Une information à prendre avec des pincettes !

« La baisse de pollution aggrave le réchauffement climatique ». C’est le titre d’un article publié le 13 avril 2024 sur le site web de France Info. Faut-il en conclure qu’il faut continuer à polluer pour que le réchauffement climatique ne progresse pas ?

Le titre de l’article est très maladroit et risque de faire le lit des climato-sceptiques. En effet, la pollution évoquée est seulement celle générée par les particules. On nous explique que « la disparition de la couverture d’aérosols qui réfléchit la lumière solaire vers le ciel, aggrave le réchauffement. Cela pourrait représenter jusqu’à 40% de l’augmentation de l’énergie qui réchauffe la planète entre 2001 et 2019. » L’auteur de l’article ajoute : « Lorsqu’elles sont en suspension dans l’air, les particules de pollution réfléchissent la lumière dans l’espace, et provoquent donc un refroidissement. Si on en a moins, il y a réchauffement. »

L’article ne mentionne à aucun moment le gaz carbonique ou le méthane qui sont les principaux vecteurs du réchauffement de l’atmosphère terrestre. Actuellement, les concentrations de CO2 atteignent 424,58 ppm, après avoir atteint 425 ppm au début du mois d’avril. On a affaire à ne hausse permanente. Au même moment en 2023, les concentrations étaient de 422 ppm. On se rend vite compte de la vitesse à laquelle elles augmentent. Même si la quantité de particules fines diminue, nous ne sommes pas près de voir la courbe des température diminuer sur Terre.

A noter que la photo illustrant l’article est censée représenter le bassin du Vieux Fidèle dans le Parc National de Yellowstone. C’est faux ; de toute évidence, l’auteur de l’article n’y a jamais mis les pieds !

Eruption du Vieux Fidèle

Bassin de West Thumb illustrant l’article

Photos: C. Grandpey

Le changement climatique au fond des grottes // Climate change at the bottom of the caves

Au cours du Petit Âge Glaciaire, les Européens vivant au Moyen Age ont été confrontés à des hivers extrêmement froids et à des étés inhabituellement doux. Les catastrophes climatiques extrêmes étaient devenues plus fréquentes, entraînant avec elles maladies et famine. Comme les gens ne possédaient guère de notions de climatologie à l’époque, beaucoup imputaient la vague de froid prolongée au mauvais sort ou à la magie. Les sorcières furent persécutées dans toute l’Europe, mais cela n’a, bien sûr, pas permis à la planète de sortir du Petit Âge Glaciaire.
De nouvelles études publiées dans la revue Earth and Planetary Science Letters, ont permis, au 21ème siècle, de percer les mystères du Petit Âge Glaciaire. Ainsi, les géoscientifiques de l’Université de Heidelberg et de l’Institut de Technologie de Karlsruhe ont découvert une foule d’informations sur le climat de leurs régions et sur le monde dans son ensemble, en remontant à des siècles écoulés. Ils ont trouvé ces informations dans un univers très inattendu : celui des stalagmites à l’intérieur des grottes.
Les stalagmites sont des spéléothèmes, autrement dit des dépôts minéraux formés à partir des eaux souterraines dans des cavernes souterraines. Jusqu’à présent, les scientifiques ne pouvaient mesurer les fluctuations climatiques à court terme, au cours de siècles passés, qu’à l’aide des cernes des arbres. Les données fournies par les cernes d’arbres devaient ensuite être analysées en relation avec des mesures indépendantes provenant d’autres études, puis recoupées avec des données historiques.
De leur côté, les stalagmites ouvrent de nouvelles perspectives sur les fluctuations climatiques. En effet, les chercheurs allemands ont pu examiner la composition isotopique de l’oxygène dans une stalagmite du sud de l’Allemagne. On sait que les années inhabituellement chaudes produisent des hivers très humides tandis que les années inhabituellement froides produisent des étés très humides. En analysant l’histoire des précipitations racontée par chaque couche microscopique de la stalagmite, les scientifiques ont pu obtenir davantage d’informations sur les fluctuations climatiques à court terme il y a plusieurs siècles.
On peut lire dans l’étude que lorsque les données des cernes des arbres sont combinées avec les données des spéléothèmes, on obtient un enregistrement complet de l’histoire de l’eau sur Terre avec des données qui peuvent être extrapolées de manière « particulièrement adaptée pour résoudre les problèmes climatiques extrêmes à court terme, à l’échelle régionale. »
Ce n’est pas la seule étude récente qui relie le changement climatique à l’intérieur des grottes. En 2019, une étude parue dans la revue The Anthropocene Review a décrit dans quelle mesure le changement climatique constitue une menace pour les écosystèmes rares dans des systèmes de grottes fermées, dont beaucoup sont des sites de recherche pour les biologistes. En effet, ces grottes sont, en théorie, à l’abri des influences du monde extérieur. Le climat sous terre, comme celui à la surface, peut être influencé de diverses manières par le réchauffement climatique anthropique. Pourtant, contrairement aux espèces de surface, les formes de vie souterraines ont parfois du mal à faire face à ces nouvelles conditions.
L’étude de 2019 explique qu’en raison de leur évolution dans un environnement stable, les espèces souterraines sont censées présenter une faible tolérance aux perturbations climatiques et ne pourraient donc, en théorie, faire face à de tels changements qu’en modifiant leur aire de répartition ou en s’adaptant aux nouvelles conditions environnementales. Cependant, lors de tels déplacements, elles auraient plus d’obstacles à surmonter que les espèces de surface et seraient donc plus exposées à une extinction locale.
Les auteurs de l’étude donnent un exemple de vie troglodyte rendue difficile par le changement climatique : les Troglohyphantes qui sont de très petites araignées que l’on rencontre dans les grottes. Les scientifiques ont étudié les conditions thermiques dans les grottes des Alpes occidentales et ont comparé ces données à la prévalence des Troglohyphantes. Ils ont découvert que la répartition des araignées était en corrélation avec les changements de température par rapport à l’époque du Pléistocène, ainsi qu’avec les changements climatiques plus récents. Après avoir analysé ces données, ainsi que des informations sur les températures constantes à l’intérieur des grottes, et en utilisant une modélisation de pointe, les chercheurs ont conclu que l’avenir s’annonce mal pour les araignées souterraines. En effet, il faut s’attendre à « un déclin futur de l’habitat propice aux araignées souterraines et à la possible extinction des espèces endémiques les plus restreintes. » Par rapport à d’autres espèces qui vivent dans des habitats confinés tels que les îles et les montagnes, les chercheurs s’attendent à ce que les espèces vivant dans des grottes soient aussi beaucoup plus vulnérables au changement climatique.
Source  : Salon via Yahoo Actualités.

