Le refuge du Goûter (Massif du Mont Blanc) : une erreur collective ?

Dans le massif du Mont-Blanc, à 3 835 mètres d’altitude, le refuge du Goûter est l’un des plus hauts refuges gardés d’Europe de l’Ouest. Il permet aux alpinistes d’accéder au sommet du mont Blanc par la voie normale. Le nouveau refuge de 120 places, à la conception futuriste, est entré en service en 2013. Il bénéficie de nombreuses innovations en matières architecturale et environnementale. Sa construction a coûté 7,5 millions d’euros, financés à 51 % par la Fédération française des clubs alpins et de montagne (FFCAM) et à 49 % par des collectivités publiques et des mécènes.

Lors de l’ouverture du refuge aux alpinistes, ses concepteurs ont fait remarquer que la chaleur dégagée par les alpinistes occupant le refuge chaque soir est susceptible de faire monter la température intérieure à 35 °C pour une température extérieure à −20 °C. L’air est renouvelé par une ventilation double flux qui permet de chauffer l’air neuf par l’air vicié au moyen d’un échangeur de chaleur. Le surplus de chaleur est en partie utilisé pour faire fondre la neige grâce à un système de circulation d’eau. L’assainissement des eaux usées se fait par filtration et stérilisation avant qu’elles soient rejetées dans l’environnement. L’électricité est produite par 95 m2 de capteurs solaires photovoltaïques placés sur le toit et en façade.

Malgré ces innovations, des critiques ont été émises concernant des acheminements d’eau par hélicoptère, nécessaires à cause de problèmes de réglage du fondoir, la saturation des toilettes, l’utilisation massive de fioul pour éviter les coupures d’électricité ou les pannes du système de régulation de la chaleur. Ces dysfonctionnements ont, semble-t-il, été aggravés par le comportement de certains alpinistes.

Les critiques continuent aujourd’hui. En décembre 2022, le maire de Saint-Gervais Mont-Blanc Jean-Marc Peillex a parlé, à propos du refuge du Goûter, d’une « une véritable erreur collective » par rapport à certains choix techniques pris dans la construction de ce refuge. Selon lui, « on ne peut pas commander depuis Grenoble un refuge qui est à Saint Gervais. C’est le refuge le plus polluant alors que ceux qui l’ont conçu prétendaient qu’il était le plus environnementalement correct. » Pour la maire de St Gervais, c’est la FFCAM qui est responsable des défauts d’entretien. Elle a fait mettre un système d’épuration qui est le même que dans les sous-marins, et qui consiste à filtrer l’eau et à la réutiliser. Sauf que quand on n’entretient pas, qu’on ne nettoie pas les filtres, la situation devient catastrophique. En 2021, un hélicoptère était utilisé pour évacuer les boues compactées d’excréments, Le coût était de 100.000 euros pour trois mois, Pour J-M. Peillex, c’est une situation intolérable. Il ajoute qu’on ne peut pas dire qu’on fait un refuge propre sur le plan environnemental, alors qu’on brûle 8000 litres de fioul par saison, à 3.800 mètres d’altitude, pour se fournir en électricité et qu’on a une station d’épuration qui ne marche pas depuis le début. C’est une erreur collective d’avoir accepté le projet de la FFCAM présenté comme le symbole d’une démarche écologique et durable, en pointe en matière de production et d’économie d’énergie. Dans les faits, rien ne fonctionne. Quand il y a un incident, il y a une omerta !

A noter que dans la nuit du 29 au 30 mai 2023 un incendie s’est déclaré dans un local technique du refuge. Toutes les installations électriques ont alors été coupées, et le pire a pu être évité. Le refuge n’a pas été évacué.

Si vous désirez faire l’ascension du Mont Blanc avec une halte au refuge du Goûter, il vous en coûtera 65 euros pour une nuitée, 19 euros pour le petit déjeuner et 47,20 euros pour le repas du soir…si le mal des montagnes ne vous a pas coupé l’appétit! J’ai eu l’occasion de grimper à plus de 5000 mètres d’altitude en Amérique du Sud et la vue des files de randonneurs qui se dirigent vers le toit de l’Europe m’a coupé toute envie de me joindre à elles…

Le refuge du Goûter (Crédit photo: Wikipedia)

Tsunami de l’éruption aux Tonga: pourquoi les prévisionnistes se sont trompés // Tonga eruption tsunami : why forecasters were mistaken

