Et si on parlait des normales saisonnières?

La France vient de traverser une période estivale particulièrement chaude, avec la « vigilance » rouge décrétée pour plusieurs régions de la moitié sud. Les températures se sont envolées, dépassant souvent les 40°C. Dans ce contexte, il est étonnant de constater que les émissaires de Météo-France sur France Info rechignent à indiquer la différence de température par rapport aux normes de saison, alors que ces personnes précisent volontiers le nombre de degrés en dessous de ces normes lorsque le temps se rafraîchit. C’est ce qui s’est passé avant-hier avec la baisse des températures, une fois les différentes vigilances ‘canicule’ levées. Comme par hasard, on a appris que plusieurs températures étaient en dessous des normales saisonnières. De la même façon, l’agence – ou les médias? – n’a pas beaucoup insisté sur l’altitude (5100 mètres) atteinte au-dessus du Mont Blanc par l’isotherme 0°C, avec des conséquences désastreuses pour les glaciers et le permafrost de roche. Pourquoi ce silence.? Pour ne pas affoler la population? Ce sera bien pire quand la vérité éclatera au grand jour.

Avec l’accélération actuelle du réchauffement climatique et la présence du « beau soleil » – comme s’il existait un soleil laid – les températures ne cessent de battre des records. Afin de tenir compte de ces novelles conditions, Météo-France a actualisé à la hausse ses « normales » saisonnières le 28 juin 2022. Après cette date, l’agence a eu recours à des « normales » actualisées en prenant comme période de référence les décennies 1991-2020. La période précédente était 1981-2010.

Tous les dix ans, Météo-France met à jour la période de référence pour ses « normales climatiques » (aussi appelées « saisonnières ») pour s’aligner sur les recommandations de l’Organisation météorologique mondiale (OMM). Le changement de référence met en lumière quelques évolutions par rapport à la période 1981-2010.

Sur la période 1991-2020, la nouvelle normale de température moyenne annuelle en France est de 12,97°C, en hausse d’un peu plus de 0,4°C par rapport à 1981-2010 (12,55°C).

Les changements de normales climatiques ne remettent pas en cause les seuils de « vigilance canicule » qui, explique Météo-France, « sont calculés par rapport à des indices bio-météorologiques », en collaboration avec Santé publique France et d’autres agences.

Selon Météo-France, les nouvelles « normales » sont loin de décrire notre climat normal d’il y a encore quelques décennies. Le réchauffement climatique, avec la hausse des températures associée, s’est considérablement accéléré ces dernières décennies. Ainsi, 2020 a été l’année la plus chaude jamais mesurée en France, marquée par des épisodes méditerranéens historiques. En 2019, les vagues de chaleur exceptionnelles ont provoqué des températures inédites de 46 °C dans le sud de la France..Des travaux de recherche sont en cours pour proposer des estimations de normales climatiques non-stationnaires, dans le but de disposer des références non-biaisées pour le climat présent.

Depuis 1900, la température moyenne en France s’est réchauffée de 1,7 °C. Chaque décennie depuis 1970 est plus chaude que la précédente. Ces dix dernières années, durant la période 2011-2020, la hausse atteint +0,6 °C et marque la plus forte progression observée entre deux décennies en France depuis 1900.

Il est bien évident que les températures enregistrées en juin ou en août 2025 crèvent les plafonds. Avec 40°C on se trouve bien au-dessus de la moyenne saisonnière. Météo France indique que sur l’Hexagone, la température moyenne « normale » de la saison estivale est de 20,4 °C. Il s’agit de la moyenne saisonnière de référence 1991-2020 de l’indicateur de température moyenne. Il est facile de calculer la différence avec les températures enregistrées ces derniers jours !

Source: Météo France.

Une chose est certaine: il ne faudra pas s’empresser d’oublier les vagues de chaleur de l’année 2025 et se dire qu’elles étaient accidentelles ou exceptionnelles. Ce serait une grave erreur car elles vont se répéter avec l’accélération actuelle du réchauffement climatique. Elles ont montré les lacunes de la France pour affronter de telles conditions extrêmes. Par exemple, beaucoup de bâtiments ou immeubles d’habitation n’ont pas l’isolation adéquate et, comme je l’ai expliqué récemment, il n’est pas certain que les climatiseurs soient la solution la plus respectueuse de l’environnement. On se lamente devant le manque d’eau, en particulier dans les zones rurales. On suggère, on promet, mais on ne fait rien, souvent à cause des obstacles mis par les écologistes. Les réserves collinaires sont à mes yeux une bonne chose, à la condition expresse qu’elles ne prennent pas leur eau dans la nappe phréatique et se contentent de celle tombée du ciel.

Le manque d’ambition de la politique énergétique en France est dangereux car le mot ‘canicule’ va vite faire partie de notre vocabulaire de la vie quotidienne.

51,1°C : température enregistrée sur ma terrasse le 18 juillet 2022. Le 11 août 2025 arrive en 2ème position avec 51°C. 

Réchauffement climatique : sale temps pour le crabe des neiges en Alaska // Global warming : hard times for snow crabs in Alaska

Voici une autre victime du réchauffement climatique : le crabe des neiges – snow crab – qui joue un rôle important dans l’économie de l’Alaska. Ce crabe est en fait une grosse araignée de mer rencontrée dans les mers froides, en particulier dans le Pacifique nord, de l’Alaska aux îles Kouriles et au Kamtchatka, ainsi que dans l’Atlantique nord-ouest.

