Activité éruptive et changement climatique en Antarctique // Eruptive activity and climate change in Antarctica

Les résultats d’une étude publiée au début de septembre 2017 dans les Proceedings of the National Academy of Sciences apportent une nouvelle lumière sur une période de presque deux siècles d’éruptions volcaniques en Antarctique, alors que le continent connaissait une rapide déglaciation il y a environ 17 700 ans.
Les mesures chimiques effectuées sur des carottes de glace de l’Antarctique montrent que des éruptions puissantes et riches en halogènes du Mont Takahe dans l’Antarctique de l’Ouest ont coïncidé exactement avec l’apparition d’un changement climatique rapide et à grande échelle dans l’hémisphère sud à la fin de la dernière période glaciaire et le début de l’augmentation des concentrations de gaz à effet de serre au niveau de la planète.
Les changements climatiques qui ont débuté il y a environ 17 700 ans ont été accompagnés d’un déplacement des vents d’ouest vers le pôle avec, en parallèle, des changements dans la surface occupée par la glace de mer, la circulation océanique et la ventilation de l’océan profond. Les preuves de ces changements sont observées dans de nombreuses parties de l’hémisphère sud et dans différentes archives paléoclimatiques, mais leur cause était en grande partie inexpliquée.
On sait que les évolutions climatiques rapides qui ont eu lieu à cette époque ont été provoquées par des changements intervenus dans l’ensoleillement et sur la banquise de l’hémisphère nord. Les cycles glaciaires et interglaciaires sont influencés par les paramètres orbitaux du soleil et de la Terre qui influent sur l’ensoleillement (l’intensité des rayons du soleil) ainsi que par les changements dans les couches de glace continentale et les concentrations de gaz à effet de serre. Les scientifiques pensent que les éruptions du Mt Takahe, riches en halogènes, ont créé un trou d’ozone dans la stratosphère au-dessus de l’Antarctique, semblable au trou dans la couche d’ozone de nos jours ; elles ont par ailleurs entraîné des changements à grande échelle dans la circulation atmosphérique et l’hydroclimat dans l’hémisphère sud. Même si le système climatique était déjà programmé pour subir une évolution, ces changements ont probablement entraîné le passage d’un état climatique profondément glaciaire à un état climatique largement interglaciaire.
En outre, les retombées de ces éruptions, avec des niveaux élevés d’acide fluorhydrique et de métaux lourds toxiques, se sont propagées au moins jusqu’à 2 800 kilomètres du Mont. Takahe et ont probablement atteint le sud de l’Amérique du Sud.
Ces puissantes éruptions volcaniques en Antarctique ont été découvertes et vérifiées grâce à des carottes de glace extraites de régions comme le Groenland et l’Antarctique. L’une de ces carottes, connue sous le nom de West Antarctic Ice Sheet Divide (WAIS Divide) a été forée à une profondeur de plus de 3 400 mètres, et les analyses ont mis à jour plus de 30 éléments et espèces chimiques différents. Elles confirment que l’anomalie chimique observée dans la carotte de glace WAIS Divide résulte d’une série d’éruptions du Mont. Takahe qui se trouve à 350 kilomètres au nord.
La découverte de cet événement unique dans le WAIS Divide n’était pas la première indication d’une anomalie chimique qui a eu lieu il y a environ 17 700 ans. L’anomalie a également été détectée de manière plus limitée dans une carotte de glace prélevée  sur le glacier Byrd dans les années 1990, mais les données n’ont pas pu être interprétées clairement. La plupart des études des anciennes carottes de glace en Antarctique n’ont pas pris en compte de nombreux éléments et espèces chimiques étudiés par des chercheurs, comme les métaux lourds et les éléments rares qui caractérisent l’anomalie. Donc, à bien des égards, ces autres études sont passées à côté de l’éruption Mont Takahe.
Source: Science Daily

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New findings published early in September in the Proceedings of the National Academy of Sciences document a 192-year series of volcanic eruptions in Antarctica that coincided with accelerated deglaciation about 17,700 years ago.

