Piton de la Fournaise (Ile de la Réunion): Fin the l’éruption // End of the eruption

17 heures. Il fallait s’y attendre; c’était la conclusion de ma dernière note : L’activité éruptive débutée le 25 octobre 2019 à 14h40 (heure locale) s’est arrêtée ce 27 octobre 2019 à 16h30 (heure locale), après une phase d’activité de « gaz piston » d’environ une heure.

Comme il le fait à l’issue de chaque éruption, l’OVPF écrit qu’aucune hypothèse n’est écartée quant à l’évolution de la situation à venir.

Source : OVPF.

On connaît le tempérament fantasque du volcan qui pourrait très bien recommencer à émettre brièvement de la lave, histoire de finir de vider la poche superficielle de magma. Personnellement, je n’y crois pas trop. Cette 5ème éruption se retrouve dans le contexte des événements précédents : Très lente inflation du volcan, activité sismique sporadique et, au final, une éruption de quelques heures ou, au maximum, quelques dizaines d’heures. On a vraiment l’impression que le magma n’a pas la force d’atteindre le sommet di volcan, ce qui explique les émissions de lave à basse altitude, quand un réseau de fractures permet l’évacuation de la lave.

Je remarque aussi que ces cinq éruptions ont lieu au moment où est en train de naître au large de l’île de Mayotte un nouveau volcan sous-marin. Tout se passe comme si se nouveau volcan « pompait » le magma de la Fournaise et empêchait le volcan réunionnais de s’exprimer puissamment, comme autrefois. Etant donné la position géographique de la Réunion et de Mayotte et l’obstacle malgache entre les deux îles, je ne pense pas qu’il y ait de corrélation, mais rien ne dit que les profondeurs du manteau terrestre ne réservent pas des surprises. Le problème, c’est que l’analyse des laves émises à Mayotte et à la Réunion ne permettra pas vraiment de savoir si leur origine a des points communs.

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17:00: It was to be expected: The eruptive activity started on October 25th, 2019 at 14:40 (local time) stopped on October 27th, 2019 at 16:30 (local time), after a phase of gas pistoning activity which lasted about one hour.
As it does at the end of each eruption, OVPF writes that no hypothesis can be discarded as to the evolution of the future situation.
Source: OVPF.
We know the whimsical mood of the volcano that could very well begin to emit lava briefly, just to finish emptying the sshallow pocket of magma. Personally, I do not believe in this hypothesis. This fifth eruption is similar to the previous events: Very slow inflation of the volcano, sporadic seismic activity and, finally, an eruption of a few hours or, at most, a few dozen hours. One really feels that magma does not have the strength to reach the summit of volcano, which explains low-altitude lava emissions, when a network of fissures allows the evacuation of the lava.
I also notice that these five eruptions are taking place just as a new submarine volcano is appearing off the island of Mayotte. Everything happens as if the new volcano « pumped » the magma of La Fournaise and prevented the Reunion volcano from expressing powerfully, as before. Given the geographical position of Reunion and Mayotte and the Malagasy obstacle between the two islands, I do not think there is a correlation, but the depths of the Earth’s mantle may hold surprises. The problem is that the analysis of lava emitted in Mayotte and Reunion will not really allow to know if their origin has common points.

 

En souvenir de la cinquième éruption…

Crédit photo: Fabrice Juignier

Piton de la Fournaise (Ile de la Réunion) : La lave fait du surplace // Lava is no longer moving forward

 9 heures (heure métropole) : L’éruption du Piton de la Fournaise continue, mais la lave fait du surplace dans le Grand Brûlé et il y a peu de risque d’elle atteigne et traverse la RN2. Comme je l’ai indiqué précédemment, le front de coulée se trouvait à 25 mètres de la chaussée samedi vers 17 heures.

Ce matin, la coulée n’a avancé que de quelques mètres. La progression de la lave se fait désormais sur des pentes moyennes de 19%, sans pour cela vraiment accélérer sa progression. Cette lenteur s’explique par la baisse du débit à la source (traduite par la décroissance rapide du tremor), de sorte que la lave n’exerce plus suffisamment de pression sur l’aval.

Par mesure de sécurité, la RN 2 reste coupée. A noter que les gendarmes surveillent attentivement le comportement des curieux et freinent les ardeurs de ceux qui s’approchent trop près des coulées. Les pompiers sont également sur le qui-vive pour pallier les risques de départs de feu de végétation.

Source : Réunion La 1ère.

