Venise (suite): Les doutes sur la capacité du projet MOSE à protéger la ville

Au fil des siècles, Venise s’est toujours adaptée aux phénomènes naturels auxquels elle a été exposée, en commençant par l’élévation du niveau de la lagune sur laquelle elle a été construite il y a plus de mille ans, mais aujourd’hui son adaptabilité est mise à rude épreuve et il n’est pas du tout certain que le projet MOSE suffira pour faire face au changement climatique actuel. C’est le point de vue d’un professeur vénitien d’économie de l’environnement et spécialiste en science et gestion du changement climatique. Il rappelle que « les événements extrêmes sont de plus en plus fréquents. La situation de ces derniers jours à Venise est semblable à celle provoquée en 2018 par la tempête Vaia qui a frappé l’Italie fin octobre, avec de graves dégâts en Vénétie. Venise a subi de fortes précipitations associées à un fort sirocco. Sur une période de mille ans, un phénomène comme celui-ci s’est produit plusieurs fois, mais le fait qu’il survienne deux années de suite est significatif « .
Au cours des dernières décennies, le niveau de l’eau a augmenté en moyenne de 5,6 millimètres par an. Au phénomène mondial d’élévation du niveau de la mer s’ajoutent à Venise les phénomènes naturels qui ne concernent que son lagon et d’autres facteurs provoqués par l’action humaine, tels que l’encrassement des canaux et l’exploitation de la nappe phréatique. La ville s’est toujours adaptée à ces changements, mais son adaptabilité a une limite ; elle ne peut plus désormais suivre l’accélération des phénomènes ».
Les travaux pour la réalisation du MOSE, Module électromécanique expérimental ont débuté en 2003 sous le gouvernement Berlusconi. Il s’agit d’un système de cloisons qui sépare la lagune de Venise de la Mer Adriatique et qui est censé empêcher les hautes eaux d’atteindre la ville. Il s’agit d’un ouvrage dont le coût atteint quelque 7 milliards d’euros. Il n’est pas encore terminé et beaucoup de spécialistes pensent qu’il sera inadapté à la gestion des grandes marées. En particulier, il ne tient pas suffisamment compte du facteur vent, celui qui a récemment accru l’effet du phénomène. De plus, les travaux effectués pour la construction du MOSE ont à leur tour provoqué un changement sur les marées affectant le Lido: elles sont maintenant plus rapides, l’eau monte plus vite et les courants sont plus forts.

De plus, beaucoup de Vénitiens ont une dent contre le projet MOSE parce qu’il a drainé la plupart des fonds qui servent normalement à nettoyer les canaux et à faire tout ce qui est nécessaire pour que la ville soit prête à affronter l’acqua alta. Depuis une vingtaine d’années, on ne procède plus à l’entretien des canaux qui était financé par les fonds octroyés par la loi spéciale promulguée juste après la crue de novembre 1966.

Source : Presse italienne.

Vue du système MOSE à Bad-Ems en Allemagne (Source: Wikipedia)

L’Ile de la Réunion au cœur de scandales

Il y a quelques semaines, la chaîne de télévision France Ô a rafraîchi nos mémoires en remettant au goût du jour un scandale qui a secoué l’île de la Réunion en 1970. Une dizaine d’années auparavant, un autre scandale, étouffé par les autorités françaises, avait défrayé la chronique. J’ai effectué un séjour de plusieurs semaines à la Réunion au mois de juin et j’ai eu l’occasion de discuter avec la population qui m’a confirmé les faits.

Dans les années 1960, la Réunion était déjà un département français, mais la pauvreté et l’explosion démographique mettaient l’île sous tension. En 1963, le nouveau député Michel Debré décida d’organiser la migration des enfants de la DDASS ( Direction Départementale des Affaires Sanitaires et Sociales). Certains étaient orphelins, mais beaucoup ont été carrément retirés à leur famille. On leur promettait un avenir plus radieux, et des retours réguliers aux vacances. Près de 2 000 enfants furent ainsi arrachés à leurs familles, puis exilés vers des départements en voie de désertification, comme la Creuse où je suis né, et je me sens donc un peu concerné par cette histoire qui laisse en moi un sentiment de honte. Beaucoup de ces enfants ont été confiés à des familles d’accueil, souvent dans des fermes où on les considérait en général comme des domestiques. On leur demandait d’effectuer les travaux de la ferme comme labourer les champs, semer l’engrais ou tailler les haies… D’autres enfants ont été bien accueillis, mais tous ont été déracinés, jusqu’à parfois perdre leur identité.

