Pas-de-Calais : alerte climatique

C’est toujours la même rengaine : « Du jamais vu ! «  avec des scènes de désolation devant les dégâts et des scènes de désespoir au sein de la population. Début janvier 2024, le Pas-de-Calais est à nouveau en état d’alerte face aux risques d’inondations et de crues. L’alerte rouge a de nouveau été déclenchée et des renforts ont été envoyés pour aider les équipes locales.

Crédit photo: AFP

Les médias attirent l’attention du public sur le plus spectaculaire, mais je n’ai guère entendu de reportages mettant le doigt sur la cause de ces inondations : le réchauffement climatique. La hausse globale des températures amènera de telles situation à se reproduire de plus en plus souvent.

Le nouvel An à peine fêté, voilà que ressurgissent les traumatismes de 2023. Le 2 janvier, neufs départements du quart nord-ouest de la France étaient placés en vigilance Orange « pluie et inondations ». Le Pas-de-Calais, quant à lui, est passé en vigilance Jaune pour les inondations et Rouge pour les crues. Météo France prévoyait un nouveau renforcement des pluies, parfois accompagné d’orages. Selon Vigicrues, plusieurs cours d’eau risquaient de sortir à nouveau de leur lit. Ces inondations avaient déjà touché plus de 260 communes en 2023, transformant les rues en torrents et affectant quelque 5 849 logements.

 

Il est intéressant de noter que ces inondations ont lieu avec de faibles coefficients de marée, autour de 40 actuellement. Des coefficients de plus de 100 sont annoncés pour les prochaines semaines, ce qui aura forcément un impact sur le comportement des fleuves côtiers et ralentira leur évacuation vers la mer.

La situation générée par les inondations se complique quand surviennent des restrictions d’eau, des coupures d’électricité et des fermetures d’écoles. La grande question est la suivante : que faut-il faire pour s’adapter ? Avec le réchauffement climatique, on sait que les précipitations vont devenir de plus en plus abondantes. Certains diront qu’il n’y a pas urgence à agir car ce ne sont que deux épisodes d’inondations ponctuels. C’est vrai, mais tous les climatologues de la planète s’accordent pour dire que les inondations des zones côtières sont amenées à se multiplier, et pas seulement dans le Pas-de-Calais. A l’échelle de la planète, on sait que des villes comme Miami, New York ou Hong Kong auront un jour les pieds dans l’eau.

 

Photo: C. Grandpey

L’un des principaux phénomènes physiques expliquant cette situation trouve son origine dans le réchauffement des océans : plus l’eau est chaude, plus l’évaporation est importante et plus l’atmosphère se charge en humidité. Puis toute cette vapeur d’eau passe à nouveau à l’état liquide et s’abat à la surface de la Terre. Le CNRS explique qu’en comparant les modèles d’événements similaires entre 1979 et 2000, on note une augmentation de 1 à 3 millimètres de pluie par jour, soit 15 à 30 % de précipitations supplémentaires. A cela s’ajoute la dilatation des océans dont le volume augmente avec les températures et provoque la hausse de leur niveau. Sans oublier, bien sûr, la fonte de la banquise et des glaciers.

 

D’après Météo-France, le Pas-de-Calais sera l’un des départements les plus touchés par la hausse des précipitations, avec entre 20 et 50 mm de cumuls supplémentaires par an.

Alors quoi faire ? Il est clair que les zones côtières du Pas-de-Calais sont en sursis. Si des inondations majeures devaient se reproduire plusieurs fois par an, il faudrait partir et relocaliser les villages les plus menacés à l’intérieur des terres, à l’abri des eaux.

Le Pas-de-Calais n’est pas le seul département dans ce cas. Les délocalisations de maisons qui se trouvent dans des zones à risque d’inondations sont appelées à augmenter, Même si cette option peut apparaître très dispendieuse, au final, elle pourrait être moins coûteuse pour les gouvernements, les villes, les assureurs et les ménages si l’on tient compte de toutes les répercussions directes et indirectes qu’entraînent les dommages occasionnés par les grandes crues sur les bâtiments, le portefeuille des familles et le moral des occupants.

