Mesure des gaz sur le Kilauea (Hawaï) // Gas measurement on Kilauea Volcano (Hawaii)

L‘Observatoire des Volcans d’Hawaï (HVO) publie régulièrement des articles dans le cadre d’une série baptisée « Volcano Watch » dont le but est d’informer sur les observations et les mesures effectuées par les scientifiques en poste à l’Observatoire. C’est aussi un travail de vulgarisation qui informe le public sur les risques volcaniques.

L’un des derniers articles « Volcano Watch » est consacré à la mesure des gaz volcaniques, un paramètre essentiel, que ce soit pour la sécurité du public ou pour la compréhension de l’activité volcanique. Le HVO explique dès le début de l’article que la technologie repose avant tout sur le vent.

 

Panache de gaz émis par le cratère de l’Halema’uma’u (Photo : C. Grandpey)

Le HVO exploite actuellement 19 stations permanentes de mesure des gaz et 7 instruments portables pour analyser les éruptions du Kilauea. L’ensemble de ces instruments peut être divisé en deux catégories : (1) ceux qui analysent les concentrations de gaz ; et (2) ceux qui étudient les taux d’émission.

Les instruments qui analysent les concentrations de gaz comprennent des stations multi-gaz qui mesurent un ensemble de gaz (CO2, H2O, SO2 et H2S) et des stations haute résolution capables de mesurer un seul gaz (le SO2, par exemple) jusqu’à de très faibles concentrations. Ces instruments prélèvent des échantillons de panaches volcaniques pour indiquer quels gaz sont présents et les rapports de ces gaz les uns par rapport aux autres, ce qui est important pour comprendre le système volcanique.

Les instruments qui analysent les taux d’émission mesurent l’absorption de la lumière ultraviolette du soleil par le panache via la télédétection. Cela permet aux scientifiques du HVO de déterminer la quantité de SO2 émise par le volcan, mais uniquement pendant la journée.

Un géochimiste du HVO mesure les gaz émis par le Kilauea à l’aide d’un spectromètre infrarouge à transformée de Fourier (FTIR), un instrument qui détecte la composition des gaz sur la base de la lumière infrarouge absorbée. (Crédit photo : HVO)

Tous ces instruments nécessitent une bonne coopération des gaz. Cela signifie que le panache doit passer à proximité ou au-dessus de l’instrument pour qu’une mesure soit effectuée.

Le panache volcanique ne bouge pas tout seul. Il dépend du vent pour le transporter dans une direction donnée. Le travail des scientifiques spécialisés dans la mesure des gaz volcaniques consiste à rechercher et à mesurer cette formation de gaz changeante et transitoire, ce qui n’est pas une tâche facile. En effet, les instruments ne fonctionnent pas dans certaines conditions météorologiques. Ils ont besoin que le vent souffle dans la bonne direction et à la bonne vitesse pour effectuer une mesure utile.

Sur le Kilauea, les alizés sont les vents dominants, ce qui signifie que les vents proches de la surface soufflent du nord-est la majeure partie de l’année. Pour cette raison, les stations permanentes de mesure des gaz du HVO sont positionnées au sud-ouest (sous le vent) de l’Halema’uma’u, le cratère sommital.

Si la direction du vent s’inverse par rapport aux alizés (une situation appelée « vents de Kona »), les scientifiques se trouvent en difficulté car le vent éloigne les gaz des capteurs permanents. De même, si le vent est trop lent (en dessous d’environ 4 mètres par seconde), le panache peut alors s’élever verticalement et se trouver hors de portée des capteurs. Dans le cas contraire, si le vent est trop fort, il dilue le panache, l’étale et rend difficile la mesure par les capteurs.

