La Martinique bientôt au patrimoine mondial de l’UNESCO ?

Attente et angoisse commencent à monter à la Martinique. Du 10 au 25 septembre 2023 à Riyad en Arabie saoudite, la candidature de la Martinique sera examinée par le Comité du patrimoine mondial de l’UNESCO. Cette candidature concerne les « Volcans et forêts de la Montagne Pelée et pitons du nord de la Martinique« .

Plusieurs sites naturels de Martinique sont sélectionnés. Il s’agit du Mont Conil et de la Montagne Pelée, des Pitons du nord (ils sont au nombre de 13 avec ceux du Carbet), et du Morne Jacob. Avec le choix de ces sites, la Martinique met en avant sa biodiversité – avec les forêts – et sa géologie – la Montagne Pelée et l’éruption péléenne de 1902. La formation de la Montagne Pelé a aussi contribué à celle des pitons du Carbet / Morne Vert, une combinaison géologique unique au monde.

Selon les autorités locales, « si la candidature de la Martinique est retenue, les retombées attendues seront importantes. Les sites mentionnés ci-dessus auront une visibilité internationale prestigieuse comme celle du Mont Saint Michel, du Grand Canyon, de la grande muraille de Chine. »

Cette mise en avant internationale devrait provoquer une augmentation de la fréquentation touristique de 30 à 40%. Il ne faut toutefois pas s’emballer à ce sujet. Je n’ai pas l’impression touristique ait considérablement augmenté en Auvergne. Pour ce faire, il faudrait une campagne publicitaire digne de ce nom.

La 45ème session du Comité du patrimoine mondial aura à examiner 52 dossiers. Celui de la Martinique sera le 4ème à être scruté par le comité. La décision devrait être connue le 17 septembre à 1h du matin, heure de la Martinique.

Source : Martinique la 1ère.

NDLR : Je suis relativement optimiste quant au verdict du Comité. Avec la Montagne Pélée qui est une référence dans le monde de la volcanologie, la Martinique possède un sacré atout pour être élue. En métropole, la Chaîne des Puys et la Faille de la Limagne ont été inscrites au Patrimoine mondial de l’UNESCO, après plusieurs tentatives infructueuses, il est vrai. La Martinique mérite largement cet honneur !

Photo: C. Grandpey

Activité volcanique sous-marine dans les Iles Eoliennes // Underwater volcanic activity in the Aeolian Islands

Le numéro de juin 2023 du National Geographic France consacre un chapitre à l’activité volcanique sous-marine au large de la Sicile, en particulier dans les Iles Eoliennes. Ces sept îles sont d’origine volcanique et deux volcans, la Fossa di Vulcano et le Stromboli, sont toujours actifs. L’accès au sommet du Vulcano est très réglementé et il est carrément interdit à Stromboli. A Vulcano, il suffit de s’avancer un peu dans la mer pour voir des bouillonnements dignes d’un jacuzzi. L’eau de mer est brassée par les gaz volcaniques et nous rappelle que cette zone de l’archipel est bien active. Au large de l’île de Panarea émerge l’îlot de Basiluzzo. Les fonds marins à proximité regorgent de bulles de gaz.

Une mission d’exploration « UNESCO – 1 Océan » a été menée dans les îles Eoliennes en 2022, dans le but d’améliorer nos connaissances sur les volcans sous-marins et le risque de tsunamis en Méditerranée. La mission a rapporté des images exceptionnelles.
L’archipel des Éoliennes est un site du patrimoine mondial de l’UNESCO connu pour son intense activité volcanique. Le 13 mai 2022, le Stromboli a connu une nouvelle explosion majeure qui a généré un épais nuage de cendres et des glissements de terrain qui ont atteint la mer.
Cette éruption de surface était très visible, mais la majeure partie de l’activité volcanique mondiale est cachée à notre vue. Plus d’un million de volcans se trouvent sous l’eau et ils génèrent 80% de l’activité volcanique mondiale.
Dans le cadre de la Décennie des sciences océaniques (2021-2030), coordonnée par l’UNESCO, la mission d’exploration sous-marine « UNESCO – 1 Océan » s’est déroulée début juin 2022 non loin de Stromboli, au large de l’île de Panarea.
Les images tournées par Alexis Rosenfeld et le cinéaste italien Roberto Rinaldi nous emmènent au plus profond du cratère sous-marin de Panarea et le long du bord de la caldeira. A quelques mètres de profondeur seulement, des émissions permanentes de gaz, provenant directement de la chambre magmatique du volcan, s’échappent des entrailles de la Terre pour former d’impressionnants rideaux de bulles. Certains secteurs émettent plus d’un million de litres de gaz par jour.
A plus de soixante-dix mètres sous la surface, les plongeurs ont découvert un site exceptionnel : « The Smoking Land ». Il se compose d’une multitude de bouches hydrothermales qui expulsent des fluides acides à haute température.
Ces phénomènes sont surveillés quotidiennement par l’équipe du professeur Francesco Italiano, chef de la section de Palerme de l’INGV, que je salue ici. En effet, ils peuvent représenter un risque pour la population. Ces dernières années, les scientifiques ont noté une « instabilité » dans le comportement des volcans, avec la nécessité de recherches plus approfondies. Ils pensent qu’un « événement majeur » est possible. Francesco Italiano a déclaré : « Nous estimons que, selon un cycle naturel, il y a une éruption majeure dans cette zone tous les 70 ans. La dernière a eu lieu à la fin des années 1930. [En cas d’éruption] un des risques est le déclenchement d’un tsunami. Il pourrait toucher les îles en quelques minutes, ce qui signifie que nous devons réagir très rapidement. »
Source : UNESCO.