Les enrochements de plus en plus visibles le long de nos côtes (métropole et outre-mer) montrent la fragilité de nos littoraux. Ainsi, face à l’inéluctable avancée de l’océan qui grignote le trait de côte, la commune de Lacanau (Gironde) repense son littoral et ses usages pour maintenir ses activités.

Lacanau, un site menacé par l’océan (photo: C. Grandpey)

Je suis conscient que ce texte ne plaira pas à tout le monde, en particulier aux négationnistes du réchauffement climatique qui rôdent en grand nombre sur les réseaux sociaux. Il ne fait guère de doute – j’espère, bien sûr, me tromper – que de nouvelles inondations à répétition se produiront dans le nord de la France. D’autres littoraux – en Normandie, par exemple – seront confrontés au recul du trait de côte. Si rien n’est fait pour mettre les populations sinistrées à l’abri de ces événements, la situation ne se limitera plus à des dégâts matériels. La santé mentale des populations sera durement affectée Alors, mieux vaut anticiper une catastrophe annoncée.

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Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, en visite à Thérouanne (Pas-de-Calais), a déclaré : « On ne pourra pas partout se dire que c’est en rehaussant chaque année les digues de quelques centimètres, que ça suffira à lutter contre les épisodes climatiques. Regarder la réalité en face, ça peut consister à dire qu’il y a des endroits où il faut qu’il n’y ait (…) plus d’habitations. Ça s’est fait ailleurs en France ». Le ministre aurait-il compris l’urgence de la situation climatique? Même si ce sera une nécessité, force est de reconnaître que vider toute une zone de ses habitations ne sera pas chose facile, pour des tas de raisons. (Source: France Info)

Retour sur le séisme du 16 juin 2023

Dans ma note à propos du séisme du 16 juin 2023, j’indiquais que l’on ne recensait ni victimes ni dégâts en Limousin. En revanche, les dégâts sont significatifs dans la zone proche de l’épicentre du séisme – entre La Rochelle (Charente-Maritime) et Niort (Deux-Sèvres) – dont la magnitude a été arrêtée à M 5,3 par le Réseau national de surveillance sismique (RENASS). L’USGS a localisé l’épicentre à 3 kilomètres au nord de Saint-Georges-du-Bois, au sud de Mauzé-sur-le-Mignon, avec un hypocentre à une profondeur de 4,9 à 5 km.

Le séisme a engendré de nombreux dégâts matériels tels que des chutes de pierres, des fissures et un effondrement partiel de toiture. La quasi-totalité des 500 habitants de la commune de La Laigne (Charente-Maritime) ont été évacués par précaution. La plupart des personnes évacuées ont trouvé refuge chez des proches. Une dizaine de personnes ont passé la nuit dans le gymnase de Courçon, un village voisin. De nombreux maisons et bâtiments de La Laigne menacent de s’effondrer, notamment le clocher de l’église

Les pompiers sont mobilisés et procèdent à des actions de reconnaissance, pour répondre aux appels et vérifier l’état des bâtiments, en particulier ceux fragilisés lors de la première secousse. Une réplique de magnitude M 4,6 a été ressentie vers 4h30 le 17 juin au matin, accompagnées d’autres atteignant M 3,4.

Si les séismes ne sont pas rares en Poitou-Charente, l’intensité de l’événement du 16 juin est assez exceptionnelle. Personnellement, je n’avais encore jamais ressenti de secousse aussi forte en Limousin.

Le Poitou-Charentes subit des secousses sismiques car la région est traversée par de grandes failles profondes. Elle n’est pas située dans une zone de confrontation de plaques tectoniques comme les Alpes, mais dans une zone de cisaillement entre plaques. Les failles mentionnées plus haut sont héritées de la Chaîne hercynienne qui occupait une grande partie de l’Europe il y a environ 300 millions d’années. La DREAL* explique que « les continents américains et européens sont repoussés par l’expansion des océans et des tensions se manifestent sur le littoral atlantique français. En conséquence, les accidents géologiques comme les failles hercyniennes qui s’étirent de la Vendée jusqu’au Massif Central, peuvent jouer brutalement. ».

* DREAL : Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement.

Source: journal Sud-Ouest

Mayotte : Le mystère demeure ! // Still a mystery !

