apa’a Street. Cependant, le HVO indique que la coulée du 27 juin reste active. Des sorties de lave sont observées à la surface et sur les bords de la coulée jusqu’à 2 km en amont, de sorte que la coulée continue à s’élargir. L’alimentation au niveau du Pu’u ‘O’o reste relativement réduite, ce qui correspond aux données fournies par les inclinomètres. Comme la vitesse de progression de la lave n’est plus que de  25 mètres par jour en moyenne, le HVO ne fait plus de projections sur la date possible d’arrivée à Paoha.

Il est intéressant de noter que la coulée du 27 juin a ralenti et a même cessé d’avancer au moment où la tempête tropicale Ana se rapprochait de la Grande Ile. On peut se demander si la baisse de la pression atmosphérique qui accompagne inévitablement une tempête tropicale ou un ouragan a eu un effet sur son alimentation au niveau du Pu’uo’o. Il faudra voir si le front de coulée recommence à avancer la semaine prochaine, une fois que la tempête se sera éloignée de l’archipel. Quand l’ouragan Iselle a frappé Hawaii en septembre, une forte déflation a été observée sur le Pu’uO’o, mais la coulée de lave du 27 juin a continué d’avancer et de brûler la forêt au nord du volcan.
Il y a quelques années, j’ai réalisé une étude sur le lien possible entre la pression atmosphérique et l’activité éruptive (voir le résumé dans la colonne de gauche de ce blog). Haroun Tazieff m’avait alors dit que si un tel lien existait, il ne pouvait être observé que sur des ‘petits’ volcans comme le Stromboli. Toutefois, lorsque de fortes baisses de pression atmosphérique se produisent (principalement pendant les ouragans ou tempêtes tropicales), je pense que les ‘gros’ volcans comme le Kilauea peuvent eux aussi en subir les effets.

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drapeau anglaisTropical storm Ana should not cause damage to Hawaii Big Island which should only suffer heavy rains up to 30 centimetres and possible flooding until 6 p.m. Sunday.

Work continues on Chain of Craters Road which is being built in preparation for lava coming from the Kilauea and threatening to cut Highway 130. Lava has not made any significant progress during the past days and the lava front – which has stalled – remains 1.4 km upslope from Apa’a Street. However, HVO indicates that the June 27th flow remains active. Breakouts are observed on the surface and margins of the flow as far as 2 km upslope, and they continue to widen the flow. Lava discharge from Pu‘u ‘Ō‘ō into the June 27th lava tube is low which corresponds with the data provided by tiltmeters. Because the flow has slowed to about 25 metres/day, HVO no longer offers a future projection of the flow’s advance.

It is interesting to notice that the June 27th lava flowed slowed and even stalled as tropical storm Ana was getting closer to the Big Island. One may wonder whether the drop in atmospheric pressure that inevitably accompanies a tropical storm or hurricane had an effect on the lava output from Pu’uo’o. We’ll see if lava starts flowing again next week once the storm has moved away from the archipelago. When hurricane Iselle hit Hawaii in September, strong deflation was observed at Pu’uO’o, but the June 27th lava flow kept moving forward and burning the forest to the north of the volcano.

A few years ago, I made a study about the possible link between atmospheric pressure and eruptive activity (see abstract in the left-hand column of this blog). Haroun Tazieff had told me that if such a connection existed it could only be seen on small-scale volcanoes like Stromboli. However, when major drops of atmospheric pressure occur (mainly during hurricanes or tropical storms), I think that large-scale volcanoes like Kilauea can be affected as well.

Des nouvelles rassurantes d’Hawaii // Good news from Hawaii

drapeau francaisFinalement, l’ouragan Iselle n’a pas causé les dégâts redoutés sur la Grande Ile d’Hawaii. En approchant des côtes, l’ouragan est devenu une tempête tropicale avec des rafales de vent atteignant tout de même 80 km/h. Des arbres se sont couchés sur la chaussée et sur des lignes électriques, entraînant des pannes de courant localisées. Il a beaucoup plu de sorte que certaines routes inondées restent fermées à la circulation. Toutefois, on ne recense pas de dégâts majeurs. La population avait pris les devants en condamnant les ouvertures des maisons, tandis que plusieurs hôtels de la côte étaient évacués.

Comme je l’écrivais précédemment, le mois d’août est souvent celui des ouragans et tempêtes tropicales à Hawaii. A peine Iselle évacuée, Julio va s’approcher des côtes hawaiiennes ce dimanche, sans toutefois les atteindre. Sa trajectoire le conduit vers le nord de l’archipel. Les touristes actuellement en vacances à Hawaii doivent donc s’attendre à de nouvelles pluies abondantes.

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drapeau anglaisFinally, Hurricane Iselle did not cause the damage feared on Hawaii Big Island. As it neared the coast, the hurricane became a tropical storm with wind gusts still reaching 80 km / h. Trees fell down on some roads and on power lines, causing local power outages. It rained a lot so some flooded roads remain closed to the traffic. However,  no major damage was reported. The population had taken early measures in condemning the openings of the houses, while many coastal hotels were evacuated.
As I put it before, the month of August is often the period of hurricanes and tropical storms in Hawaii. Hardly Iselle evacuated, Julio will approach the Hawaiian coast on Sunday, but should not reach it. Its path is supposed to go north of the archipelago. As a consequence, tourists currently vacationing in Hawaii must expect more heavy rains.