Une autre difficulté est que les volcans n’entrent pas en éruption toujours au même endroit. Lors de l’éruption la plus récente du Kilauea, des fissures se sont ouvertes dans la partie supérieure de la zone de rift sud-ouest, sous le vent de la quasi-totalité du réseau de mesure des gaz. Un seul instrument, une station à haute résolution – la HRPKE – était située à proximité des bouches éruptives, à quelques centaines de mètres à l’ouest-nord-ouest des fissures. Le problème, c’est que le vent soufflait du nord ce jour-là et emportait l’épais panache éruptif vers le sud, loin de la station HRPKE qui a dû se contenter d’un filet de gaz plusieurs heures après le début de l’éruption. Par la suite, le vent a tourné plus à l’est et dirigé le panache vers la station.

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Station HRPKE installée au sud-ouest du sommet du Kīlauea, dans l’Upper Southwest Rift Zone. L’instrument mesure les concentrations de SO2 dans l’air, ainsi que des données météorologiques telles que la vitesse et la direction du vent, et les précipitations. (Crédit photo : USGS)

Pour parvenir à des mesures de gaz efficaces, il faut la combinaison de quatre éléments : la direction et la vitesse du vent, parfois la lumière du jour, et toujours beaucoup de chance. Les chercheurs en charge de la mesure des gaz volcaniques à l’USGS ne cessent de mettre au point de nouvelles technologies pour être plus efficaces et pouvoir informer le public sur ce risque volcanique.

Source : HVO / USGS.

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The Hawaiian Volcano Observatory (HVO) regularly publishes articles as part of a series called “Volcano Watch” whose aim is to inform about the observations and measurements performed by scientists stationed at the Observatory . It is also popularization work which informs the public about volcanic hazards.

One of the latest « Volcano Watch » articles is dedicated to the measurement of volcanic gases which is critical for both public safety and understanding volcanic activity. HVO explains from the beginning that the technology relies on the wind.

HVO currently operates 19 permanent gas monitoring stations and 7 portable instruments for eruption response on Kilauea. These can be divided into two categories : (1) gas concentrations; and (2) emission rates.

Gas concentration instruments include multi-GAS stations that measure a combination of gases (CO2, H2O, SO2, and H2S) and high-resolution stations that can measure a single gas (SO2) down to very low concentrations. These instruments draw in samples of volcanic plumes to indicate which gases are present and the ratios of these gases to each other, which is important for understanding the volcanic system.

Emission rate instruments measure the plume’s absorption of ultraviolet light from the sun via remote sensing. This allows HVO scientists to determine how much SO2 is coming out of the volcano, though only during daylight hours.

All these instruments require cooperation from the gases themselves: the plume must pass by or over the instrument for a measurement to be made.

The volcanic plume, however, doesn’t move on its own. It relies on the wind to carry it in any given direction. The job of volcano gas scientists is to chase around and measure this shifting, transient gas claoud, which is not an easy task. Indeed, gas instruments do not work in certain weather conditions. They need the wind to be in the right direction and the right speed to make a useful measurement.

At Kilauea volcano, the dominant trade winds mean that near-surface winds blow from the northeast most of the year. For this reason, HVO’s permanent gas monitoring stations are positioned to the southwest (downwind) of Halemaʻumaʻu, the summit crater.

If the wind direction is reversed relative to normal trade winds (a condition called “Kona winds”), scientists have no easy way of measuring it because the wind is blowing the gas away from the permanent sensors. Similarly, if the wind is too slow (below about 4 m/s), then the plume can loft straight up and once again miss the sensors. Alternatively, if the wind is too strong then it effectively dilutes the plume, spreading it thin and making it difficult for the sensors to measure.

Another complication is that volcanoes do not always erupt from the same location. In the most recent eruption at Kilauea, fissures opened in the Upper Southwest Rift Zone, downwind of nearly the entire gas monitoring network. Only one instrument, a high-resolution station called HRPKE, was located near the eruptive vents, a few hundred meters to the west-northwest of the fissures. However, the winds were northerly that day and were blowing the thick eruptive plume to the south, away from HRPKE which di not record a wisp of gas until several hours into the eruption when the wind turned more easterly, finally blowing the plume to the station.

Effective gas measurements require an alignment of four things: wind direction, wind speed, sometimes daylight, and always luck. Volcano gas researchers at the USGS continue to develop new technologies to be more efficient and be able to inform the public about this volcanic hazard.

