Eruption sous-marine dans le Pacifique ? // Submarine eruption in the Pacific Ocean ?

Comme je l’ai déjà écrit à plusieurs reprises, nous savons tout ce qui se passe sur la planète Mars, mais nous ne savons que très peu de choses sur les profondeurs de nos propres océans.

Dans une note publiée le 11 janvier 2018, l’indiquais que de nouveaux enregistreurs permettront peut-être aux scientifiques de cartographier beaucoup plus rapidement les éruptions sous-marines. À l’aide d’hydrophones nouvelle génération, des scientifiques de l’Observatoire des Volcans d’Alaska (AVO) et de l’US Geological Survey (USGS) avaient à cette époque enregistré les sons très différents émis par les éruptions de deux volcans, dont celle de l’Ayhi en 2014.

L’Ayhi est un volcan sous-marin qui fait partie de l’arc volcanique des Mariannes, une chaîne qui présente plus de 60 volcans actifs et qui s’étire sur 960 kilomètres à l’ouest et parallèlement à la Fosse des Mariannes, le point le plus profond sur Terre. L’Ahyi présente une forme conique. Son point culminant se trouve à 79 mètres sous la surface de l’océan. Il est situé à environ 18 kilomètres au sud-est de l’île de Farallon de Pajaros, également connue sous le nom d’Uracas. Il n’y a pas de stations de surveillance à proximité de l’Ahyi, ce qui limite la possibilité de détecter et d’analyser l’activité volcanique dans le secteur.

Selon l’USGS, tout indique que l’Ahyi a commencé à entrer en éruption à la mi-octobre. Les scientifiques cherchent à voir si l’activité se limite à une sismicité peu profonde ou si des matériaux sont émis par le cratère. Ils scrutent les données satellitaires pour voir si la surface de l’océan est décolorée, ce qui pourrait laisser supposer que des matériaux sortent effectivement du volcan. Rien pour le moment ne laisse penser que cette éruption va s’intensifier et devenir un événement majeur. Cependant,il est demandé aux marins d’éviter la zone.
L’activité d’une source volcanique sous-marine a été détectée le mois dernier par des capteurs hydroacoustiques à Wake Island, à environ 250 km. Avec l’aide du Laboratoire de géophysique de Tahiti et les données des stations sismiques de Guam et du Japon, les scientifiques ont analysé les signaux et déterminé que la source de l’activité était probablement le volcan sous-marin Ahyi. L’activité était toutefois en baisse ces derniers jours.
Source : The Seattle Times.

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As I put it several times before, we know everything that happens on Mars, but we know very little about the depths of our own oceans.

In a post published on January 11th, 2018, I indicated that new recordings may help scientists map these incredible events much more quickly. Using a new generation of hydrophones, scientists from the Alaska Volcano Observatory (AVO) and the U.S. Geological Survey (USGS) had recorded the very different sounds of two volcanoes, with Ayhi erupting in 2014.

Ahyi seamount is part of the Mariana Volcanic Arc, which is a chain of over 60 active volcanoes stretching over 960 kilometers west of and parallel to the Mariana Trench, the world’s deepest point. Ahyi is a large conical submarine volcano. Its highest point is 79 meters below the surface of the ocean. It is located about 18 kilometers southeast of the island of Farallon de Pajaros, also known as Uracas. There are no local monitoring stations near Ahyi Seamount, which limits the ability to detect and characterize volcanic unrest there.

According to USGS, all indications are that the Ahyi Seamount began erupting in mid-October. Scientists are looking to see if the activity is limited to shallow earthquakes or if material exploded from the crater. They are checking satellite data to see if there is discolored water, which could suggest material is coming out of the volcano. There’s nothing right now that suggests that this eruption will intensify and become a major event. However, mariners are asked to avoid the immediate area.

Activity from an undersea volcanic source was picked up last month by hydroacoustic sensors some 250 km away at Wake Island. With help from the the Laboratoire de Geophysique in Tahiti and data from seismic stations in Guam and Japan, scientists analyzed the signals and determined that the source of the activity was likely Ahyi Seamount. Activity has been declining in recent days.