Photo: C. Grandpey

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During the Little Ice Age, medieval European were afflicted with bitterly cold winters and unusually mild summers. Extreme weather disasters became more common, bringing with them the scourges of disease and famine. Because people did not entirely understand climate science back then, many blamed evil or magic for the prolonged cold snap. « Witches » were persecuted all over Europe, but of course this did nothing to break the planet out of the Little Ice Age.

Thanks to new research published in the journal Earth and Planetary Science Letters, ordinary people alive in the 21st Century can better understand the mysteries of the Little Ice Age. Indeed, the geoscientists from Heidelberg University and the Karlsruhe Institute of Technology have discovered a treasure trove of climate information about both their region of Germany and the world as a whole, going back centuries and centuries. They found all of this in a very unexpected place: stalagmites, or the tapering columns that grow up from the bottom of caves.

Stalagmites are speleothems, or mineral deposits that are formed from groundwater in underground caverns like caves. Up to now, scientists could only measure short-term climate fluctuations from over hundreds of years ago using tree ring records. Even then, those tree-ring records had to be analyzed along with independent measurements from other studies, as well as cross-referenced with historical records.

Yet stalagmites offer new insights into climate fluctuations because the German researchers could examine the isotopic composition of oxygen in a southern German stalagmite that had been formed from hard water. Unusually warm years produce very wet winters while unusually cold years produce very wet summers. By analyzing the precipitation history chronicled in each microscopic layer of the stalagmite, the scientists could learn about short-term climate fluctuations from centuries ago.

One can read in the study that when the tree-ring data is combined with the data from speleothems, it creates a comprehensive record of the history of Earth’s water with data that can be extrapolated in ways « uniquely suited to resolve extreme short-term climate events at the regional scale. »

This is not the only recent research that connects climate change science with the science of caves. A 2019 study in the journal The Anthropocene Review described how climate change poses a threat to the rare ecosystems that exist in closed-off cave systems, many of which are valued as research sites for biologists because they are, in theory, largely separated from the influences of the outside world. The subterranean climate, like the one on the surface, can in many ways be impacted by anthropogenic global heating. Yet unlike surface species, subterranean life forms may struggle to cope.

