Les inondations au Sahara et leurs conséquences // Floods in Sahara and their consequences

S’agissant des événements extrêmes provoqués par le réchauffement climatique d’origine humaine ces dernières semaines, on a beaucoup parlé des ouragans Helene et Milton qui ont meurtri le sud-est des États-Unis. Un autre événement extrême est passé plus inaperçu, bien qu’il puisse avoir un impact sur toute une région dans les mois et années à venir.
Les 6 et 7 septembre 2024, des précipitations équivalentes à celles d’une année entière se sont abattues sur certaines régions du Maroc, provoquant des inondations dans des régions habituellement arides. On recense 11 morts et 9 disparus.
Les zones touchées ont connu d’importantes perturbations. Il est fait état de maisons détruites, de dégâts sur les routes et de problèmes d’approvisionnement en électricité et en eau potable. Les inondations ont également entraîné le remplissage de lacs et d’aquifères jusque là asséchés, ce qui pourrait atténuer temporairement les pénuries d’eau dans la région.
Tagounite, près de la frontière algérienne, a enregistré 170 mm de précipitations le 7 septembre, et Marrakech en a enregistré 90 mm. Dans la région de Ouarzazate, 47 mm de pluie sont tombés en seulement trois heures.
La région du sud du Maroc connaît habituellement des précipitations relativement faibles, en particulier en septembre. Par exemple, Marrakech reçoit généralement entre 15 et 20 mm de précipitations au cours de ce mois. Ouarzazate, située dans une région désertique, ne reçoit en moyenne que 5 à 10 mm au cours de ce même mois.
Chaque année, les précipitations varient selon les régions : Marrakech reçoit environ 240 à 280 mm de pluie, Essaouira environ 300 à 350 mm et Ouarzazate seulement 50 à 100 mm. Des villes comme Tagounite et Asni, situées près du Sahara et des montagnes de l’Atlas, connaissent des précipitations annuelles tout aussi faibles en raison de leur environnement aride.
Les climatologues de la Direction météorologique du Maroc indiquent que les fortes précipitations récentes sont les plus intenses enregistrées depuis 30 à 50 ans dans un laps de temps aussi court. Ces précipitations inhabituelles sont importantes car le Sahara est généralement l’une des régions les plus sèches de la planète. Les météorologues marocains ajoutent que la présence d’eau dans le Sahara pourrait profondément modifier les prévisions météorologiques. Ainsi, ce type de situation pourrait avoir un impact notable sur les systèmes météorologiques et les modèles de prévision, car l’humidité crée par de telles précipitations peut influencer les conditions atmosphériques, modifiant potentiellement les modèles météorologiques établis dans la région et au-delà.
Source : The Watchers, presse marocaine, NASA.

 

Image du Sahara le 14 août 2024 avant le déluge

Image de la même région après les fortes précipitations

(Source : NASA)

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As far as extreme events triggered by human-caused global warming are concerned, there has been a lot of talk about huricanes Helene and Milton that deeply affected south-est United States. Another extreme event went more discreet although it could have an impact on a whole region.

Over a year’s worth of rainfall fell on parts of Morocco on September 6th and 7th, 2024, causing floods in normally arid regions, and resulting in 11 deaths and 9 missing persons.

The affected areas experienced significant disruptions, with reports of destroyed homes, damage to roads, and issues with electricity and drinking water supplies. The flooding also led to the refilling of dry lakebeds and aquifers, which might temporarily ease water shortages in the region.

Tagounite, near the Algerian border, registered 170 mm of precipitation on September 7th, and Marrakech recorded 90 mm. In the Ouarzazate region, 47 mm of rain fell within just three hours.

The region of southern Morocco experiences relatively low rainfall, particularly in September. For example, Marrakech typically receives around 15 – 20 mm of rainfall during this month. Ouarzazate, which is located in a desert region, averages just 5 – 10 mm during the same month.

Annually, the rainfall varies across these areas, with Marrakech receiving approximately 240 – 280 mm, Essaouira about 300 – 350 mm, and Ouarzazate only 50 – 100 mm. Towns like Tagounite and Asni, situated near the Sahara and Atlas Mountains, experience similarly low levels of annual precipitation due to their arid surroundings.

Climatologists at Morocco’s General Directorate of Meteorology indicate that the recent heavy rainfall was the most intense in 30 to 50 years within such a short timeframe. This unusual precipitation is significant because the Sahara is typically one of the driest regions on Earth. Local meteorologists add that the presence of water in the Sahara could profoundly alter weather forecasts in the future. Thus, it could have a notable impact on weather systems and prediction models, as the additional moisture can influence atmospheric conditions, potentially changing established weather patterns across the region and beyond.