Depuis 2014, la responsabilité de l’Etat a été reconnue, et un dispositif a été mis en place pour aider ceux qu’on a surnommé « les enfants de la Creuse » à renouer avec leurs origines. À l’occasion de la remise du rapport d’enquête sur la transplantation des mineurs réunionnais, la Ministre des outre-mer a annoncé le 10 avril 2018 des mesures d’aide aux victimes. Elle a aussi déclaré : « Oui,  l’État a manqué à sa responsabilité morale à l’encontre de ces mineurs. Une faute a été commise et cette faute impose des réparations morales. » Une fois de plus, de belles paroles gouvernementales car les victimes attendent toujours des compensations…

J’ai eu l’occasion d’aborder ce problème avec des Réunionnais. Dans l’ensemble, les sentiments sont mitigés. La plupart des personnes que j’ai rencontrées pensent que l’idée n’était pas si mauvaise que cela pour éviter une surpopulation de l’île. En revanche, toutes sont unanimes pour condamner la méthode employée par Michel Debré qui manquait vraiment de tact. Aujourd’hui, peut-être faudrait-il mettre en place des mesures identiques pour éviter l’envahissement de la Réunion par les voitures. L’engorgement est proche!

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En 1970, cinq ans avant le vote de la loi Veil autorisant l’interruption volontaire de grossesse (IVG), la police de l’île de la Réunion fut alertée par un médecin qui avait diagnostiqué chez une de ses patientes un avortement clandestin pratiqué à la clinique orthopédique de Saint-Benoît, et déposé une plainte contre X. L’enquête confirma les rumeurs d’avortements et de stérilisations forcées qui circulaient depuis plus d’un an dans la presse et parmi les familles. Des milliers d’avortements avaient effectivement eu lieu à la clinique du docteur Moreau à Saint-Benoît depuis le début des années 1960. Leur but non avoué était en réalité d’apporter une solution à la démographie galopante sur l’île. Le docteur Moreau était un influent notable de l’île de la Réunion, proche de Michel Debré, ancien Premier Ministre de Charles de Gaulle, devenu leader de la droite réunionnaise. Comme indiqué plus haut, Michel Debré était déjà tenu pour responsable de l’affaire des « enfants de la Creuse. » Une série de scandales fut dévoilée dans la presse locale et nationale. Elle mit au jour d’une part un système bien rôdé d’abus de la part des médecins envers les femmes réunionnaises les plus pauvres, et d’autre part un détournement massif de la Sécurité sociale qui a permis à ces médecins de s’enrichir sur le dos du contribuable français. Un procès a eu lieu. Le médecin qui avait effectué les avortements à l’hôpital de Saint-Benoît a été condamné à une peine de prison dont la moitié avec sursis. Le docteur Moreau a été acquitté. Les trente femmes courageuses qui avaient osé porter plainte ont été déboutées et n’ont reçu aucune compensation pour les blessures qui leur avaient été infligées.  Comme pour « les enfants de la Creuse », l’affaire est longtemps restée dans les archives de l’histoire.

Au début de l’année 2019, une trentaine de députés ont demandé la création d’une commission d’enquête afin d’avoir « une idée précise de l’ampleur des faits et évaluer l’étendue des responsabilités personnelles et institutionnelles ». On attend toujours les résultats…

Source : France Info et France Ô.

L’ « acqua alta » à Venise: Une punition pour le Conseil Régional de Vénétie ? // « Acqua alta » in Venice: A punishment for the Veneto Regional Council ?

Les locaux du Conseil Régional de Vénétie situés à Venise ont été inondés pour la première fois de leur histoire par l' »acqua alta » qui a affecté la Cité des Doges. Il semblerait que la montée soudaine des eaux se soit produite juste après que le Conseil Régional ait rejeté les amendements proposés par l’opposition et qui visaient à lutter contre le changement climatique. Le bâtiment a été inondé deux minutes après que deux partis de droite – la Liga et les Fratelli d’Italia- et le parti de centre-droit Forza Italia aient rejeté les amendements proposés par leurs opposants. Ces amendements incluaient des demandes de financement en faveur de davantage de sources d’énergie renouvelables, le remplacement des bus roulant au diesel et des mesures visant à réduire l’impact du plastique. L’opposition imputait également l' »acqua alta » – qui est montée à plus de 1,80 mètre au-dessus du niveau habituel et a causé au moins un décès – à une combinaison de facteurs, notamment la hausse du niveau de la mer due à la fonte des glaciers. L’opposition a été accusée par la majorité de faire de la propagande. La majorité a fait remarquer que le Conseil Régional a dépensé 965 millions d’euros au cours des trois dernières années dans le cadre de la lutte contre la pollution de l’air. Le maire de Venise avait tweeté plus tôt dans la semaine que les inondations avaient mis Venise à genoux, qualifiant d ‘ »apocalyptiques les conditions vécues.

