Une meilleure prévision éruptive sur l’Etna (Sicile) ? // Better eruptive prediction on Mt Etna (Sicily) ?

Alors que l’Etna est vivement critiqué par l’UNESCO pour la mauvaise gestion de son Parc, une nouvelle méthode de surveillance des mouvements de magma sous le volcan pourrait permettre aux scientifiques de mieux prévoir une éventuelle éruption.
L’éruption la plus récente de l’Etna, le 2 juin 2025, a éjecté un énorme nuage de cendres de 6,5 kilomètres de haut et déclenché une avalanche de blocs de lave et autres matériaux.

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L’éruption était annoncée ; les autorités ont donc pu émettre des bulletins d’alerte le matin même, mais les prévisions sont rarement aussi fiables.
Selon une nouvelle étude publiée par des scientifiques de l’INGV le 8 octobre 2025 dans la revue Science Advances, la nouvelle méthode de surveillance pourrait faciliter la prévision des éruptions de l’Etna. Les chercheurs ont analysé un paramètre, la valeur b, qui décrit le rapport entre les séismes de faible et de forte magnitude dans une région de la croûte terrestre. Ce rapport peut changer à mesure que le magma remonte à travers la croûte jusqu’au sommet d’un volcan. Un géophysicien de l’Etna Osservatorio explique que « l’évolution de la valeur b au fil du temps reflète l’évolution des contraintes à l’intérieur du volcan. Puisque la remontée du magma induit des variations de contraintes au sein de la croûte, le suivi de la valeur b peut révéler les différentes étapes du transfert du magma des profondeurs vers la surface.»
La valeur b est un paramètre établi en volcanologie, mais les chercheurs l’ont étudiée d’une manière innovante, à l’aide d’un modèle statistique actualisé. En compilant 20 années de données sismiques sur l’Etna, ils ont constaté une forte corrélation entre la valeur b et l’activité volcanique de l’Etna.
L’Etna se situe dans la zone de collision entre les plaques tectoniques africaine et européenne. De ce fait, une fracture verticale dans la croûte terrestre sous le volcan facilite la remontée du magma à la surface. La croûte sous l’Etna atteint 30 km d’épaisseur. Le magma remonte à travers la croûte avant une éruption, mais au lieu de réalimenter une seule chambre magmatique, la roche en fusion alimente une série de zones de stockage interconnectées, logées dans la croûte à différentes profondeurs. La zone de stockage magmatique la plus profonde se situe à 11 km sous le niveau de la mer et alimente un système de stockage intermédiaire composé de différentes zones s’étendant probablement de 3 à 7 km de profondeur. À mesure que le magma remonte, il traverse un réseau complexe de fractures et atteint finalement la dernière zone de stockage, située au-dessus du niveau de la mer, à l’intérieur de l’édifice volcanique.

Modèle sismique-tectonique 3D mettant en évidence la corrélation entre les clusters sismiques et les principales structures géologiques. Source : INGV)

Les chercheurs ont analysé les schémas sismiques des 30 kilomètres de croûte sous le volcan de 2005 à 2024, en accordant une attention particulière à la variation de ces schémas selon les régions de la croûte. En général, les régions de la croûte terrestre comportant des zones de stockage magmatique actives présentent des valeurs b plus élevées que les régions plus stables, car les zones actives connaissent plutôt de petits séismes. À l’inverse, les régions plus stables de la croûte terrestre subissent généralement plus de séismes importants car la force nécessaire pour briser la roche est plus importante.
Ainsi, en suivant la valeur b au fil du temps, les chercheurs pourraient suivre le mouvement du magma à travers la croûte profonde jusqu’à la première zone de stockage, puis vers le système de stockage intermédiaire, et enfin vers la zone de stockage peu profonde. Cette méthode pourrait permettre aux scientifiques d’estimer la chronologie des éruptions de l’Etna.
Source : Live Science via Yahoo News.

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While Mount Etna is under sharp criticism from the UNESCO for the poor management of its Park, a newly discovered way to monitor magma movements beneath the volcano could help scientists forecast when it might erupt.

Etna’s most recent eruption, in June 2025, ejected a huge 6.5-kilometer-high cloud of ash and triggered an avalanche of hot lava blocks and other debris. The eruption was expected, so officials were able to issue warnings on the morning of the event, but predictions are rarely as reliable.