Source : HVO / USGS.

Mesures du dioxyde de soufre (SO2) sur le Kilauea (Hawaii) // SO2 measurements on Kilauea Volcano (Hawaii)

Dans un nouvel article, les scientifiques de l’Observatoire des Volcans d’Hawaii (HVO) expliquent comment ils analysent les panaches de dioxyde de soufre (SO2) émis par le Kilauea
Les analyses des panaches de SO2 sont essentielles pour surveiller et comprendre l’activité éruptive. Le HVO s’appuie aussi sur les mesures d’émission de SO2 pour les prévisions concernant le vog (brouillard volcanique) et pour évaluer les émissions de lave.
Le HVO utilise des caméras – aussi bien visuelles que thermiques – pour décrire l’activité volcanique. Un troisième type de caméra, la caméra ultraviolet (UV), permet aux volcanologues de visualiser des panaches de SO2. Le SO2 absorbe la lumière ultraviolette, ce qui la fait apparaître dans les images UV alors qu’elle n’est pas visible avec les caméras classiques.
Des caméras UV sont utilisées sur le Kilauea depuis 2010. En 2013, une collaboration entre le Cascades Volcano Observatory (CVO) et le HVO a permis l’installation d’un système de caméra UV automatisé au sommet du Kilauea. Ce réseau de caméras a été retiré en 2018 lorsqu’il a été menacé par l’ouverture de fractures au sol au cours de l’effondrement de la caldeira sommitale.
Avec le retour de la lave et d’un fort dégazage de SO2 au sommet du Kilauea fin 2020, le HVO et le CVO ont fait équipe avec des collègues de l’Université de Sheffield au Royaume-Uni. Les scientifiques britanniques ont mis au point une nouvelle génération de petites caméras UV qui utilisent la technologie Raspberry Pi. Le Raspberry Pi est un nano-ordinateur monocarte à processeur ARM de la taille d’une carte de crédit conçu par des professeurs du département informatique de l’université de Cambridge dans le cadre de la fondation Raspberry Pi. Le HVO a déjà utilisé la technologie Raspberry Pi dans d’autres applications.
Les nouvelles caméras – PiCams – seront testées fin juillet 2022 et pourront être utilisées comme outils de terrain portables ou installées comme stations permanentes dans le réseau de surveillance du HVO. En attendant le résultat des premiers tests, le HVO prévoit d’installer au moins une PiCam en permanence au sommet du Kilauea. Une deuxième PiCam sera soit portable, soit installée en permanence près du sommet du Mauna Loa.
Les mesures des émissions de SO2 peuvent également être dérivés des images des caméras UV. Les mesures traditionnelles des émissions de SO2 sont effectuées en se plaçant sous le panache avec un spectromètre UV monté sur une voiture. Il faut compter une dizaine de minutes, voire davantage, pour effectuer chaque mesure, et seulement 6 à 10 de ces mesures peuvent être réalisées chaque jour. À partir de 2012, le HVO a installé un réseau de spectromètres continus pour mesurer les émissions de SO2 du Kilauea avec une meilleure résolution temporelle que les mesures à partir de véhicules, mais le réseau ne fournit pas d’informations spatiales sur le panache de SO2.
Une fois que les PiCams seront prêtes à l’emploi,elles fourniront une vue bidimensionnelle du panache de SO2 du Kilauea, mais aussi une résolution temporelle élevée et une série temporelle continue de mesures du taux d’émission de SO2.
Les données continues fournies à propos des émissions de SO2 faciliteront l’étude du dégazage en relation avec d’autres ensembles de données continues, comme l’activité sismique et la déformation du sol. Cela donnera une meilleure idée du rôle du dégazage dans des événements éruptifs spécifiques, ce qui n’a pas toujours été facile à réaliser dans le passé. Des travaux semblables ont été effectués au cours de la dernière décennie sur de nombreux volcans à travers le monde, y compris sur le Kilauea où il a été démontré que l’activité sismique et les émissions de SO2 étaient liées au cours des variations de niveau du lac de lave en 2010. Le lac de lave actuel dans le cratère de l’Halema’uma’ u a une configuration et un comportement différents de ceux du lac de lave de 2008-2018. Le HVO est impatient de voir ce que les nouvelles PiCams révéleront sur le dégazage du nouveau lac.
Source : USGS, HVO.