Voir aussi ma note du 4 mars 2018 intitulée « Les bouches hydrothermales de Basiluzzo. »

https://claudegrandpeyvolcansetglaciers.com/2018/03/04/les-bouches-hydrothermales-de-basiluzzo-iles-eoliennes-sicile-the-hydrothermal-vents-of-basiluzzo-aeolian-islands-sicily/

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The June 2023 issue of National Geographic France devotes a chapter to the underwater volcanic activity off Sicily, in particular in the Aeolian Islands. These seven islands are of volcanic origin and two volcanoes, La Fossa di Vulcano and Stromboli, are still active. Access to the summit of Vulcano is strictly regulated and it is completely forbidden at Stromboli. At Vulcano, you just have to walk into the sea to see bubblings worthy of a jacuzzi. The sea water is brewed by volcanic gases and reminds us that this area of the archipelago is very active. Off the island of Panarea emerges the islet of Basiluzzo. The nearby seabed is full of gas bubbles.

A « UNESCO – 1 Ocean » exploration mission was carried out in the Aeolian Islands in 2022, with the goal of improving our knowledge of underwater volcanoes and the risk of tsunamis in the Mediterranean. The mission has brought back exceptional images.

The Aeolian Islands archipelago is a UNESCO World Heritage Site known for its intense volcanic activity. On May 13th, 2022, the Stromboli volcano experienced another major explosion that generated a thick cloud of smoke and landslides that reached the sea.

While this surface eruption was highly visible, most of the world’s volcanic activity is actually hidden from view. More than a million volcanoes are underwater, generating 80% of the world’s volcanic activity.

As part of the Decade for Ocean Science (2021-2030), coordinated by UNESCO, a « UNESCO – 1 Ocean » exploration mission conducted an underwater exploratory mission in early June 2022 not far from Stromboli, off the island of Panarea.

The images shot by Alexis Rosenfeld and Italian filmmaker Roberto Rinaldi take us deep into the Panarea underwater crater and along the rim of the caldera. At a depth of only a few metres, permanent gas eruptions, coming directly from the volcano’s magma chamber, escape from the bowels of the Earth to form impressive curtains of bubbles. Some areas release more than a million litres of gas a day.

Much deeper, more than seventy metres below the surface, an exceptional site has been discovered: The Smoking Land. It consists of a multitude of hydrothermal vents that expel acidic fluids at high temperatures.

These phenomena are monitored daily by the team of Professor Francesco Italiano, head of the Palermo section of the National Institute of Geophysics and Volcanology (INGV), because they can represent a risk for the population. In recent years, scientists have noted an « instability » in the behaviour of volcanoes that requires further research. They believe that a « major event » is possible. Francesco Italiano has declared: «  We estimate that, according to a natural cycle, there is a major explosion in this area every 70 years. The last one took place at the end of the 1930s. [In the event of an explosion] one of the risks is the formation of a tsunami. It could hit the islands in a few minutes, which means that we have to react very quickly. »

Source : UNESCO/

See my post of March 4th, 2018 : « The hydrothermal vents of Basiluzzo. »

https://claudegrandpeyvolcansetglaciers.com/2018/03/04/les-bouches-hydrothermales-de-basiluzzo-iles-eoliennes-sicile-the-hydrothermal-vents-of-basiluzzo-aeolian-islands-sicily/

 

