Le risque d’un méga-séisme au Japon // The risk of a megaquake in Japan

Après le séisme de magnitude 7,1 qui a frappé le sud du Japon le 8 août 2024, les autorités ont émis pour la première fois un bulletin d’alerte concernant le risque – plus élevé que précédemment – d’un méga-séisme. Elles préviennent qu’un méga-séisme accompagné d’un tsunami déclenché par la Fosse de Nankai pourrait tuer des centaines de milliers de personnes et profondément affecter l’économie japonaise. (Un méga-séisme est un événement d’une magnitude supérieure à M8,0.)
La Fosse de Nankai se trouve au large de la côte pacifique sud-ouest du Japon et s’étire sur environ 900 km, là où – dans un phénomène de subduction – la plaque océanique des Philippines s’enfonce sous la plaque eurasienne et où les contraintes tectoniques s’accumulent et sont susceptibles de provoquer un méga-séisme environ une fois tous les 100 à 150 ans.
Le gouvernement japonais avait précédemment parlé d’un risque de 70 à 80 % qu’un séisme de magnitude M8.0 à M9.0 se produise le long de la fosse au cours des 30 prochaines années.
L’USGS explique que la magnitude d’un séisme est liée à la longueur de la faille sur laquelle il se produit. Le plus puissant séisme jamais enregistré a eu lieu le 22 mai 1960 au Chili, sur une faille de près de 1 600 kilomètres de long, avec une magnitude de M9,5.
De son côté, le comité consultatif sur les séismes de la Fosse de Nankai explique que la probabilité qu’un séisme plus puisssant se produise après une secousse de magnitude M7,0 est d’une fois sur plusieurs centaines de cas, mais un tel événement pourrait atteindre une magnitude de M9,1.
En conséquence, le comité consultatif sur les séismes a déclaré que les habitants des zones potentiellement affectées par une telle catastrophe doivent garder à l’esprit les procédures d’évacuation et rester vigilants pendant encore une semaine. Ils ne doivent pas oublier qu’en 2011, plus de 15 000 personnes ont été tuées lors d’un séisme de magnitude M9,0 dans le nord-est du Japon, avec un tsunami et la fusion des coeurs de trois réacteurs dans une centrale nucléaire.
Si un méga-séisme se produisait, il pourrait être ressenti dans des zones allant du centre de la province de Shizuoka – à environ 150 km au sud de Tokyo – jusqu’au sud-ouest de Miyazaki. Des vagues de tsunami atteignant 30 mètres de hauteur pourraient atteindre la côte pacifique du Japon quelques minutes après le séisme, en fonction de l’épicentre et de l’amplitude des marées.
Si l’on ajoute les glissements de terrain et les incendies, la catastrophe pourrait coûter la vie à 323 000 personnes et détruire 2,38 millions de bâtiments, tout en obligeant près de 10 millions de survivants à évacuer. Les dommages économiques pourraient atteindre plus d’un tiers du produit intérieur brut annuel du Japon, avec des impacts durables sur les infrastructures et les chaînes d’approvisionnement dans des secteurs comme la fabrication de voitures et d’autres produits japonais clés.
Les séismes générés par la Fosse de Nankai apparaissent dans les archives historiques du Japon à plusieurs reprises depuis l’année 684, souvent avec des récits de tsunamis frappant des villages côtiers. Le séisme le plus récent avec pour origine la Fosse de Nankai s’est produit en 1946 avec une secousse de magnitude M8,0 et un tsunami de 6,90 mètres. Il a tué 1 330 personnes.
Source : agence de presse Reuters et médias d’information japonais.

Source: Wikipedia

———————————————————

After the M7.1 earthquake that struck south Japan on August 8th, 2024, the first-ever advisory on higher-than-usual risks of a megaquake was issued by Japanese authorities. They warn that a possible Nankai Trough megaquake and tsunami disaster could kill hundreds of thousands of people and cause huge damage to Japan. (Earthquakes with a magnitude larger than M8.0 are considered megaquakes.)

The Nankai Trough is off Japan’s southwest Pacific coast and runs for approximately 900 km, where the Philippine Sea Plate is subducting under the Eurasian Plate and the accumulating tectonic strains could result in a megaquake roughly once in 100 to 150 years.

The Japanese government had previously predicted a 70-80% chance of an M 8 to 9 earthquake happening along the Trough in the next 30 years.