The 2019 study explains that owing to their evolution in a stable environment, subterranean species are expected to exhibit low tolerance to climatic perturbations and could theoretically cope with such changes only by shifting their distributional range or by adapting to the new environmental conditions. However, they should have more obstacles to overcome than surface species in such shifts, and therefore could be more prone to local extinction.

The authors of the study give an example of cave life struggling due to climate change : Troglohyphantes, or a genus of very small spiders known as sheet weavers. Scientists studied the thermal conditions in western Alps caves and compared this data to the prevalence of Troglohyphantes. They found that the spiders’ distribution correlated with temperature shifts from the Pleistocene epoch, as well as more recent climate shifts. After analyzing this data, along with information on constant temperatures inside the caves, and by using ecological niche modeling, the researchers concluded that subterranean spider species have a bleak outlook. Indeed, it « pointed toward a future decline in habitat suitability for subterranean spiders and the potential extinction of the most restricted endemic species. When compared with other species that live in confined habitats such as islands and mountains, the researchers expect cave species to be as much, if not more, vulnerable to climate change. »

Source : Salon via Yahoo News.

Empreinte du réchauffement climatique dans les vagues de chaleur précoces // Footprint of global warming in early heat waves

Selon une étude du World Weather Attribution, un groupe de scientifiques internationaux qui ont effectué une analyse informatique et statistique rapide de la vague de chaleur de la fin avril 2023 à travers la péninsule ibérique jusqu’en Algérie et au Maroc, les températures record enregistrées dans ces pays ont été 100 fois plus favorisées par le réchauffement climatique d’origine anthropique, et auraient été inimaginables dans le passé.
Les quatre pays ont connu des températures comprises entre 36,9°C et 41°C. Les auteurs de l’étude insistent sur le fait qu’un événement météorologique aussi extrême « aurait été presque impossible dans le passé, avec un climat plus froid. Nous verrons des vagues de chaleur plus intenses et plus fréquentes à l’avenir à mesure que le réchauffement climatique se poursuivra. »
Les régions étudiées souffrent toutes d’une sécheresse pluriannuelle, qui peut exacerber les températures élevées. Actuellement, 27 % du territoire espagnol est dans la catégorie « urgence » ou « alerte » à la sécheresse et les réserves d’eau sont à 50 % de leur capacité. Le stockage moyen d’eau dans les barrages au Maroc est à des niveaux tout aussi bas, et en Tunisie de nombreux foyers ont des coupures d’eau pendant la journée. Les agriculteurs de toute la Méditerranée occidentale ont averti que de mauvaises récoltes sont probables dans certaines régions pour la sixième année consécutive.
L’étude indique également que la chaleur extrême en Europe augmente plus rapidement que ne l’avaient prévu les modèles informatiques. La même chose s’est produite avec le dôme de chaleur du Pacifique, de sorte que les scientifiques qui créent des modèles informatiques doivent revoir leurs copies et repenser leurs projections trop conservatrices.
Les scientifiques ont comparé les températures réelles d’avril à celles d’un monde simulé sans réchauffement climatique. Ils ont découvert qu’une vague de chaleur comme celle subie par la Méditerranée occidentale en avril aurait été moins sévère de plus de deux degrés Celsius dans un monde sans gaz à effet de serre pour piéger la chaleur.
L’un des buts de l’étude est d’informer les gouvernements qui se préparent à l’apparition précoce de températures extrêmement chaudes. Ils pourront prévenir les décès et déployer des campagnes de sensibilisation à la chaleur. Selon l’Organisation mondiale de la santé, en 2022 au moins 15 000 personnes sont mortes en Europe à cause de la canicule et l’Espagne a été l’un des pays les plus touchés.
L’étude devrait aussi aider les gens à percevoir le risque à leur niveau personnel et les inciter à changer leur comportement. Les changements comprennent l’accès à la climatisation dans les écoles, la surveillance des admissions à l’hôpital liées à la chaleur et le conseil aux citoyens d’éviter les sports de plein air à certaines heures de la journée.
Source : médias d’information internationaux.