Source : The Watchers, presse marocaine, NASA.

https://watchers.news/

COP 26 : Les causes de la prolifération des sargasses // COP 26 : The causes of sargassum proliferation

J’ai évoqué plusieurs fois sur ce blog les bancs de sargasses, ces algues brunes qui ont envahi les Caraïbes et pourri la vie à la Martinique ou à la Guadeloupe. Lors de mes voyages en Martinique, j’ai pu me rendre compte de leur impact sur l’environnement et sur la santé des personnes.
Un groupe de chercheurs américains a identifié l’une des principales causes de ce phénomène : les eaux usées d’origine humaine et les eaux de ruissellement agricoles transportées par les rivières vers l’océan. En réalité, les scientifiques pensent que l’on a affaire à un phénomène complexe associant changement climatique, destruction de la forêt amazonienne et poussière en provenance de l’ouest du désert du Sahara. Cet ensemble de facteurs favorise très probablement les méga-proliférations de sargasses.
En juin 2018, les scientifiques ont enregistré la présence de 20 millions de tonnes d’algues, soit une augmentation de 1000% par rapport à 2011 pour ce même mois.
Une étude publiée en mai 2021 dans la revue Nature Communications a examiné la chimie des sargasses des années 1980 à 2019. Elle offre la preuve que l’eau de ruissellement des villes et des terres agricoles est un contributeur majeur à l’expansion de La Grande Ceinture des Sargasses de l’Atlantique qui s’étire aujourd’hui sur près de 9 000 kilomètres.
Cette étude a révélé que les sargasses prélevées récemment dans les eaux côtières entre le Brésil et le sud des États-Unis, y compris dans plusieurs pays des Caraïbes, contiennent des niveaux d’azote en moyenne 35 % plus élevés que dans les échantillons prélevés il y a plus de trente ans. L’azote se trouve dans les déchets humains et animaliers et dans les engrais. Les résultats de l’étude montrent que les eaux usées et le ruissellement agricole qui se déversent dans les rivières des Amériques puis dans l’océan favorisent la croissance des sargasses au large. Les courants océaniques transportent ensuite une grande partie de ces algues vers la mer des Caraïbes, où elles perturbent les économies côtières qui dépendent du tourisme.
Les échantillons d’algues prélevés montrent également une augmentation de 111% du rapport de l’azote au phosphore au cours de la même période. Ce ratio a été presque constant dans tous les océans du monde depuis des décennies. Ce changement prouve que la chimie de l’eau a été radicalement modifiée.
Une autre partie de l’étude insiste sur le rôle joué par le changement climatique. Avec la hausse des températures dans le monde, les scientifiques pensent que les pluies torrentielles s’intensifient dans certaines régions du globe, notamment en Amazonie. Ces précipitations très abondantes augmentent la fréquence des inondations, ce qui entraîne probablement plus de ruissellement riche en azote vers la mer. Les scientifiques notent que les inondations les plus importantes de l’Amazone en mars et avril véhiculent des bancs de nutriments à des centaines de kilomètres vers la mer, ce qui coïncide avec les principales proliférations de sargasses. A partir de là, les courants font remonter les algues le long de de la côte du Venezuela, puis dans la mer des Caraïbes et parfois même plus au nord dans le golfe du Mexique. Le changement climatique provoque également des ouragans plus puissants qui extraient plus de nutriments des fonds marins est sont susceptibles de fertiliser les sargasses.
Comme mentionné ci-dessus, la poussière du désert du Sahara contribue elle aussi à la prolifération des sargasses. En effet, au fur et à mesure que les particules sont emportées vers l’ouest et traversent l’océan Atlantique, elles rencontrent des nuages et se retrouvent au sol avec la pluie, sous forme de dépôts fertilisants de fer et de phosphore dans l’eau.
Il faudra des années de financement et de recherche pour prouver exactement dans quelle mesure chacun des facteurs que l’on vient de mentionner contribue à la prolifération des sargasses.
Selon les auteurs de l’étude, ce phénomène se poursuivra jusqu’à ce qu’il y ait un changement de politique de la part des états concernés. Le Brésil, par exemple, pourrait décider des ralentir la déforestation qui a conduit à une intensification de l’élevage. Un tel élevage permet inévitablement à la terre meuble, au fumier et aux engrais de se déverser dans les rivières.
Source : Yahoo News.