USGS explains that the magnitude of an earthquake is related to the length of the fault on which it occurs. The largest earthquake ever recorded was a magnitude M9.5 on May 22nd, 1960 in Chile on a fault that is almost 1,600 kilometers long.

The Nankai Trough quake advisory panel said the chance of a bigger earthquake striking after an M7.0 tremor was once in a few hundred cases, but such an event could have a magnitude up to M9.1.

As a consequence, the quake advisory panel said that residents in areas that would be hit by such a disaster should review evacuation procedures and stay vigilant for a week. They should keep in mind that in 2011, more than 15,000 people were killed in an M9.0 quake in northeast Japan that triggered a tsunami and triple reactor meltdowns at a nuclear power plant.

Should a megaquake occur, it could result in maximum measurable tremors to areas from central Shizuoka – about 150 km south of Tokyo – to southwestern Miyazaki. Tsunami waves up to 30 metres may reach Japan’s Pacific coasts within minutes after the quake, depending on the epicentre and tidal situation.

Coupled with landslides and fire, the disaster would be expected to claim the lives of as many as 323,000 people and destroy 2.38 million buildings, forcing nearly 10 million survivors to evacuate. Economic damage could reach more than a third of Japan’s annual gross domestic product, with long-lasting impacts on infrastructure and supply chains for coastal industrial powerhouses producing cars and other key Japanese products.

Nankai Trough earthquakes have been marked on Japan’s historic records multiple times since 684, often with accounts of tsunamis striking coastal villages.The most recent Nankai Trough quake happened in 1946 with an M8.0 tremor and a 6.9-metre tsunami, killing 1,330 people.

Source : Reuters press agency and Japanese news media.

Japon: Exploration des zones de subduction // Japan: Exploring subduction zones

Comme je l’ai écrit à plusieurs reprises, nous sommes capables d’explorer la surface de la planète Mars, mais nous ne savons que très peu de choses sur les profondeurs de nos propres océans, en particulier sur les zones de subduction où se déclenchent les séismes les plus puissants et les plus dévastateurs.

Il y a quelques jours, je regardais sur la chaîne de télévision française France 5 l’émission très intéressante «Science Grand format» qui était consacrée à deux «terres extrêmes»: le Japon et la Californie.

Le Japon doit régulièrement faire face à des événements extrêmes tels que des éruptions volcaniques, des séismes, des lahars, des tsunamis et des typhons. D’un point de vue géologique, le pays se trouve à l’intersection de 4 grandes plaques tectoniques: la plaque d’Okhotsk au nord, la plaque du Pacifique à l’est, la plaque Philippine au sud et la plaque Eurasienne à l’ouest. Les séismes sont le plus souvent provoqués par la subduction des plaques Pacifique et Philippine qui plongent sous les plaques d’Okhotsk et Eurasienne.

Un épisode du documentaire sur le Japon nous explique que le Chikyu, un navire de recherche spécialisé en forage océanique, a foré le plancher océanique dans l’espoir d’atteindre la zone de subduction. Cependant, la mission n’a pas réussi à atteindre son objectif ultime : forer jusqu’à 5 200 mètres sous le fond marin, là où la plaque Philippine plonge sous la plaque Eurasienne, en provoquant de puissants tremblements de terre. En mai 2019, les ingénieurs ont arrêté le processus de forage à cause d’effondrements dans le puits de forage, à une profondeur d’un peu plus de 3250 mètres sous le plancher océanique.

Cet échec marquait la fin de près de dix ans d’efforts pour s’enfoncer à l’intérieur de la Fosse de Nankai, au large de la côte sud-est du Japon. Dans cette région, le processus de subduction déclenche des séismes dévastateurs tous les 100 à 150 ans environ. Par exemple, deux événements d’une magnitude supérieure à M 8 ont été enregistrés en 1944 et 1946.

Atteindre les profondeurs de la zone de subduction n’est pas une tâche facile. La limite entre les plaques tectoniques est si profonde que le Chikyu est le seul navire de forage océanique capable de l’atteindre. Pour stabiliser son équipement de forage et pénétrer le plancher océanique, le navire dispose d’une technologie semblable à celle utilisée sur une plate-forme pétrolière.

