Un hiver chaud en France…et ailleurs! // A warm winter in France…and elsewhere!

drapeau-francaisAvec une température moyenne nationale de 7,9°C, l’hiver 2015-2016 est en train d’être le plus chaud observé en France depuis 1900, année du début des relevés. Avec un écart de 2,6°C au-dessus de la normale, cet hiver – en se référant aux températures enregistrées en décembre, janvier et février – se place loin devant les précédents records. 2015-2016 arrive loin devant 1989-1990 (+2°C) et 2006-2007 et 2013-2014 (+1,8°C). A noter que le mois de décembre 2015 a été le plus doux jamais observé avec un excédent de 3,9°C.
Autre indicateur de la douceur des mois passés, les gelées ont été peu fréquentes en plaine, souvent deux fois moins que la normale.
Sur les massifs, la neige a également tardé à apparaître. Des chutes ont été enregistrées en février, mais Météo-France fait remarquer que « l’enneigement n’a retrouvé des valeurs conformes qu’en altitude, au-dessus de 1.400 mètres ».
On peut lire sur le site du journal Le Point qu’« il n’est pas possible d’amputer (preuve que le journaliste ne connaît pas le français, car il aurait dû écrire imputer) avec certitude cette clémence au réchauffement de la planète, car la variabilité naturelle du climat, qui peut être de plusieurs degrés d’une année sur l’autre, est le facteur déterminant ». Une telle affirmation serait valable si l’on observait ponctuellement des hivers doux, ce qui n’est pas le cas. Au contraire, nous assistons à des hivers de moins en moins froids, une tendance qui reflète ce qui se passe dans les zones arctiques. A plusieurs reprises (voir ma dernière note du 26 février 2016), j’ai attiré l’attention sur la fonte rapide de la glace de mer dans l’Arctique où les températures ont encore atteint des sommets cet hiver, ce qui ne manque pas de poser des problèmes. Dans le monde animal, l’hibernation des ours bruns est perturbée tandis que les ours polaires ont bien du mal à trouver de la nourriture à cause du rétrécissement de la banquise. Il n’y a pas de neige à Anchorage (Alaska) en ce moment et il a fallu transporter de la neige depuis Fairbanks (où il n’y en a pas beaucoup) pour que la cérémonie de départ de l’Iditarod – célèbre course de traîneaux – puisse avoir lieu.
Certains diront que l’effet El Niño a contribué au coup de chaleur de ces derniers mois. C’est probable, mais ce n’est pas suffisant pour justifier la hausse des températures qui ne cesse de s’affirmer depuis le milieu des années 1980. Il est assez révélateur de constater que cette hausse est parallèle à la courbe de Keeling qui montre l’évolution des émissions de CO2 dans l’atmosphère depuis 1958.

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drapeau-anglaisWith a national average temperature of 7.9°C, the winter 2015-2016 has been the hottest in France since 1900, the year when the records began. With a difference of 2.6°C above normal, this winter – with reference to temperatures in December, January and February – is far ahead of previous records. 2015-2016 comes ahead of 1989-1990 (+ 2°C) and 2006 to 2007 and 2013-2014 (+ 1.8°C). December 2015 was the mildest on record with a surplus of 3.9°C.
Another indicator of the mildness of the past months, frosts have been infrequent in the plains, often twice less than normal.
In the mountains, snow has also been slow to appear. Snowfalls were recorded in February, but Météo-France indicates that « the layer of snow only found normal values above 1,400 meters a.s.l. »
One can read on the website of the newspaper Le Point that « it is not possible to link with certainty that mildness [of winters] to global warming, because natural climate variability, which can be several degrees from one year to the next, is the determining factor. » Such an assertion would be valid if we occasionally observed mild winters, which is not the case. Instead, we are witnessing less and less cold winters, a trend that reflects what happens in Arctic areas. On several occasions (see my last note of 26 February 2016), I have drawn attention to the rapid melting of sea ice in the Arctic where temperatures reached highs this winter, which entails quite a lot of problems. Among the animals, the hibernation of brown bears is disturbed while polar bears are struggling to find food because of the loss of sea ice. There is no snow in Anchorage (Alaska) these days and they had to carry snow from Fairbanks (where there is not so much) so that the ceremonial start of the Iditarod – the famous sled race – might take place.
Some will say El Nino has contributed to high temperatures in recent months. It is likely, but not enough to justify the rise of temperatures since the mid 1980s. It is quite significant to notice that this increase is parallel to the Keeling curve which has shown the evolution of CO2 emissions into the atmosphere since 1958.

