Une conférence sur les océans : à quoi bon ?

Pour la première fois, en France, des maisons ont été détruites à Treffiagat en Bretagne à cause de l’érosion côtière et du recul du trait de côte. Ce ne seront pas les dernières. Plus au sud, sur la côte atlantique, à Biscarrosse dans les Landes, les villas jumelles, deux copropriétés face à la mer, sont devenues inhabitables. Des exemples comme ceux-ci vont se multiplier dans les prochaines années. Selon un rapport du Centre d’études et d’expertise sur les risques, 5.200 habitations seront menacées par le recul du trait de côte, dont plus de 60% de résidence principale. La façade atlantique reste la plus exposée, mais la côte méditerranéenne, elle aussi, sera impactée. La cause est facile à comprendre : avec le réchauffement climatiques et la hausse ininterrompue des températures, les glaces fondent, phénomène auquel s’ajoute la dilatation thermique des océans.

C’est dans ce contexte que s’ouvre à Nice ce lundi 9 juin 2025 la Conférence des Nations Unies sur l’Océan (UNOC 3), coorganisée par la France et le Costa Rica. Avant même qu’elle débute, on peut se demander si une telle grand-messe sert à quelque chose et si elle sera suivie d’effets. On a vu que les Conferences of the Parties, les célèbres COP, se soldent régulièrement par des échecs. D’ailleurs, de nombreux chercheurs en océanographie-climatologie ont décliné l’invitation de participer à l’UNOC, de peur de ne pas être entendus. Il est vrai que les précédents rendez-vous au cours desquels la communauté scientifique a alerté sur l’état des océans, du système climatique ou des écosystèmes (One Ocean Summit, One Polar Summit, etc) n’ont guère été suivis d’effets. Il existe un énorme décalage entre la communication et l’action et on ne peut que constater la crise de confiance entre la politique et la science. Beaucoup de scientifiques se questionnent sur la sincérité de certains politiques qui prétendent prendre des décisions guidées par la science, alors que récemment, beaucoup sont allées dans le sens contraire. On l’a vu avec la suppression des zones à faibles émissions (ZFE) ou la réintroduction d’un pesticide néonicotinoïde.

Les États-Unis, premier domaine maritime au monde, n’ont pas prévu d’envoyer de délégation, comme aux négociations climatiques. Fin avril, Donald Trump a décidé unilatéralement d’ouvrir l’extraction minière dans des eaux internationales du Pacifique, contournant l’Autorité internationale des fonds marins dont les États-Unis ne font pas partie. L’Administration Trump va également cesser d’alimenter la base de données de référence recensant les coûteuses catastrophes climatiques, nouvelle conséquence des importantes réductions de financement de la NOAA,  l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA).

L’Organisation météorologique mondiale (OMM) a encore rappelé en mars le niveau inédit de réchauffement de l’océan, de montée du niveau de la mer et de dégradation des écosystèmes marins. On attend les mesures pour y remédier, en espérant que l’océan n’aura pas le dernier mot. Comme pour les COP, je crains fort que cette UNOC se solde par de belles promesses et des décisions non contraignantes.

Le trait de côte recule régulièrement, avec une menace pour les habitations construites trop près de l’océan, comme à Talmont, dans la Gironde (Photo: C. Grandpey)

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L’UNOC-3 a lieu à Nice, au bord de l’une des mers les plus polluées du monde, et très affectée par la réchauffement climatique. La Méditerranée, a atteint au cours de l’été 2024 la température record de 28,9°C.

Lors de l’ouverture de la troisième Conférence des Nations unies sur l’océan (Unoc-3), Emmanuel Macron a annoncé que le traité sur la haute mer, qui protège les eaux internationales, serait ratifié par suffisamment de pays pour pouvoir entrer en vigueur, sans toutefois préciser de calendrier. Le traité, signé en 2023, est censé entrer en vigueur 120 jours après la 60ème ratification. Il vise à lutter contre la pêche illégale et l’exploitation des grands fonds en haute mer, une zone qui représente les deux tiers des océans. Les États Unis n’ayant pas ratifié le traité et Donald Trump s’apprêtant à intensifier l’exploitation minière des fonds océaniques, l’application du traité semble avoir du plomb dans l’aile avant même son application. Antonio Guterres a beau affirmer que les océans ne doivent pas devenir un « Far West » de l’extraction minière, je vois mal comment il pourrait empêcher le président américain de se lancer dans son opération de saccage.