12 heures : Après une baisse progressive depuis le début de l’éruption, l’intensité du tremor montre des signes de fluctuation depuis 2h45 (heure locale). Selon l’OVPF, ce phénomène est à mettre en relation avec le processus d’édification et de démantèlement du cône volcanique qui s’est formé au niveau de la bouche éruptive. Cela induit forcément des variations de pression qui influent sur le tremor. Toutefois, l’activité au niveau du site éruptif localisé à 1050 m d’altitude est faible. La hauteur des projections de lave est inférieure à 20 mètres, et le cône qui s’est édifié fait une dizaine de mètres de hauteur. Comme je l’ai indiqué précédemment, le front de coulée le plus proche de la RN2 (à environ 250 mètres de la chaussée) est figé et ne progresse plus.

Il est à noter toutefois qu’un nouveau bras de coulée, de petite taille, s’est formé en amont des coulées principales sur le côté sud du Piton Tremblet. Cette nouvelle émission de lave contribue forcément à ralentir la progression du front proche de la RN 2.

Source : OVPF.

Je pense personnellement qu’il va falloir se dépêcher à profiter du spectacle. La hausse ponctuelle du tremor (sans augmentation par ailleurs de la sismicité) pourrait bien signifier que le dyke à l’origine de l’éruption est en train de se refermer, un peu comme une blessure qui a fini de vider son sang et est en passe de se cicatriser…

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9:00 (Paris time): The eruption of Piton de la Fournaise continues, but lava is stagnating in the Grand Brûlé and there is little risk it might reach and cross RN2. As I put it before, the flow front was 25 metres from the roadway Saturday around 17:00.
This morning, lava has advanced only a few metres. The progression of the lava is now on slopes of 19%, without really accelerating its progression. This slowness is explained by the decrease of the output at the source (accompanied by the rapid declineof the tremor), so that lava does not exert enough pressure on the flow downslope.
As a safety measure, RN 2 remains closed. The gendarmes carefully control the behaviour of the visitors, and especially those who get too close to the flows. Firefighters are also on the alert to mitigate the risk of fire in the nearby vegetation.
Source: Réunion La 1ère..

12 p.m.: After a gradual decline since the beginning of the eruption, the intensity of the tremor has been showing signs of fluctuation since 2:45 (local time). According to OVPF, this phenomenon is related to the process of erection and dismantling of the volcanic cone at the eruptive vent. This necessarily induces pressure variations that affect the tremor. However, activity at the eruptive site (1050 m. a.s.l.) is weak. The lava projections are less than 20 metres high, and the cone that has been built is about ten metres high. As I indicated previously, the flow front located about 250 metres from the road is no longer advancing. It should be noted, however, that a new small lava branch is observed upslope of the main flows on the south side of Piton Tremblet. This new lava inevitably contributes to slowing the progression of the flow front close to RN 2.
Source: OVPF.
I personally think that tourists will have to rush to enjoy the show. The punctual rise in tremor (without any increase in seismicity) could well mean that the dyke causing the eruption is closing, much like an injury that has stopped bleeding and is about to heal …

Vue de la coulée samedi après-midi (Photo: Fabrice Juignier)

Le tremor ce matin (Source: OVPF)

Une nouvelle technique pour essayer de prévoir les éruptions // A new technique to try to predict eruptions