L’éruption volcanique du 15 janvier aux Tonga a déclenché une onde de choc atmosphérique qui s’est propagée à une vitesse proche de lcelle du son, poussant devant elle de puissantes vagues à travers le Pacifique, jusqu’aux côtes du Japon et du Pérou, à des milliers de kilomètres.
Les modèles de prévision et les systèmes d’alerte, conçus principalement pour évaluer les vagues déclenchées par les séismes conventionnels, ont été déconcertés par l’événement de Tonga et ont donc commis des erreurs. Ils n’ont pas tenu compte de l’effet amplifiant de l’onde de choc. On se rend donc compte du point faible ces systèmes qui ont été incapables de prévoir avec précision à quel moment les vagues toucheraient terre.
L’éruption du volcan Hunga Tonga-Hunga Ha’apai a déclenché un tsunami qui a détruit des villages et coupé les communications dans l’archipel des Tonga et ses 105 000 habitants. Trois personnes ont été tuées. Ce bilan est faible car la population est bien préparée pour faire face à un tsunami. Les habitants sont même probablement parmi les mieux préparés pour affronter les catastrophes naturelles, avec des années d’exercices tsunami: C’est pourquoi de nombreuses personnes ont su se réfugier sur des endroits plus élevés.
S’agissant du Pérou, le manque d’informations précises a peut-être contribué à la mort de deux personnes qui se sont noyées dans des vagues inhabituellement hautes, ainsi qu’à la marée noire majeure qui a souillé le littoral près de la raffinerie de La Pampilla.
Les scientifiques expliquent qu’ils doivent maintenant réévaluer le risque tsunami pour d’autres volcans dans le monde. Par exemple, ils pensaient que le volcan sous-marin Kick’em Jenny ne posait qu’un risque de tsunami pour l’île voisine de la Grenade, dans les Caraïbes. Mais la vague pourrait très bien affecter l’ensemble des Caraïbes et du golfe du Mexique, et peut-être même l’océan Atlantique à grande échelle, si un événement de type Tonga devait se produire.
Les tsunamis déclenchés par des éruptions volcaniques sont rares dans l’histoire moderne. L’onde de choc générée par le volcan des Tonga compte parmi les plus importantes jamais enregistrées; elle est similaire à celle produite par l’éruption du Krakatoa en 1883.
Avant le tsunami de 2018 qui a suivi l’éruption de l’Anak Krakatau, un tsunami déclenché par un volcan ne s’était pas produit dans l’océan depuis plus d’un siècle. A côté de cela, 90 % des tsunamis sont déclenchés par des séismes classiques. En conséquence, les systèmes d’alerte aux tsunamis sont programmés pour donner la priorité aux événements sismiques classiques. Les instruments disposés sur le plancher océanique surveillent les variations anormales de la hauteur des vagues; ils envoient des informations par balises de surface, puis par satellite, à un centre d’alerte pour évaluation.
Le Pacific Tsunami Warning Center à Hawaï a tout d’abord mis en garde contre des vagues dangereuses à moins de 1 000 km de l’éruption des Tonga. Cependant, leur bulletin émis par le Centre expliquait qu' »en raison de la source volcanique, nous ne pouvons pas prévoir l’amplitude des tsunamis ni jusqu’où le risque de tsunami peut s’étendre ». Quelque 10 heures plus tard, l’alerte a été mise à jour et incluait une menace possible pour le Pérou, une évolution surprenante étant donné que le tsunami près des Tonga était relativement faible.
Entraînées par la gravité, les vagues de tsunami se déplacent à environ 200 mètres par seconde. Cependant, l’onde de choc générée par le volcan des Tonga s’est déplacée à plus de 300 mètres par seconde et était si puissante qu’elle a fait résonner l’atmosphère comme le fait une cloche.
Grâce au transfert de cette énergie de l’atmosphère vers l’océan, l’onde de choc a amplifié les vagues océaniques dans le monde entier, les a repoussé plus loin et accéléré leur vitesse de déplacement, un phénomène pour lequel les centres d’alerte aux tsunamis se sont pas équipés.
Source : Reuters, Yahoo Actualités.

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The January 15th volcanic eruption in Tonga unleashed an atmospheric shockwave that radiated out at close to the speed of sound, pushing large waves across the Pacific to the shores of Japan and Peru, thousands of kilometres away.

Forecasting models and warning systems, designed primarily to assess earthquake-triggered waves were disconcerted by the tonga event. They did not account for the boosting effects of the shockwave. It was a critical flaw in these systems, leaving them unable to predict exactly when the waves would hit land.

The Hunga Tonga-Hunga Ha’apai eruption triggered a tsunami that destroyed villages and knocked out communications for the South Pacific nation of about 105,000 people. Three people have been reported killed. However Tongans were well equipped to deal with the tsunami. They are also considered among the most prepared for natural disasters, with years of tsunami drills so that many people knew to evacuate to higher ground.

But for faraway Peru, for example, the lack of accurate information may have contributed to the death of two people who drowned in unusually high waves, as well as the major oil spill near La Pampilla refinery.

Experts say they need to re-evaluate tsunami hazards for other volcanoes around the world. For example, the Kick’em Jenny underwater volcano is thought to pose only a regional tsunami risk to the neighboring Caribbean island of Grenada. But it may very well affect the entire Caribbean and Gulf of Mexico, and possibly even the Atlantic and global oceans, if a Tonga-type event were to happen.

Volcano-triggered tsunamis have been rare in modern history, and the shockwave from Tonga’s volcano was among the largest ever recorded, similar to the one produced by the 1883 eruption of Krakatoa.

Prior to the 2018 tsunami that followed the eruption of Anak Krakatau, a tsunami set off by a volcano had not happened in the ocean in more than a century. Rather, 90 percent of tsunamis are triggered by earthquakes. As a consequence, tsunami warning systems are programmed to prioritize seismic events. Seafloor instruments monitor for irregular changes in wave height, sending information by surface buoy and then satellite to a warning centre for assessment.

