Mesure du dioxyde de soufre (SO2) en milieu volcanique // Measurement of sulphur dioxide (SO2) in volcanic environments

Le dioxyde de soufre (SO2) est l’un des principaux gaz émis par les volcans. L’éruption de la Lower East Rift Zone (LERZ) du Kilauea en 2018 a libéré d’énormes quantités de SO2 et tout l’archipel hawaïen a parfois été envahi par le brouillard volcanique, appelé localement vog. Aujourd’hui, avec l’éruption dans l’Halema’uma’u, les panaches de SO2 sont emportés par les alizés et ils perturbent la vie de la population dans les zones sous le vent. Il est donc important de savoir quelle quantité de ce gaz est émise pour comprendre les conséquences pour la santé humaine.

J’ai écrit une note sur les émissions de SO2 le 31 mai 2020. Les scientifiques du HVO donnent aujourd’hui plus de détails sur la technique de mesure de ce gaz.

Pour mesurer les émissions de SO2, les scientifiques du HVO commencent par monter un spectromètre ultraviolet (UV) sur la carrosserie d’une voiture ou la carlingue d’un avion. Dans la mesure où le SO2 est invisible et peut ne pas coïncider parfaitement avec les parties visibles du panache éruptif, ils déterminent l’endroit où le SO2 est susceptible de se trouver en fonction de la direction du vent.

Puis, en partant du ciel clair d’un côté du panache, ils balayent toute la largeur inférieure du panache et retrouvent le ciel clair de l’autre côté. Le spectromètre est d’abord orienté vers le ciel et, comme le SO2 absorbe les rayons UV, l’appareil détecte ensuite une quantité d’UV moins importante lorsqu’il se trouve sous le panache de gaz contenant du SO2. Le spectromètre mesure la quantité de SO2 qui se trouve au-dessus de lui dans une trajectoire verticale ; c’est la « longueur de trajet de concentration. » (concentration-path-length).

Cette longueur de trajet de concentration associe la concentration et le trajet en une seule unité, ppm ∙ m (parties par million par mètre). Un panache de 1 mètre d’épaisseur avec une concentration de 10 ppm de SO2 équivaut à 10 ppm ∙ m. Il en va de même pour un panache de 10 mètres d’épaisseur avec une concentration de seulement 1 ppm de SO2. La quantité de SO2 est la même, elle est simplement distribuée différemment.

Toutes ces mesures mises ensemble sur la largeur du panache fournissent des indications sur une section transversale de ce même panache et montrent quelle quantité de SO2 se trouvait au-dessus du spectromètre en chaque point de mesure. Cette section transversale qui incorpore la largeur du panache en mètres, permet de connaître la surface de gaz dans cette zone, avec des unités de ppm ∙ m2 (parties par million par mètre carré).

Une fois que les scientifiques ont calculé cette section transversale, ils utilisent la vitesse du panache (en mètres / seconde) pour déterminer le nombre de sections transversales – mais aussi la quantité de gaz – dans un certain laps de temps. Cela conduit à des unités de ppm ∙ m3 / s (parties par million par mètre cube par seconde), autrement dit un volume de gaz émis avec une certaine concentration de SO2 par seconde.

Dans la mesure où on sait combien pèse une molécule de SO2, on peut convertir ce volume en masse (en kilogrammes ou en tonnes), et on peut convertir les secondes en jours. C’est ainsi que procèdent les scientifiques pour déterminer les flux de SO2 qui sont généralement exprimés en tonnes / jour (t / j). Grâce aux résultats obtenus, les scientifiques du HVO peuvent comparer les émissions de SO2 de l’éruption actuelle avec celles des éruptions précédentes du Kilauea.

Ainsi, lorsque le HVO a commencé à utiliser des mesures UV en 1979, les émissions de SO2 au sommet du volcan atteignaient en moyenne 500 t / j ou moins. Entre 1983 et 2008, l’éruption du Pu’uO’o émettait en moyenne 2000 t / j. Après des émissions relativement élevées au début de l’éruption sommitale de 2008-2018, les émissions du lac de lave se sont stabilisées à près de 5 000 t / j tandis que les émissions du Pu’uO’o chutaient  à quelques centaines de t / j.