Source: The Seattle Times.

Source : NOAA

Image bathymétrique de l’Ahyi (Source: NOAA)

L’éruption sous-marine la plus profonde jamais observée sur Terre // The deepest known undersea eruption en Earth

Une équipe de chercheurs issus de plusieurs universités américaine, canadienne et allemande a effectué une étude sur une récente éruption volcanique sur le bassin arrière-arc des Mariannes dans le Pacifique occidental, à environ 4480 mètres sous la surface de l’océan, ce qui en fait l’éruption la plus profonde jamais observée à ce jour. À titre de comparaison, cette profondeur sous la surface de l’océan est supérieure à la hauteur du Mont Rainier au-dessus du niveau de la mer.
L’éruption a été découverte par des chercheurs qui exploraient de nouveaux sites hydrothermaux dans un secteur où la plaque tectonique Pacifique glisse sous la plaque Philippine dans le processus bien connu de subduction qui donne naissance à la Fosse des Mariannes et l’arc volcanique actif composé de neuf îles et de plus de 60 volcans sous-marins. Le bassin arrière-arc des Mariannes est une zone d’extension du plancher océanique et de volcanisme actif dans la partie supérieure de la plaque derrière l’arc volcanique. Les résultats de l’étude ont été publiés dans un numéro spécial de Frontiers in Earth Science.
Grâce à des technologies de pointe et de nouvelles méthodes d’exploration, les scientifiques ont détecté au cours des 30 dernières années des preuves d’une quarantaine d’éruptions sous-marines. Avant 1990, aucune éruption n’avait été observée. L’éruption d’arrière-arc des Mariannes a été découverte pour la première fois en décembre 2015 par des caméras à bord d’un véhicule autonome appelé Sentry. Les photos ont révélé la présence d’une coulée de lave intacte, sombre et vitreuse, sur le fond de l’océan, sans couverture de sédiments. Les fluides hydrothermaux de couleur laiteuse qui s’en échappaient prouvaient que la coulée était encore chaude et donc très jeune.
Les données bathymétriques récemment recueillies indiquent d’importants changements de profondeur dans la zone entre les relevés de 2013 et 2015, signe qu’une éruption s’est produite. La nouvelle coulée de lave présente une longueur d’environ 7,2 kilomètres et une épaisseur variant entre 40 et 135 mètres.
Les scientifiques sont revenus sur le site en avril et en décembre 2016 et ont utilisé les véhicules télécommandés Deep Discoverer et SuBastian lors de plusieurs expéditions. Les nouvelles observations ont montré un système hydrothermal en déclin rapide sur les coulées de lave, signe que l’éruption a eu lieu seulement quelques mois avant sa découverte l’année précédente.
La dernière étude est importante. En effet, les volcans sous-marins peuvent aider à expliquer le fonctionnement des volcans terrestres et leur impact sur la chimie des océans, ce qui peut avoir une incidence importante sur les écosystèmes locaux.
Source: Oregon State University.

A team of researchers from U.S, Canadian and German universities has documented a recent volcanic eruption on the Mariana back-arc in the western Pacific Ocean, about 4480 metres below the ocean surface, making it the deepest known eruption on Earth. As a comparison, this is deeper below the ocean surface than Mount Rainier’s height above sea level.
The eruption was discovered by researchers searching for new hydrothermal vent sites where the Pacific tectonic plate subducts beneath the Philippine Sea plate, forming the Mariana trench and the active volcano arc, which is made up of nine islands and more than 60 seamounts. The Mariana back-arc is a zone of seafloor spreading and active volcanism in the upper plate behind the volcanic arc. Results of the research were published in a special issue of Frontiers in Earth Science.
Thanks to new technologies and new exploration methods, in the last 30 years scientists have detected evidence of about 40 undersea eruptions. Before 1990, there were zero. The Mariana back-arc eruption was first discovered in December 2015 by cameras aboard an autonomous underwater vehicle called Sentry. Photos revealed the presence of a pristine dark, glassy lava flow on the seafloor with no sediment cover. Venting of milky hydrothermal vent fluid indicated that the lava flow was still warm, and therefore very young.
Newly collected bathymetric data indicated major depth changes in the area between surveys in 2013 and 2015, consistent with an eruption. The new lava flows stretched over an area about 7.2 kilometres long and ranged in thickness between 40 and 135 metres.
The scientists returned to the site in April and December of 2016 and used remotely operated vehicles Deep Discoverer and SuBastian during several expeditions. The new observations showed a rapidly declining hydrothermal system on the lava flows, suggesting the eruption had taken place only months before its discovery the previous year.
The research is important for several reasons. Undersea volcanoes can help inform about how terrestrial volcanoes work and how they impact ocean chemistry, which can significantly affect local ecosystems.
Source: Oregon Sate University.