Le 16 mars 2019, à l’occasion du Salon du Livre de Paris, j’ai rencontré des habitants de Mayotte qui m’ont dit que la terre continuait de trembler sur leur île, même si les secousses sont aujourd’hui moins fortes qu’en mai 2018, lorsque l’essaim sismique a commencé. Il ne faudrait pas oublier que le 11 novembre 2018, un « grondement » a été enregistré par les sismomètres du monde entier. Un nouveau document explique qu’il a pu être provoqué par « le plus grand événement volcanique en mer jamais observé dans les temps historiques. »
Avec sa source à 48 kilomètres à l’est de l’île de Mayotte, le signal sismique a immédiatement attiré l’attention des scientifiques. Il faisait partie d’une séquence sismique qui avait débuté dans la région en mai 2018, mais la très basse fréquence enregistrée en novembre était très différente d’une séquence sismique habituelle et sa cause n’était pas immédiatement évidente. Les scientifiques ont tous été d’accord pour dire qu’il ne pouvait s’agir que d’un événement volcanique impliquant le déplacement d’un vaste volume de magma sous le plancher océanique, avec pour conséquence une déflation significative de ce même plancher. Aujourd’hui, un nouveau document émanant de chercheurs français a été téléchargé sur le serveur public EarthArXiv. Bien que beaucoup de questions restent en suspens, il semble que le volume de magma impliqué soit si important qu’il s’agisse certainement de l’un des plus importants événements volcaniques en mer jamais repérés par l’instrumentation scientifique moderne.
La difficulté à apporter des réponses à cet événement majeur est due au manque cruel de d’équipement de surveillance des profondeurs océaniques dans le monde. En conséquence, beaucoup d’événements ont probablement eu lieu en mer depuis le début des observations, mais n’ont pas pu être détectés par les scientifiques. Comme je l’ai écrit très souvent, nous connaissons mieux la surface de Mars et de la Lune que les profondeurs de nos propres océans.
Les mouvements du sol à Mayotte révèlent que les fonds marins au large de l’île s’affaissent à raison d’environ un centimètre par mois. Dans le même temps, l’île de Mayotte elle-même se déplace vers l’est à raison de 1,6 cm par mois. Ces deux phénomènes indiquent que quelque chose d’énorme est en mouvement dans les profondeurs et provoque une déflation significative.
La nature des événements sismiques laisse supposer que la source magmatique se trouve à une profondeur de 25 kilomètres sous le plancher océanique. On pense qu’au cours des six premiers mois de la séquence sismique, au moins un kilomètre cube de magma s’est déplacé, ce qui équivaut à environ 385 grandes pyramides de Gizeh.
Cependant, certains scientifiques pensent qu’une éruption n’a pas forcément eu lieu près de Mayotte. Il se peut que la lave n’ait pas atteint la surface. Au lieu de cela, le magma a pu s’être injecté dans les sédiments épais qui tapissent le fond de l’océan et y avoir séjourné. Cela a déjà été observé ailleurs, lorsque le magma est plus dense que les sédiments environnants.
Bien que le volume global de magma impliqué au large de Mayotte soit comparable à celui de l’éruption du Havre (Iles Kermadec) en 2012, il est probable que les deux événements sont assez différents. L’éruption du Havre impliquait certainement beaucoup de matériel éruptif, comme l’a démontré l’immense banc de pierre ponce aperçu depuis un avion. Dans le même temps, de grands dômes volcaniques se sont formés sur le plancher océanique du Havre. Dans le cas de Mayotte, si une éruption a effectivement eu lieu, il s’agit plutôt d’un épanchement fissural mettant en jeu de la lave plus fluide.
Quelle qu’en soit la cause, le signal sismique du 11 novembre laisse les scientifiques extrêmement perplexes. En particulier, les épisodes haute fréquence à répétition, qui sont semblables à (mais ne sont pas liées à) ceux générés par une activité industrielle, sont difficiles à expliquer.
Une explication possible serait que les événements haute fréquence sont liés à l’effondrement de l’encaissant rocheux entourant la chambre magmatique. Cela a pu perturber le réservoir magmatique en le faisant osciller ou « bourdonner ». Parallèlement, les ondes, en rebondissant, ont pu frapper les parois de la chambre magmatique et provoquer d’autres effondrements, ce qui a généré d’autres événements haute fréquence. Tout cela aurait synchronisé les événements basse et haute fréquence et donné naissance au signal si particulier du 11 novembre.
Le cadre géologique est également assez étrange. L’événement volcanique majeur se serait produit à l’extrémité Est de la chaîne d’îles, ce qui ne semble pas logique étant donné que les îles volcaniques les plus jeunes se trouvent à l’Ouest.

