Un ‘couvercle’ de magma à Yellowstone // A magma ‘cap’ at Yellowstone

Après la découverte d’une double chambre magmatique sous Yellowstone il y a quelques années, des scientifiques nous informent, dans une étude récemment publiée dans la revue Nature, qu’un ‘couvercle’ de magma joue probablement un rôle essentiel pour empêcher une puissante éruption dans l’un des plus grands systèmes volcaniques actifs au monde.
Ce ‘couvercle’ de magma se trouve à environ 3,8 km sous la surface de la Terre où il retient la pression et la chaleur. Il a été découvert quand les scientifiques ont utilisé un camion vibrosismique – ou vibrateur sismique – qui génère de minuscules séismes en envoyant des ondes sismiques dans le sol. Les ondes sont renvoyées par les couches souterraines et ont révélé la profondeur où se trouve le ‘couvercle’ de magma.

Crédit photo : USGS

L’étude indique que la stabilité des systèmes volcaniques actifs est « fortement influencée » par la profondeur de stockage du magma le plus proche de la surface. Le réservoir magmatique de la croûte supérieure sous la caldeira de Yellowstone n’a pas été bien défini. On sait qu’il y a du magma sous Yellowstone, mais la profondeur et la structure exactes de sa limite supérieure restent à déterminer. Les auteurs de l’étude ont constaté que ce réservoir est toujours actif.
Comme je l’ai indiqué plus haut, en 2022, des chercheurs ont découvert que le super volcan de Yellowstone possède un double réservoir magmatique sous la caldeira, bien plus important qu’on ne le pensait. La lave est présente à de faibles profondeurs et a alimenté la dernière éruption.

 Source : USGS

Les chercheurs ont modélisé diverses conditions de roche, de fusion et de volatilité afin de déterminer les matériaux composant le ‘couvercle’ de magma ; les modélisations ont révélé un mélange de silicates fondus et de bulles d’eau supercritique au sein de la roche poreuse. Les bulles se forment lorsque le magma monte et se décompresse, ce qui provoque la séparation d’éléments comme l’eau et le dioxyde de carbone de la masse en fusion. Des éruptions peuvent se produire lorsque les bulles s’accumulent et augmentent leur flottabilité, provoquant une explosion. Cependant, contrairement à ce qu’affirment certains médias, les chercheurs pensent qu’une éruption à Yellowstone n’est probablement pas imminente.
Les données d’imagerie sismique et de modélisation informatique indiquent que le réservoir magmatique sous Yellowstone libère des gaz, mais reste stable ; les bulles s’élèvent et passent à travers la roche poreuse du ‘couvercle’ magmatique. Cependant, le contenu des bulles et de la masse en fusion est inférieur à ce qui précède généralement une éruption imminente. Il semble plutôt que le système volcanique sous Yellowstone évacue le gaz par des fissures et des canaux entre les cristaux des minéraux.
La géologie complexe de Yellowstone est un environnement difficile à analyser et les chercheurs ont eu beaucoup de mal à obtenir ces données. La diffusion des ondes sismiques a produit des images bruitées, difficiles à interpréter. Cependant, les scientifiques ont réussi à obtenir l’une des premières images « ultra nettes » de la partie sommitale du réservoir magmatique sous la caldeira de Yellowstone grâce à la technique d’imagerie sismique structurelle. Cette découverte pourrait donner des indications sur l’activité future du vaste système volcanique de Yellowstone.
Source : ABC News et autres médias américains.

Émissions gazeuses à Yellowstone (Photo: C. Grandpey)

———————————————–

After the discovery of a dual magma chamber beneath Yellowstone a few years ago, geoscientists are informing us, through a study recently published in the journal Nature, that a magma cap at Yellowstone National Park is likely playing a critical role in preventing a massive eruption in one of the largest active volcanic systems in the world.

The cap made of magma is about 3.8 km below the Earth’s surface and essentially acts as a lid that traps pressure and heat below it.It was found after scientists used a vibroseis truck to generate tiny earthquakes that send seismic waves into the ground. The waves measured reflected off subsurface layers, revealing a sharp boundary at the depth where the magma cap lies.

One can read in the study that the stability of hazardous volcanic systems is « strongly influenced » by the uppermost magma storage depth. In addition, the magma reservoir at the upper crust beneath Yellowstone’s caldera has not been well constrained. We know that there is magma beneath Yellowstone, but the exact depth and structure of its upper boundary is a big question. The authors of the study have found that this reservoir has not shut down and is still dynamic.

As I put it above, in 2022, researchers discovered that Yellowstone’s supervolcano has substantially more magma reservoir under the caldera than previously thought. The lava is also flowing at shallow depths that fueled prior eruption.