Detailed chemical measurements in Antarctic ice cores show that massive, halogen-rich eruptions from the West Antarctic Mt. Takahe volcano coincided exactly with the onset of the most rapid, widespread climate change in the Southern Hemisphere during the end of the last ice age and the start of increasing global greenhouse gas concentrations.

Climate changes that began about17,700 years ago included a sudden poleward shift in westerly winds encircling Antarctica with corresponding changes in sea ice extent, ocean circulation, and ventilation of the deep ocean. Evidence of these changes is found in many parts of the Southern Hemisphere and in different paleoclimate archives, but what prompted these changes has remained largely unexplained.

It is known that rapid climate change at this time was primed by changes in solar insolation and the Northern Hemisphere ice sheets. Glacial and interglacial cycles are driven by the sun and Earth orbital parameters that impact solar insolation (intensity of the sun’s rays) as well as by changes in the continental ice sheets and greenhouse gas concentrations. Scientists postulate that these halogen-rich eruptions created a stratospheric ozone hole over Antarctica that, analogous to the modern ozone hole, led to large-scale changes in atmospheric circulation and hydroclimate throughout the Southern Hemisphere. Although the climate system already was primed for the switch, these changes probably initiated the shift from a largely glacial to a largely interglacial climate state.

Furthermore, the fallout from these eruptions, containing elevated levels of hydrofluoric acid and toxic heavy metals, extended at least 2,800 kilometres from Mt. Takahe and likely reached southern South America.

These massive Antarctic volcanic eruptions were discovered and verified thanks to ice cores extracted from remote regions of the Earth, such as Greenland and Antarctica. One such ice core, known as the West Antarctic Ice Sheet Divide (WAIS Divide) core was drilled to a depth of more than 3,400 metres, and much of it was analyzed for more than 30 different elements and chemical species. These precise, high-resolution records illustrate that the chemical anomaly observed in the WAIS Divide ice core was the result of a series of eruptions of Mt. Takahe located 350 kilometres to the north.

Discovery of this unique event in the WAIS Divide record was not the first indication of a chemical anomaly occurring about 17,700 years ago. The anomaly was detected in much more limited measurements of the Byrd ice core in the 1990s, but exactly what it was or what created it was not clear. Most previous Antarctic ice core records have not included many of the elements and chemical species that are studied by researchers, such as heavy metals and rare earth elements that characterize the anomaly. So in many ways these other studies were blind to the Mt. Takahe event.

Source: Science Daily

Vue du Mont Takahe, volcan qui culmine à 2000 mètres au-dessus de l’Ouest antarctique (Source : NASA)

 

Les secrets des carottes de glace // The secrets of ice cores

Une carotte de glace vieille de 2,7 millions d’années a été prélevée en Antarctique. Cette carotte et les bulles d’air qu’elle renferme racontent beaucoup de choses sur l’histoire du climat terrestre et pourraient même révéler ce qui a provoqué les âges de glace. La carotte est la seule de son genre à pouvoir révéler à quoi ressemblait l’atmosphère terrestre à cette époque reculée.
La carotte montre que le niveau de dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère au moment où elle s’est formée était inférieur à 300 parties par million. Actuellement, ce niveau est supérieur à 400 ppm (voir la courbe de Keeling ci-dessous) et ce nombre est en hausse constante. Le niveau de CO2 a toujours montré des tendances cycliques, mais depuis l’époque industrielle, il ene cesse de grimper, ce qui aboutit aujourd’hui à des niveaux sans précédent.
Grâce aux carottes de glace, les climatologues peuvent connaître l’atmosphère des années passées. Après avoir prélevé de fines carottes dans les glaciers et les icebergs, les scientifiques analysent les bulles d’air piégées dans ces échantillons. La composition des bulles révèle la composition de l’air au moment où il a été piégé et au moment où la carotte s’est formée.
Pour extraire l’air des carottes de glace, les scientifiques peuvent écraser la carotte ou la faire fondre sous vide afin que l’air qu’elle contient ne soit pas contaminé avant l’analyse. La carotte est ensuite examinée à l’aide d’instruments de haute technologie qui analysent les niveaux de pollution en contrôlant les sulfates, les aérosols de métaux et les gaz. Selon la NOAA, le type d’isotope d’oxygène contenu dans la carotte peut également révéler la température de la Terre au moment où la carotte s’est formée.
La carotte vieille de 2,7 millions d’années n’a pas été prélevée très profondément dans la «glace bleue» qui est fréquemment ignorée lors de la collecte d’échantillons de glace. Cette glace bleue est le résultat de la chute de neige sur la glace formée et de sa compression. La glace n’est pas vraiment bleue; La couleur provient des courtes longueurs d’ondes de la diffusion de la lumière et plus la lumière se déplace dans la glace, plus elle est bleue.
Les chercheurs de l’Université de Princeton qui ont prélevé la carotte de glace espèrent retourner dans la zone qui a été forée dans l’espoir de trouver des glaces encore plus anciennes qui leur permettront d’effectuer de nouvelles recherches dans les années à venir.
Source: Science Magazine.