Keeling 2016

Courbe de Keeling pour les 6 derniers mois. (Source: NOAA)

1815, une année sans été ! 2015, une année sans hiver? // 1815, a year without a summer! 2015, a year without a winter?

drapeau-francaisUne fois encore, nous n’avons pas eu de Noël blanc cette année. Le thermomètre ne descend plus au-dessous de zéro comme il le faisait il y a seulement un demi-siècle dans ma Creuse natale. Cela fait plusieurs semaines que les températures restent anormalement douces. Les météorologues affirment que cette douceur inhabituelle n’est pas forcément due au changement climatique, mais à une modification des pressions au pôle Nord. Le « vortex polaire » a, jusqu’à maintenant, été mis en échec par un phénomène connu sous le nom d’Oscillation Arctique. El Niño, qui provoque le réchauffement cyclique de la température de la surface de l’Océan Pacifique, a aussi sa part de responsabilité pour ces températures de mi-décembre qui ressemblent à celles d’une mi-avril.
Le temps chaud devrait se prolonger début 2016. Beaucoup se posent la question : Aurons-nous une année sans hiver? Ce ne serait pas bon pour les stations de ski qui ont investi beaucoup d’argent pour moderniser leurs équipements.
Les historiens ne manqueront pas de remarquer une coïncidence climatique: 2015 marque le 200ème anniversaire de ce que l’on a appelé « l’année sans été ». Le 5 avril 1815, le Tambora en Indonésie se réveilla d’un sommeil séculaire. Pendant plusieurs jours, de violentes explosions à répétition ont envoyé dans l’atmosphère des colonnes de cendre et de poussière d’une taille encore jamais vue qui ont fait disparaître le soleil et provoqué une chute des températures dans la région et dans de nombreux pays à travers le monde. Les populations se posèrent des questions sur la météo pendant les mois qui ont suivi. On a beaucoup écrit sur les gelées d’août 1815 ou les somptueux couchers de soleil qui ont inspiré les peintres du 19ème siècle.
L’hiver 2015-2016 sera-t-il la copie inverse de ce qui est arrivé en 1815? Personne ne le sait car les prévisions à long terme en météorologie sont aussi peu fiables qu’en volcanologie. Coïncidant avec la COP 21, l’hiver doux actuel devrait avant tout nous rappeler que notre planète est très fragile et que l’envoi de saloperies dans l’atmosphère est susceptible de déstabiliser un équilibre déjà bien incertain.

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drapeau-anglaisOnce again, we did not have a white Christmas this year. Below-zero temperatures are a thing of the past. They have remained unseasonably mild for weeks. Experts say the blame for this unwinter weather belongs not to climate change but to a shift in air pressure at the North Pole. The “polar vortex” has so far been kept at bay by a phenomenon known as Arctic Oscillation. El Niño, the cyclical warming of the surface temperature of the Pacific Ocean, is also doing its part to make mid-December feel like mid-April.
Warm weather is forecast to last well into the New Year, raising an intriguing possibility: could this be the year without a winter? It would not be good for ski resorts that invested money to upgrade their equipment.
Historians, however, will note a climatic coincidence: 2015 marks the 200th anniversary of what has come to be known as the year without a summer. On April 5th 1815, Indonesia’s Mount Tambora awoke from a centuries-long slumber. Over the course of several days, repeated thunderous explosions hurled massive amounts of ash and dust of unprecedented size, blotting out the sun and causing temperatures to plummet in the region and in many countries around the world which were left to wonder about the strange weather over the ensuing months. A lot has been written about the freezing days in August 1815 or the sumptuous sunset that inspired many 19th century painters.
Will the winter 2015 – 2016 be a reverse copy of what happened in 1815? Nobody knows as long-term predictions in meteorology are as impossible as in volcanology. Coinciding with the Paris climate conference, the current mild winter should remind us that our planet is quite fragile and that sending rubbish into the atmosphere is likely to destabilize an uncertain balance.

