Montée du niveau des océans : des territoires inhabitables

À l’occasion de la COP30 à Belém (Brésil), le journal Le Populaire du Centre a publié un article fort intéressant rappelant que certaines parties du monde ont déjà à subir les effets de la montée du niveau des océans. Le journal donne quelques exemples de territoires où des habitants doivent déménager à cause de la montée des eaux.

Le journal explique que rien qu’en France, 500.000 logements seront menacés d’ici 2100. Ils seront condamnés à devenir inhabitables et/ou impossibles à assurer.

https://www.lepopulaire.fr/paris-75000/actualites/dereglement-climatique-miquelon-jakarta-ces-territoires-qui-deviennent-deja-inhabitables_14783826/

La commune de Miquelon, la moins peuplée des deux communes de Saint-Pierre-et-Miquelon, située en Amérique du nord, a entamé le processus de déménagement des 617 habitants du village en 2022. C’est le premier village français à être déplacé en raison du réchauffement climatique. Miquelon est situé à seulement deux mètres au-dessus de la mer et l’archipel a connu deux ouragans destructeurs accompagnés de vagues de submersion. Le gouvernement a financé l’opération grâce au fonds Barnier, qui prévoit un rachat des maisons abandonnées par l’État.

Plan de prévention des risques littoraux de Miquelon

En France métropolitaine, le phénomène atteint la côte Atlantique du nord au sud. J’ai mentionné dans ce blog la destruction de la résidence Le Soleil à Soulac-sur-Mer ainsi que la menace qui plane sur Lacanau.

En Normandie, des habitations situées en bord de mer sont abandonnées ou vont bientôt l’être. En effet, des pans de falaises du littoral normand se décrochent et mettent en péril des maisons aujourd’hui proches du vide.

Dans le Finistère, deux maisons ont été démolies en juin 2025 à Treffagiat car elles étaient menacées par l’érosion côtière et la submersion marine.

En 2050, on estime que plusieurs milliers de logements seront menacés par la montée des eaux océaniques

J’ai expliqué (notes du 31 août 2019 et du 20 août 2024) qu’en Indonésie, la capitale administrative entière, Jakarta, a dû être déplacée dans une ville nouvelle, Nusantura, située 2.000 kilomètres plus loin sur l’île de Bornéo.

La nouvelle capitale officielle a été inaugurée en 2024. La décision de déplacer la capitale a été motivée par la montée des eaux et l’affaissement du sol causé par un pompage incontrôlé des nappes phréatiques. Le problème est que la nouvelle ville n’a pas la capacité d’accueillir tous les habitants de Jakarta (2 millions d’habitants prévus en 2045), qui doivent surélever leurs habitations ou vivre les pieds dans l’eau.

Vue synthétisée du futur palais présidentiel de Nusantara (Source : presse indonésienne)

Le Vanuatu, petit archipel du Pacifique, est le pays le plus menacé par la montée des eaux. Il pourrait être totalement englouti dans les prochaines années. Son existence même est menacée. En désespoir de cause, le pays a décidé d’attaquer les gouvernements en justice pour qu’ils passent à l’action face au réchauffement climatique.

Il faudrait ajouter à ce constat alarmant du côté de l’océan que des habitants du Sud de la France migrent à cause des températures de plus en plus élevées et vont s’établir dans des territoires où les températures sont plus supportables, notamment la Normandie et la Bretagne.

La Nouvelle-Aquitaine face à l’érosion côtière

Mes fréquentes visites en Gironde et en Charente-Maritime ont confirmé à quel point le littoral atlantique de Nouvelle-Aquitaine était affecté et menacé par la montée du niveau des océans causée par le réchauffement climatique d’origine anthropique. Ici, ce sont des enrochements qui s’effondrent, là c’est la dune qui est arrachée, malgré la résistance des oyats.

Un colloque sur l’érosion côtière et la submersion marine s’est déroulé à Lacanau en Gironde le 27 mars 2024, au milieu des pelleteuses qui s’activent pour essayer d’endiguer le phénomène. Le but de cet événement, qui réunissait experts et élus, était de répondre à la question : Quelles préparations des littoraux de Nouvelle-Aquitaine pour s’adapter au réchauffement climatique ? On sait que cette hausse des températures aura des conséquences environnementales et financières très importantes dans les prochaines années.