Bouillonnements et décoloration de l’eau de mer à Vulcano

Vue de Basiluzzo depuis Panarea (Photo: C. Grandpey)

Vue d’une cheminée hydrothermale (Image extraite de la vidéo)

La mort des glaciers (suite) // The death of glaciers (continued)

Un rapport de l’ONU rappelle une fois de plus que les glaciers de la planète, en particulier les derniers glaciers d’Afrique, auront inévitablement disparu d’ici 2050 en raison du réchauffement climatique. Un rapport de l’UNESCO ajoute que les glaciers d’un tiers des sites inscrits au patrimoine mondial des Nations Unies fondront complètement dans les trente prochaines années.
Les derniers glaciers du Kilimandjaro disparaîtront, tout comme les glaciers des Alpes et ceux du Parc national de Yosemite aux États-Unis. Ils fondront quelles que soient les mesures prises pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre. Le processus est irréversible.
Environ 18 600 glaciers ont été identifiés sur 50 sites du Patrimoine mondial des Nations Unies. Ils représentent près de 10 % de la surface glaciaire sur Terre. Les uns après les autres, les rapports expliquent que le retrait et la disparition des glaciers comptent « parmi les preuves les plus spectaculaires du réchauffement climatique ».
Les glaciers encore présents dans les deux autres tiers des sites du Patrimoine mondial des Nations Unies pourraient être sauvés, à condition que le monde limite le réchauffement climatique à 1,5°C. Un autre rapport de l’ONU publié début novembre révèle que, malheureusement, le monde ne montre actuellement « aucune voie crédible » pour y parvenir.
En consultant les archives historiques, on se rend compte de la rapidité sans précédent avec laquelle se produit la fonte des glaciers. Au milieu des années 1900, les glaciers étaient relativement stables, puis ils ont entamé le recul incroyablement rapide auquel nous assistons aujourd’hui.
Parmi les glaciers inscrits sur la liste du Patrimoine mondial et voués à disparaître d’ici 2050, on remarque le Parc national des Virunga (République Démocratique du Congo) ; le Parc national de Yellowstone (États-Unis); le Parc national du Mont Kenya (Kenya); les Pyrénées avec le Mont Perdu (France, Espagne) ; le Parc national des monts Rwenzori (Ouganda); le Haut lieu tectonique suisse Sardona (Suisse); le Parc national Nahanni (Canada); le Parc national du Kilimandjaro (Tanzanie); le Parc national de Yosemite (États-Unis); Les Dolomites (Italie).
Le rapport indique que la perte de glace dans les sites du Patrimoine mondial pourrait avoir déjà causé jusqu’à 4,5 % de l’élévation mondiale du niveau de la mer observée entre 2000 et 2020. Ces glaciers perdent 58 milliards de tonnes de glace chaque année. C’est l’équivalent du volume annuel d’eau consommé ensemble par la France et l’Espagne.
De nombreuses personnes dépendent également des glaciers comme source d’eau pour l’usage domestique et l’agriculture. Leur disparition pourrait donc entraîner une pénurie d’eau douce pendant les saisons sèches.
Les populations locales et les peuples autochtones seront les premiers exposés aux inondations causées par la fonte des glaciers. Les auteurs du rapport insistent pour que des systèmes d’alerte précoce et de réduction des risques de catastrophe soient mis en place.
La mesure la plus évidente à prendre serait évidemment de limiter le réchauffement climatique.
Source : BBC News / Climat et Science.

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A United Nations report warns one more that glaciers across the globe, including the last ones in Africa, will have unavoidably disappeared by 2050 due to global warming. A UNESCO report adds that glaciers in a third of UN World Heritage sites will melt within three decades.

Mount Kilimanjaro’s last glaciers will vanish as will glaciers in the Alps and Yosemite National Park in the US. They will melt regardless of the world’s actions to combat greenhouse gas emissions.

About 18,600 glaciers have been identified across 50 UN World Heritage sites. They represent almost 10% of the Earth’s glacierised area. The reports warns that the retreat and disappearance of glaciers is « among the most dramatic evidence that Earth’s climate is warming. »

The remaining glaciers in the other two thirds of UN World Heritage sites could be saved, but only if the world limits global warming to 1.5°C. Another UN report released early November found that the world currently had « no credible pathway » to achieve that.

What is quite unprecedented in the historical record is how quickly glacier melting is happening. In the middle of the 1900s, glaciers were quite stable, Then there was the incredibly fast retreat we see today.