Le Groenland ou l’Antarctique « ne sont pas à vendre », a lancé le président Macron. Cette déclaration est, bien sûr, destinée à son homologue américain. J’approuve personnellement la prochaine visite d’Emmanuel Macron au Groenland le 15 juin. Elle ne servira pas à grand chose dans les faits, mais aura le mérite de montrer à Donald Trump qu’il n’est pas le seul sur Terre.

Au cours d’une soirée en direct sur France 2 le 10 juin, après le journal de 20 heures, présentée par Léa Salamé et Hugo Clément et suivie d’un documentaire sur la Polynésie, Emmanuel Macron « présentera les résultats de la Conférence des Nations unies sur l’océan et rappellera l’ambition de la France pour la protection des océans. » C’est bien, mais si aucune mesure contraignante n’est prise pendant l’UNOC, ce ne seront que parlotes et vœux pieux et nos océans continueront à dépérir.

Histoire d’enfoncer le clou… // Just to drive the point home…

Selon des scientifiques de l’Union européenne, 2023 devrait être la année la plus chaude que la planète ait connue depuis 125 000 ans. Ils ont fait cette déclaration après que les données ont montré qu’octobre 2023 était de loin le mois d’octobre le plus chaud jamais enregistré (voir ma note du 7 novembre). .
Comme je l’ai écrit précédemment, le réchauffement climatique que nous connaissons actuellement est dû aux émissions continues de gaz à effet de serre provenant de la combustion de combustibles fossiles, combinées à l’arrivée cette année d’El Niño, qui réchauffe les eaux de surface de l’océan Pacifique oriental et devrait durer au moins jusqu’au mois d’avril 2024. L’année la plus chaude jamais enregistrée jusqu’à présent est 2016, une autre année El Nino, même si 2023 est en passe de la dépasser.
Les données de l’agence Copernicus remontent à 1940. Lorsque les climatologues européens combinent leurs données avec celles du GIEC, le résultat est que 2023 est l’année la plus chaude des 125 000 dernières années. Les données du GIEC sur le long terme s’appuient sur des éléments tels que les carottes de glace, les cernes d’arbres et les dépôts coralliens.
Le réchauffement climatique provoque des phénomènes extrêmes de plus en plus destructeurs comme on vient de le voir en France. En 2023, des inondations ont tué des milliers de personnes en Libye ; l’Amérique du Sud a connu de sévères vagues de chaleur et le Canada a dû faire face à la pire saison d’incendies de forêt jamais enregistrée.
À l’échelle mondiale, la température moyenne de l’air à la surface de la Terre en octobre a été de 15,3 °C. C’est 1,7 °C de plus que que la moyenne du mois d’octobre de 1850 à 1900,(période préindustrielle). Le seul autre mois où le record de température a été battu avec une telle marge a été septembre 2023.
La combinaison du réchauffement climatique d’origine anthropique et d’El Nino fait craindre d’autres catastrophes provoquées par les vagues de chaleur à venir, notamment en Australie, qui s’attend à une nouvelle saison de feux de feux de végétation provoqués par un climat chaud et sec.
Les conclusions des scientifiques européens arrivent trois semaines avant la COP28 de Dubaï. Près de 200 pays essaieront de négocier des mesures plus efficaces pour lutter contre le réchauffement climatique. L’une des questions au cœur de la conférence sera de savoir si les gouvernements accepteront – pour la première fois et avec des mesures contraignantes – de réduire progressivement la combustion de combustibles fossiles émetteurs de dioxyde de carbone. Les dernières déclarations du sultan Al Jaber ne sont guère encourageantes : « Nous ne pouvons pas débrancher le système énergétique d’aujourd’hui avant de construire le système de demain. Ce n’est tout simplement ni pratique ni possible »
Source : Médias d’information internationaux.

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According to European Union scientists, 2023 is set to be the world’s warmest in 125,000 years. Their statement was made after data showed October 2023 was the hottest October on record by a massive margin (see my post of November 7th).

As I put it before, the heat is a result of continued greenhouse gas emissions from the burning of fossil fuels, combined with the emergence this year of El Nino which warms the surface waters in the eastern Pacific Ocean and is set to last until at least April 2024. The current hottest year on record so far is 2016, another El Nino year, although 2023 is on course to overtake that.

