Tamu : Le roi déchu // The dethroned king

En 2013, des scientifiques avaient déclaré que le Mauna Loa sur l’île d’Hawaï n’était plus le plus grand volcan bouclier du monde. Il venait de se faire détrôner par le massif du Tamu, un volcan sous-marin de 310.000 km2 (environ 650 km de long, pour 450 km de large) situé dans l’Océan Pacifique à 1.600 km à l’est du Japon. Une nouvelle étude montre que le détenteur du record précédent doit être disqualifié pour des raisons techniques.
Une analyse détaillée du champ magnétique du massif du Tamu révèle que ce dernier n’est pas un volcan bouclier comme on le pensait auparavant ; il fait en réalité partie d’une dorsale médio-océanique, autrement dit: une structure géologique beaucoup plus grande, formée par le déplacement des plaques océaniques. Les résultats de l’analyse ont été publiés dans la revue Nature Geoscience.
Cela signifie que massif du Tamu a perdu son titre. Lors de sa découverte en 2013, les scientifiques ont expliqué avec beaucoup d’enthousiasme qu’il couvrait une superficie d’environ la taille du Nouveau-Mexique, soit environ 310 000 kilomètres carrés. Le Tamu est sans aucun doute un très grand système volcanique, mais pas un volcan qui s’est formé au cours d’une longue mais unique éruption comme le Mauna Loa.
Dans la dernière étude, les scientifiques ont découvert des anomalies magnétiques dans les profondeurs du volcan laissant supposer que le champ magnétique de la Terre s’est inversé au moins une fois au cours de la formation du Tamu. Comme ces inversions se produisent sur des milliers ou des millions d’années, on peut en déduire que le massif du Tamu ne s’est pas formé à partir d’une seule et unique éruption, de sorte qu’il ne répond pas aux critères d’un vrai volcan bouclier.
Cette découverte permet également d’expliquer comment le massif du Tamu s’est formé au point de rencontre de trois dorsales médio-océaniques en expansion et correspond aux anomalies magnétiques en bordure des plaques. Les chercheurs ont analysé quelque 4,6 millions de mesures de champ magnétique effectuées par divers navires au cours des 54 dernières années. Ces données ont été comparées à d’autres mesures de champ magnétique liées aux positions GPS prises par le navire de recherche Falkor pour établir une carte magnétique.
Outre le déclassement du massif du Tamu, les résultats des recherches ont d’autres implications importantes en ce qui concerne la formation des plateaux océaniques. On pensait que des plateaux de cette taille ne pourraient pas être formés par l’expansion des fonds marins où l’activité volcanique crée une croûte océanique à partir d’une éruption centrale. Le massif du Tamu offre des preuves du contraire et laisse supposer que la formation des plateaux océaniques ne ressemble pas aux épanchements basaltiques continentaux – résultats d’éruptions volcaniques sur terre – comme on le pensait auparavant.
Source: Nature Geocience et presse scientifique.

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In 2013, scientists had declared that Mauna Loa on the island of Hawaii was no longer the largest shield volcano in the world. It was overtaken by the Tamu Massif, a submarine volcano covering 310,000 km2 (about 650 km long, 450 km wide) located in the Pacific Ocean 1,600 km east of Japan.  New research suggests the previous record holder should be disqualified on a technicality.

Detailed analysis of the magnetic field over the submerged Tamu Massif suggests it is not a shield volcano as was previously thought, but rather part of a mid-ocean ridge: a much bigger geological structure, formed as oceanic plates shift. The results of the analysis have been published in Nature Geoscience.

This means Tamu Massif loses its title. When it was discovered in 2013, scientists explained with a lot of enthusiasm that it covered an area roughly the size of New Mexico, or around 310,000 square kilometres. Tamu is really a large volcanic system, but not a single volcano like Mauna Loa.

In the new research, scientists found magnetic anomalies deep in the volcano, suggesting Earth’s magnetic field flipped at least once during its formation. As these flips happen over thousands or millions of years, the implication is that Tamu Massif was not formed from a single eruption, so that it is not a regular shield volcano.

This also helps explain how Tamu Massif formed at the meeting point of three spreading mid-ocean ridges, and matches up with the magnetic anomalies at the plate boundaries. The researchers analysed some 4.6 million magnetic field readings taken by various ships over the past 54 years. That data was linked to more magnetic readings linked to GPS locations taken by the research vessel Falkor to build up a magnetic map.

Besides reclassifying Tamu Massif, the research has other important implications in regards to how oceanic plateaus are formed. It was understood that plateaus of this size could not be produced by seafloor spreading, where volcanic activity creates oceanic crust by pushing it out from a central eruption. Tamu Massif offers up evidence to the contrary, and hints that oceanic plateau formations are not as similar to continental flood basalts – the results of volcanic eruptions on land – as previously thought.

Source: Nature Geocience and the scientific press.