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In a new article, scientists at the Hawaiian Volcano Observatory (HVO) explain how they analyse the sulphur dioxide (SO2) plumes emittes by Kilauea

Observations of SO2 are essential to both monitoring and understanding eruptive activity. HVO relies heavily on measurements of SO2 emission rate which are critical for vog (volcanic air pollution) forecasts and can be used for calculating lava eruption rates.

HVO also relies heavily on cameras to document activity, including both visual and thermal cameras. A third type of camera—an ultraviolet (UV) camera—allows volcanologists to visualize otherwise invisible, SO2 plumes. SO2 absorbs ultraviolet light, which makes it visible in UV imagery even when it cannot be seen by standard cameras.

UV cameras have been used at Kilauea since 2010. Later, in 2013, a combined effort between the Cascades Volcano Observatory (CVO) and HVO resulted in the installation of an automated UV camera system at the summit of Kilauea. That camera station was removed in 2018 when it was threatened by ground cracking associated with summit caldera collapse events.

With lava and strong SO2 degassing having returned to Kilauea summit in late 2020, HVO and CVO are teaming up with colleagues at the University of Sheffield in the United Kingdom. The UK scientists have developed a new generation of small UV cameras that use Raspberry Pi technology. A Raspberry Pi is a small, low-cost computer, about the size of a credit card, and HVO has used them in other applications before.

The new cameras—PiCams—will be tested later this month and can be used as portable field tools or installed as permanent stations in HVO’s monitoring network. Pending the outcome of the initial tests, HVO plans to install at least one PiCam permanently at Kilauea’s summit. A second PiCam will either be kept portable or will eventually be permanently installed near Mauna Loa’s summit.

SO2 emission rates can also be derived from UV camera images. Traditional SO2 emission rate measurements are made by traversing beneath the plume with a UV spectrometer mounted on a car, so that each measurement takes ten or more minutes, with only 6–10 of those measurements made per day. Beginning in 2012, HVO pioneered a network of continuous spectrometers to measure Kilauea’s SO2 emission rate at a much higher temporal resolution than possible with vehicle-based measurements, but the network did not provide spatial information about the SO2 plume.

Once the PiCams are ready for use, they will provide both a 2-dimensional view of Kilauea’s SO2 degassing as well as a high-temporal resolution, continuous timeseries of SO2 emission rate measurements.

The continuous SO2 emission rate data will make it easier to study degassing in conjunction with other continuous datasets, like earthquake activity and ground deformation. This will give greater insight into the role of degassing in specific eruptive events, something that has not always been easy to do in the past. Similar work has been done over the past decade at many volcanoes around the world, including at Kilauea, where earthquake activity and SO2 emissions were shown to be linked during lava lake rise-fall events in 2010. The current lava lake in Halema‘uma‘u has a different configuration and set of behaviours from the 2008–18 lava lake, and HVO is eager to see what the new PiCams will reveal about the degassing of the new lake.

Source: USGS, HVO.

Panache émis par le lac de lave du Kilauea avant l’éruption de 2018 (Photos: C. Grandpey)

Mesure des gaz sur le Kilauea (Hawaii) // Gas measuring on Kilauea Volcano (Hawaii)

