Retour de l’expédition MOSAIC // The MOSAIC expedition is back

J’ai consacré plusieurs notes les 12 mai, 4 juin et 22 août 2020 à l’expédition MOSAIC (Multidisciplinary drifting Observatory for the Study of Arctic Climate). A l’époque, cette expédition est restée très discrète dans les médias, mais les résultats des observations leur ont, semble-t-il, fait prendre conscience de la gravité de la situation dans l’Arctique, une situation sur laquelle je ne cesse d’alerter dans ce blog.

L’expédition MOSAIC est la plus importante jamais mise sur pied dans l’Arctique. Le 20 septembre 2019, le brise-glace Polarstern, navire amiral de l’Institut Alfred Wegener, a levé l’ancre dans le port de Tromsø en Norvège, pour rejoindre le cœur de l’Océan Arctique et y faire des mesures scientifiques. La mission impliquait 600 chercheurs de dix-sept pays.

Lors de la conférence de presse organisée le lundi 12 octobre à l’occasion du retour du Polarstern, le chef de l’expédition n’a pas mâché ses mots pour rendre compte de la situation dans l’Arctique. Selon ses propres mots, la banquise d’été est « en train de disparaître. » Ce qu’ont vu les scientifiques n’incite pas à l’optimisme. Le chef de l’expédition a expliqué que « la banquise dans l’Arctique fond à une vitesse spectaculaire. Si le changement climatique se poursuit, dans quelques décennies, nous aurons un Arctique libéré des glaces durant l’été. […] Nous devons tout faire pour préserver la banquise dans l’Arctique pour les générations futures, et nous devons tenter de saisir la petite chance que nous avons encore de pouvoir le faire. ».

Pendant un an, le Polarstern s’est laissé entraîner avec les glaces, selon la dérive polaire. Les scientifiques ont récolté plus de 150 térabits de données ainsi que de nombreux échantillons de glace et d’eau.

Les conclusions de l’expédition MOSAIC sont confortées par des observations satellites. Elles confirment que la banquise d’été a fondu jusqu’à former en 2020 la deuxième plus faible superficie jamais enregistrée, après celle de 2012.

Nos gouvernants tireront-ils des leçons des conclusions de l’expédition MOSAIC ? C’est une autre histoire. Quand on voit la portée quasiment nulle des différentes COP, on peut raisonnablement se le demander !

Source : presse nationale et internationale.

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 I devoted several posts on May 12th, June 4th and August 22nd, 2020 to the MOSAIC (Multidisciplinary drifting Observatory for the Study of Arctic Climate) expedition. At the time, this expedition remained very discreet in the media, but the results of the observations have, it seems, made them aware of the gravity of the situation in the Arctic, a situation on which I continue to alert in this blog.
The MOSAIC expedition is the largest ever in the Arctic. On September 20th, 2019, the Polarstern icebreaker, flagship of the Alfred Wegener Institute, left the port of Tromsø in Norway, to reach the heart of the Arctic Ocean and take scientific measurements. The mission involved 600 researchers from seventeen countries.

On Monday 12 October, at the press conference on the occasion of the return of the Polarstern, the expedition leader did not mince his words to report on the situation in the Arctic. In his own words, the summer sea ice is « disappearing. » What the scientists have seen does not give cause for optimism. The expedition leader explained that « the sea ice in the Arctic is melting at a spectacular rate. If climate change continues, in a few decades we will have an ice-free Arctic in the summer. […] We must do everything to preserve the ice in the Arctic for future generations, and we must try to seize the small chance we still have of being able to do so. »
For a year, the Polarstern let itself be dragged along with the ice, depending on the polar drift. Scientists collected more than 150 terabits of data as well as numerous samples of ice and water.
The findings of the MOSAIC expedition are confirmed by satellite observations. They confirm that the summer sea ice has melted so fast in 2020 that it has become the second smallest area on record, after that of 2012.
Will our rulers learn from the findings of the MOSAIC expedition? This is an other story. When we see the very limited interest of the different COPs, we can reasonably wonder!
Source: national and international press.