The researchers modeled various rock, melt and volatile conditions to determine what materials the magma cap consists of ; it revealed a mixture of silicate melt and supercritical water bubbles within porous rock. The bubbles are formed as the magma rises and decompresses, causing gases like water and carbon dioxide to separate from the melt. Volcanic eruptions can occur as the bubbles accumulate and increase in buoyancy, driving an explosion. However, the researchers say that an eruption at Yellowstone is likely not imminent.

Data from seismic imaging and computer modeling indicates that the magma reservoir is actively releasing gas but remains in a stable state, with the bubbles rising and releasing through the porous rock of the magma cap. However, the bubble and melt contents are below the levels typically associated with imminent eruption. Instead, it seems the system is venting gas through cracks and channels between mineral crystals.

Yellowstone’s complex geology was a challenging environment for the researchers to obtain the data. The scattering seismic waves produced noisy data that was hard to interpret. However, the geoscientists were able to capture one of the first « super clear » images of the top of the magma reservoir beneath the Yellowstone caldera using the structural seismic imaging technique. The discovery could offer clues to future activity amid Yellowstone’s extensive volcanic system.

Source : ABC News and other U.S. News media.

Compréhension en profondeur des éruptions // Deep understanding of eruptions

Les derniers événements en Islande ont montré que les scientifiques savent qu’une éruption est susceptible de se produire, mais ils ne peuvent pas prédire le moment précis où elle débutera. Lorsqu’ils sont sur le point d’entrer en éruption, les volcans montrent des signes qui sont enregistrés par des instruments tels que des sismomètres, des inclinomètres ou même par les satellite. Ces paramètres concernent les couches les plus superficielles de la croûte terrestre.
De nouvelles recherches, menées par des équipes de l’Imperial College de Londres et de l’Université de Bristol, révèlent que nous devrions observer ce qui se passe plus profondément, jusqu’à 20 km sous terre. Certains indices annonciateurs d’éruptions pourraient nous aider à améliorer nos prévisions.

Les auteurs de l’étude se sont concentrés sur la compréhension des réservoirs magmatiques, là où une chaleur extrême fait fondre les roches solides et les transforme en magma à des profondeurs d’environ 10 à 20 kilomètres.
Après avoir collecté des données sur cette zone, l’équipe scientifique les a intégrées dans des modèles informatiques. Les chercheurs ont découvert que certaines conditions au sein des réservoirs magmatiques profonds pouvaient donner des indications sur la taille, la composition et la fréquence des éruptions volcaniques. En d’autres termes, en étudiant ce qui se passe en bas, nous pouvons mieux prévoir ce qui pourrait se passer en haut.
La flottabilité du magma est peut-être l’un des indicateurs les plus surprenants d’une éruption. Contrairement aux théories émises jusqu’à présent, la nouvelle étude montre que c’est la flottabilité du magma, plus que la proportion de roches solides et fondues, qui déclenche les éruptions. Une fois que la densité du magma lui permet de flotter, donc de s’élever, il crée des fractures dans la roche solide sus-jacente. ; il s’engouffre alors très rapidement dans ces fractures et provoque une éruption.
Un autre facteur est la taille du réservoir magmatique proprement dit. Un réservoir magmatique de grande taille ne signifie pas forcément que l’éruption sera plus importante. En effet, plus le réservoir est grand, plus la chaleur est dispersée, ce qui réduit la vitesse de fusion des roches et leur transformation en magma. De plus, plus le magma reste longtemps sous terre, plus l’éruption sera réduite.
Un auteur de l’étude affirme qu' »en améliorant notre compréhension des processus à l’origine de l’activité volcanique et en fournissant des modèles qui mettent en lumière les facteurs contrôlant les éruptions, la nouvelle étude constitue une étape cruciale vers une meilleure surveillance et prévision de ces puissants événements géologiques ».
Source : Science Advances.

Vous pourrez lire l’étude (en anglais) et découvrir les illustrations en plus grande taille en cliquant sur ce lien :

https://www.science.org/doi/10.1126/sciadv.add1595

——————————————————-

The recent events in Iceland have shown that scientissts know that an eruption is likely to erupt. However, they cannot predict the precise moment an eruption will begin. When tey are bout to erupt,volcanoes often show signs that are recorded by instruments suchas seismometers, tiltmetersor even satellite images. These parameters concern the topmost layers of Earth’s crust.

New research, led by teams from Imperial College London and the University of Bristol, suggests we should look deeper, down to 20 km underground, at different eruption clues that might help us improve our predictions.