Lors d’une éruption, le dioxyde de soufre (SO2) est souvent mentionné par les volcanologues. À Hawaii, c’est la principale composante du vog, ou brouillard volcanique. Cependant, d’autres gaz sont présents dans un panache éruptif et il est intéressant d’étudier leur rapport, comme celui entre le SO2 et le HCl (dioxyde de soufre/chlorure d’hydrogène). Il est également intéressant de connaître la quantité de CO2 (dioxyde de carbone) dissous dans le verre volcanique.
Sur le Kilauea, c’est le travail de l’Hawaiian Volcano Observatory (HVO) d’effectuer ces analyses. Pour réaliser les mesures, les scientifiques de l’Observatoire utilisent un spectromètre infrarouge à transformée de Fourier (IRTF ou FTIR pour Fourier Transform InfraRed spectroscopy). Ce type de spectromètre détecte le rayonnement infrarouge (IR) entrant ; c’est le type de rayonnement associé aux objets chauds ou tièdes qui ont des longueurs d’onde légèrement plus longues que la lumière visible que perçoivent les yeux.
Il s’avère que les gaz absorbent le rayonnement et que chaque gaz – CO2, HCl, SO2, H2O (sous forme de vapeur d’eau), par exemple – a sa propre signature unique de la quantité de rayonnement qu’il absorbe à différentes longueurs d’onde.
Un exemple un peu différent, mais bien connu, de gaz absorbant est l’ozone (O3). L’ozone dans l’atmosphère nous protège d’une partie des rayons ultraviolets (UV) nocifs du soleil (longueurs d’onde plus courtes que la lumière visible) en absorbant très fortement les longueurs d’onde UV. Le SO2 absorbe lui aussi fortement dans la gamme UV ; c’est pour cela que le HVO utilise les UV pour mesurer les taux d’émission de SO2.
Cependant, de nombreux gaz volcaniques n’absorbent pas très bien les UV; en revanche, ils absorbent fortement dans la gamme infrarouge ( IR). En conséquence, les scientifiques du HVO se tournent vers le FTIR pour effectuer les mesurer. L’Observatoire possède deux types de spectromètres FTIR qu’ils utilisent pour des applications différentes.
Pour mesurer les gaz dans l’atmosphère, les scientifiques utilisent le spectromètre FTIR ‘de terrain’ et se rendent sur le site où le volcan émet le panache volcanique. Une source d’énergie IR est nécessaire et la lave convient parfaitement car elle est très chaude. Ainsi, lorsqu’une éruption se produit, les scientifiques peuvent orienter le FTIR vers de la lave incandescente. S’il n’y a pas de lave à portée de main, ils peuvent toujours mesurer le gaz en dirigeant le FTIR vers une lampe spéciale qui génère des IR.
Une fois la source IR obtenue, les scientifiques doivent positionner le FTIR de telle sorte que le gaz volcanique se trouve entre la source IR et le FTIR. Le FTIR mesure les quantités relatives de rayonnement IR à différentes longueurs d’onde, dont une partie est absorbée par les gaz volcaniques. Ils analysent ensuite les données et calculent des ratios de gaz majoritaires, comme CO2/SO2 et le SO2/HCl, qui peuvent donner des informations sur la façon dont le magma et les gaz volcaniques sont véhiculés dans le système d’alimentation du volcan.
Le deuxième spectromètre FTIR reste dans le laboratoire où il est utilisé pour mesurer de petites quantités de H2O et de CO2 dissous dans les minéraux et le verre volcanique. Le principe reste le même que pour le FTIR de terrain. Le FTIR de labo dispose d’une source IR et d’un détecteur de rayonnement qui mesure l’intensité IR à de nombreuses longueurs d’onde différentes. Au lieu d’un panache volcanique pour effectuer les mesures, les scientifiques insèrent une fine lame de minéral ou de verre soigneusement polie entre la source IR et le détecteur.
Les minéraux et les verres, en particulier ceux qui sont émis par des volcans riches en gaz, contiennent souvent du CO2 et du H2O encore dissous qui absorbent les infrarouges à ces longueurs d’onde caractéristiques, tout comme les gaz volcaniques dans l’atmosphère. Dans la mesure où les scientifiques connaissent l’épaisseur de la minuscule lame de verre ou de minéral, le FTIR peut alors leur indiquer quelle quantité de gaz est dissoute dans ce petit échantillon solide. Une fois qu’ils ont ces informations, les scientifiques peuvent déterminer, par exemple, de quelle profondeur provient le matériau émis pendant éruption et à quelle vitesse il a été émis.
Source : USGS/HVO.

