En ce moment la forte sismicité et la déformation du sol bien visibles à Grindavik inquiètent les autorités islandaises. Grâce aux instruments terrestres et aux données satellitaires dont ils disposent, les scientifiques ont détecté une importante intrusion magmatique dans le sous-sol du sud-ouest de l’Islande. Ce dyke couvre une longueur d’une quinzaine de kilomètres et le magma se rapproche par endroit dangereusement de la surface, flirtant avec elle à moins de 1 kilomètre de profondeur. Ce sont des constations précieuses, mais les volcanologues islandais sont incapables de dire comment se comportera l’intrusion magmatique dans les prochains jours. Se soldera-t-elle par une éruption ? La bourgade de Grindavik et la centrale électrique de Svartsengi seront-elles menacées ? Y aura-t-il une éruption sous-marine au large de la péninsule de Reykjanes ? Le magma se solidifiera-t-il sous terre sans émerger à la surface ? Ce sont autant de questions auxquelles personne ne peut répondre. A Hawaii, on dirait que seule Madame Pélé connaît la suite des événements.
En constatant la longueur de l’intrusion magmatique, il me vient à l’esprit l’éruption du Laki, dans le sud-est de l’Islande, en 1783 . Il ne faudrait pas que le magma adopte un tel comportement en 2023 car les conséquences prendraient une autre ampleur que la situation actuelle
Le 8 juin 1783, une fissure de 27 kilomètres de long déchire le paysage islandais. C’est le point de départ d’une éruption qui durera jusqu’au 7 février 1784. Elle a produit 14,7 kilomètres cubes de lave qui ont recouvert une superficie de 599 kilomètres carrés. La fissure est ponctuée de quelque 140 cratères, évents et cônes orientés dans une direction SO-NE, celle du rift qui tranche l’Islande dans son ensemble.
Cette lave a menacé de nombreux Islandais, leurs animaux et leurs biens. L’éruption a produit de grandes quantités de gaz et de cendres. Ces dernières, très riches en fluor, ont empoisonné les champs, les prairies et les étangs. 50 % des bovins, 79 % des ovins et 76 % des chevaux ont péri entre 1783 et 1785.
L’éruption a également profondément affecté la vie de la population, avec la famine de la brume, ou Móðuharðindin. Le régime alimentaire islandais de l’époque était principalement basé sur la viande et le poisson, de sorte que les retombées de cette éruption ont été catastrophiques. En 1785, environ 20 % de la population islandaise était morte de faim, de malnutrition ou de maladie.
Cette éruption est remarquable par ses impacts bien au-delà de l’Islande. Les gaz – surtout le dioxyde de soufre (SO2) – ont été transportés en Europe par le jet-stream et le SO2 est apparu sous la forme d’un brouillard sec à odeur de soufre. Les populations en Europe ignoraient qu’une éruption volcanique s’était produite en Islande au même moment et que c’était cet événement qui causait ce brouillard sec inhabituel. Une autre caractéristique de l’été 1783 a été la coloration rouge sang du ciel au coucher et au lever du soleil.
Par sa durée, le brouillard sec a pu avoir des effets négatifs sur la végétation et la santé humaine en Europe continentale. Plusieurs plantes se sont fanées, les feuilles ont changé de couleur et certains arbres ont perdu leurs feuilles. Le brouillard sec a frappé plus durement les personnes souffrant de problèmes respiratoires ou cardiaques préexistants. Dans plusieurs régions, les gens se sont plaints de douleurs aux yeux.
En parcourant les registres paroissiaux, les chercheurs ont établi un lien entre la concentration de S02 et de SO4 dans l’air et le pic de mortalité observé entre août et septembre 1783 puis janvier-Février 1784. Quant à dire que l’éruption du Laki, par ses conséquences sur l’agriculture et les famines qu’elle a générées, est l’une des causes de la Révolution Française de 1789, c’est une autre histoire…

Photo: C. Grandpey
D’après le périodique « Sciences & Vie », il est reconnu que la mortalité européenne a crû de 10% les années 1784 et 1785 (de mémoire).
L’éruption du Laki était bien l’hypothèse de cause la plus convaincante et probable.
Pour l’autre Histoire, il faut se remémorer les diverses rébellions populaires en France de 1785 à 1789, accusant Louis XVI de protéger les spéculateurs du blé et par conséquence, l’accès difficile au pain.
La famine reste une cause première des soulèvements populaires violents.
J’aimeJ’aime
Bonjour,
Merci pour ce complément d’information. Il faut croiser le doigts pour qu’une éruption de type Laki ne vienne pas s’ajouter aux problèmes que nous connaissons actuellement.
Cordialement,
Claude Grandpey
J’aimeJ’aime
C’est bien pour cette raison que je me suis permis de vous répondre.
La faculté d’oubli des masses populaires (provoquée ou non) a souvent été la causé de leurs malheurs.
Comme vous, je croise les doigts et orteils à défaut de pouvoir mieux.
Bonne journée.
Cordialement.
J’aimeJ’aime