L’éruption de 2018 a eu des émissions très élevées, avec près de 200 000 t / j ; ce sont les émissions les plus élevées jamais enregistrées sur le Kilauea.

Après l’éruption de 2018, les émissions de SO2 du Kilauea ont chuté à une trentaine de tonnes par jour.

Au début de la nouvelle éruption en décembre 2020, les émissions de SO2 au sommet du Kilauea étaient de 30 000 à 40 000 t / j. Les services sanitaires ont mis en garde le public sur la mauvaise qualité de l’air et ses dangers pour la santé.

Après l’arrêt de l’activité dans la fissure nord de l’Halema’uma’u le 26 décembre 2020, les émissions de SO2 ont progressivement baissé pour atteindre environ 2500 t / j le 11 janvier 2021, signe que l’activité éruptive diminuait..

Source: USGS / HVO.

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Sulphur dioxide (SO2) is one of the main gases emitted by volcanoes. Kilauea’s Lower East Rift Zone (LERZ) eruption in 2018 released huge amounts of sulphur dioxide and the whole Hawaiian archipelago was sometimes invaded by the volcanic fog, or vog. Today, during the Halema’uma’u eruption, SO2 plumes are pushed by the trade winds and disturb life in downwind areas. So, it is important to know how much of this gas is emitted for understanding implications for human health during volcanic eruptions.

I wrote a post about SO2 emissions on May 31st, 2020. In a new article, HVO scientists give more details about how to measure this gas.

To measure SO2 emission rates, HVO scientists begin by mounting an ultraviolet (UV) spectrometer to a car or an aircraft. Since SO2 is invisible and may not perfectly coincide with visible parts of the plume, they determine where the SO2 should be based on wind direction.

Then, starting under clear sky on one side of the plume, they traverse underneath the entire width of the plume, and end up back under clear sky on the other side.

The spectrometer looks up at the sky and, because SO2 absorbs UV radiation, it detects less incoming UV when it is under the gas plume where there is SO2. It measures how much SO2 is above it in the vertical ‘path’ where the spectrometer is looking – the ‘concentration-path-length’.

Concentration-path-length combines concentration and path into a single unit, ppm∙m (parts per million meters). A 1-metre-thick plume with a concentration of 10 ppm (parts per million) of SO2 is equivalent to 10 ppm∙m. So is a 10-metre-thick plume with a concentration of only 1 ppm of SO2. The amount of SO2 is the same, it is just distributed differently.

All those concentration-path-length measurements put together across the plume’s width make a ‘slice’, or cross-section, through the plume, showing how much SO2 was above the spectrometer at each point. That slice, since it incorporates the plume width in metres, is the area of the gas in a cross-section of plume, with units of ppm∙m2 (parts per million square metres).

Once the scientists have that cross-section, they use plume speed (in metres/second) to determine how many of those cross-sections – and how much gas – are passing overhead in a certain amount of time. That brings them to units of ppm∙m3/s (parts per million cubic metres per second)—which is a volume of gas with a certain concentration of SO2 each second.

Because one knows how much a molecule of SO2 weighs, one can convert that volume into a mass (in kilograms or tonnes), and one can convert seconds to days. That is how scientists derive the emission rates of SO2, which are usually presented in units of tonnes/day (t/d).

With the results they obtain, HVO scientists are able to compare SO2 emission rates from the current eruption to those emitted by previous Kilauea eruptions.

When HVO began to use UV measurements in 1979, the summit averaged about 500 t/d of SO2 or less. Between 1983 and 2008, Kilauea’s Pu’uO’o eruption averaged around 2,000 t/d. After higher emission rates early in the 2008–2018 summit eruption, the lava lake emissions stabilized near 5,000 t/d while Pu’uO’o’s emissions fell to a few hundred t/d.

The 2018 eruption had very high emission rates of nearly 200,000 t/d, the highest recorded emissions from Kilauea. Following the 2018 activity, Kilauea emissions dropped to only about 30 t/d.

At the beginning of the new eruption in December 2020, Kilauea summit emission rates were 30,000–40,000 t/d. The Department of Health warned the public of potential hazardous, poor air quality. It advised residents and visitors to be prepared and aware of the surrounding conditions. Since the north fissure activity ceased on December 26, 2020, SO2 emissions have progressively dropped and reached about 2,500 t/d on January 11th, 2021, a sign that the eruption rate has decreased.