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During an eruption, sulfur dioxide (SO2) is often mentioned by volcanologists. In Hawaii, it is the major component of vog, or volcanig smog. However, other gases are present in an eruptive plume and it is interesting to study their ratio, such as the one between SO2 and HCl (sulfur dioxide/hydrogen chloride). It is also interesting to know the amount of CO2 (carbon dioxide) dissolved in volcanic glass.

On Kilauea volcano in Hawaii, it is up to the Hawaiian Volcano Observatory (HVO) to perform these analyses. To make the measurements, scientists at the Observatory use a Fourier Transform Infrared spectrometer, or FTIR. FTIR instruments detect incoming infrared (IR) radiation; this is the type of radiation associated with hot or warm objects having wavelengths slightly longer than the visible light we can see with our eyes.

It turns out that gases absorb radiation, and each gas – CO2, HCl, SO2, H2O (water vapour), and others – has its own unique signature of how much it absorbs at different wavelengths.

One slightly different, but common, example of an absorbing gas is ozone (O3). Ozone in the atmosphere protects us from some of the sun’s harmful ultraviolet (UV) radiation (shorter wavelengths than visible light) by absorbing UV wavelengths very strongly. SO2 also absorbs strongly in the UV range; HVO uses UV to measure SO2 emission rates.

However, many important volcanic gases don’t absorb UV very well, but they do absorb strongly in the IR range. So, HVO scientists turn to FTIR to measure them. HVO has two different types of FTIR, which they use for different applications.

For measuring gases in the atmosphere, scientists take the ‘field FTIR’ and head out to where the volcanic plume is. A source of IR energy is needed and lava is a great source of IR because it is very hot. So, when an eruption takes plave,scientists can aim the FTIR at hot, glowing lava. If there is no lava around, they can still measure the gas by aiming the FTIR at a special lamp that generates IR.

Once the IR source is obtained, scientists need to position the FTIR so the volcanic gas is between the IR source and the FTIR. The FTIR measures relative amounts of IR radiation at different wavelengths, some of which is absorbed by the volcanic gases. They then process the data and calculate important gas ratios, like CO2/SO2 and SO2/HCl, which can give information about how magma and volcanic gases are transported in the volcanic plumbing system.

The second FTIR stays in the lab where it is used for measuring small amounts of H2O and CO2 dissolved in minerals and volcanic glass. The principles are the same as with the previous instrument. The lab FTIR has an IR source and a radiation detector that measures IR intensity at many different wavelengths. But instead of a volcanic plume passing between them, the scientists insert a tiny, carefully polished chip of mineral or glass into the path between the IR source and the detector.

Minerals and glasses, especially those that erupt out of gas-rich volcanoes, often have CO2 and H2O still dissolved in them, which will absorb IR at those characteristic wavelengths just like volcanic gases in the air. As long as scientists know how thick the tiny chip of glass or mineral is, the FTIR can then tell them how much of those gases are dissolved in those little solid pieces. Once they know that, they can determine, for instance, how deep the erupted material came from and how quickly it erupted.

Source : USGS / HVO.

Scientifique du HVO utilisant le spectromètre FTIR de terrain au cours de la dernière éruption du Kilauea (Source: USGS / HVO)

Mesure du dioxyde de soufre (SO2) en milieu volcanique // Measurement of sulphur dioxide (SO2) in volcanic environments

Le dioxyde de soufre (SO2) est l’un des principaux gaz émis par les volcans. L’éruption de la Lower East Rift Zone (LERZ) du Kilauea en 2018 a libéré d’énormes quantités de SO2 et tout l’archipel hawaïen a parfois été envahi par le brouillard volcanique, appelé localement vog. Aujourd’hui, avec l’éruption dans l’Halema’uma’u, les panaches de SO2 sont emportés par les alizés et ils perturbent la vie de la population dans les zones sous le vent. Il est donc important de savoir quelle quantité de ce gaz est émise pour comprendre les conséquences pour la santé humaine.