Les derniers événements climatiques viennent de le confirmer : chaque année, l’océan avance sur les terres. Le trait de côte recule de plusieurs mètres à chaque tempête, et encore plus si la mer part à l’assaut du rivage au moment des grandes marées. Le constat est alarmant et inéluctable. Certaines communes sont sérieusement menacées.

Comme je l’ai rappelé dans plusieurs notes sur ce blog, la ville de Lacanau est l’une des plus touchées par la montée des eaux. Les autorités locales travaillent depuis dix ans sur le phénomène d’érosion, et de gros travaux sont en cours sur plusieurs types de chantiers. Le maire de la localité explique qu’ « il va falloir relocaliser le poste de secours, les parkings du front de mer et la Maison de la glisse. Et en même temps, on aménage le centre-ville pour une nouvelle mobilité et des espaces « renaturés » en désimperméabilisant les sols, pour rendre à la nature ce qu’elle n’aurait jamais dû quitter. »

Du Pays basque aux marais charentais, de l’île d’Oléron à Lacanau, les 900 km de côtes de la Nouvelle-Aquitaine sont couverts par ces stratégies de lutte contre l’érosion. Les enrochements se multiplient ; on essaye de retenir les dunes à l’aide de différentes techniques, mais ces initiatives semblent bien fragiles devant la force de l’océan. Comme l’a déclaré le président de la région Nouvelle-Aquitaine, « la hausse du niveau marin et les tempêtes amplifieront, quoi qu’il arrive, l’érosion côtière, l’intrusion saline et le niveau de submersion et d’inondation, surtout en cas d’évènements extrêmes du type de la tempête Xynthia. » Lors de cette dernière, en février 2010, le recul du trait de côte a été de quinze mètres. Au final, l’érosion côtière menacera l’activité touristique littorale, un secteur majeur de l’économie, avec 49 000 emplois directs.

On sait qu’au final c’est l’océan qui gagnera, mais si rien n’en fait, la situation sera encore pire. La Chambre régionale des comptes de Nouvelle-Aquitaine a chiffré le coût total de l’inaction entre 8 et 17 milliards d’euros à l’horizon 2050. La région Nouvelle-Aquitaine compte sur l’aide de l’État pour entreprendre ces travaux à grande échelle. Des maisons de particuliers sont menacées, mais aussi de nombreux campings qui font le plein tous les étés dans la région. En tout, ce sont 7 000 bâtiments qui sont menacés dans la région Nouvelle-Aquitaine. Si ces structures venaient à disparaître, elles généreraient un sérieux manque à gagner pour le secteur touristique aquitain.

La région en appelle à la solidarité nationale. Le préfet de Gironde, présent au colloque, a rappelé que l’État participait à hauteur de 50 % dans les travaux opération trait de côte à Lacanau. Le ministre de la Transition écologique a prévu d’intégrer des crédits dédiés à la lutte contre l’érosion côtière dans le projet de loi de finance 2025. Il le fallait, car le temps presse.

Source : France 3 Régions, presse écrite de Nouvelle-Aquitaine.

Enrochements stables à Lacanau…

….Plus fragiles ailleurs…

Erosion dunaire…

Erosion de falaise…

La côte atlantique a bien du mal à faire face aux assauts de l’océan !

(Photos: C. Grandpey)

Pas-de-Calais : alerte climatique

C’est toujours la même rengaine : « Du jamais vu ! «  avec des scènes de désolation devant les dégâts et des scènes de désespoir au sein de la population. Début janvier 2024, le Pas-de-Calais est à nouveau en état d’alerte face aux risques d’inondations et de crues. L’alerte rouge a de nouveau été déclenchée et des renforts ont été envoyés pour aider les équipes locales.

Crédit photo: AFP

Les médias attirent l’attention du public sur le plus spectaculaire, mais je n’ai guère entendu de reportages mettant le doigt sur la cause de ces inondations : le réchauffement climatique. La hausse globale des températures amènera de telles situation à se reproduire de plus en plus souvent.