En 2022, il y a une telle hécatombe de crabes des neiges que l’État a pris une décision encore jamais vue : l’interdiction de leur pêche cette saison pour sauver l’espèce.
Selon une étude du plancher océanique en mer de Béring en 2022, réalisée par la NOAA, le nombre total de ces crustacés n’atteint plus que 1,9 milliard, contre 11,7 milliards en 2018, soit une baisse d’environ 84 %.
Pour la toute première fois, le Département de la pêche et de la chasse de l’Alaska a annoncé que la saison du crabe des neiges en Mer de Béring resterait fermée en 2022-2023. Le Département a ajouté dans un communiqué que les efforts doivent se tourner vers « la conservation et la reconstruction » compte tenu de l’état de la population de crabes. On trouve également le crabe des neiges dans les mers de Chukchi et de Beaufort plus au nord, mais il n’y atteint pas des tailles exploitables.
Selon un biologiste marin de l’Alaska Fisheries Science Center, les très mauvais chiffres observés aujourd’hui sont le résultat des vagues de chaleur de 2018 et 2019. L’habitat d’eau froide dont les crabes ont besoin a pratiquement disparu, ce qui confirme que la température est vraiment le principal responsable de la situation actuelle. Selon la NOAA, l’Alaska est l’État qui se réchauffe le plus rapidement aux Etats Unis et il perd des milliards de tonnes de glace chaque année. Cette glace est essentielle car les crabes ont besoin d’eau froide pour survivre. Leur disparition est un indicateur des perturbations subies par l’environnement avec le réchauffement climatique.
Plusieurs hypothèses existent pour expliquer pourquoi la température plus chaude de l’océan a appauvri l’espèce. Des études ont révélé une prévalence plus élevée de la Bitter Crab Disease, une maladie dont est victime l’espèce à mesure que la température se réchauffe.
Les crustacés qui, comme leur nom l’indique, se plaisent en eau froide, sont également soumis à un stress métabolique plus important dans les eaux plus chaudes, et ils ont donc besoin de plus d’énergie pour rester en vie. Ils sont peut-être morts de faim parce qu’ils ne pouvaient pas faire face aux demandes métaboliques.
Les jeunes crabes des neiges en particulier ont besoin de basses températures pour se mettre à l’abri de leur principal prédateur, la morue du Pacifique. La température de l’eau dans les régions où résident généralement les juvéniles est passée de 1,5 ° C en 2017 à 3,5 ° C en 2018. Des études ont indiqué que 3 ° C pourrait être une température clé pour l’espèce.
L’annulation de la pêche au crabe des neiges annonce une période de difficultés sans précédent pour ce secteur de la pêche en Alaska et pour les communautés qui en dépendent. Les familles de pêcheurs de crabes de deuxième et troisième génération vont se retrouver sans travail et donc sans revenus. L’industrie a également été touchée par l’annulation de la pêche au crabe royal rouge en Baie de Bristol pour la deuxième année consécutive. En conséquence, tout le secteur qui dépend de la population de crabes des neiges demande des aides financières comme il en existe pour les agriculteurs en période de mauvaises récoltes ou pour les populations touchées par des ouragans ou des inondations.
Source : CBS News, Yahoo News.

——————————————

Here is another victim of global warming: the snow crab which plays an important part in Alaska’s economy. In 2022, there is such a mass die-off of snow crabs that the State has taken the unprecedented step of cancelling their harvest this season to save the species.

According to an annual survey of the Bering Sea floor carried out by NOAA, estimates for the crustaceans’ total numbers fell to about 1.9 billion in 2022, down from 11.7 billion in 2018, or a reduction of about 84 percent.

For the first time ever, the Alaska Department of Fish and Game announced the Bering Sea snow crab season will remain closed for 2022-23, saying in a statement efforts must turn to « conservation and rebuilding given the condition of the stock. » The species is also found in the more northward Chukchi and Beaufort Seas, but they do not grow to fishable sizes there.

According to a marine biologist with the Alaska Fisheries Science Center, the shocking numbers seen today are the result of heatwaves in 2018 and 2019. The cold water habitat that the crabs need was virtually absent, which suggests that temperature is really the key culprit in this population decline. According to NOAA, Alaska is the fastest warming State in the country, and is losing billions of tons of ice each year. This is critical for crabs that need cold water to survive.

Historically an abundant resource in the Bering Sea, their loss is considered a bellwether of ecological disruption.

There are several hypotheses to explain why warmer temperatures have depleted the species.

Studies have pointed toward a higher prevalence of Bitter Crab Disease as the temperature heats up.

The crustaceans, named for their love of cold water, are also under greater metabolic stress in warmer waters, meaning they need more energy to stay alive. They may have starved because they couldn’t keep up with metabolic demands.

Young snow crabs in particular need low temperatures to hide out from their major predator, Pacific cod, and temperatures in regions where juveniles typically reside jumped from 1.5°C in 2017 to 3.5°C in 2018, with studies indicating 3°C might be an important threshold.

The cancellation of snow crab fishing heralds unprecedented and troubling times for Alaska’s iconic crab fisheries and for the hard-working fishermen and communities that depend on them. Second and third generation crab-fishing families will go out of business. The industry was also hit by the cancellation of Bristol Bay red king crab fishing for the second year in a row. As a consequence, fisheries that rely heavily on the snow crab population are asking for a relief program for fisherman, similar to programs for farmers who experience crop failure, or communities affected by hurricanes or flooding.

Source: CBS News, Yahoo News.

Crédit photo : Wikipedia

Mer de Béring où le crabe des neiges prolifère habituellement.