J’ai écrit une note sur les émissions de SO2 le 31 mai 2020. Les scientifiques du HVO donnent aujourd’hui plus de détails sur la technique de mesure de ce gaz.

Pour mesurer les émissions de SO2, les scientifiques du HVO commencent par monter un spectromètre ultraviolet (UV) sur la carrosserie d’une voiture ou la carlingue d’un avion. Dans la mesure où le SO2 est invisible et peut ne pas coïncider parfaitement avec les parties visibles du panache éruptif, ils déterminent l’endroit où le SO2 est susceptible de se trouver en fonction de la direction du vent.

Puis, en partant du ciel clair d’un côté du panache, ils balayent toute la largeur inférieure du panache et retrouvent le ciel clair de l’autre côté. Le spectromètre est d’abord orienté vers le ciel et, comme le SO2 absorbe les rayons UV, l’appareil détecte ensuite une quantité d’UV moins importante lorsqu’il se trouve sous le panache de gaz contenant du SO2. Le spectromètre mesure la quantité de SO2 qui se trouve au-dessus de lui dans une trajectoire verticale ; c’est la « longueur de trajet de concentration. » (concentration-path-length).

Cette longueur de trajet de concentration associe la concentration et le trajet en une seule unité, ppm ∙ m (parties par million par mètre). Un panache de 1 mètre d’épaisseur avec une concentration de 10 ppm de SO2 équivaut à 10 ppm ∙ m. Il en va de même pour un panache de 10 mètres d’épaisseur avec une concentration de seulement 1 ppm de SO2. La quantité de SO2 est la même, elle est simplement distribuée différemment.

Toutes ces mesures mises ensemble sur la largeur du panache fournissent des indications sur une section transversale de ce même panache et montrent quelle quantité de SO2 se trouvait au-dessus du spectromètre en chaque point de mesure. Cette section transversale qui incorpore la largeur du panache en mètres, permet de connaître la surface de gaz dans cette zone, avec des unités de ppm ∙ m2 (parties par million par mètre carré).

Une fois que les scientifiques ont calculé cette section transversale, ils utilisent la vitesse du panache (en mètres / seconde) pour déterminer le nombre de sections transversales – mais aussi la quantité de gaz – dans un certain laps de temps. Cela conduit à des unités de ppm ∙ m3 / s (parties par million par mètre cube par seconde), autrement dit un volume de gaz émis avec une certaine concentration de SO2 par seconde.

Dans la mesure où on sait combien pèse une molécule de SO2, on peut convertir ce volume en masse (en kilogrammes ou en tonnes), et on peut convertir les secondes en jours. C’est ainsi que procèdent les scientifiques pour déterminer les flux de SO2 qui sont généralement exprimés en tonnes / jour (t / j). Grâce aux résultats obtenus, les scientifiques du HVO peuvent comparer les émissions de SO2 de l’éruption actuelle avec celles des éruptions précédentes du Kilauea.

Ainsi, lorsque le HVO a commencé à utiliser des mesures UV en 1979, les émissions de SO2 au sommet du volcan atteignaient en moyenne 500 t / j ou moins. Entre 1983 et 2008, l’éruption du Pu’uO’o émettait en moyenne 2000 t / j. Après des émissions relativement élevées au début de l’éruption sommitale de 2008-2018, les émissions du lac de lave se sont stabilisées à près de 5 000 t / j tandis que les émissions du Pu’uO’o chutaient  à quelques centaines de t / j.

L’éruption de 2018 a eu des émissions très élevées, avec près de 200 000 t / j ; ce sont les émissions les plus élevées jamais enregistrées sur le Kilauea.

Après l’éruption de 2018, les émissions de SO2 du Kilauea ont chuté à une trentaine de tonnes par jour.

Au début de la nouvelle éruption en décembre 2020, les émissions de SO2 au sommet du Kilauea étaient de 30 000 à 40 000 t / j. Les services sanitaires ont mis en garde le public sur la mauvaise qualité de l’air et ses dangers pour la santé.