Vue du Deep Discoverer utilisé pendant la mission (Crédit photo : Oregon State University)

Le bassin arrière-arc des Mariannes // The Mariana back-arc basin

drapeau-francaisUne équipe scientifique vient de rentrer d’une expédition de 28 jours à bord du RV Falkor après avoir identifié un grand nombre de sites hydrothermaux dans le bassin arrière-arc des Mariannes. Cette zone, située à l’ouest de la Fosse des Mariannes, est l’endroit où se concentre le volcanisme sous-marin lié à l’accrétion de la région (voir la coupe ci-dessous). Plusieurs observations importantes ont été réalisées, notamment la découverte d’une bouche active à très grande profondeur.
Un autre point important a été la découverte extrêmement rare d’un champ de lave sous-marin âgé probablement de seulement quelques mois. Les scientifiques ont également observé des émissions d’eau encore chaude et trouble à partir de pillow lavas en cours de refroidissement.
L’équipe, dirigée par des scientifiques du Pacific Marine Environmental Laboratory de la NOAA, a réussi à observer de nouveaux sites hydrothermaux dans l’arrière-arc, faisant passer leur nombre de trois à sept grâce à la découverte de quatre nouvelles zones d’activité. L’une de ces bouches compte parmi les 700 plus profondes recensées à ce jour à travers le monde. Seules trois autres bouches se trouvent encore plus bas que cette dernière qui a été détectée à une profondeur de 4230 mètres.
Pour ses observations, l’équipe scientifique multidisciplinaire a utilisé le véhicule sous-marin autonome (Autonomous Underwater Vehicle – AUV) Sentry de la Woods Hole Oceanographic Institution. Un sonar multifaisceaux ainsi que des capteurs chimiques et optiques ont également été utilisés pour rechercher les nouveaux sites hydrothermaux sur une piste d’exploration de 600 km de long sur le plancher océanique du Pacifique, à proximité du Monument National de la Fosse des Mariannes (Marianas Trench Marine National Monument). Cette région, déjà connue pour ses records de profondeur océanique, possède également des volcans sous-marins actifs et des écosystèmes de fonds marins uniques qui offrent un environnement riche pour les espèces vivant dans ces milieux.
L’équipe scientifique reviendra sur cette région d’arrière-arc dans un an pour étudier les sources hydrothermales nouvellement observées avec le tout nouveau véhicule télécommandé du Schmidt Ocean Institute, capable de descendre à 4500 mètres de profondeur. Grâce aux nouvelles cartes des bouches, les chercheurs seront en mesure de mieux définir les écosystèmes des fonds marins dans et autour du Monument National de la Fosse des Mariannes. Ils étudieront comment des espèces réussissent à s’adapter à cet environnement géologique et chimique unique.
Source: NOAA.