Copernicus’ dataset goes back to 1940. When European climatologists combine their data with the IPCC, the result is that 2023 is the warmest year for the last 125,000 years. The longer-term data from the IPCC includes readings from sources such as ice cores, tree rings and coral deposits.

Global warming is causing increasingly destructive extremes. In 2023, floods killed thousands of people in Libya ; there were severe heatwaves in South America, and Canada had to face its worst wildfire season on record.

Globally, the average surface air temperature in October of 15.3°C was 1.7°C warmer than the average for October in 1850-1900, which Copernicus defines as the pre-industrial period. The only other month to breach the temperature record by such a large margin was September 2023.

The combination of human-caused global warming together with El Nino raises concerns of more heat-fuelled destruction to come, including in Australia, which is confronted with a severe bushfire season amid hot and dry conditions.

The scientists’ findings come three weeks before governments meet in Dubai for this year’s COP28. Nearly 200 countries will negotiate stronger action to fight climate change. A central issue at the conference will be whether governments agree – for the first time and with binding measures – to phase out the burning of carbon dioxide-emitting fossil fuels. Sultan Al Jaber’s latest declarations of Sultan are not encouraging : “We cannot unplug today’s energy system before building tomorrow’s system. It’s just not practical or possible,”

Source : International news media.

Vulcano dans l’attente (Iles Eoliennes / Sicile) // Vulcano (Aeolian Islands / Sicily)

Les habitants de l’île éolienne de Vulcano attendent avec impatience le verdict d’une visioconférence qui doit avoir lieu le 20 décembre 2021 et à laquelle participeront des membres de l’INGV, de la Protection Civile, d’Arpa, d’Ispra, d’Asp et le maire de Lipari pour décider si la zone rouge et les contraintes qu’elle implique doit être prolongée ou si les insulaires pourront revenir dormir dans leurs maisons. L’ordonnance promulguée il y a un mois par le maire de Lipari expirera le 21 décembre.

Les dernières informations communiquées par l’INGV de Catane laissent entendre que la situation s’est légèrement améliorée, mais qu’il reste des zones sous la menace des gaz. La température des fumerolles diminue sur la lèvre du cratère et est stable sur sa face interne. Les émissions de CO2 à la base du cône de La Fossa et dans la zone de Vulcano Porto, mesurées automatiquement par le réseau Vulcanogas, montrent une baisse générale mais restent toujours à des valeurs élevées, à l’exception du site de Faraglione, où les valeurs habituelles sont enregistrées.
En revanche, les émissions de de CO2 dans la zone du cratère continuent de montrer des valeurs élevées, supérieures aux moyennes enregistrées au cours des 10 dernières années.

S’agissant de la géochimie des nappes phréatiques, les valeurs de température et de conductivité sont stables dans le puits du Camping Sicilia, tandis qu’une légère augmentation des valeurs est observée dans le puits Bambara et les valeurs de conductivité continuent de diminuer.

Ces derniers jours, les contrôles effectués par les techniciens de l’ARPA et d’Ispra avec de nouveaux instruments ont concerné essentiellement la zone rouge. Les résultats de ces mesures seront divulgués en réunion le 20 décembre par les scientifiques, puis par le maire qui les communiquera à la population.

Selon le journal La Sicilia, « il est probable qu’il y aura une autre prolongation d’un mois, mais il n’est pas exclu que la nouvelle ordonnance puisse affecter les personnes les plus vulnérables, tandis que d’autres pourraient rentrer chez elles. »

Source: La Sicilia.

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The inhabitants of the Aeolian island of Vulcano are impatiently awaiting the verdict of a videoconference due to take place on December 20th, 2021 and in which members of INGV, Civil Protection, Arpa, Ispra, d’Asp and the mayor of Lipari are to decide whether the red zone and the constraints it implies should be extended or whether the islanders will be allowed to return to their homes to sleep. The ordinance released a month ago by the mayor of Lipari will expire on December 21st.
The latest information from the INGV of Catania suggests that the situation has improved slightly, but that there are still areas under the threat of gas. The temperature of the fumaroles is decreasing on the crater rim and is stable on its internal face. CO2 emissions at the base of the La Fossa cone and in the Vulcano Porto area, automatically measured by the Vulcanogas network, show a general decrease but still remain at high values, with the exception of the Faraglione site, where background values are recorded.
In contrast, CO2 emissions in the crater area continue to show high values, higher than the averages recorded over the past 10 years.
Regarding the geochemistry of groundwater, the temperature and conductivity values are stable in the well of Camping Sicilia, while a slight increase in values is observed in the Bambara well and the conductivity values continue to decrease.
In recent days, the monitoring carried out by technicians from ARPA and Ispra with new instruments have mainly concerned the red zone. The results of these measurements will be disclosed at the meeting of December 20th by the scientists, then by the mayor who will communicate them to the population.
According to the newspaper La Sicilia, « it is likely that there will be another one month extension, but it is not excluded that the new ordinance could affect the most vulnerable people, while others could return home. »
Source: La Sicilia.