Après l’arrêt de l’activité dans la fissure nord de l’Halema’uma’u le 26 décembre 2020, les émissions de SO2 ont progressivement baissé pour atteindre environ 2500 t / j le 11 janvier 2021, signe que l’activité éruptive diminuait..

Source: USGS / HVO.

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Sulphur dioxide (SO2) is one of the main gases emitted by volcanoes. Kilauea’s Lower East Rift Zone (LERZ) eruption in 2018 released huge amounts of sulphur dioxide and the whole Hawaiian archipelago was sometimes invaded by the volcanic fog, or vog. Today, during the Halema’uma’u eruption, SO2 plumes are pushed by the trade winds and disturb life in downwind areas. So, it is important to know how much of this gas is emitted for understanding implications for human health during volcanic eruptions.

I wrote a post about SO2 emissions on May 31st, 2020. In a new article, HVO scientists give more details about how to measure this gas.

To measure SO2 emission rates, HVO scientists begin by mounting an ultraviolet (UV) spectrometer to a car or an aircraft. Since SO2 is invisible and may not perfectly coincide with visible parts of the plume, they determine where the SO2 should be based on wind direction.

Then, starting under clear sky on one side of the plume, they traverse underneath the entire width of the plume, and end up back under clear sky on the other side.

The spectrometer looks up at the sky and, because SO2 absorbs UV radiation, it detects less incoming UV when it is under the gas plume where there is SO2. It measures how much SO2 is above it in the vertical ‘path’ where the spectrometer is looking – the ‘concentration-path-length’.

Concentration-path-length combines concentration and path into a single unit, ppm∙m (parts per million meters). A 1-metre-thick plume with a concentration of 10 ppm (parts per million) of SO2 is equivalent to 10 ppm∙m. So is a 10-metre-thick plume with a concentration of only 1 ppm of SO2. The amount of SO2 is the same, it is just distributed differently.

All those concentration-path-length measurements put together across the plume’s width make a ‘slice’, or cross-section, through the plume, showing how much SO2 was above the spectrometer at each point. That slice, since it incorporates the plume width in metres, is the area of the gas in a cross-section of plume, with units of ppm∙m2 (parts per million square metres).

Once the scientists have that cross-section, they use plume speed (in metres/second) to determine how many of those cross-sections – and how much gas – are passing overhead in a certain amount of time. That brings them to units of ppm∙m3/s (parts per million cubic metres per second)—which is a volume of gas with a certain concentration of SO2 each second.

Because one knows how much a molecule of SO2 weighs, one can convert that volume into a mass (in kilograms or tonnes), and one can convert seconds to days. That is how scientists derive the emission rates of SO2, which are usually presented in units of tonnes/day (t/d).

With the results they obtain, HVO scientists are able to compare SO2 emission rates from the current eruption to those emitted by previous Kilauea eruptions.

When HVO began to use UV measurements in 1979, the summit averaged about 500 t/d of SO2 or less. Between 1983 and 2008, Kilauea’s Pu’uO’o eruption averaged around 2,000 t/d. After higher emission rates early in the 2008–2018 summit eruption, the lava lake emissions stabilized near 5,000 t/d while Pu’uO’o’s emissions fell to a few hundred t/d.

The 2018 eruption had very high emission rates of nearly 200,000 t/d, the highest recorded emissions from Kilauea. Following the 2018 activity, Kilauea emissions dropped to only about 30 t/d.

At the beginning of the new eruption in December 2020, Kilauea summit emission rates were 30,000–40,000 t/d. The Department of Health warned the public of potential hazardous, poor air quality. It advised residents and visitors to be prepared and aware of the surrounding conditions. Since the north fissure activity ceased on December 26, 2020, SO2 emissions have progressively dropped and reached about 2,500 t/d on January 11th, 2021, a sign that the eruption rate has decreased.

Source : USGS / HVO.

 

Panaches de gaz sur le Kilauea (Photos : C. Grandpey)