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A 2.7 million-year-old ice core has been collected in Antarctica. The core’s age and the air bubbles it contains reveal a lot about the Earth’s climate history and possibly reveal what caused the Ice Ages. The core is the only of its kind that can reveal what the atmosphere on Earth was like so long ago.

This specific core shows that the level of carbon dioxide (CO2) in the atmosphere at the time it was formed was no greater than 300 parts per million.. Currently the Earth’s atmosphere is at more than 400 ppm (see Keeling Curve below), a number that is increasing. Levels of CO2 have always shown some cyclical trends, but since the industrial era CO2 levels have spiked leading to unprecedented levels never recorded.

Ice cores are a key means by which climate scientists learn about the atmosphere of years past. By removing thin ice cores from glaciers and icebergs scientists then test the air bubbles trapped in those cores. The composition of the bubbles reveal what the air was like around the time it was trapped and the core was formed.

To extract the air from the cores scientists can crush the core or melt it in a vacuum so no other air contaminates it before testing. The core then goes through sophisticated instruments that measure levels of pollution by checking for sulfates, metals aerosols and any gases. According to NOAA, the type of oxygen isotope found in the core can also reveal what the temperature on Earth was like when the core formed.

The 2.7 million year old core was found not very deep down in “blue ice” which is frequently ignored when looking for ice cores. That blue ice is the result of snow falling on formed ice and compressing down. The ice is not actually blue; the colour comes from the short wavelengths of light scattering and the further the light travels in the ice the bluer it looks.

The researchers from Princeton University who found the core are hoping to return to the area where it was drilled to find possibly even older ice for further research in the future.

Source : Science Magazine.

Ce graphique de la NASA montre les niveaux de CO2 dans des carottes de glace au coours des 400 000 dernères années.

Courbe de Keeling montrant les concentrations de CO2 dans l’atmosphère au cours des 800 000 dernières années. Depuis 1958, la courbe se réfère aux mesures en continu effectuées à l’observatoire du Mauna Loa à Hawaii. Les données antérieures s’appuient sur les carottes de glace. On remarquera que la concentration actuelle de CO2 est supérieure à 405 ppm.

 