According to a new study published by INGV scientists on October 8 2025 in the journal Science Advances , the novel method could make it easier to predict Mount Etna’s eruptions. The researchers analyzed a parameter called the b value, which describes the ratio of low-magnitude to high-magnitude earthquakes in a region of Earth’s crust. This ratio can change as magma rises through the crust to the summit of a volcano.

A geophysicist at INGV’s Etna Observatory explains that « changes in the b value over time reflect how the stress inside the volcano is evolving. Since magma ascent induces stress changes within the crust, tracking the b value can help reveal different stages of magma transfer from depth to the surface. »

The b value is an established parameter in volcanology, but the researchers examined it in a novel way, with an updated statistical model. By compiling 20 years’ worth of earthquake data from Mount Etna, they found a very strong correlation between the b value and Etna’s volcanic activity.

Mount Etna sits in the collision zone between the African and European tectonic plates. As a result, a vertical fracture in Earth’s crust underlies the volcano, thus facilitating the rise of magma to the surface. The crust beneath Mount Etna is up 30 km thick. Magma rises through this volume before an eruption, but instead of replenishing a single magma chamber, the molten rock feeds a series of interconnected storage zones that are embedded in the crust at different depths. The deepest magma storage zone is 11 km below sea level, and it feeds an intermediate storage system with different zones likely extending 3 to 7 km deep. As magma rises, it travels through an intricate network of fractures and eventually reaches the last storage zone, which is located above sea level inside the volcano edifice.

The researchers analyzed seismic patterns in the 30 kilometers of crust beneath the volcano from 2005 to 2024, paying particular attention to how these patterns varied between crustal regions. Generally, regions of Earth’s crust with active magma storage zones show higher b values than more stable regions do, because the active zones experience more small earthquakes than bigger ones. Conversely, regions of Earth’s crust that are more stable typically experience more big earthquakes than smaller ones, because it takes more force to break the rock.

So, by tracking the b value over time, it may be possible for researchers to follow the movement of magma through the deep crust to the first storage zone, up from there to the intermediate storage system, and up again to the shallow storage zone. This method could help experts estimate the timings of eruptions at Mount Etna.

Source : Live Science via Yahoo News.

Islande : des éruptions plus difficiles à prévoir ? // Iceland : eruptions more difficult to predict ?

Depuis le mois de décembre 2023, la prévision éruptive le long de la chaîne de cratères Sundhnúkagígar sur la péninsule de Reykjanes est relativement bonne. En s’appuyant sur les données de soulèvement du sol dans le secteur de Svatseengi, qui correspondent à l’accumulation de magma sous la surface, les scientifiques du Met Office ont pu dire, avec une marge d’erreur relativement faible, à quel moment une éruption était susceptible de se produire.
Cependant, selon une étude récente effectuée par des scientifiques de l’Institut des sciences de la Terre de l’Université d’Islande en collaboration avec le Met Office islandais, la prévision des prochaines éruptions pourrait devenir plus difficile.
La composition chimique du magma émis lors des quatre premières éruptions de Sundhnúkagígar révèle qu’il provient de plusieurs chambres ou sources magmatiques proches les unes des autres, à une profondeur d’environ cinq kilomètres. L’étude se base sur les données des quatre premières éruptions, en décembre 2023 et en janvier, février et mars 2024.
L’objectif de l’étude était de mieux comprendre l’accumulation de magma pour chaque éruption en examinant la composition chimique du magma émis. Si cette composition change à chaque éruption, cela montre que le magma provient de plusieurs chambres magmatiques.
La méthodologie de l’étude comprenait le prélèvement d’un certain nombre d’échantillons de lave à différents endroits au cours des quatre éruptions, ainsi que l’étude des différentes compositions chimiques du magma. Au total, 161 échantillons ont été collectés ; leur analyse a été réalisée à l’Institut des sciences de ta Terre de l’Université d’Islande et au Laboratoire Magmas et Volcans de Clermont-Ferrand.
Le résultat des analyses révèle que la composition chimique du magma est très variable, ce qui laisse supposer qu’il provient de chambres magmatiques différentes à une profondeur d’environ cinq kilomètres sous la chaîne de cratères. De plus, la composition chimique varie également d’une éruption à l’autre, ce qui indique des changements dans les chambres magmatiques à mesure que l’activité volcanique progresse sur la péninsule de Reykjanes.
Selon la conclusion de l’étude, comme il existe probablement plus d’une chambre magmatique sous Svartsengi, il peut être difficile de prévoir quand les prochaines éruptions auront lieu. Le comportement des éruptions peut également changer. Il peut être difficile de prévoir la quantité de magma émise par chaque éruption et la durée de l’éruption, en fonction de la chambre d’où provient ce magma.
On savait déjà que le magma est susceptible de s’accumuler dans plusieurs chambres magmatiques proches les unes des autres, mais c’est la première fois que cela est confirmé, grâce à l’analyse détaillée du magma émis sur la chaîne de cratères Sundhnúkagígar.