Cratère de La Fossa (Photo: C. Grandpey)

Le Cap Ferret face à l’érosion littorale

Comme je l’ai indiqué à plusieurs reprises, l’érosion littorale provoquée par la hausse du niveau des océans suite au réchauffement climatique se produit au moment des tempêtes et est encore accentuée si ces événements extrêmes ont lieu quand les coefficients des marées sont élevés.

En France, les effets de l’érosion littorale sont parfaitement visibles le long de la côte atlantique. J’ai déjà mentionné la résidence Le Signal à Soulac-sur-Mer (Gironde) qui a dû être évacuée car elle était menacée par les assauts de l’océan. A Lacanau (Gironde), des enrochements ont été mis en place pour essayer de freiner les ardeurs des vagues.

Depuis le 15 janvier, la plage de la pointe du Cap Ferret (Gironde), qui fait face à la dune du Pilat, était fermée en raison de l’accélération de l’érosion observée lors des tempêtes d’hiver. Sa réouverture programmée au 30 avril n’aura pas lieu pour des raisons de sécurité.

Le Cap Ferret est une flèche sableuse se situant à l’extrémité sud de la presqu’île de Lège-Cap-Ferret. Il sépare l’Océan Atlantique du Bassin d’Arcachon. (voir la carte ci-dessous) Il reçoit chaque année plusieurs milliers de touristes. La pointe du cap a toujours été soumise à une forte érosion. Des travaux de restauration du cordon dunaire ont été entamés dès les années 1980, notamment par la végétalisation des dunes.

Dans un communiqué, le Préfet de la région Nouvelle-Aquitaine estime que « l’accélération du phénomène d’érosion de la pointe du Cap Ferret est une réalité que personne ne peut désormais contester ». L’État entend agir pour accélérer en la matière la prise de conscience et minimiser, autant que possible, les conséquences inéluctables.

En conséquence, le 6 février 2019, le préfet a demandé au maire de Lège-Cap-Ferret de mettre en œuvre des décisions extrêmement fortes et lourdes de conséquences suite aux phénomènes d’érosion observés sur le littoral atlantique.

Voici une liste des décisions préfectorales :

– Tout cheminement du public est strictement interdit sur les ouvrages (de protection contre la mer) depuis « chez Hortense » jusqu’à la pointe et il a été demandé au maire de procéder à la fermeture au public des différents accès à ces ouvrages.

– Sous trois mois, la ville de Lège-Cap-Ferret devra intégrer dans son plan communal de sauvegarde, un plan de gestion de crise pour la pointe et la zone des 44 hectares permettant d’anticiper les risques de brèche et d’effondrement brutal des ouvrages. Ce plan devra notamment prévoir les procédures d’évacuation d’urgence des populations.

– La ville devra également actualiser sous trois mois, sa stratégie de rechargement de la plage et de la dune pour tenir compte de l’accélération de l’érosion dunaire et des départs répétés des sédiments apportés en urgence cet hiver.

– Lège-Cap-Ferret devra produire avant l’automne prochain, l’évaluation environnementale prescrite par l’arrêté préfectoral du 29 décembre 2017 concernant le plan pluriannuel de rechargement.

– Enfin, la ville doit lancer, dans les six mois, l’étude de recomposition spatiale prévue dans sa stratégie locale, afin d’actualiser cette stratégie d’ici fin 2020, considérant que la lutte active contre l’érosion ne pourra être que temporaire, au vu de l’évolution du site et de sa configuration.

Source: Presse régionale.

A gauche de la carte, la pointe du Cap Ferret s’étirer entre l’Océan Atlantique et le Bassin d’Arcachon (Source: Google Maps)