Tempête tropicale et brouillard volcanique à Hawaii // Tropical storm and vog at Hawaii

drapeau francaisUne étude récente effectuée par des chercheurs de l’Université d’Hawaii (UH) à Manoa a révélé que les gaz et les particules volcaniques du Kilauea avaient exercé une influence sur la tempête tropicale Flossie, en affectant considérablement la formation des orages et de la foudre.
En juillet 2013, quand Flossie s’est approchée de l’archipel hawaiien, les satellites ont contrôlé en permanence les éclairs, les précipitations, la couverture nuageuse, la température et les vents. En outre, deux scientifiques de l’UH ont scrupuleusement mis à jour leur modèle du vog, un outil de prévision exploité depuis 2010 et qui fournit des indications sur l’emplacement du panache de vog, les concentrations de dioxyde de soufre (SO2) et d’aérosols sulfatés au niveau des localités de l’île d’Hawaï. («Vog» est le nom local donné au brouillard volcanique produit par les émissions gazeuses du Kilauea).
Les chercheurs ont constaté que, avant le passage de Flossie sur Hawaii Big Island, le réseau d’observation n’avait pas détecté d’éclairs à l’intérieur de la tempête. Toutefois, une heure plus tard, de violents éclairs sont apparus à proximité de l’île d’Hawaii tandis que Flossie s’en approchait. En outre, alors que les émissions volcaniques se trouvaient enveloppées dans cet environnement humide, les aérosols sulfatés ont favorisé la formation d’un plus grand nombre de gouttelettes plus petites que la normale à l’intérieur des nuages, ce qui a favorisé la séparation des charges dans la région supérieure des nuages et l’apparition des éclairs.
Les aérosols sulfatés ont déjà été identifiés comme étant le composant principal de noyaux de condensation des nuages ​​(NCN), un ingrédient nécessaire à la formation des gouttes de pluie. Les scientifiques hawaiiens font remarquer que « c’est la première fois que l’interaction entre le dégazage important d’un volcan actif et un cyclone tropical est détectée dans une modélisation du brouillard volcanique (vog) sur les îles hawaïennes. Cela offre une occasion unique d’analyser le comportement des émissions volcaniques solides entraînées dans un système de tempête tropicale. »
Les observations visuelles et la modélisation du brouillard volcanique démontrent qu’il existait une interaction intime entre Flossie et le panache de vog du Kilauea lors du passage de la tempête tropicale au-dessus de la Grande Ile. Les observations du changement de dynamique de Flossie au moment où la tempête a rencontré le vog du Kilauea serviront à apprécier l’impact des ouragans d’air pollué quand ils s’approchent de la côte continentale des États-Unis.

Vous pourrez lire l’intégralité de l’article et voir la modélisation des gaz et particules du Kilauea au moment du passage de Flossie à cette adresse :

http://westhawaiitoday.com/community-bulletin/research-reveals-kilauea-volcano-exerted-influence-tropical-storm

Source: West Hawaii Today

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drapeau anglaisA recent study from scientists at the University of Hawaii (UH) at Manoa revealed that gasses and particles from Kilauea volcano exerted an influence on Tropical Storm Flossie, affecting the formation of thunderstorms and lightning in the sizeable storm.

In July 2013, as Flossie approached the Hawaiian Islands, satellites steadily monitored lightning, rainfall, cloud cover, temperature and winds. In addition, two UH scientists carefully maintained their vog model – a forecasting tool that has been operated since 2010 to provide guidance on the location of the vog plume and the concentrations of sulphur dioxide (SO2) and sulphate aerosol for Hawaiian Island communities. “Vog” is the local name given to volcanic smog caused by the gas emissions of Kilauea volcano.

The researchers found that prior to Flossie’s passage over Hawaii Big Island, the observation network detected no lightning in the storm. However, one hour later, vigorous lightning flashed in the vicinity of the Island of Hawaii as Flossie approached. Further, as volcanic emissions were wrapped into this moist environment, sulphate aerosols promoted the formation of a greater number of smaller than normal cloud droplets, which favoured charge separation in the upper cloud region and the occurrence of lightning.

Sulphate aerosols have previously been identified as a principal component of cloud condensation nuclei (CCN), a necessary ingredient for forming raindrops. The scientists say “this is the first interaction between an active, vigorously degassing volcano and a tropical cyclone captured by a vog model run over the Hawaiian Islands, providing a unique opportunity to analyze the influence of robust volcanic emissions entrained into a tropical storm system.”

Taken together, the observations and the vog model highlight an intimate interaction between Tropical Storm Flossie and Kilauea’s vog plume during the passage of the storm. The observations of Flossie’s changing dynamics as it encountered Kilauea’s vog have implications for the impact on hurricanes of polluted air as they approach the US mainland coast.

You can read the whole article and see the model of Kilauea’s gas and particles entrained in tropical storm Flossie at this address:

http://westhawaiitoday.com/community-bulletin/research-reveals-kilauea-volcano-exerted-influence-tropical-storm

Source: West Hawaii Today.

Kilauea-degazage

Les gaz du Kilauea contribuent à former le « vog », brouillard volcanique qui peut perturber la vie sur la Grande Ile.

(Photo:  C.  Grandpey)