Le nouvel An à peine fêté, voilà que ressurgissent les traumatismes de 2023. Le 2 janvier, neufs départements du quart nord-ouest de la France étaient placés en vigilance Orange « pluie et inondations ». Le Pas-de-Calais, quant à lui, est passé en vigilance Jaune pour les inondations et Rouge pour les crues. Météo France prévoyait un nouveau renforcement des pluies, parfois accompagné d’orages. Selon Vigicrues, plusieurs cours d’eau risquaient de sortir à nouveau de leur lit. Ces inondations avaient déjà touché plus de 260 communes en 2023, transformant les rues en torrents et affectant quelque 5 849 logements.

 

Il est intéressant de noter que ces inondations ont lieu avec de faibles coefficients de marée, autour de 40 actuellement. Des coefficients de plus de 100 sont annoncés pour les prochaines semaines, ce qui aura forcément un impact sur le comportement des fleuves côtiers et ralentira leur évacuation vers la mer.

La situation générée par les inondations se complique quand surviennent des restrictions d’eau, des coupures d’électricité et des fermetures d’écoles. La grande question est la suivante : que faut-il faire pour s’adapter ? Avec le réchauffement climatique, on sait que les précipitations vont devenir de plus en plus abondantes. Certains diront qu’il n’y a pas urgence à agir car ce ne sont que deux épisodes d’inondations ponctuels. C’est vrai, mais tous les climatologues de la planète s’accordent pour dire que les inondations des zones côtières sont amenées à se multiplier, et pas seulement dans le Pas-de-Calais. A l’échelle de la planète, on sait que des villes comme Miami, New York ou Hong Kong auront un jour les pieds dans l’eau.

 

Photo: C. Grandpey

L’un des principaux phénomènes physiques expliquant cette situation trouve son origine dans le réchauffement des océans : plus l’eau est chaude, plus l’évaporation est importante et plus l’atmosphère se charge en humidité. Puis toute cette vapeur d’eau passe à nouveau à l’état liquide et s’abat à la surface de la Terre. Le CNRS explique qu’en comparant les modèles d’événements similaires entre 1979 et 2000, on note une augmentation de 1 à 3 millimètres de pluie par jour, soit 15 à 30 % de précipitations supplémentaires. A cela s’ajoute la dilatation des océans dont le volume augmente avec les températures et provoque la hausse de leur niveau. Sans oublier, bien sûr, la fonte de la banquise et des glaciers.

 

D’après Météo-France, le Pas-de-Calais sera l’un des départements les plus touchés par la hausse des précipitations, avec entre 20 et 50 mm de cumuls supplémentaires par an.

Alors quoi faire ? Il est clair que les zones côtières du Pas-de-Calais sont en sursis. Si des inondations majeures devaient se reproduire plusieurs fois par an, il faudrait partir et relocaliser les villages les plus menacés à l’intérieur des terres, à l’abri des eaux.

Le Pas-de-Calais n’est pas le seul département dans ce cas. Les délocalisations de maisons qui se trouvent dans des zones à risque d’inondations sont appelées à augmenter, Même si cette option peut apparaître très dispendieuse, au final, elle pourrait être moins coûteuse pour les gouvernements, les villes, les assureurs et les ménages si l’on tient compte de toutes les répercussions directes et indirectes qu’entraînent les dommages occasionnés par les grandes crues sur les bâtiments, le portefeuille des familles et le moral des occupants.

Les enrochements de plus en plus visibles le long de nos côtes (métropole et outre-mer) montrent la fragilité de nos littoraux. Ainsi, face à l’inéluctable avancée de l’océan qui grignote le trait de côte, la commune de Lacanau (Gironde) repense son littoral et ses usages pour maintenir ses activités.

Lacanau, un site menacé par l’océan (photo: C. Grandpey)

Je suis conscient que ce texte ne plaira pas à tout le monde, en particulier aux négationnistes du réchauffement climatique qui rôdent en grand nombre sur les réseaux sociaux. Il ne fait guère de doute – j’espère, bien sûr, me tromper – que de nouvelles inondations à répétition se produiront dans le nord de la France. D’autres littoraux – en Normandie, par exemple – seront confrontés au recul du trait de côte. Si rien n’est fait pour mettre les populations sinistrées à l’abri de ces événements, la situation ne se limitera plus à des dégâts matériels. La santé mentale des populations sera durement affectée Alors, mieux vaut anticiper une catastrophe annoncée.