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La Collectivité Territoriale de Martinique (CTM) a décidé de prendre les choses en main pour lutter contre l’envahissement des sargasses. La conseillère exécutive en charge des fonds européens a présenté deux demandes de financement pour des barrages dédiés à la ville du Robert, particulièrement touchée par les vagues successives d’algues brunes. Le coût de l’opération est estimé à environ 1,200 000 million d’euros dont 700 000 euros de fonds communautaires.

Lors des débats, majorité et opposition ont souligné « l’absence de l’Etat » qui a été accusé d’être « totalement défaillant ».

Une autre demande de financement concerne les effets des algues indésirables sur la santé des populations exposées, problème que j’ai exposé dans des notes précédentes. L’étude permettra de caractériser les conséquences sur la santé, ainsi que la mise en œuvre de mesures préventives et la prise en charge médicale. Le résultat de cette étude devrait aboutir à « l’élaboration d’un plan régional de santé publique ».

Source: Martinique la 1ère.

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I have mentioned several times on this blog the shoals of Sargassum, the brown seaweed that invaded the Carribean. During my trips to Martinique, I could realize their impact on the environment and on people’s health.

A group of U.S. researchers has fingered a prime suspect: human sewage and agricultural runoff carried by rivers to the ocean. This nutrient-charged outflow is just one of several likely culprits fueling an explosion off sargassum in warm waters of the Americas. Scientists suspect a complex mix of climate change, Amazon rainforest destruction and dust blowing west from the Sahara Desert may be fueling mega-blooms of the sargassum.

In June 2018, scientists recorded 20 million metric tons of seaweed, a 1,000% increase compared with the 2011 bloom for that month.

A recent study published in May 2021 in the journal Nature Communications examined the chemistry of sargassum from the 1980s up to 2019. It offers the strongest evidence that water coming from city and farm runoff has been a major contributor to the expansion of the so-called Great Atlantic Sargassum Belt, which now stretches for nearly 9,000 kilometers.

That study found that sargassum collected recently in coastal waters from Brazil to the southern United States, and including several Caribbean nations, contained levels of nitrogen that were 35% higher on average than in samples taken more than three decades earlier.

Nitrogen is found in human and animal waste and in fertilizers. The results suggest that sewage and farm runoff that is flowing into rivers throughout the Americas and then on to the ocean is feeding offshore sargassum growth. Currents carry much of this seaweed to the Caribbean Sea, where it is disrupting the region’s tourism-dependent coastal economies.

The samples also showed, for example, a 111% rise in the ratio of nitrogen to phosphorus during the same time frame. That ratio has been nearly constant across the world’s oceans going back decades. The change suggests the water chemistry has been radically altered..

Another part of the study insists on the part played by climate change. As global temperatures rise, scientists believe that rainstorms are intensifying in certain areas of the globe, including over the Amazon. Those storms are increasing the frequency of extreme flooding, which likely is pushing more nitrogen-rich runoff out to sea. Experts note that peak Amazon River flooding pushes a plume of nutrients hundreds of kilometers out to sea in March and April, coinciding with major sargassum blooms. From there, currents push the seaweed around the coast of Venezuela into the Caribbean Sea and sometimes even farther north into the Gulf of Mexico. Climate change is also fueling stronger hurricanes, which at sea are pulling more nutrients up from the seabed to potentially fertilize sargassum.

As mentioned above, dust from the Sahara Desert could be contributing to the sargassum boom. Indeed, as the particles are blown westward over the Atlantic Ocean, they run into clouds and get rained down as fertilizing iron and phosphorus deposits in the water.

Proving exactly how much each of these factors might be contributing to sargassum’s growth will take years of funding and research.

According to the authors of the study, this phenomenon will continue until there is a change in public policy. Brazil, for example, could slow deforestation, which has led to a boom in cattle ranching that allows loose soil, manure and fertilizer to wash into rivers.

Source: Yahoo News.

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The Collectivité Territoriale de Martinique (CTM) has decided to take matters into its own hands to fight against the invasion of Sargassum. The executive advisor in charge of European funds has presented two funding requests for dams dedicated to the town of Robert, particularly affected by the successive waves of brown algae. The cost of the operation is estimated at around 1,200,000 million euros, including 700,000 euros from Community funds.
During the debates, the majority and the opposition stressed « the absence of the State » which was accused of being « totally failing ».
Another request for funding concerns the effects of the algae on the health of exposed populations, an issue I have outlined in previous posts. The study will characterize the consequences on health, as well as the implementation of preventive measures and medical care. The result of this study should lead to « the development of a regional public health plan ».
Source: Martinique la 1ère.

Sargasses à la Martinique (Photos: C. Grandpey)