On ignore également quelle est la cause première du volcanisme dans la région. Il peut être dû à un processus en bordure de plaque tectonique, à un panache mantellique à très haute température, ou même à une extension du rift est-africain, événement tectonique majeur qui déchire lentement le continent.
Il y a aussi un élément écologique qui reste inexpliqué : la découverte de nombreux poissons morts au large de Mayotte. Il se peut que l’activité magmatique les ait effrayés et les ait fait remonter vers la surface où ils n’ont pas supporté les faibles pressions auxquelles ils ne sont pas habitués.

Ce ne sont pour l’instant que des hypothèses. L’installation d’instruments dans la zone concernée est absolument nécessaire. Comme je l’ai écrit précédemment, le CNRS et le BRGM, ainsi que d’autres organismes, mettent en place actuellement des équipements à Mayotte, sur le site de l’activité et sur les Iles Glorieuses, à l’est. Des drones sous-marins et des systèmes de surveillance par des radars basés sur les navires seront nécessaires pour déterminer la quantité de lave qui a percé la surface, en supposant qu’elle ait percé la surface !. Des simulations numériques et des travaux de laboratoire peuvent aussi s’avérer nécessaires pour mieux comprendre ce qui se passe sous la surface.
Source: EarthArXiv.

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On March 16th, 2019, during the Salon du Livre of Paris, I met residents of mayotte who told me seismicity was going on on their island, even though it is less strong than in May 2018 when the swarm began. We should also remember that on November 11th, 2018, a deep rumble was recorded by seismometers around the world. A new pre-print paper about the event is now suggesting that it was caused by the largest offshore volcanic event in recorded history.

Originating 48 kilometres east of the island of Mayotte, the seismic signal immediately caught the attention of geoscientists. It was part of a prolonged seismic sequence that had started in the area back in May 2018, but the very low-frequency recorded in November stood out because it was not immediately obvious what caused it. The scientists agreed that it could only have originated from a volcanic event, one involving the movement of a vast volume of magma beneath the seafloor, causing the ground to significantly deflate.

Now, a new paper by French researchers has been uploaded to the public server EarthArXiv. Although there are plenty of unanswered questions, it appears that the volume of magma involved is so huge that this is certainly one of the largest offshore volcanic events ever spotted by modern scientific instrumentation.

There is a major caveat to all this, however. Compared to land-based monitoring, there is a huge lack of offshore monitoring happening around the world today, and there are likely plenty of offshore events that have taken place since modern records began that scientists have not picked up on. As I wrote it very often, we know the surface of Mars and the Moon better than the depths of the earth’s oceans.

The way the ground on Mayotte is moving implies that the seafloor off its eastern shoreline is sinking at a rate of about one centimetre per month. At the same time, Mayotte itself is shifting eastward at a rate of 1.6 centimetres per month. Both indicate something huge underground is on the move, causing some serious deflation.

The nature of the seismic events suggests that the magma source is centered at a depth of 25 kilometres beneath the seafloor. In the first six months of the sequence alone, at least one cubic kilometre of magma has shifted around, which is roughly equivalent to 385 Great Pyramids of Giza.

However, some other scientists think that what is happening near Mayotte is not necessarily an eruption.as there is currently no direct evidence of an eruption having taken place. There is a significant probability that no lava reached the surface. Failing to breach into the sea, the migrating magma might have injected itself into thick sediments in the seafloor and spread itself around. This has been observed elsewhere, when the magma is denser than the surrounding sediment.

Although the overall volume of magma involved is comparable to the 2012 Havre eruption (Kermadec Islands), the two are likely to be quite different events. The former definitely involved plenty of eruptive material, whose huge pumice raft was first spotted from a plane. At the same time, large volcanic domes formed on the seafloor. In Mayotte’s case, if an eruption did take place, it is more likely to be some sort of fissure effusion involving more fluid lava.