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According to a study by World Weather Attribution, a group of international scientists who did a rapid computer and statistical analysis of a late-April heat wave that stretched across the Iberian peninsula into Algeria and Morocco, record-breaking temperatures in these countries were made 100 times more likely by human-caused climate change, and would have been almost impossible in the past.

The four countries experienced temperatures ranging between 36.9°C and 41°C. The authors of the study insist that a weather event this extreme “would have been almost impossible in the past, colder climate. We will see more intense and more frequent heat waves in the future as global warming continues.”

The regions in the study are all suffering from a multi-year drought, which can exacerbate high temperatures. Currently, 27% of Spanish territory is in either the drought “emergency” or “alert » category and water reserves are at 50% of capacity nationally. The average dam storage in Morocco is at similarly low levels, and in Tunisia many homes have water cuts during the day. Farmers across the Western Mediterranean have warned that poor harvests are likely, in some regions for the sixth year running.

The study also says the extreme heat in Europe is rising faster than computer models had projected. The same thing happened in the Pacific heat dome, so scientists who create computer models need to go back and rethink their overly conservative projections.

The scientists compared real life April temperatures to a simulated world without climate change. They found that a heat wave like the one the Western Mediterranean suffered in April would have been more than two degrees Celsius less severe in a world without greenhouse gases trapping heat.

The study will also help inform governments preparing for the earlier onset of extreme hot weather, with the aim of preventing deaths and unrolling heat awareness campaigns. According to the World Health Organization, in 2022 at least 15,000 people died in Europe because of extreme hot weather, with Spain one the countries worst affected.

The warning in the study should incite people to perceive their personal risk and change their personal behaviour. Changes include access to air conditioning in schools, monitoring heat-related hospital admissions and advising citizens to avoid outdoor sports at certain hours of the day.

Source : International news media.

Météo et climat : ne pas confondre !

A en juger par les commentaires sur les réseaux sociaux – Facebook en particulier – beaucoup de gens ont encore des doutes sur l’existence du réchauffement climatique. Il suffit que notre pays traverse une période un peu froide pour que ces mêmes personnes se posent des questions sur la hausse des températures sur notre planète. Qu’elles aillent donc demander ce qu’en pensent les responsables des stations de sports d’hiver qui reculent leur date d’ouverture les uns après les autres. Et ce n’est pas fini au vu du redoux significatif prévu la semaine prochaine.

Il faudrait que ces négationnistes en herbe apprennent avant tout à faire la différence entre les mots « météo » et « climat ». La météo s’intéresse au temps qu’il va faire à court terme alors que le climat couvre des périodes beaucoup plus longues comme une décennie ou un siècle. Ainsi, on s’aperçoit qu’aujourd’hui, la température moyenne d’un mois de janvier en France est 1,34°C plus élevée qu’il y a 100 ans, malgré des périodes de froid exceptionnelles comme au mois de janvier 1985.

Voilà pourquoi la météo et le climat sont deux choses bien différentes. Dire que le réchauffement climatique n’existe pas simplement parce qu’il fait froid dehors n’est pas très futé !

Le réchauffement climatique est un phénomène progressif, même si les statistiques actuelles montent qu’il a tendance à s’accélérer – il faut le noter – parallèlement aux concentrations de gaz carbonique dans l’atmosphère. Il ne fait guère de doute que les banquises polaires et nos glaciers vont continuer à fondre. Les chutes de neige en montagne vont prendre de l’altitude. C’est pour cela que les stations de basse et moyenne altitude, les plus exposées au réchauffement climatique, ont intérêt à se diversifier rapidement si elles ne veulent pas connaître de graves difficultés.

J’ai indiqué sur ce blog le 7 décembre dernier que 2022 a été l’année la plus chaude jamais enregistrée en France, malgré la fraîcheur de ce mois de décembre. La moyenne sera comprise entre 14,2°C et 14,6°C.

https://claudegrandpeyvolcansetglaciers.com/2022/12/07/2022-lannee-la-plus-chaude-en-france-2022-the-hottest-year-in-france/

Donc plus de doute à avoir, le réchauffement climatique est là et même bien là, peu importe le temps qu’il fait dehors !

La Mer de Glace et les autres glaciers vont continuer à reculer et s’amincir. Gare à l’alimentation en eau dans certaines régions du monde!

Mon livre « Glaciers en Péril » (15 euros sur commande; 10 euros lors de mes conférences) reste plus que jamais d’actualité!