Localisation du Tamu Source: Nature Geoscience

Image 3D du Tamu (Source: NOAA)

La Mauna Loa, un superbe volcan bouclier

Vue de la caldeira sommitale du Mauna Loa

(Photos: C. Grandpey)

Le Tamu, un géant au fond de l’océan // Tamu Massif, a giant at the bottom of the ocean

drapeau francaisDans une note rédigée le 8 septembre 2013, j’indiquais que, selon une étude effectuée par des scientifiques de plusieurs universités américaines, le plus grand volcan du monde – le Massif Tamu – se trouvait sous l’Océan Pacifique.  Les chercheurs faisaient alors remarquer qu’il était beaucoup plus grand que le Mauna Loa à Hawaii et n’était que de 25% inférieur à Olympus Mons sur Mars, le plus grand volcan du système solaire. Le Tamu présentait une envergure de 650 kilomètres et une hauteur d’environ 4 km. Il est entré en éruption pendant quelques millions d’années pendant les premières années du Crétacé, il y a environ 144 millions d’années et il est resté inactif depuis cette époque.
Dans une autre note rédigée le 15 novembre 2015, j’indiquais qu’une équipe scientifique du Schmidt Ocean Institute venait de terminer la cartographie du Tamu. A bord du navire de recherches Falkor, les chercheurs ont réussi à réaliser une carte couvrant 98% de la zone tout en rassemblant 2 millions de mesures magnétiques qui devraient permettre d’en savoir plus sur la formation du volcan.

Une nouvelle étude menée par des chercheurs chinois et américains, publiée dans la revue Earth and Planetary Science Letters, nous apprend que le massif du Tamu est encore plus imposant que l’on pensait. Rappelons que le Tamu est un volcan bouclier sous-marin qui s’est formé il y a environ 145 millions d’années. Son sommet se trouve à 2 kilomètres en dessous du niveau de la mer entre le Japon et Hawaii dans l’Océan Pacifique.

Des fossiles de créatures marines collectés au niveau du dôme laissent supposer que son sommet a pu se trouver au-dessus de la surface de l’océan à une certaine époque. Si c’est le cas, les dinosaures auraient assisté à son éruption spectaculaire. Au 21ème siècle les scientifiques sont persuadés que le Tamu n’entrera plus jamais en éruption. En effet, le Moho, la limite entre la croûte terrestre et le manteau, descend à plus de 30 km  en dessous de la base du volcan, ce qui crée une barrière quasiment infranchissable entre le magma et le fond de l’océan.
Après avoir analysé les données sismiques et cartographié la structure du volcan, les scientifiques ont constaté qu’ils avaient sous-estimé sa taille réelle. Ils estiment que la superficie totale du Shatsky Rise, un plateau océanique qui s’est formé après l’éruption du Tamu, atteint 533 000 kilomètres carrés. Auparavant, on pensait que le volcan avait à peu près la même taille que le Japon en termes de masse terrestre. Compte tenu de la nouvelle estimation, il serait maintenant égal au Japon et à la Corée du Sud réunis. On pensait également que le Tamu était beaucoup plus petit qu’Olympus Mons sur Mars, considéré comme le plus grand volcan de notre système solaire. Le Tamu a une hauteur de 4 km, contre 22 km pour Olympus Mons. La nouvelle étude révèle que la superficie de l’ensemble du massif du Tamu serait 80 pour cent plus grande que celle de son homologue martien.
En comparaison, le plus grand volcan actif sur Terre aujourd’hui est le Mauna Loa à Hawaii, avec une base d’environ 5000 kilomètres carrés. C’est un centième de la taille du Tamu !
Source: South China Morning Post.

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drapeau anglaisIn a note written on September 8th 2013, I indicated that according to research by scientists from several U.S. universities, the world’s largest volcano lay beneath the Pacific Ocean. Called the Tamu Massif, it is much bigger than Hawaii’s Mauna Loa and is only 25 percent smaller than Olympus Mons on Mars which is the biggest volcano in Earth’s solar system.
Tamu is 650 kilometres wide and about 4 km tall. It erupted for a few million years during the early Cretaceous period, about 144 million years ago, and has been extinct since then.
In another note written on November 15th 2015, I indicated that a scientific team with the Schmidt Ocean Institute had just finished mapping the Tamu volcano. The researchers aboard the Falkor research vessel were able to map about 98% of the area – filling in gaps of information about the geography of the volcano while collecting almost 2 million magnetic measurements which help to better understand how the volcano was formed

A new study by researchers from China and the United States, published in the journal Earth and Planetary Science Letters, tells us that the Tamu Massif is larger than was previously thought.

Let’s bear in mind that Tamu Massif is an extinct submarine shield volcano formed about 145 million years ago. It is located 2 kilometres below sea level between Japan and Hawaii in the Pacific Ocean.

Fossils of marine creatures found in the underwater dome suggest its peak may, at the time, have been above the surface of the water. As such, dinosaurs could have witnessed its spectacular eruption. 21st century scientists believe there is no chance of the volcano coming back to life. Indeed, the Mohorovic Discontinuity (Moho), the boundary between the Earth’s crust and mantle, descended over 30km below the base of Tamu Massif. This would create an almost impenetrable barrier between deposits of magma and the ocean floor.

After analysing more seismic data and mapping the volcano’s underlying structure, the scientific team found they may have underestimated the volcano’s actual size. They put the total area of the Shatsky Rise, an elevated oceanic plateau created after the Tamu Massif erupted, at 533,000 square kilometres. Previously, the volcano was considered to be roughly the same size as Japan in terms of its land mass. Given the new estimate, it would now be equal to Japan and South Korea combined. It was also considered much smaller overall than Olympus Mons on Mars, considered as the largest volcano discovered in our solar system. Tamu Massif reaches a height of 4km while Olympus Mons is 22km. The new study claims that the surface area of Tamu Massif should now be 80 per cent larger than its Martian relative.

The largest active volcano today is Mauna Loa in Hawaii, which has a base measuring about 5,000 square kilometres. It is only one hundredth the size of Tamu Massif

Source: South China Morning Post.

Tamu 2

Dernière carte du massif du Tamu (Source: NOAA)