Le Polarstern (Source : Wegener Institute)

Venise a perdu son âme// Venice has lost its soul

Plusieurs semaines après la montée des eaux et les vents violents qui ont provoqué la pire inondation à Venise depuis plus d’un demi-siècle, les habitants sont désespérés. Tout le monde a le sentiment que le changement climatique accélère une décrépitude qui a commencé avec le tourisme de masse. Comme l’a dit un Vénitien: «La ville est devenue laide. Elle a perdu son âme.»
Venise, qui s’étend sur plus de 100 îlots dans la lagune, a attiré quelque 30 millions de visiteurs  en 2019. Cependant, ces foules apportent peu à l’économie locale. Les trois quarts des touristes ne restent que quelques heures et dépensent en moyenne 13 euros pour l’achat de souvenirs. Les artisans font ce qu’ils peuvent pour faire face à l’afflux de produits meilleur marché fabriqués à l’étranger, en particulier en Chine, et beaucoup ne peuvent pas se permettre des loyers qui ont augmenté suite à la spéculation immobilière. Le nombre d’artisans qualifiés du quartier historique de la ville a diminué de moitié depuis les années 1970. Il en va de même pour l’île voisine de Murano, où le nombre d’artisans  travaillant à la fabrication de jolis vases et figurines de verre soufflé a également été réduit de moitié, en partie à cause de l’impact des produits de contrefaçon en provenance d’Europe de l’Est, de Chine et d’Inde. Les inondations, de plus en plus fréquentes, perturbent la vie à Venise, avec la mise à l’arrêt des vaporetti qui relient le Grand Canal à des sites périphériques tels que Murano, Burano et l’île du Lido.
Comme je l’ai écrit précédemment, l’acqua alta de Venise a atteint 184 centimètres le 12 novembre 2019. Elle a été provoquée par un phénomène concomitant de marées hautes et de vents puissants. Les autorités ont estimé les dégâts à environ un milliard d’euros. Le changement climatique est la cause principale de la catastrophe. Un responsable a déclaré: «La tempête a rappelé la réalité de la situation. Venise est sur le point de tomber de son piédestal. Il n’y a plus de capitaine dans le bateau. »
Un millier d’habitants quittent Venise chaque année et on estime à environ 50 000 les personnes qui habitent encore dans la lagune. L’ancienne ville est gérée de pair avec Mestre, sa voisine plus récente sur le continent, depuis leur rattachement par Mussolini en 1926. Les défenseurs de Venise affirment que les problèmes de la ville sont si particuliers qu’il faut gérer Venise et Mestre séparément. Les Vénitiens seront invités à participer à un référendum pour dire si la ville doit être dotée de sa propre structure administrative, mais le vote ne sera pas contraignant et le maire s’y oppose en affirmant que ce serait « une folie » car cela provoquerait une cacophonie bureaucratique et découragerait les investissements.
Cette situation met encore davantage l’accent sur le projet anti-inondation MOSE. Entravé par plusieurs affaires de corruption, le système de vannes qui a coûté 5,5 milliards d’euros ne sera opérationnel qu’en 2022, plus de deux décennies après le début des travaux de construction…et il n’est pas certain qu’il soit capable de faire face à l’acqua alta…..
Source: Journaux italiens.

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Several weeks after high tides and fierce winds produced the worst flooding in Venice in more than half a century, residents are desperate. There is a general feeling in the city that climate change is hastening a downfall that started with mass tourism. Said one resident: “The city has become ugly. It’s lost its soul.”

Venice, which spreads across more than 100 small islands in the lagoon, attracted an estimated 30 million visitors in 2019. However, these crowds provide little value for the local economy. Three-quarters of the tourists stay for just a few hours and spend an average 13 euros on souvenirs. Artisans are struggling to compete with the influx of cheaper products made abroad, especially in China, and many can’t afford rents that have been driven up by real-estate speculation. Skilled craftspeople in the city’s historical area have dropped by half since the 1970s. It is the same disaster on the nearby island of Murano, where the number of people working to produce the lovely hand-blown vases and figurines has also halved, partly due to the impact of counterfeit products from Eastern Europe, China and India. The floods, which have become more frequent, disrupt Venice’s rhythm, suspending Vaporetto boat lines that connect stops on the Grand Canal to outlying sites like Murano, Burano and island of Lido.

As I put it before, on November 12th, 2019, Venice’s “acqua alta” reached 184 centimetres. It was generated by a combination of rising tides and powerful winds.  City officials estimated the damage at about 1 billion euros. Climate change is blamed for the disaster. One official said: “The storm brought home the reality of the situation. Venice is close to falling off the precipice. There’s no control room.”

About 1,000 residents leave every year, and about 50,000 people now call the lagoon home. The former city-state has been governed together with its larger mainland neighbour Mestre since they were linked in 1926 by Mussolini. Activists say the city’s issues are so unique that it needs to be separate. Venetians will be asked to vote on a referendum to give the community its own administrative structure, but it is non-binding and opposed by the mayor who has called the effort “folly” because it risks creating bureaucratic bottlenecks and discouraging investment.

That puts more focus on the MOSE anti-flooding project. Embroiled in several corruption probes, the 5.5-billion-euro system of water gates won’t be ready until 2022, more than two decades after construction began. And it is said to be useless in stopping rising tides.

Source: Italian newspapers.

Photo: C. Grandpey