En octobre 2018, le Chikyu a effectué sa quatrième mission sur un site de la Fosse de Nankai connu sous le nom de C0002, où il avait déjà effectué le forage le plus profond jamais réalisé. Les ingénieurs savaient que cette mission serait délicate, car le forage devait s’effectuer dans des roches fracturées et litées. L’équipe de forage a pu s’enfoncer jusqu’à 3262 mètres, battant ainsi son propre record de forage océanique à but scientifique. Mais les chercheurs n’ont pas pu descendre davantage à cause des effondrements dans le puits de forage. Grosse déception à bord du navire de recherche !

Après l’échec du forage C0002, le Chikyu a effectué des missions moins profondes. En particulier, les scientifiques ont exploré la géologie de la faille qui a déclenché le séisme dévastateur de Tohoku en 2011 qui s’est accompagné de la destruction de la centrale nucléaire de Fukushima. A côté de ces événements meurtriers, les scientifiques à bord du navire ont également étudié les séismes ‘lents’ que l’on enregistre le long de la Fosse de Nankai.

Source: Nature.

Espérons que le Japon – et d’autres pays – pourront mettre en place dans les prochaines années d’autres initiatives comme la mission dans la Fosse de Nankai. Elles nous permettront de mieux comprendre le comportement de notre planète.

————————————————-

As I put it several times, we are able to explore the surface of Mars, but we know very little about the depths of our own oceans, especially the subduction zones that trigger the most powerful and devastating earthquakes.

A few days ago, I was watching on the French TV channel France 5 the very interesting programme “Science Grand format” that was dedicated to two “extreme lands”: Japan and California.

Japan regularly has to face extreme events such as volcanic eruptions, earthquakes, lahars, tsunamis and typhoons. From a geological point of view, the country is located at the intersection of 4 major tectonic plates: the Okhotsk Plate to the north, the Pacific Plate to the east, the Philippine Plate to the south and the Eurasian Plate to the west. Earthquakes are usually caused by the subduction of the Pacific and Philippine plates, which dive beneath the Okhotsk and Eurasian plates.

An episode of the documentary about Japan informs us that the nation’s ocean-drilling research vessel, Chikyu, has drilled the ocean floor deeper than ever before in the hope to reach the subduction zone. However, the mission failed to achieve its ultimate goal of penetrating 5,200 metres beneath the sea floor, into the area where the Philippine Sea plate  plunges beneath the Eurasian plate, causing powerful earthquakes. In May 2019, engineers stopped the drilling process after the drill hole kept collapsing, just over 3,250 metres beneath the sea floor.

It was the end to an almost decade-long effort to drill deep into the Nankai Trough off Japan’s southeast coast. In this region, the plate subduction triggers devastating earthquakes roughly every 100 to 150 years. For instance, a pair of earthquakes with magnitudes above M 8 struck in 1944 and 1946.

Reaching the depths of the subduction zone is not an easy job. The plate boundary is so deep that Chikyu is the only scientific ocean-drilling vessel capable of reaching it. The ship uses a structure similar to the technology used on an oil rig, to stabilize its drilling equipment and penetrate the sea floor.

In October 2018, Chikyu made its fourth trip to a site on the Nankai Trough known as C0002, where it had already drilled the deepest-ever hole beneath the sea floor. Engineers knew that the next phase of drilling would be difficult, because the hole penetrates rocks that are fractured and folded. The drilling team was able to deepen the hole from just over 2,900 metres beneath the sea floor to 3,262 metres, breaking its own record for the deepest scientific ocean drilling. But the researchers could not go any farther because the hole kept collapsing at the bottom. There was a general disappointment aboard the research vessel.

After the C0002 hole failed, Chikyu moved on to drill in shallower holes nearby. In particular, scientists explored the geology of the shallow fault that triggered the devastating 2011 Tohoku earthquake that destroyed the Fukushima nuclear plant.. The ship also investigated the many small, slow-motion earthquakes that are recorded along the Nankai Trough, in addition to the large, devastating ones.

Source : Nature.

Let’s hope more initiatives like the Japanese mission in the Nankai Trough will be set up in the next years. They will help us understand better the behaviour of our planet.

Le Chikyu est un navire japonais de forage en haute mer. Il mesure 210 mètres de longueur, 38 mètres de large, 16,2 mètres de haut pour un tonnage de 57000 tonnes. La partie la plus originale du navire est son derrick de 121 mètres au dessus du niveau de la mer. Il a un équipage de 150 hommes, divisé en 50 scientifiques et 100 opérateurs. (Source : Wikipedia)