The authors of the study focused on understanding magma source reservoirs deep beneath our feet, where extreme heat melts solid rocks into magma at depths of around 10 to 20 kilometers.

After collecting data from this part of the Earth’s crust, the team fed that data into computer models. What they found was that certain conditions within deep magma reservoirs could indicate the size, composition and frequency of volcanic eruptions. In other words, by studying what is going on below, we can better predict what might happen above.

Magma buoyancy is perhaps one of the most surprising indicators of an eruption. Contrary to previous beliefs, the new study suggests that the buoyancy of the magma, rather than the proportion of solid and molten rock, is what drives eruptions, Once the magma becomes buoyant enough to float, it rises and creates fractures in the overlying solid rock ; it then flows through these fractures very rapidly, causing an eruption.

Another factor is the size of the reservoir itself. While it is true that larger reservoirs hold more magma, that doesn’t always mean the eruption will be greater. The larger the reservoir, the more heat is dispersed, reducing the rate of melting rock into magma. Plus, the longer magma sits underground, the smaller the eruption will be.

One author of the study says that « by improving our understanding of the processes behind volcanic activity and providing models that shed light on the factors controlling eruptions, the new research is a crucial step towards better monitoring and forecasting of these powerful geological events. »

Source : Science Advances.

You can read the whole  study and discover the full-scale  illustrations by clicking on this link :

https://www.science.org/doi/10.1126/sciadv.add1595

Islande : Source des éruptions de Fagradalsfjall et de Sundhnúkagígar // Iceland : Source of the Fagradalsfjall and Sundhnúkagígar eruptions

Depuis l’éruption de Fagradalsfall de 2021 à 2023 jusqu’à la dernière éruption sur la chaîne de cratères de Sundhnúkagígar, il y a eu, à un moment ou à un autre, des désaccords entre scientifiques sur ces événements. Cette fois, c’est le groupe de sismologues de l’Université d’Uppsala en Suède qui contredit la théorie islandaise sur l’emplacement de la chambre magmatique sous le mont Fagradalsfjall.
Jusqu’à présent, les scientifiques islandais pensaient que la chambre magmatique était située à la lisière supérieure du manteau, à plus de 15 km de profondeur. Cependant, selon les résultats des sismologues suédois, elle se trouve directement sous le mont Fagradalsfjall, à une profondeur de seulement 8 à 12 km, c’est-à-dire dans la partie supérieure de la croûte inférieure. La chambre magmatique en question mesure une dizaine de kilomètres de large et contient un magma plutôt primaire.

Le réservoir magmatique peu profond, qui est à l’origine de l’éruption actuelle, est situé à environ 4 ou 5 km sous le secteur de Svartsengi et contient un magma plus élaboré. Le magma s’écoule du réservoir magmatique profond vers le réservoir supérieur, ce qui explique l’inflation au niveau du secteur de Svartsengi. Lorsque le réservoir peu profond est plein et qu’il a accumulé environ 10 à 15 millions de mètres cubes de magma, son toit se brise et une éruption commence.

Le magma qui s’est écoulé lors des éruptions sur le système éruptif du mont Fagradalsfjall de 2021 à 2023 provenait directement du réservoir magmatique profond.
Le magma de l’éruption actuelle au niveau de la chaîne de cratères Sundhnúkagígar a également été observé dans le réservoir magmatique profond, mais il a fait une halte dans le réservoir le moins profond. Le magma semble y avoir séjourné pendant environ 3 à 5 semaines où il s’est modifié au cours du processus de différenciation, devenant plus léger avant de remonter à la surface lors de l’éruption. [NDLR : Une fois encore, cette différenciation subie par le magma au cours de son séjour dans une chambre magmatique me rappelle la théorie des ‘magmas TGV ‘ et des ‘magmas omnibus’ ru regretté Alain De Goër de Herve].
Source : Université d’Islande.

Source : Université d’Uppsala

—————————————————————

From the Fagradalsfall eruption from 2021 to 2023 to the latest eruption on the Sundhnúkagígar crater row, there have been, some time or other, disagreements among scientists about these events. This time, it is the findings of the Uppsala University of Sweden’s seismic group that contradict the previous notion of the location of the magma chamber under Mt Fagradalsfjall.

It was previously thought that the magma chamber was located at the top of the mantle at a depth of more than 15 km. However, according to the results of the Swedish seismologists, it is located directly under Mt Fagradalsfjall at a depth of 8 to 12 km, i.e. in the upper part of the lower crust.

The magma chamber in question is about 10 km wide and contains rather primitive magma.

