Tentative de détournement de lave sur le Mauna Loa (Hawaii) [2ème partie] // Attempt to divert lava on Mauna Loa (Hawaii) [Part 2]

Quelques heures après le largage des bombes le 27 décembre 1935, Jaggar déclara à la radio  que l’opération était un succès. Il a précisé: «Notre but n’était pas d’arrêter la coulée de lave, mais de la bloquer à la source pour qu’elle prenne une nouvelle trajectoire.»
La coulée de Humu’ula a ralenti, mais elle a continué de progresser et, à 10 heures du matin, le samedi 28 décembre 1935, la lave s’est dirigée vers le nord-est et a pénétré dans la Hilo Forest Reserve, à 30 kilomètres de Hilo Bay. Les incendies allumés par la lave étaient visibles depuis Hilo et constituaient une menace pour l’approvisionnement en eau de la ville. Le samedi en fin d’après-midi, Jaggar a fait état du ralentissement de la coulée, mais sans ajouter que c’était grâce au bombardement de la veille. La coulée de lave s’est arrêtée pendant la nuit mais a repris sa marche en avant le dimanche soir et a continué de progresser.
Le 2 janvier 1936, la coulée de Humu’ula n’avançait plus, mais les gaz continuaient de s’échapper de bouches dans la zone de rift nord-est.
Jaggar était convaincu que le largage des bombes bombe « avait contribué à précipiter la fin de la coulée ». Il a déclaré que « dans un processus naturel, la lave ne cesserait pas d’avancer aussi soudainement. »
À la fin de l’été 1939, Jaggar s’est rendu sur le site du bombardement de 1935. « Ce qui frappe dans la zone bombardée, c’est l’existence en amont de certains orifices percés par les bombes, d’ouvertures dans les tunnels par lesquelles une lave d’aspect pâteux, a émergé pour former un tas, un peu comme un pudding. La destruction du tunnel a refroidi la lave liquide venant de l’amont de telle sorte qu’un barrage s’est formé. Cela confirme la théorie selon laquelle le bombardement a solidifié la lave du tunnel.  […] Avec 12 largages de bombes réussis sur 16 tentatives, il ne fait aucun doute que le bombardement a arrêté la coulée de lave. »

Une reconnaissance sur le terrain à la fin des années 1970 est arrivée à une conclusion différente: « L’examen du site de bombardement n’a montré aucune preuve que ce dernier avait augmenté la viscosité de la lave ; l’arrêt de la coulée de 1935 peu après le bombardement doit être considéré comme une coïncidence.»
Aujourd’hui, en 2020, s’agissant du succès ou de l’échec de l’utilisation d’explosifs pour détourner le cours de la coulée de lave de 1935, le HVO pense que le bombardement a été effectué alors que l’éruption était déjà en train de décliner. Le bombardement n’a pas fait apparaître une nouvelle coulée à la source, comme l’espérait Jaggar au début. La coulée de de Humu’ula n’a pas cessé d’avancer soudainement après le bombardement ; elle s’est arrêtée d’elle-même progressivement au cours de la semaine suivante. [Une conclusion similaire a été avancée sur l’Etna en 1994 après l’introduction d’explosifs dans un tunnel de lave.] La reconnaissance sur le terrain dans les années 1970 n’a pas confirmé l’épaississement de la lave à la sortie du tunnel sous l’effet des bombes, comme l’avait affirmé Jaggar.

S’agissant de la « pointer bomb » de 1935 présente sur le Mauna Loa, le HVO pense qu’il est souhaitable de la laisser intacte à sa place pour rappeler qu’un détournement de lave ne sera probablement pas techniquement, économiquement ou socialement réalisable pour la plupart des futures éruptions à Hawaii. Cette technique reste toutefois une option qui peut être envisagée dans certains situations très particulières

Source: USGS / HVO.

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Hours after bombs were dropped on December 27th, 1935, Jaggar declared the bombing a success on a radio broadcast. He said: “Our purpose was not to stop the lava flow, but to start it all over again at the source so that it will take a new course.”

The Humu‘ula flow slowed but continued to advance, and at 10 a.m. on Saturday, December 28th, 1935, it turned northeast into the Hilo Forest Reserve 30 kilometres from Hilo Bay. Fires ignited by the lava were visible from Hilo and posed a threat to Hilo’s water supply. By late Saturday afternoon, Jaggar reported on the flow’s slowing, but was not yet prepared to say that it was the result of the previous day’s bombing. The flow stopped overnight but resumed its forward movement on Sunday evening and continued to advance.

By January 2nd, 1936, the Humu‘ula flow was declared dead, but gas emissions from the Northeast Rift Zone vents continued.

Jaggar was convinced that the bombing “helped hasten end of the flow.” He said that “in a natural end, the lava would not cease so abruptly.”

In late summer 1939, Jaggar visited the 1935 bombing targets. “A striking feature of the bombed area was the existence upstream from some bomb-holes, of tunnel-openings where pasty lava welled up as a heap or pudding. The smashing of the tunnel had cooled the oncoming liquid so that it dammed itself. This confirmed the theory that the bombing solidified the tunnel lava back into the heart of the mountain. “With 12 hits out of 16, there can be no question whatever that the bombing stopped the flow.”

A field investigation in the late 1970s reached a different conclusion: “Ground examination of the bombing site showed no evidence that the bombing had increased viscosity; the cessation of the 1935 flow soon after the bombing must be considered a coincidence.”

Today, in 2020, regarding the success or failure of using explosives to influence the 1935 lava flow, HVO’s view is that the bombing was carried out as the eruption was already waning. Bombing did not start a new flow at the source as Jaggar originally hoped. The Humu’ula flow did not cease abruptly after the bombing but died slowly over the following week. [A similar conlusion was reached on Mt Etna in 1994 after explosives were dropped in a lava tunnel.] The 1970s investigation confirmed no thickening of vent lava by the bombs as Jaggar claimed.

Back to the 1935 pointer bomb on Mauna Loa, HVO thinks that it might be left intact as a reminder that lava diversion may not be technically, economically, nor socially feasible for most future Hawaiian eruptions, but is an option that could be considered for some situations.

Source: USGS / HVO.

Etna : Préparatifs pour l’introduction de blocs de béton dans un tunnel de lave pendant l’éruption de 1991-1994 (Photo: C. Grandpey)