L’étude souligne également que l’analyse de la composition chimique du magma fournit des informations permettant l’interprétation des données géophysiques ; cela pourrait conduire à une meilleure compréhension du comportement des volcans.
Source ; Icelandic Met Office, Iceland Monitor.

Image webcam de la dernière éruption

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Since December 2023, the prediction of eruptions along the Sundhnúkagígar crater row on the Reykjanes Peninsula has been quite good. Relying on ground uplift in the Svatseengi area that corresponded with magma accumulation beneath the surface, scientists at the Met Office were able to say, with a relatively small margin of error, when the next eruption would occur.

However, according to a recent study by scientists at the Earth Sciences Institute of the University of Iceland in collaboration with the Icelandic Meteorological Office, eruptive prediction might become more difficult in the future.

The chemical composition of the magma in the first four eruptions in the Sundhnúkagígar crater row suggests that the magma comes from several magma chambers or vents that are close to each other at a depth of about five kilometers.The study is based on data from the first four eruptions, in December 2023 and January, February and March 2024.

The goal of the study was to gain a better understanding of magma accumulation for each eruption by examining the chemical composition of the magma that emerged. If it turned out to change in each eruption, it would be an indication that the magma came from more than one magma chamber.

The methodology of the study included that the researchers collected a number of lava samples in many places in the eruption areas during the four eruptions and investigated the different chemical composition of the magma. They took a total of 161 samples whose analysis was carried out at the Institute of Geosciences of the University of Iceland and the Laboratoire Magmas et Volcans in Clermont-Ferrand.

The result of the analysis was that the chemical composition of the magma is very variable, which suggests that it comes from several different magma chambers at a depth of about five kilometers below the series of craters. In addition, the chemical composition also varies from one eruption to another, which indicates changes in the magma chambers as the volcanic activity progresses on the Reykjanes Peninsula.

The conclusion of the study is that since there is possibly more than one magma chamber under Svartsengi, it may be difficult to predict when the next eruptions will occur. Then the behaviour of the volcanic eruptions can also change. It may be difficult to predict how much magma will be produced by each eruption and how long the eruption will last, depending on which chamber the magma comes from.

We know that it is probably common for magma to accumulate in more than one magma chamber that are close to each other in volcanoes, but this is the first time it has been confirmed, thanks to the detailed analysis of the magma from the Sundhnúkagígar crater row. The study also emphasizes that the analysis of the chemical composition of magma provides more accurate information that helps in the interpretation of geophysical data and will lead to a better understanding of the behaviour of volcanoes.

Source ; Icelandic Met Office, Iceland Monitor.

Les chambres magmatiques du Hunga Tonga Hunga-Ha’apai // Hunga Tonga Hunga-Ha’apai’s magma chambers