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drapeau-anglaisA scientific team has just returned from a 28-day expedition onboard R/V Falkor after having identified a large number of hydrothermal vent sites in the Mariana Back-arc region. This area, west of the Mariana Trench, is where plate spreading and submarine volcanism are concentrated (see cross section below). Several important findings were made, including the discovery of one of the deepest vents ever found.
Another important outcome was the discovery of an extremely rare recently-erupted underwater lava field that is likely only a few months old. The scientists also observed cloudy warm water leaking through the still-cooling pillow lavas.
The team, led by NOAA Pacific Marine Environmental Laboratory scientists, was able to increase the number of known hydrothermal vent sites in the Back-arc from three to seven by discovering four new areas of activity. One of these vents is amongst the deepest ever found from the 700 vent sites known globally. Only three other vents extend deeper than this newly-found vent, detected at a depth of 4230 meters.
The multidisciplinary group used their Woods Hole Oceanographic Institution’s Autonomous Underwater Vehicle (AUV) Sentry. Multibeam sonar and chemical and optical sensors were also used to hunt for the new hydrothermal sites on a track that explored a 600-km stretch of Pacific seafloor in the vicinity of the Marianas Trench Marine National Monument. This region, best known for including the ocean’s deepest depths, is also populated with active underwater volcanoes and unique deep-sea ecosystems that provide a rich environment for uniquely adapted species.
The scientific team will return to this same Back-arc region one year from now to explore the newly-found hydrothermal vents with Schmidt Ocean Institute’s brand new 4,500 m Remotely Operated Vehicle (ROV). Armed with new maps of the recently discovered vents, the researchers will be able to better characterize the deep-sea ecosystems in and around the Mariana Trench Marine National Monument, exploring how vent species adapt to their unique chemical and geologic environment.
Source: NOAA.

Mariannes

Fosse et arrière-arc des Mariannes (Source: NOAA)

Les volcans des Mariannes

Il m’est arrive à plusieurs reprises dans mes notes de signaler des éruptions dans l’archipel des Mariannes, en particulier sur les îles Pagan et Anatahan. Profitons de la faible activité volcanique actuelle pour s’attarder sur cet archipel qui fait partie d’une longue chaîne de montagnes sous-marine qui s’étire sur 2519 km entre l’île de Guam et le Japon. Les îles du sud de l’archipel sont des destinations touristiques prisées par les Américains. En revanche, les îles du nord, volcaniques, sont désertes. Le volcanisme est le résultat de la subduction de la Plaque pacifique qui s’enfonce dans la Fosse des Mariannes, donnant naissance aux abysses les plus profonds de notre planète.

La plus septentrionale des Mariannes a pour nom Farallon de Pajaros. Les fréquentes éruptions lui ont valu le surnom de « Phare du Pacifique occidental ». La dernière activité a eu lieu en 1967 et aucune végétation ne recouvre le sommet de cette île.

Plus au sud, on trouve les Iles Maug, ensemble de trois îles en forme d’anneau, restes de la lèvre d’un ancien volcan. Aucune activité n’a été observée dans les temps historiques.

Viennent ensuite Asuncion et Agrihan. Cette dernière dresse ses 4000 mètres au-dessus du plancher océanique, mais la hauteur émergée n’est que de 965 mètres, ce qui en fait malgré tout le point culminant non seulement des Mariannes, mais de toute la Micronésie. La caldeira de 2 km de diamètre a connu sa dernière éruption en 1917. Elle a entraîné l’évacuation du seul village de l’île.

L’île de Pagan est sortie des eaux il y a moins de 1000 ans. Une éruption majeure a été observée en 1981, avec l’évacuation des deux villages qui occupaient l’île. La dernière éruption a eu lieu en 2010 (voir la note sur mon blog à cette époque).

Alamagan est beaucoup plus petite que Pagan et n’a pas connu d’activité éruptive au cours du dernier millénaire.

L’île la plus méridionale est Anatahan. D’une longueur de 10 km, elle a fait la une de la presse internationale à la fin de la seconde guerre mondiale. En effet, elle avait servi de refuge à un groupe de soldats japonais après le torpillage de leur navire au large des côtes de l’île. Ils vécurent à Antahan jusqu’en 1952 en refusant d’accepter la fin de la guerre six années plus tôt !

D’un point de vue volcanique, la première éruption connue a eu lieu en 2003 et a donné naissance à une vaste caldeira dans la partie E de l’île. Une autre caldeira héberge un lac dans la partie O. La dernière éruption a été observée en 2007 et a duré une année (voir la note de mon blog à ce sujet).

Source : Google Sightseeing.

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