Source : USGS / HVO.

 

Panaches de gaz sur le Kilauea (Photos : C. Grandpey)

Malgré le confinement, les concentrations de CO2 ne cessent d’augmenter // Despite the lockdown, CO2 concentrations keep increasing

Comme je l’ai indiqué précédemment, si les émissions de CO2 (dioxyde de carbone) ont décliné pendant la période de confinement, les concentrations dans l’atmosphère n’ont pas été dans ce sens ; elles ont même augmenté et ont atteint un nouveau record le 2 mai 2020, avec 417,37 ppm (parties par million). C’est la concentration dans l’atmosphère enregistrée par l’observatoire du volcan Mauna Loa sur l’île d’Hawaii. Vous pourrez consulter les relevés sur le site web de la Scripps Institution of Oceanography et voir la Courbe de Keeling qui montre les variations de concentrations de CO2 depuis 1958.Vous constaterez que la quantité de ce gaz dans l’atmosphère augmente régulièrement  et que les mises en garde des scientifiques ne servent à rien.

Depuis la révolution industrielle, nous sommes passés de 280 ppm à  417 ppm au début du mois de mai. La baisse importante des émissions enregistrées ces dernières semaines n’a finalement eu quasiment aucun effet sur la concentration, autrement dit l’épaisseur totale de CO2 dans l’atmosphère. Cette épaisseur de CO2 autour de notre planète est un peu comme la couche d’isolation autour d’un bâtiment ; si on l’augmente, il fait plus chaud à l’intérieur. Si on cesse de l’augmenter, il ne fait pas moins chaud pour autant. Cela veut simplement dire que la température va arrêter d’être un peu plus élevée.

Aujourd’hui, nous émettons près de deux fois plus que ce que les systèmes naturels peuvent absorber. Si on regarde la Courbe de Keeling, on constate que la valeur de la concentration de CO2 a augmenté de près de 50% par rapport à l’ère préindustrielle (de 280 ppm à 417 ppm). Si on voulait retrouver le climat qui a longtemps été celui de référence pour l’agriculture et les écosystèmes, il faudrait retomber aux alentours de 350 ppm Cela permettrait de maintenir une hausse de température d’environ 1 degré Celsius au-dessus du niveau préindustriel. La seule solution pour retrouver une telle valeur est d’arrêter d’émettre de plus en plus de CO2 chaque année.

Au vu des derniers chiffres, les climatologues doutent fort de la capacité des états à atteindre les objectifs de l’Accord de Paris sur le climat.

Source : RTBF.

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As I put it earlier, while CO2 (carbon dioxide) emissions declined during the lockdown period, atmospheric concentrations increased and reached a new record on May 2nd, 2020, with 417.37 ppm (parts per million). This is the concentration in the atmosphere recorded by the Mauna Loa observatory on the island of Hawaii. You can see the readings on the website of the Scripps Institution of Oceanography, and observe the Keeling curve which shows the variations in CO2 concentrations since 1958. They are constantly inceasing and the scientists’ warning are useless.
Since the industrial revolution, CO2 concentrations have increased from 280 ppm to 417 ppm at the beginning of May 2020. The significant drop in emissions in recent weeks had almost no effect on the concentration, in other words the total thickness of CO2 in the atmosphere. This thickness of CO2 around our planet is a bit like the layer of insulation around a building; if you increase it, it’s warmer inside. If you stop increasing it, it’s not less hot. It just means that the temperature will stop being a little higher.
Today, we emit almost twice as much as natural systems can absorb. If we look at the Keeling Curve, we see that the value of the CO2 concentration has increased by almost 50% compared to the pre-industrial era (from 280 ppm to 417 ppm). If we wanted to return to the climate that has long been the reference for agriculture and ecosystems, we would have to fall back to around 350 ppm. This would allow a temperature increase of about 1 degree Celsius above the pre-industrial level. The only solution to retrieve such a value is to stop emitting more and more CO2 every year.
In light of the latest figures, climatologists have serious doubts about the ability of states to achieve the goals of the Paris Climate Agreement.
Source: RTBF.

Courbe de Keeling et concentration de CO2 le 5 mai 2020