The shallow magma reservoir, which is the source of the current eruption, is located about 4 to 5 km below Svartsengi, and it holds more advanced magma. The magma flows from the deeper magma reservoir to the upper reservoir, which is the cause of the inflation in Svartsengi. When the shallow reservoir is full, and has axccumulated about 10 to 15 million cubic meters of magma, the roof breaks and an eruption starts.

The magma that flowed in the eruptions in the Mt Fagradalsfjall system from 2021 to 2023 came directly from the deeper magma reservoir.

The magma in the current eruption at the Sundhnúkagígar crater row was detected from the deeper magma reservoir too, but with a stop in the shallower reservoir. The magma appeared to have been in the shallow reservoir for about 3 to 5 weeks where it developed, becoming lighter before it came to the surface during the the eruption.

Source : University of Iceland.

La chambre magmatique du volcan sous-marin Axial // The magma chamber of Axial Seamount

drapeau francaisDepuis de nombreuses années, les scientifiques américains de la Scripps Institution of Oceanography (Université de Californie à San Diego) étudient l’Axial Seamount, un volcan sous-marin situé à environ 400 km au large de la côte de l’Oregon, sur la dorsale Juan de Fuca (voir mes notes des 11 et 23 août 2011 et du 17 août 2013).
Avec de nouveaux outils informatiques plus puissants et des compétences analytiques innovantes, les chercheurs viennent de mettre au point l’imagerie la plus détaillée à ce jour de la volumineuse chambre magmatique située sous ce volcan actif. Ils ont utilisé une mine de données sismiques qui leur ont permis de découvrir un réservoir magmatique d’une taille comparable à celle de la Vallée de Yosemite en Californie. La description de la structure magmatique qui se cache sous le volcan Axial (qui entre en éruption environ tous les dix ans) a été présentée dans un récent numéro de la revue Geology.
Le travail des chercheurs révèle que la chambre magmatique de l’Axial, située à l’intersection de la dorsale Juan de Fuca et la chaîne Cobb-Eickleberg, s’étend sur 14 kilomètres de long, trois kilomètres de large, pour une épaisseur d’un kilomètre.
Depuis les premières données recueillies en 2002, de nouvelles techniques informatiques et d’imagerie ont permis aux scientifiques d’élaborer des images avec une fidélité sans précédent. C’est comme si l’on comparait les détails d’une radiographie du 20ème siècle à celle fournie par une IRM moderne.
Les nouvelles images font apparaître un système magmatique géométriquement complexe qui comporte plusieurs conduits – encore jamais révélés par des images – qui peuvent transporter le magma vers des sites éruptifs à la surface de la terre et ainsi soulager les pressions qui s’exercent à l’intérieur du volcan. Les images ont également révélé que seule une petite fraction du magma qui se trouve dans le volumineux réservoir est mise en œuvre au cours d’une éruption.

Source : Scripps Oceanography News

 ———————————————–

drapeau anglaisFor quite a long time, US scientists at Scripps Institution of Oceanography at UC San Diego and their colleagues have been studying Axial Seamount, an undersea volcano located about 400 km off the Oregon coast, at the Juan de Fuca Ridge (see my notes of August 11th and 23rd 2011 and August 17th 2013).

With modern computing power and innovative analytical skills, they have recently constructed the most detailed imagery to date of the massive active magma chamber located beneath the volcano. They tapped into a trove of seismic data to uncover a magma reservoir comparable in size to California’s Yosemite Valley. The new details of the internal structure beneath Axial volcano, which erupts roughly every decade, are presented in a recent issue of the journal Geology.

According to the researchers’ study, Axial’s magma chamber, centered at the intersection of the Juan de Fuca Ridge and the Cobb hotspot chain, spans 14 kilometres long, three kilometres wide, and one kilometre thick.

Since the data first collected in 2002, new imaging and computing techniques have allowed the researchers to construct images with unprecedented fidelity. It’s like comparing details of a 20th century X-ray to a modern MRI.

The new images revealed a geometrically complex magma system that includes several never-before-imaged pathways that may transport magma to eruption sites on the earth’s surface and help relieve stress within the volcano. The images also revealed that only a small fraction of the magma in the giant reservoir is used during an eruption event.

Source : Scripps Oceanography News.

Axial-blog

Représentation schématique du système magmatique de l’Axial. Le volcan possède un épais  réservoir où le magma apparaît sous différentes nuances de rouge, selon sa consistance. Il s’étend sous une zone d’accrétion que l’on attribue à la juxtaposition de la dorsale Juan de Fuca avec la chaîne CobbEickleberg. Plusieurs fractures (lignes bleues) transportent probablement la matière en fusion du réservoir vers les sites éruptifs, ce qui évacue une partie de la pression accumulée à l’intérieur volcan.

(Crédit documentaire : Geology)