Notre capacité à prévoir les éruptions est encore très faible aujourd’hui. Des progrès ont certes été réalisés au cours des dernières décennies avec de nouveaux instruments performants, mais les centaines de morts causées par les éruptions du Merapi (Indonésie) en 2010 et du Fuego (Guatemala) en 2018 montrent que nous sommes encore très loin de la prévision parfaite.
Une équipe de chercheurs de l’Illinois et du Michigan a testé une nouvelle technique qui, selon eux,  pourrait permettre de prévoir avec précision à quel moment une éruption volcanique se produira. La méthode utilise physique et statistique pour analyser la probabilité de modèles d’éruptions passées. Pour ce faire, les scientifiques ont étudié l’histoire éruptive du volcan Okmok en Alaska.
Un panache de cendre émis lors de l’éruption de l’Okmok en 2008 s’est étiré sur environ 1,6 km dans le ciel et a constitué un danger pour les moteurs d’avion. L’éruption fut une surprise. En effet, après une éruption en 1997, on avait observé des périodes de légère activité dans les années qui ont suivi, mais pratiquement pas de sismicité ou d’autres signes annonciateurs d’une éruption.
Selon les chercheurs, pour développer de meilleures prévisions, il est essentiel de comprendre les éruptions volcaniques qui s’écartent de la norme. Les éruptions sont généralement prévisibles au vu de la sismicité, de l’inflation de l’édifice volcanique et des émissions de gaz, ainsi que d’autres paramètres analysés au cours de la période précédant une éruption. Cependant, l’Okmok ne présentait aucun de ces paramètres.
L’équipe de chercheurs a utilisé le filtrage de Kalman – Ensemble Kalman Filter (EnKF) – une technique d’analyse de données statistiques qui a été améliorée après la Seconde Guerre mondiale. La version utilisée pour l’étude a été mise à jour en 1996 et a continué à être utilisée dans les prévisions météorologiques et climatiques, ainsi que dans l’océanographie physique. L’équipe de chercheurs a été la première à utiliser la méthode en volcanologie, en particulier pour l’étude de l’éruption de l’Okmok.
Les scientifiques ont constaté qu’il n’y avait pas eu d’augmentation de la sismicité avant l’éruption de l’Okmok en 2008. Cela pourrait s’expliquer par le fait que le réservoir magmatique sous le volcan avait conservé la même taille pendant qu’il se remplissait de gaz à haute température et de magma. Cela a entraîné une hausse de pression dans la chambre qui a provoqué le déplacement des roches environnantes, phénomène qui a fini par déclencher des séismes. Lors de l’éruption de 2008, il apparaît que la chambre magmatique s’est agrandie pour s’adapter à l’augmentation de pression, de sorte que l’activité sismique qui aurait dû normalement précéder l’éruption n’a pas eu lieu et n’a donc pas pu être détectée.
En regardant dans le passé grâce aux nouveaux modèles, les scientifiques ont pu constater que des contraintes s’étaient accumulées pendant des semaines dans les roches autour de la chambre magmatique et la croissance du système magmatique avait finalement entraîné sa rupture et l’éruption volcanique. La modélisation en amont et en aval a permis aux chercheurs d’observer l’évolution du système volcanique. Ils ont été en mesure de faire évoluer le nouveau modèle dans le temps et de prévoir le comportement éruptif de l’Okmok.
Cependant, l’équipe scientifique a ajouté que chaque volcan était différent et qu’un modèle spécifique devrait être élaboré  pour chacun d’eux.

Source: American Geophysical Union (AGU) – Geophysical Research Letters / The Watchers.

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Our capacity to predict eruptions is still very low today. Progress has been made in the past decades with new effective instruments but the hundreds of deaths caused by the eruptions of Mt Merapi (Indonesia) in 2010 and Mt Fuego (Guatemala) in 2018 show that we are still very far from the perfect prediction.

A research team from Illinois and Michigan has tested a new technique that could possibly forecast how a volcanic eruption will happen accurately. The method combined physics and statistics to capture the probability of past eruption patterns. The scientists studied the history of the eruption of the Okmok Volcano in Alaska.

An ash plume from the eruption of Okmok in 2008 extended about 1.6 km into the sky and posed a hazard to aircraft engines. The eruption came a a surprise. Indeed, after an eruption in 1997, there were periods of slight unrest, but very little seismicity or other eruption precursors.

According to the researchers, in order to develop better forecasting, it is crucial to understand volcanic eruptions that deviate from the norm. Eruptions are commonly predicted by studying seismicity, inflation of the volcanic edifice and gas emissions, and other established parameters analused during the period that precedes an eruption. However, Okmok did not display any of the patterns.

The research team used a statistical data analysis technique called Ensemble Kalman Filter (EnKF) or Kalman filtering, which was improved after World War II. The version used for the study was updated in 1996 and has continued to be used in weather and climate forecasting, as well as physical oceanography. The research team was the first group to use the updated method in volcanology, especially for Okmok’s eruption study.

The researchers noticed there was a lack of increased seismicity before the eruption. A hypothesis explains that the reservoir under the volcano remained the same size as it filled with hot gases and magma. This resulted in pressure in the chamber that triggered surrounding rocks to move, eventually leading to earthquakes. In the 2008 eruption, it appears that the magma chamber grew larger to accommodate the increasing pressure, so that the precursor seismic activity could not be detected.

By looking back in time with the new models, the scientists could observe that stress had been building up in the rocks around the chamber for weeks, and the growth of the magma system ultimately led to its failure and eruption. The backward and forward modelling enabled researchers to observe the evolution of the volcanic system. They were also able to propagate the new model forward in time and predict Okmok’s eruptive behaviour afterward.

However, the scientific team added that since every volcano is different, a model must be specifically made for each of them.

Source: American Geophysical Union (AGU) – Geophysical Research Letters / The Watchers.

Vue du cratère de l’Okmok le 15 septembre 2008 (Crédit photo : Alaska Volcano Observatory)