Tambora-blog

Le Tambora vu depuis l’espace (Crédit photo: NASA)

Yellowstone en hiver depuis le ciel // Yellowstone in winter from the sky

drapeau francaisAprès les vues panoramiques de la planète Mars et des volcans du Kamchatka, voici le Parc de Yellowstone vu depuis le ciel en hiver. En jouant avec la souris, vous pourrez survoler plusieurs sites du parc tels que le Norris Geyser Basin, le canyon de la Yellowstone River ou encore le Grand Prismatic. Pour passer d’un endroit à l’autre, il suffit de cliquer sur les doubles flèches au bas de l’image. Dix circuits aériens vous sont proposés. Bon voyage !

http://www.airpano.ru/files/Yellowstone-USA/2-2

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drapeau anglaisAfter the panoramic views of Mars and the volcanoes of Kamchatka, here is Yellowstone Park as seen from the sky in winter. By playing with the mouse, you can fly over several park sites such as the Norris Geyser Basin, the canyon of the Yellowstone River and the Grand Prismatic. To move from one place to another, just click on the double arrows at the bottom of the image. Ten air tours are available. Bon Voyage!
http://www.airpano.ru/files/Yellowstone-USA/2-2

Yellowstone-blog

Yellowstone:  Grand Prismatic Spring  (Photo:  C.  Grandpey)

Eruptions volcaniques et hivers froids en Irlande // Volcanic eruptions and cold winters in Ireland

drapeau francais   En étudiant scrupuleusement 40.000 chroniques médiévales – les Annales Irlandaises – et en les comparant à des mesures effectuées à partir de carottes de glace, des chercheurs ont réussi à lier les conséquences climatiques des éruptions volcaniques aux épisodes de froid extrême en Irlande sur une période de 1200 ans, entre 431 et 1649.
Leur étude, qui a été récemment publiée dans la revue Environmental Research Letters, a montré que sur cette durée jusqu’à 48 éruptions volcaniques explosives ont pu être identifiées par le projet Greenland Ice Sheet (GISP2) qui enregistre chaque année les dépôts de sulfate volcanique dans les carottes de glace.
Parmi ces 48 événements volcaniques, 38 ont été étroitement associés à 37 événements de froid extrême identifiés en examinant systématiquement les entrées écrites dans les Annales Irlandaises et en recensant les phénomènes météorologiques observés directement, tels que les fortes chutes de neige et le gel, les périodes pendant lesquelles la glace a recouvert les lacs et les rivières, ainsi que les descriptions contemporaines de temps anormalement froid.
Une conclusion importante de l’étude est que les éruptions volcaniques explosives sont fortement et constamment impliquées dans la survenue de phénomènes météorologiques froids au cours de cette longue période temps (1200 ans) en Irlande. Il est rare que de tels événements météorologiques extrêmes se produisent dans un pays au climat océanique comme l’Irlande.
On sait que, suite à l’injection de dioxyde de soufre dans la stratosphère, les éruptions volcaniques peuvent jouer un rôle important dans la régulation du climat de la Terre. A l’issue des éruptions, le dioxyde de soufre se transforme en particules d’aérosols sulfatés qui réfléchissent la lumière solaire et entraînent un refroidissement temporaire de la surface de la Terre.
Alors que les effets globaux des éruptions récentes sont assez bien connus, comme celle du Pinatubo en 1991, on sait moins de choses sur leurs effets sur le climat avant l’apparition des instruments de mesures, ou encore leurs effets à l’échelle régionale. Les Annales Irlandaises ont permis d’apporter des réponses à ces deux questions.
Les grandes éruptions sont susceptibles de refroidir le climat en été ; en revanche, pendant l’hiver, les éruptions de basse latitude dans les tropiques ont plutôt tendance à réchauffer une grande partie de l’hémisphère nord car elles provoquent un renforcement des vents d’ouest qui apportent, par exemple, l’air plus chaud océanique en Europe. Toutefois, l’étude a identifié plusieurs cas où des éruptions de basse latitude semblaient correspondre à des hivers extrêmement froids en Irlande. Par exemple, les chercheurs ont été surpris de constater que, dans les années 1600, l’éruption au Pérou du Huaynaputina avait entraîné des hivers extrêmement froids en Irlande les années suivantes.
La possibilité que les éruptions tropicales puissent entraîner des hivers plus rigoureux en Irlande met en lumière la complexité de la relation volcans-climat en termes de réaction climatique régionale aux événements volcaniques.