Source: Huffington Post et journaux italiens.

Le premier magistrat de Venise a raison d’être inquiet car l' »acqua alta » n’est pas terminée. On prévoit une hauteur d’eau d’au moins 1,60 mètre aujourd’hui 17 novembre 2019. La situation actuelle à Venise ne fait que préfigurer ce qui va se passer dans les grandes villes côtières de la planète dans les prochaines années.  Les médias n’évoquent que du bout des lèvres le réchauffement climatique et la fonte des glaces pour expliquer la situation catastrophique à Venise. C’est pourtant là que se trouve la cause du problème. Il faudrait que nos dirigeants cessent de pratiquer la politique de l’autruche et prennent les vraies mesures pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.

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The premises of the Veneto Regional Council in Venice were flooded for the first time in known history during the acqua alta that affected the city. It was apparently right after the members of the Regional Council rejected amendments to tackle climate change. The building was flooded two minutes after two Italian right-wing parties – the League and Brothers of Italy –  and the center-right Forza Italia party rejected their opponents’ amendments. The rejected amendments included requests for funding for more renewable energy sources, the replacement of diesel buses and measures to reduce the impact of plastic. They also blamed Venice’s high tide, which peaked at more than1.80 metres above the usual level and caused at least one death, on a combination of factors including rising sea levels due to glacial melt. The opposition was accused by the majority of spreading propaganda. The majority pretends the Regional Council spent € 965 million over the past three years in the fight against air pollution,  The mayor of Venice had tweeted earlier this week that flooding had brought Venice to its knees, describing the conditions as “apocalyptic.

Source: Huffington Post and Italian newspapers.

The mayor of Venice is right to be worried because the « acqua alta » is not over. A water level of at least 1.60 metres is expected today, November 17th, 2019. The current situation in Venice only foreshadows what will happen in the major coastal cities of the planet in the coming years. The media only give lip service to global warming and melting ice to explain the catastrophic situation in Venice. This is where the problem lies. Our leaders should stop burying themselves in the sand and take real action to reduce greenhouse gas emissions.

L’inondation du Conseil Régional de Vénétie (Crédit photo: Presse italienne)

2019: Deuxième mois d’octobre le plus chaud !

La NASA vient d’indiquer qu’octobre 2019 a été le 2ème mois d’octobre le plus chaud de l’histoire. Le classement publié par l’agence américaine confirme celui des autres agences climatiques dans le monde. Octobre 2019 frôle ainsi le record établi lors de l’avènement du phénomène El Niño extrême de 2015. Avec +1,04°C au-dessus de la moyenne 1951-1980, l’anomalie relevée en octobre 2019 est la deuxième plus élevée des annales. Les anomalies sont surtout importantes dans l’hémisphère nord qui n’a jamais été aussi chaud en octobre.
Une fois de plus, le haut du classement est dominé par la période récente. Depuis 1880, les 5 mois d’octobre les plus chauds ont été observés ces 5 dernières années.
Pour le mois d’octobre, sur les 100 dernières années, le rythme du réchauffement est de +0,093°C par décennie. Sur les 20 dernières années (depuis 1999), on note une accélération de +0,29°C par décennie.
Au vu des chiffres actuels, 2019 terminera probablement à la 2ème place (La Poulidor de l’histoire, avec un clin d’oeil à notre champion limousin qui vient de nous quitter). Pour l’année en cours (janvier-octobre), 2019 se situe à +0,97°C, à mi-chemin entre le record de 2016 (+1,02°C) et 2017 (+0,92°C).
Source: NASA, global-climat.

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NASA has just indicated that October 2019 was the second hottest October in history. The ranking published by the US agency confirms the results of other climate agencies in the world. October 2019 is close to the record set by the advent of the extreme El Niño phenomenon of 2015. With + 1.04°C above the 1951-1980 average, the anomaly recorded in October 2019 is the second highest in the archives. The anomalies are especiallysignificant in the northern hemisphere, which has never been so hot in October.
Once again, the top of the ranking is dominated by the recent period. Since 1880, the warmest 5 months of October have been observed in the last 5 years.
For the month of October, over the last 100 years, the rate of warming is + 0.093°C per decade. Over the last 20 years (since 1999), there has been an acceleration of + 0.29°C per decade.
In view of the current figures, 2019 will probably finish in 2nd place. For the current year (January-October), 2019 is at + 0.97°C, halfway between the record of 2016 (+ 1.02°C) and 2017 (+ 0.92°C) .
Source: NASA, global-climat.

Source: global-climat