Whatever the cause, the November 11th signal’s individual elements still remain deeply puzzling. In particular, its repeated high-frequency bursts, which are similar (but are not related to) industrial activity, are difficult to explain.

One highly speculative explanation is that the high-frequency events are related to the collapse of the rocky walls surrounding the magma chamber. This disturbs the magma reservoir, causing it to oscillate or ‘hum.’ At the same time, waves bouncing back and forth hit other flanks and trigger more collapses, generating more high-frequency events. This all happens in a way that causes the low- and high-frequency events to synchronize, forming the November 11th signal.

The geological setting is also pretty weird. This major volcanic event is taking place on the eastern end of the island chain, whereas the youngest volcanic islands are to the west. So it appears to be happening in the ‘wrong’ place.

It’s also unclear what is responsible for the volcanism in the first place. It could be caused by action along a tectonic plate boundary, an upwelling plume of superheated mantle material, or even an extension of the East African Rift, a major tectonic event that is slowly tearing the continent apart.

There is even an ecological element to the story that is currently unexplained: the emergence of lots of dead fish offshore from Mayotte. It is thought that the magmatic activity might have scared them up to the surface, where they experienced low pressures that they couldn’t survive in.

Like much about the event, this remains speculative for now. Clearly more instrumentation is required. As I put it before, the French CNRS and BRGM and other authorities are now deploying equipment on Mayotte, at the site of the activity, and on the Glorioso Islands to the east. That still won’t solve all the enigmas. Underwater drones and ship-based radar surveys will be required to determine how much lava erupted at the surface, if any. Numerical simulations and laboratory work may be required to better comprehend what’s going on beneath the surface.

Source: EarthArXiv.

Situation géographique de Mayotte et de l’archipel des Comores (Google Maps)

La source de Lusi, le volcan de boue ? // The source of the Lusi mud volcano ?

On en parle très peu aujourd’hui, mais plus de dix ans après le début de la catastrophe, le volcan de boue indonésien Lusi déverse toujours des flots de boue sur l’île indonésienne de Java. Au pire moment, Lusi vomissait 170 000 mètres cubes de boue par jour. Certains villages ont été ensevelis sous 40 mètres de fange. Quelque 60 000 personnes ont dû abandonner leurs maisons et 13 ont été tuées.
Une étude publiée dans le Journal of Geophysical Research de l’American Geophysical Union affirme que la source de ce déversement incessant de boue a été trouvée. Une équipe de chercheurs norvégiens, suisses et indonésiens explique que le volcan de boue n’a pas cessé son activité parce qu’il est relié à un système volcanique qui se trouve à proximité.
La compréhension du fonctionnement de Lusi serait d’un grand intérêt pour les volcanologues. En effet, d’un point de vue géologique, Lusi est un phénomène très récent qui peut permettre de comprendre comment évoluent les volcans, les systèmes hydrothermaux et les geysers.
Les volcans de boue et ceux qui émettent de la lave se trouvent souvent dans les zones de subduction, et l’Indonésie en fait partie. S’agissant des volcans qui émettent de la lave, le magma à très haute température monte constamment vers la surface et permet aux volcans de la région de demeurer actifs. Inversement, les volcans de boue se forment généralement lorsque des gaz tels que le méthane et le dioxyde de carbone s’accumulent en créant une pression qui se libère violemment. Selon la nouvelle étude, Lusi est à la fois un volcan de boue et un système hydrothermal, autrement dit une formation géologique qui libère du gaz.