Source : California Science & technology News.

drapeau anglais   By critically assessing over 40,000 written Irish medieval chronicles and comparing them with measurements taken from ice cores, researchers successfully linked the climatic aftermath of volcanic eruptions to extreme cold weather events in Ireland over a 1200-year period from 431 to 1649.

Their study, which has recently been published in the journal Environmental Research Letters, showed that over this timescale up to 48 explosive volcanic eruptions could be identified in the Greenland Ice Sheet Project (GISP2) ice-core, which records the deposition of volcanic sulphate in annual layers of ice.
Of these 48 volcanic events, 38 were associated, closely in time, with 37 extreme cold events, which were identified by systematically examining written entries in the Irish Annals and picking out directly observed meteorological phenomena and conditions, such as heavy snowfall and frost, prolonged ice covering lakes and rivers, and contemporary descriptions of abnormally cold weather.
A major result of the study is that explosive volcanic eruptions are strongly, and persistently, implicated in the occurrence of cold weather events over this long timescale in Ireland. In their severity, these events are quite rare for the country’s mild maritime climate.
It is well-known that through the injection of sulphur dioxide into the stratosphere, volcanic eruptions can play a significant role in the regulation of the Earth’s climate. Sulphur dioxide is converted into sulphate aerosol particles after eruptions which reflect incoming sunlight and result in an overall temporary cooling of the Earth’s surface.
While the global effects of recent eruptions are quite well-known, such as the 1991 Mount Pinatubo eruption, less is known about their effects on climate before the beginning of instrumental weather recording, or their effects on regional scales; the Irish Annals provided an opportunity to explore both of these issues.

Although the effect of big eruptions on the climate in summer is likely to cause cooling, during the winter, low-latitude eruptions in the tropics have instead been known to warm large parts of the northern hemisphere as they cause a strengthening of the westerly winds that brings, for example, warmer oceanic air to Europe; however, this study identified several instances when low-latitude eruptions appeared to correspond to extreme cold winters in Ireland. One example is the 1600 eruption in Peru of Huaynaputina, which the researchers found, against expectations, to be associated with extreme cold winter weather in Ireland in the following years.
The possibility that tropical eruptions may result in severe winter cooling for Ireland highlights the considerable complexity of the volcano-climate system in terms of the regional expression of the response of climate to volcanic disturbances.
Source : California Science & technology News.

Pinatubo-blog-2

L’éruption du Pinatubo (1991) a eu un effet certain sur le climat de la planète. Elle est décrite dans mon dernier livre « Killer Volcanoes, éruptions meurtrières des temps modernes » (voir colonne de gauche de ce blog).

[Crédit photo:  Wikipedia]