Among the glaciers on the World Heritage list that will disappear by 2050, one can see Virunga National Park (Democratic Republic of the Congo); Yellowstone National Park (USA); Mount Kenya National Park/Natural Forest (Kenya); Pyrenees Mont Perdu (France, Spain); Rwenzori Mountains National Park (Uganda); Swiss Tectonic Arena Sardona (Switzerland); Nahanni National Park (Canada); Kilimanjaro National Park (Tanzania); Yosemite National Park (USA); The Dolomites (Italy).

The report says that ice loss in World Heritage sites may have caused up to 4.5% of the observed global sea level rise between 2000 and 2020. These glaciers lose 58 billion tonnes of ice every year. This is the equivalent to the total annual volume of water used in France and Spain put together.

Many people also depend on glaciers as their water source for domestic use and agriculture, and their loss could lead to a scarcity of fresh water during the dry seasons.

Local communities and indigenous people will bear the brunt of the flooding caused by glacier loss. The report’s authors urge that early-warning and risk-reduction disaster systems be put in place.

However the most obvious thing to be done is limit global warming.

Source : BBC News Climate and Science.

Glaciers dans le Parc de Yosemite (Crédit photo: NPS)

Fort risque sismique en Méditerranée?

C’est bien connu, la presse a ses marottes, avec des sujets qui ressortent de temps à autre, histoire de titiller les angoisses des lecteurs. Ces derniers jours, Le Figaro titrait :  » Le volcanisme sous-marin, menace oubliée en Méditerranée »; La Croix annonçait qu’ en Méditerranée, il y avait « un risque certain de tsunami dans les trente ans », information confirmée par le journal Libération. A l’heure où nous ne sommes pas fichus de prévoir, même à très court terme séismes et éruptions volcaniques, de telles affirmations prêtent à sourire, voire carrément à rire. Comme disait ma grand-mère, c’est gratuit et ça ne coûte pas cher.

On notera au passage que personne n’a vu venir les deux séismes de M 5,9 et M 4,5 qui ont tué plus d’un millier de personnes en Afghanistan le 22 juin 2022 !

C’est une déclaration en provenance de l’Unesco qui a déclenché cette avalanche d’articles. L’institution nous rappelle que le risque sismique est très peu considéré autour de la Méditerranée et qu’il est ignoré par beaucoup de personnes. Pourtant, le 16 octobre 1979, un raz-de-marée a été déclenché par un glissement de terrain à Nice. Il faut toutefois remarquer que cet événement était lié à l’effondrement d’une partie de l’extension de l’aéroport en cours de travaux. Le tsunami avait donc une cause largement humaine. Il a frappé la côte niçoise, faisant une dizaine de morts. D’autres événements similaires, mais d’origine naturelle, ont eu lieu en Algérie en 2003, et sur l’île grecque de Samos en 2020.

Selon un scientifique mandaté par l’UNESCO, «il y a 100 % de chances qu’un tel phénomène ait lieu en Méditerranée au cours des trente prochaines années.» Face à cette menace, l’institution onusienne a appelé, le 21 juin 2022, les pouvoirs publics à mettre en œuvre des mesures de sensibilisation, d’alerte et de prévention afin de s’assurer que les communautés côtières soient prêtes à réagir face à de tels phénomènes.

Il est indéniable que le risque tsunami existe en Méditerranée, tout comme le risque volcanique auquel il peut être lié, comme on l’a vu à Stromboli en décembre 2002. D’autres volcans se cachent sous la mer à proximité de la Sicile et de la côte italienne. Ils ont pour noms Panarea, Marsili – le plus grand volcan sous-marin d’Europe et de Méditerranée, dans la mer Tyrrhénienne entre Palerme et Naples – ou Empedocle dans le Canal de Sicile – entre la Sicile et la Tunisie -, un volcan sous-marin d’une trentaine de kilomètres de diamètre à sa base et dont le Ferdinandea n’est que l’un des cônes éruptifs. Dans une note publiée le 23 janvier 2022, je rapportais les paroles de Boris Behncke (INGV Catane) à propos de ce volcan dont le système éruptif a été décrit par les scientifiques comme « un grand relief sous-marin qui s’élève sur les fonds marins à une profondeur de 250 à 500 m, et sur lequel sont implantés des dizaines d’édifices volcaniques bien structurés de dimensions très variables, souvent alignés selon l’orientation NNO du Canal de Sicile. » Selon Boris, s’il n’y a pas de danger imminent, il est également vrai qu’il y a toujours la possibilité d’une forte éruption sous-marine avec un risque significatif de tsunami.

Dégâts causés par le tsunami de 2002 à Stromboli (Photo: C. Grandpey)