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Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, en visite à Thérouanne (Pas-de-Calais), a déclaré : « On ne pourra pas partout se dire que c’est en rehaussant chaque année les digues de quelques centimètres, que ça suffira à lutter contre les épisodes climatiques. Regarder la réalité en face, ça peut consister à dire qu’il y a des endroits où il faut qu’il n’y ait (…) plus d’habitations. Ça s’est fait ailleurs en France ». Le ministre aurait-il compris l’urgence de la situation climatique? Même si ce sera une nécessité, force est de reconnaître que vider toute une zone de ses habitations ne sera pas chose facile, pour des tas de raisons. (Source: France Info)

L’érosion littorale sur les Plages du Débarquement

A Soulac-sur-Mer (Gironde), Le Signal est en train de disparaître sous les coups des engins de démolition. En France, l’immeuble était le symbole parfait du réchauffement climatique et de l’érosion du littoral sous les assauts des vagues.

Photo: C. Grandpey

Comme je l’ai souligné à plusieurs reprises, Le Signal n’est que l’un des nombreux exemples de l’érosion littorale dans notre pays. Il suffit de voir où sont arrivés les blockhaus de la Seconde Guerre Mondiale du côté de La Palmyre (Charente-Maritime) pour se rendre compte du travail de sape de l’océan.

 

Photo: C. Grandpey

Les enrochements mis en place en différents endroits de la côte – à Lacanau (Gironde), par exemple – montrent la fragilité du trait de côte.

Photo: C. Grandpey

La Normandie est également en danger. Le site d’Utah Beach, l’une des plages les plus célèbres du monde, où débarquèrent des milliers de soldats au matin du 6 juin 1944 est potentiellement menacé, en particulier le musée chargé de cette terrible histoire.

 

Le musée d’Utah Beach face à la mer (image musée)

Des moyens de protection sont mis en œuvre, mais le maire s’inquiète à chaque tempête. En effet, c’est bien au moment des tempêtes, surtout lorsque le coefficient des marées est le plus élevé que la destruction de la côte est la plus significative. De gros moyens sont mis en œuvre pour essayer de lutter contre les éléments. 7 000 m3 de sable sont déversés tous les deux ans pour compenser l’érosion de la dune. Des oyats sont plantés pour la fixer. C’est un peu le combat de David contre Goliath.

 

Oyats pour lutter contre l’érosion (Photo: C. Grandpey)

La seule solution sûre serait de déménager le musée. Mais le maire de Sainte-Marie-du-Mont (Manche), la commune qui abrite Utah Beach, refuse cette solution: « La loi Littoral nous empêche formellement de le déplacer ailleurs sur la plage. L’éloigner du littoral et du site du Débarquement serait à l’opposé de tout devoir de mémoire. Est-ce qu’on imagine laisser ainsi Verdun à l’abandon ? Le musée doit rester sur la plage. »

Pas très loin d’Utah Beach, un important pan de la falaise de la Pointe du Hoc, autre lieu symbolique du Débarquement de Normandie du 6 juin 1944, s’est effondré le 20 janvier 2023.

En raison de l’érosion progressive de la Pointe du Hoc, une partie de l’affleurement surplombant la Manche s’est effondrée. Personne n’a été blessé dans le glissement de terrain qui est tombé dans la mer,

Le lieu est chargé d’histoire. 225 rangers américains entreprirent l’ascension de la Pointe du Hoc et ses 25 mètres de hauteur le 6 juin 1944 sous les tirs allemands. Seuls 90 s’en sortirent.

Tout est fait pour trouver des moyens d’atténuer les risques d’effondrement. Selon les autorités locales, « il faut absolument préserver le site tout en continuant à raconter l’histoire héroïque du lieutenant-colonel James E. Rudder et de ses hommes qui ont escaladé les falaises le 6 juin 1944 pour aider au succès du débarquement allié en Normandie. »

 

L’assaut de la Pointe du Hoc par les rangers américains (archives musée)