Disparition du dernier glacier du Venezuela // Venezuela’s last glacier has disappeared

Sous les coups de boutoir du réchauffement climatique, les glaciers fondent dans le monde et le Venezuela n’échappe pas à la tendance. Le pays vient de perdre son dernier glacier. Il a tellement rétréci que les scientifiques l’ont reclassé en simple ‘champ de glace’. Il semble que le Venezuela soit le premier pays à avoir perdu tous ses glaciers dans les temps modernes.

Le pays hébergeait six glaciers dans la Sierra Nevada de Merida, située à environ 5 000 mètres d’altitude. Cinq de ces glaciers avaient disparu en 2011, avec seul survivant le glacier Humboldt, également connu sous le nom de La Corona, à proximité du Pico Humboldt.

Les scientifiques pensaient que le glacier Humboldt allait subsister au moins une dizaine d’années, mais ils n’avaient pas pu le surveiller pendant plusieurs années en raison de l’agitation politique dans le pays.

Une récente visite du site en décembre 2023 a révélé que le glacier a fondu beaucoup plus rapidement que prévu et ne présente plus qu’une superficie de moins de 2 hectares. En conséquence, il a été déclassé et est passé de ‘glacier’ à ‘champ de glace’.

Les scientifiques expliquent que d’autres pays ont perdu leurs glaciers il y a plusieurs décennies, après la fin du Petit Âge de glace, mais que le Venezuela est sans doute le premier pays à en perdre un dans les temps modernes. L’Indonésie, le Mexique et la Slovénie sont les prochains sur la liste. L’île indonésienne de Papouasie et le Mexique ont connu des températures record ces derniers mois, ce qui devrait accélérer le recul des glaciers.

Il se peut que la disparition des glaciers tropicaux ait été accélérée par le phénomène climatique El Niño. Dans la zone andine du Venezuela, on a enregistré des anomalies mensuelles de 3 à 4 degrés Celsius au-dessus de la moyenne 1991-2020, ce qui est exceptionnel sous ces latitudes tropicales. Les scientifiques préviennent que le Venezuela est le reflet ce qui va se produire du nord au sud de l’Amérique du Sud, d’abord en Colombie et en Équateur, puis au Pérou et en Bolivie, à mesure que les glaciers continuent de fondre dans les Andes.

La disparition du glacier de La Corona est beaucoup plus que la perte de la glace proprement dite ; elle marque également la perte des nombreux écosystèmes présents grâce aux glaciers, depuis les habitats microbiens jusqu’aux environnements à valeur culturelle. Il convient de noter que les glaciers vénézuéliens jouent un rôle limité dans l’approvisionnement en eau de la région, contrairement à des pays comme le Pérou, où les glaciers tropicaux sont beaucoup plus étendus. J’ai attiré l’attention dans plusieurs notes sur le risque que fait peser la fonte des glaciers péruviens sur la population.

Source : médias d’information internationaux.

Vue de la Sierra Nevada de Merida (Crédit photo : Wikipedia)

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Due to global warming, and following a global tendency around the world, Venezuela has lost its last remaining glacier. It has shrunk so much that scientists have reclassified it as an ice field. It is thought Venezuela is the first country to have lost all its glaciers in modern times.

The country had been home to six glaciers in the Sierra Nevada de Mérida which lies at about 5,000 meters above sea level. Five of the glaciers had disappeared by 2011, leaving just the Humboldt glacier, also known as La Corona, which is located close to Pico Humboldt.

Scientists thought the Humboldt glacier was likely to last at least another decade, but they had been unable to monitor the site for a few years due to political turmoil in the country. A recent visit to the site in December 2023 found the glacier had melted much faster than expected, and had shrunk to an area of less than 2 hectares. As a result, its classification was downgraded from glacier to ice field.

Scientists explain that other countries lost their glaciers several decades ago after the end of the little ice age but Venezuela is arguably the first one to lose them in modern times. Indonesia, Mexico and Slovenia are next in line to become glacier-free, with Indonesia’s Papua island and Mexico having experienced record-high temperatures in recent months, which is expected to accelerate the glaciers’ retreat.

The demise of tropical glaciers may have been accelerated by the El Niño climate phenomenon. In the Andean area of Venezuela, there have been some months with monthly anomalies of 3 – 4 degrees celsius above the 1991-2020 average, which is exceptional at those tropical latitudes.

Scientists warn that Venezuela is a mirror of what will continue to happen from north to south, first in Colombia and Ecuador, then in Peru and Bolivia, as glaciers continue to retreat from the Andes.

The loss of La Corona marks the loss of much more than the ice itself, it also marks the loss of the many ecosystem services that glaciers provide, from unique microbial habitats to environments of significant cultural value.

It should be noted that Venezuelan glaciers have a limited role in water provision for the region, in contrast with countries such as Peru, where tropical glaciers are much more extensive.

Source : international news media.

L’agonie du glacier de Humboldt (Venezuela) // The slow death of Humboldt Glacier (Venezuela)

Au cours de ma conférence « Glaciers en péril », j’explique qu’aucune région du monde n’est épargnée par le réchauffement climatique, pas plus les Alpes que la chaîne himalayenne ou la Cordillère des Andes. Dans l’ouest du Venezuela, les glaciers de la Sierra Nevada de Merida fondent à vue d’œil. L’un d’eux, le Glacier du Pic Humboldt (4.940 mètres) est même en train de vivre ses dernières années. Selon des données compilées par des scientifiques vénézuéliens, il a perdu plus de 99% de sa surface depuis 1910.