The Pacific Tsunami Warning Center in Hawaii initially warned of dangerous waves within 1,000 km of the Tonga eruption. However, their bulletin noted that « due to the volcano source we cannot predict tsunami amplitudes nor how far the tsunami hazard may extend. » Roughly 10 hours later, the warning was updated to include a possible threat to Peru, a surprising development given that the tsunami near Tonga was relatively small.

Tsunami waves, driven by gravity, travel at around 200 metres per second. However, the shockwave from Tonga’s volcano moved at more than 300 metres per second and was so powerful that it caused the atmosphere to ring like a bell.

Through the transfer of this energy from the atmosphere to the ocean, the shockwave amplified ocean waves around the world, pushing them farther afield and accelerating their travel time – something tsunami warning centres were not equipped to handle.

Source: Reuters, Yahoo News.

L’éruption du 15 janvier 2022 vue depuis l’espace (Source: Japan Meteorological Agency)

Errare humanum est!

Les volcanologues de l’Université des Antilles (UWI) et les habitants de St Vincent ont eu beaucoup de chance. L’éruption de La Soufrière a commencé progressivement. Le 8 avril 2021, une évolution rapide de l’activité sismique a été observée. L’ampleur des épisodes de tremor, généralement associés à l’ascension du magma vers la surface, a augmenté progressivement. Le réseau sismique a également enregistré quelques séismes longue période, généralement associés au mouvement du magma. De plus, les observations visuelles de la zone sommitale du volcan ont révélé que quelque chose allait se passer.

Au vu de tous ces paramètres, il ne faisait guère de doute que du magma s’approchait de la surface, avec le risque d’une éruption explosive. En conséquence, le niveau d’alerte a été élevé à la couleur ROUGE et il a été décidé d’évacuer tous les habitants de la zone Rouge de Saint-Vincent.

Bonne décision car, comme on pouvait s’y attendre, l’éruption a commencé à 8h40 le 9 avril avec une colonne éruptive qui est montée jusqu’à 8 km, avec les inévitables retombées de cendres qui accompagnent généralement ce genre d’éruption. Le dôme sommital du volcan n’a pas explosé et l’éruption n’a pas déclenché de coulées pyroclastiques pendant cette phase initiale, de sorte qu’il n’y a pas eu de victimes et que les autorités ont eu le temps de mettre en sécurité la population menacée. Au final, personne n’a vraiment été pris par surprise.

A côté de cette bonne prévision à court terme, les volcanologues de l’UWI se sont trompés lorsqu’une nouvelle crise éruptive a eu lieu le 16 avril 2021, une semaine après l’éruption initiale. Après 41 heures sans exploser, le volcan s’est réveillé à 6 h 16 ce jour-là. Le 15 avril, le chef de l’équipe scientifique de l’UWI avait déclaré qu’il lui semblait que le volcan était sorti de la période explosiven. Malheureusement pour lui, la prévision était mauvaise t la volcan avait décidé autrement. L’épisode éruptif du 16 avril a émis un panache qui a atteint 7 000 à 8 000 mètres.

Le volcanologue a reconnu son erreur – ce qui est tout à son honneur –  et déclaré que la période explosive n’était pas encore terminée et qu’il fallait s’attendre à de nouvelles explosions dans les prochains jours. On verra si cette nouvelle prévision est exacte…

Source: médias d’information locaux.

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UWI volcanologists – and residents – at St Vincent were very fortunate. The eruption of La Soufriere started progressively. A rapid change in seismic activity was observed on April 8th. The tremor episodes, usually associated with the movement of magma to the surface, slowly increased in magnitude. The seismic network also recorded a few long-period earthquakes, usually associated with the movement of magma. Moreover, visual observations of the volcano’s summit area revealed that something was going to happen.

All these parameters showed that a fresh batch of magma was probably getting close to the surface, with the risk of an explosive eruption.  As a consequence, the alert level was elevated to RED and an evacuation order was issued for residents in the St Vincent’s Red Hazard Zone.

With no surprise, the eruption started at 8:40 on April 9th with an eruptive column rising up to 8 km and the inevitable ashfall that usually accompanies this kind of explosions. The volcano did not produce a blast and did not trigger pyroclastic flows during this initial phase of the eruption so that there were no casualties and authorities had time to put residents at risk in safe places. In short, nobody was really taken by surprise.

However, the volcano UWI volcanologists were wrong when it exploded again on April 16th, one week after the initial eruption. After 41 hours without exploding, the volcano went off at 6:16 a.m. on that day. On April 15th, the head of the team of UWI volcanologists had said that it looked as if the volcano was out of the period of exploding. Unfortunately, this proved completely wrong. The 16 April explosion emitted an eruption plume that rose to about 7,000- 8,000 metres.

After this mistake in eruptive prediction, the scientist admitted he was wrong and said that the explosive period was not over yet and there could be more explosions in the future. Let’s see if the new prediction proves right!

Source: Local news media.

Panache éruptif du 16 avril 2021 (Source : UWI)