Les chercheurs pensent que le complexe volcanique d’Arjuno-Welirang, une chaîne volcanique à l’est de Java, est responsable de la naissance de Lusi. En effet, les échantillons de gaz expulsés par ce dernier sont similaires aux éléments chimiques que l’on observe généralement dans le magma. L’étude explique que pendant des années avant l’éruption, le magma du complexe volcanique Arjuno-Welirang a «cuit» les sédiments sous Lusi en générant une pression continue.
Le lien entre Lusi et Arjuno-Welirang a également été démontré par l’utilisation de la tomographie qui permet d’imager des structures tridimensionnelles. Les chercheurs ont disposé 31 sismomètres et ont découvert que, dans la chambre magmatique la plus au nord du complexe Arjuno-Welirang, il y a un tunnel qui alimente le bassin sédimentaire de Lusi.
La nouvelle étude a toutefois été critiquée par d’autres chercheurs qui pensent que les données ne montrent pas suffisamment que le tunnel d’Arjuno-Welirang est lié à Lusi. Ils font également remarquer que l’étude ne compare pas ses résultats aux images à résolution beaucoup plus élevée proposées par les analyses sismiques en 2D de l’industrie pétrolière. Ils ajoutent que des études supplémentaires auraient pu être effectuées pour comparer et valider les résultats, ce qui est recommandé en tomographie car cette technologie est fréquemment source d’erreurs.
La cause de la coulée de boue dévastatrice a été l’objet de nombreux débats au cours de la dernière décennie. Les scientifiques sont assez d’accord pour dire que toute cette pression a été générée par l’activité sismique, mais il n’y a pas de consensus sur l’origine exacte de cette activité. Une étude publiée en 2007 a prétendu que l’éruption du volcan de boue a été causée par un puits de gaz exploratoire qui a perforé des roches à 2 800 mètres sous la surface. Une autre étude indique qu’un séisme de magnitude M 6.3 survenu à plusieurs kilomètres de là, quelques jours avant Lusi, près de la ville de Yogykarta, a provoqué la catastrophe.
Quelle que soit la cause exacte, de nombreuses études montrent que le volcan de boue Lusi a encore de beaux jours devant lui.

Source: Presse scientifique américaine.

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Very little is said today about it, but more than ten years after the disaster started, Indonesian mud volcano Lusi is still spewing rivers of mud on the Indonesian island of Java. At its peak, the region was churning out over 170,000 cubic metres of mud every day. Some villages have been buried in as much as 40 metres of mud. Some 60,000 people have had to abandon their homes, and 13 people have been killed.

A study, published in the American Geophysical Union’s Journal of Geophysical Research, affirms that the source of this relentless flow of mud has been found. A team of researchers from Norway, Switzerland, and Indonesia say the mud volcano has not stopped oozing because it is connected to a nearby volcanic system.

Understanding how Lusi happened can tell volcanologists quite a lot. In terms of geological formations, Lusi is a new-born phenomenon, and thus allows scientists to understand how systems like volcanoes, hydrothermal vents, and geysers evolve.

Mud volcanoes and igneous volcanoes often both appear in subduction zones and Indonesia is one of them. As a consequence, hot magma is constantly rising to the surface and keeping the region’s volcanoes active. Conversely, mud volcanoes typically form when gases such as methane and carbon dioxide build up pressure that is released violently. According to the new study, Lusi is both a mud volcano and a hydrothermal vent, a geological formation that releases gas.

Researchers say the Arjuno-Welirang volcanic complex, a string of volcanoes in East Java, is to blame. Indeed, samples of the gas expelled by Lusi were similar to chemicals typically found in magma. The study explains that for years before the eruption, magma from Arjuno-Welirang had been « baking » the sediment lying under Lusi and continuously building pressure.

Connections between Lusi and Arjuno-Welirang were also made by the researchers’ use of tomography which allows to image three dimensional structures. Researchers laid out 31 seismometers and found that in the northernmost magma chamber of Arjuno-Welirang, there is a tunnel that feeds Lusi’s sediment basin.

The new study has criticisms from researchers who do not believe the data sufficiently shows the Arjuno-Welirang tunnel is linked to Lusi. These say the study does not compare its results to the far higher resolution images available from 2D petroleum industry reflection seismic surveys. They add that the additional surveys could have been used to compare and validate results, which is a useful tool in tomography because it can frequently produce errors.

Exactly how the dangerous mudflow began has been debated heavily in the past decade. Scientists are pretty united in saying all this pressure was generated by seismic activity, but there is not a consensus on the exact origin of this activity.

One study released in 2007 claimed the deadly eruption was caused by an exploratory gas well that punctured rock 2,800 metres below the surface. Another study suggests that an M 6.3 earthquake that occurred several days prior kilometres away from Lusi near the city of Yogykarta triggered the mud disaster.

Regardless of the exact cause, many studies show that Lusi shows no indication of stopping any time soon.

Source : U.S. scientific press.

Lusi: un désastre environnemental  (Crédit photo: Wikipedia)