Volcans et refroidissement de la planète // Volcanoes and cooling of the planet

drapeau francaisEn visitant le site web LiveScience (http://www.livescience.com/), j’ai lu un article très intéressant expliquant que le refroidissement global causé par certaines éruptions volcaniques historiques n’était pas aussi extrême que les climatologues le pensaient jusqu’à présent. Les scientifiques sont arrivés à cette conclusion en étudiant de récentes carottes de glace prélevées en Antarctique.
On sait depuis longtemps que les éruptions volcaniques envoient du SO2 dans la stratosphère où il se transforme en minuscules particules appelées aérosols sulfatés qui renvoient l’énergie solaire et contribuent donc au refroidissement de la planète. La neige qui tombe en Antarctique enregistre les niveaux de sulfate dans l’air au moment des éruptions. Cette neige devient ensuite la glace forée par les chercheurs et prélevée en longues carottes tubulaires.
Les scientifiques ont mesuré les concentrations de sulfate dans 26 carottes de glace prélevées dans 19 endroits différents de l’Antarctique et couvrant les 2000 dernières années de l’histoire de la Terre. Ils ont comparé ces niveaux de sulfate avec des carottes de glace retirées du Groenland afin de vérifier si les éruptions avaient véritablement eu un effet à l’échelle mondiale.
Tout en découvrant dans les carottes de glace des éruptions volcaniques jusqu’alors inconnues avant l’an 500, les chercheurs ont réalisé que certaines éruptions historiques n’avaient pas eu pour la planète des effets aussi sévères que l’avaient laissé entendre les modèles climatiques antérieurs.
L’équipe scientifique a identifié 116 éruptions volcaniques dans les carottes de glace prélevées sur les 19 sites couvrant les 2000 dernières années, y compris des événements historiques tels que le Tambora en 1815, le Kuwae en 1458 et le Rinjani en 1257. La totalité de ces 116 éruptions n’a pas été enregistrée dans les carottes de glace du Groenland, mais pour leur prochain projet, les chercheurs envisagent d’évaluer les niveaux de sulfate dans les carottes de l’île danoise.

Les dernières carottes de glace révèlent que le 13ème siècle a été marquée par un grand nombre d’éruptions sous les tropiques, comme la grande éruption du Rinjani en 1257. Certains chercheurs pensent que ces éruptions ont déclenché le Petit Age Glaciaire, épisode de refroidissement climatique qui a duré jusqu’aux années 1850.
Il s’avère que le Kuwae (Vanuatu) et le Rinjani (Indonésie), deux des plus grandes éruptions volcaniques tropicales observées dans les carottes de glace, ont déposé de 30 à 35 pour cent moins de sulfate dans l’Antarctique que l’avaient révélé les calculs antérieurs. Les résultats obtenus avec des dernières carottes de glace sont plus précis que par le passé et ils couvrent une plus grande surface de l’Antarctique, de sorte que les chercheurs peuvent mieux estimer la quantité de sulfate qui s’est déposée sur ce continent.

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drapeau anglaisWhile visiting the LiveScience website (http://www.livescience.com/), I read a very interesting article explaining that global cooling caused by some historic volcanic eruptions wasn’t as extreme as climate scientists recently thought, according to newly revised ice core records from Antarctica.

It is well known that volcanic eruptions send SO2 into the stratosphere, where it turns into tiny particles called sulfate aerosols that reflect the sun’s energy and cool the Earth. Snow falling in Antarctica records the levels of sulfate in the air at the time, and it eventually becomes ice drilled by researchers in long, tubular cores.

Researchers have measured sulfate concentrations in 26 ice cores from 19 different locations in Antarctica that cover the last 2,000 years of Earth’s history. They synchronized the sulfate records with ice cores from Greenland, to determine if the eruptions had a truly global effect.

Along with finding previously unknown volcanic eruptions in the ice cores from before A.D. 500, the researchers discovered that some historic eruptions weren’t as hard on the planet as earlier climate models suggested.

The team identified 116 volcanic eruptions in the ice cores from the 19 sites covering the past 2,000 years, including historic events such as Tambora in 1815, Kuwae in 1458 and  Rinjani in 1257. Not all of these 116 eruptions are recorded in Greenland’s ice cores, but for their next project, the researchers are planning to assess sulfate levels in the Greenland cores.

The new ice-core record reveals that the 13th century was marked by an onslaught of tropical eruptions, such as the massive 1257 eruption of Mount Rinjani. Some researchers think these eruptions triggered the start of the Little Ice Age, an episode of global cooling that lasted until the 1850s.

It turns out that Indonesia’s Kuwae and Rinjani, two of the largest tropical volcanic eruptions in the ice core record, deposited 30 to 35 percent less sulfate in Antarctica than previously had been calculated. The new ice core records are more detailed than before, and cover a greater area of Antarctica, so the researchers can better estimate how much sulfate was deposited across the continent.

Rinjani-blog

Vue de la caldeira du Rinjani  (Crédit photo:  Wikipedia)