L’éruption du Hunga Tonga Hunga-Ha’apai, le 15 janvier 2022, a été l’une des plus puissantes de l’histoire de l’humanité. Elle a déclenché la foudre la plus intense jamais enregistrée et le premier méga-tsunami documenté depuis l’Antiquité. Aujourd’hui, les scientifiques découvrent encore fréquemment de nouveaux éléments sur cet événement et sa source.
Dans une étude récente publiée dans la revue Science Advances, des scientifiques expliquent avoir enfin cartographié l’immense système d’alimentation magmatique qui a donné naissance à cette méga éruption. Elle a été ressentie dans le monde entier, mais le contexte sous-marin du volcan a toujours déconcerté les scientifiques qui tentent de comprendre comment une explosion aussi violente a pu se produire.
Dans la nouvelle étude, les chercheurs ont cartographié de légères variations de l’attraction gravitationnelle dans les eaux autour de l’île avant et après l’éruption et ils ont découvert que l’explosion était probablement alimentée par deux chambres magmatiques qui ont fusionné.
Les réservoirs magmatiques se trouvent à différentes profondeurs, entre 2 et 10 kilomètres sous le volcan et avaient probablement stocké une forte proportion de magma liquide avant l’éruption de 2022. Les chercheurs ont découvert que l’explosion a éjecté environ 30 % du magma – soit plus de 9 kilomètres cubes – stocké dans une chambre centrale peu profonde, ce qui a provoqué l’effondrement du plancher du volcan et la formation d’une caldeira de 850 mètres de diamètre. Lorsque la pression dans le réservoir central a chuté suite à l’explosion, le magma stocké dans un réservoir plus profond, au nord, a probablement traversé la croûte et reconstitué le réservoir central, ouvrant ainsi un chenal entre les deux chambres. On peut lire dans l’étude qu’il est également possible que du magma provenant d’une source riche en gaz, plus profonde dans la croûte terrestre, soit monté jusqu’à la chambre centrale, ce qui « pourrait aussi expliquer la violence de l’éruption de 2022 ».
Une troisième poche de magma, située au nord-ouest de la chambre centrale, semble déconnectée du système et ne pas avoir participé à l’éruption.
Il se pourrait que 26 kilomètres cubes de magma susceptibles d’alimenter une éruption soient encore stockés dans les deux principaux réservoirs situés sous le Hunga Tonga. Le magma susceptible d’être émis pendant une éruption est un magma en fusion à plus de 50 % et pauvre en solides cristallins.
Bien que l’étude donne un aperçu du système d’alimentation du volcan, elle ne montre pas ce qui a déclenché l’éruption du 15 janvier 2022. Les résultats gravimétriques ne permettent pas directement de déterminer le déclencheur de l’éruption, mais ils donnent « une idée de l’endroit et de la quantité de magma pouvant être encore stockée sous le volcan ».
Source : Live Science.

Diagramme montrant la réorganisation du système de stockage magmatique sous le Hunga Tonga Hunga-Ha’apai lors de l’éruption de 2022.

A diagram showing the reorganization of the magma storage system beneath Tonga’s Hunga volcano during the 2022 eruption.

Diagramme en taille réelle / Real size diagram :

https://cdn.mos.cms.futurecdn.net/piayUQXUt8knRWzaAoUbf5.png

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The eruption of Hunga Tonga Hunga-Ha’apai volcano on January 15th, 2022 was one of thr most powerful in human history. It triggered the most intense lightning storm ever recorded and the first documented mega tsunami since antiquity. Today, scientists frequently discover new elements about this event and its source.

In a recent study published in the journal Science Advances, scientists explain they have finally mapped the huge magma plumbing system that gave birth to the record-breaking blast. It was felt worldwide, but the volcano’s underwater setting posed a challenge for scientists trying to understand how such a violent blast occurred.

In the new study, researchers have mapped slight variations in the pull of gravity in waters around the island before and after the eruption and found that the explosion was likely fed by two magma chambers that merged.

The magma reservoirs sit at different depths between 2 and 10 kilometers under the volcano and likely stored a high proportion of liquid magma before the 2022 eruption. The researchers found that the blast ejected roughly 30% of the magma – more 9 cubic kilometers – from a shallow central chamber, which caused the roof of the volcano to cave in and form an 850-meter caldera. As the pressure in the central reservoir dropped following the explosion, magma stored in a deeper reservoir to the north may have burst through the crust and replenished the central reservoir, opening up a channel between the two chambers. One can read in the study that it is also possible that magma from a gas-rich source deeper within Earth’s crust rose to the central chamber, which « may also explain the violence of the 2022 eruption. »

A third pocket of magma, located to the northwest of the central chamber, seems disconnected from the system.

Up to 26 cubic kilometers of eruptible magma could still be stored in the two main reservoirs beneath the Hunga Tonga volcano. Eruptible magma is defined as magma that is over 50% melt and low in crystal solids.

While the study revealed what fueled the volcano, it could not show what triggered the massive eruption. The gravity results do not directly allow to conclude on the eruption trigger, but they give »an idea of where and how much magma could be stored under the volcano. »

Source : Live Science.