Le glacier attire aujourd’hui de nombreux botanistes qui peuvent observer comment la vie apparaît progressivement sur la roche mise à nu par la fonte de la glace. Ils ont découvert des mousses et lichens nouveaux pour le Venezuela, ainsi que des espèces qui n’avaient pas été répertoriées à cette altitude. Ainsi, on rencontre aujourd’hui des colibris, notamment une espèce qui pollinise les plantes à cette altitude.

Le glacier de Humboldt doit son nom au naturaliste allemand Alexander von Humboldt (1769-1859). C’est le dernier des cinq principaux glaciers tropicaux du pays. S’il disparaissait, le Venezuela pourrait être le premier pays du monde à voir s’effacer tous ses glaciers. D’autres pays, comme la Tanzanie et la Chine, font face à la même situation.

Un scientifique vénézuélien explique qu’en 1910, le glacier de Humboldt couvrait l’équivalent de 300 terrains de football. D’après les estimations datant de 2011, il couvrait une superficie de 0,10 km², soit 0,05 km² de moins qu’en 2009 lorsqu’il avait été mesuré pour la première fois. En l’espace de ces trois ans, de nombreuses fissures sont se formées à travers le glacier et de l’eau de fonte coulait à sa base. Aujourd’hui, il présente une superficie de 4,5 hectares, selon des mesures effectuées en 2019.

Contrairement au Groenland et à l’Antarctique, les glaciers qui ne sont pas des inlandsis, comme ceux dans les montagnes, représentent environ 1 % des glaciers du monde entier. La contribution de ces glaciers à l’élévation du niveau de la mer n’est donc pas très importante. Toutefois, comme la plupart d’entre eux se trouvent dans des régions où la température dépasse fréquemment les 0°C, ils sont plus sensibles aux fluctuations thermiques. Les Andes abritent plus de 95 % des glaciers tropicaux au monde.

Comme je l’indique dans ma conférence, dans certains pays comme le Pérou et la Colombie, les glaciers constituent une source essentielle d’approvisionnement en eau, que ce soit pour être bue, pour produire de l’électricité et pour l’irrigation. La perte de cette ressource aura de graves répercussions sur ces pays,  avec un fort risque de désertification et de mouvement des populations vers des villes comme Lima, la capitale du Pérou.

S’agissant du glacier de Humboldt, il aurait probablement déjà disparu depuis des années s’il n’était pas niché sur le côté le plus ombragé de la montagne. Comme le glacier est déjà tout petit, son impact sur les ressources locales en eau sera sans doute négligeable.

Aujourd’hui, l’accès du glacier est devenu dangereux. Seuls des alpinistes confirmés peuvent l’apercevoir. En plus de cela, le glacier de Humboldt n’est pas le plus fascinant. Les randonneurs préfèrent les champs de glace de la Patagonie. On pourrait contrôler son évolution par satellite, mais il est aujourd’hui si petit que la résolution proposée par les satellites Landsat n’est pas suffisante pour obtenir des informations.

Source : Orange, National Geographic.

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During my conference « Glaciers at Risk », I explain that no region of the world is spared by global warming, whether it is the Alps ot the Himalayas or the Ande. In western Venezuela, the glaciers of the Sierra Nevada de Merida are rapidly melting. One of them, the Humboldt Peak Glacier (4,940 metres) is in its final years. According to data compiled by Venezuelan scientists, it has lost more than 99% of its surface since 1910.

Today the glacier attracts many botanists who can observe how life gradually appears on the rock exposed by the melting ice. They discovered mosses and lichens new to Venezuela, as well as species that had not been recorded at this altitude. Thus, today they meet hummingbirds, especially a species that pollinates plants at this altitude.

The Humboldt glacier owes its name to the German naturalist Alexander von Humboldt (1769-1859). It is the last of the five main tropical glaciers in the country. If it were to disappear, Venezuela could be the first country in the world to see all of its glaciers disappear. Other countries, such as Tanzania and China, face the same situation. A Venezuelan scientist explains that in 1910, the Humboldt Glacier covered the equivalent of 300 football fields. It was estimated from 2011 to cover an area of ​​0.10 km², which is 0.05 km² less than in 2009 when it was first measured. Over the course of these three years, many cracks formed across the glacier and meltwater flowed to its base. Today, it has an area of ​​4.5 hectares, according to measurements taken in 2019.

Unlike Greenland and Antarctica, glaciers that are not ice sheets, like those in the mountains, make up about 1% of the world’s glaciers. The contribution of these glaciers to sea level rise is therefore not significant. However, since most of them are in areas where the temperature frequently exceeds 0°C, they are more sensitive to temperature changes. The Andes are home to over 95% of the world’s tropical glaciers. As I explain in my conference, in some countries like Peru and Colombia, glaciers are an essential source of water supply, whether for drinking, for generating electricity and for irrigation. The loss of this resource will have serious repercussions on these countries, with a high risk of desertification and the movement of populations to cities like Lima, the capital of Peru.

As for the Humboldt Glacier, it probably would have been gone for years if it hadn’t been protected by the shadier side of the mountain. As the glacier is already very small, its impact on local water resources will probably be negligible.

Today, access to the glacier has become dangerous. Only experienced climbers can see it. On top of that, the Humboldt Glacier is not the most fascinating. Hikers prefer the ice fields of Patagonia. Its evolution could be monitored by satellite, but it is now so small that the resolution proposed by Landsat satellites is not sufficient to obtain information.

Source: Orange, National Geographic.

L’une des rares images du glacier de Humboldt acquises en janvier 2015 par l’ Operational Land Imager (OLI) du satellite Landsat 8 (Source : NASA)