Les photos prises par les différentes sondes spatiales montrent que la face visible de la Lune est marquée par d’importants bassins d’impact, tandis que sa face cachée présente des bassins beaucoup moins nombreux et plus petits, avec une croûte nettement plus épaisse. Ce déséquilibre intrigue les scientifiques depuis des décennies. Au fil des ans, les chercheurs ont proposé diverses théories pour expliquer cette asymétrie; elles allaient d’un réchauffement dû aux marées provoqué par l’orbite de la Lune autour de la Terre à une collision géante qui aurait remodelé sa structure interne. Toutefois, aucune preuve claire n’a été apportée quant à un mécanisme capable de justifier une évolution aussi inégale.

Quatre vues hémisphériques de la Lune, obtenues à partir d’images prises par la sonde Lunar Reconnaissance Orbiter de la NASA. En haut à gauche : la face visible. En haut à droite : l’hémisphère est. En bas à gauche : la face cachée. En bas à droite : l’hémisphère ouest. (Source : NASA/GSFC/Arizona State University)
Une équipe de scientifiques du Jet Propulsion Laboratory de la NASA a analysé les données de la mission GRAIL et identifié les premiers signes de différences de température au cœur même de la Lune. L’étude, publiée le 14 mai 2025 dans la revue Nature, montre que des éléments producteurs de chaleur dans la croûte lunaire ont maintenu une face de la Lune plus fine et plus chaude que l’autre, même après des milliards d’années.
En 2012, la mission GRAIL de la NASA a utilisé deux sondes spatiales pour cartographier la gravité lunaire avec une précision remarquable. En suivant d’infimes variations de distance entre les deux sondes lors de leur vol autour de la Lune, les chercheurs ont pu détecter de subtiles variations de son attraction gravitationnelle, des différences liées à des structures inégales en profondeur sous la surface lunaire.
En étudiant ces données, les chercheurs ont constaté une différence de 2 à 3 % dans la déformation du manteau lunaire entre ses faces visible et cachée. Des simulations informatiques de la structure lunaire révèlent que cette différence peut être attribuée à un écart de température de 100 à 200 °C entre les hémisphères visible et caché, la face visible étant plus chaude.
Ce contraste est probablement dû à une concentration plus élevée d’éléments radioactifs sur la face visible de la Lune, vestiges d’une activité volcanique datant d’il y a 3 à 4 milliards d’années. En effet, les données de la mission Lunar Prospector de la NASA ont révélé que la face visible de la Lune contient jusqu’à 10 fois plus de thorium que sa face cachée. L’abondance de thorium et d’éléments radioactifs similaires a probablement généré un excès de chaleur, ce qui a provoqué des différences de température de plusieurs centaines de degrés dans le manteau de la face visible au début de l’histoire de la Lune. Cette chaleur a pu créer de vastes poches de roche en fusion contribuant à façonner des formations volcaniques, telles que les maria ou mers lunaires que nous observons aujourd’hui. Les maria sont de vastes plaines basaltiques sombres sur la Lune, formées par la lave en s’écoulant dans d’anciens bassins d’impact. Les auteurs de l’étude pensent que les processus qui ont formé les mers lunaires il y a plusieurs milliards d’années sont toujours présents et actifs aujourd’hui. Des missions comme GRAIL, qui mesurent l’évolution du champ gravitationnel d’une planète lors du déplacement d’une sonde spatiale, permettent aux scientifiques d’obtenir à distance de précieux indices sur les caractéristiques internes des corps planétaires. Comme cette technique ne nécessite pas l’atterrissage d’une sonde spatiale, elle permet de révéler plus facilement les structures internes de planètes comme Mars, Encelade, lune de Saturne, ou Ganymède, lune de Jupiter.
Source : space.com.
À voir sur France 5, dans le cadre de Science Grand Format, un très intéressant documentaire intitulé « De l’autre côté de la Lune« . Il nous montre parfaitement la face cachée de notre voisine, mais aussi les enjeux de la conquête spatiale de la Lune et le Mars.
https://www.france.tv/france-5/science-grand-format/4725331-de-l-autre-cote-de-la-lune.html
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Photos taken by the different spacecraft show that the moon’s nearside is scarred by massive impact basins, while its farside features far fewer and smaller basins, and a significantly thicker crust. This imbalance has puzzled scientists for decades. Over the years, researchers have proposed various theories to explain this asymmetry, ranging from tidal heating caused by the moon’s orbit around Earth to a giant early collision that reshaped its internal structure. But there has been no clear evidence pointing to a mechanism capable of driving such an uneven evolution.
A team of scientists at NASA’s Jet Propulsion Laboratory analyzed data from NASA’s GRAIL mission and identified the first clear signs of temperature differences deep within the moon. The study, published on May 14th, 2025 in the journal Nature, suggests heat-producing elements lingering in the moon’s crust have kept one side of the moon thinner and warmer than the other, even after billions of years.
In 2012, NASA’s GRAIL mission used a pair of spacecraft to map the moon’s gravity with remarkable precision. By tracking tiny shifts in the distance between the two orbiters as they flew around the moon, the researchers were able to detect subtle variations in its gravitational pull, differences linked to uneven structures deep beneath the lunar surface.
Studying this data, the researchers found a 2–3% difference in how the moon’s mantle deforms between its near and far sides. Computer simulations of the moon’s structure suggest this difference can be attributed to a temperature gap of 100-200 degrees Celsius between the nearside and farside hemispheres, with the nearside being warmer.
This contrast has likely been sustained by a higher concentration of radioactive elements on the moon’s nearside, which are remnants of volcanic activity from 3 billion to 4 billion years ago. Indeed, data from NASA’s Lunar Prospector mission revealed the lunar nearside contains up to 10 times more thorium than lunar farside. The abundance of thorium and similar radioactive elements probably generated additional heat, driving temperature differences of several hundred degrees throughout the nearside mantle during the moon’s early history. This heat may have created large pockets of molten rock, helping shape volcanic features, such as the lunar maria we see today. The lunar maria are large, dark, basaltic plains on Earth’s Moon, formed by lava flowing into ancient impact basins. The authors of the study think that the processes which formed the lunar maria several billion years ago are still present and active today.
Missions like GRAIL that measure how a planet’s gravity field changes as a spacecraft orbits allow scientists to gain valuable clues about the internal characteristics of planetary bodies from afar. Because this technique does not require a spacecraft to land on the surface, it can more easily reveal interior structures of worlds like Mars, Saturn’s moon Enceladus, or Jupiter’s moon Ganymede.
Source : space.com.






