Nouvelles hypothèses sur la surface de Vénus // New hypotheses on the surface of Venus

Dans une note rédigée le 29 novembre 2022, j’expliquais que, selon une étude publiée dans le Planetary Science Journal au début de l’année 2022, le volcanisme à grande échelle qui a recouvert de lave 80% de la surface de Vénus a probablement été le facteur décisif qui a fait passer la planète d’un monde humide et doux à une atmosphère sulfurique irrespirable. La température de surface sur Vénus est d’environ 464 degrés Celsius, et il y a une pression de 90 atmosphères sous les nuages de dioxyde de carbone où se mêle l’acide sulfurique.

Une autre étude, également publiée en novembre 2022, confirme qu’il y a encore beaucoup de choses que nous ne savons pas sur Vénus. Les températures élevées et la pression atmosphérique empêchent les sondes de s’approcher de la planète. De plus, l’épaisseur de atmosphère ne permet guère de l’observer depuis l’orbite. Afin de pallier ces difficultés, des chercheurs ont récemment analysé les données fournies par la mission Magellan de la NASA il y a plusieurs décennies afin d’obtenir plus d’informations sur les étranges processus géologiques qui font se renouveler la surface de la planète.
Les chercheurs se sont toujours demandé comment Vénus libère sa chaleur, car, contrairement à la Terre, la planète n’a pas de plaques tectoniques. En examinant les données de la mission Magellan, les scientifiques ont découvert que la lithosphère – la couche externe de la surface de Vénus – était probablement beaucoup plus mince qu’on ne le pensait auparavant et pourrait ainsi laisser échapper la chaleur émise par le noyau interne de la planète. Ce sont ces zones de moindre épaisseur de la lithosphère vénusienne qui permettraient à des quantités importantes de chaleur de s’échapper, de la même façon que dans les zones où de nouvelles plaques tectoniques se forment sur le plancher océanique sur Terre.
Les chercheurs ont examiné des images de formations géologiques rondes ou coronae détectées par la mission Magellan à la surface de la planète. En exogéologie, une corona est une formation circulaire à ovoïde, marquée extérieurement par de nombreuses failles. En examinant la hauteur de ces failles, les scientifiques ont pu avoir une idée de l’épaisseur de la lithosphère dans ces régions. Ils ont découvert qu’elle était de seulement 11 kilomètres.
Ces observations pourraient permettre d’expliquer pourquoi la surface de Vénus semble si jeune. En effet, elle ne présente pas les nombreux anciens cratères d’impact que l’on observe en général sur une planète de son âge. Il y a eu beaucoup d’activité volcanique sur Vénus dans le passé et il se pourrait que cette activité continue aujourd’hui. Une théorie est que toutes les quelques centaines de millions d’années, toute la surface de la planète fond et se reforme lors d’énormes événements de « resurfaçage » qui expliqueraient pourquoi Vénus semble être jeune. La minceur de la lithosphère permettrait à la chaleur de circuler et d’atteindre la surface de la planète.
De telles recherches sur une planète où les humains ne mettront jamais les pieds pourraient sembler inutiles. Malgré tout, Vénus ouvre une fenêtre sur le passé et pourrait nous permettre de mieux comprendre à quoi ressemblait la Terre il y a plus de 2,5 milliards d’années, avant qu’apparaissent les plaques tectoniques.
Sources : Planetary Science Journal, Nature Geoscience.

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In a post published on November 29th, 2022, I explained that, according to a study published in the Planetary Science Journal early in 2022, the massive global volcanism that covered 80% of Venus’ surface in lava may have been the deciding factor that transformed Venus from a wet and mild world into the suffocating, sulfuric planet that it is today. The surface temperature on Venus is about 464 degrees Celsius, and there is a pressure of 90 atmospheres underneath the dense clouds of carbon dioxide laced with sulfuric acid.

Another study, also released in November 2022 confirms that there is a lot we still don’t know about Venus. Its high temperatures and atmospheric pressure make it difficult to send probes onto the planet. Moreover, its thick atmosphere makes it difficult to observe from orbit. In order to compensate for these difficulties, researchers have recently dug through data from a decades-old NASA mission to learn about the strange geological processes which renew the planet’s surface.

One of the open questions about Venus is how it loses its heat, as, unlike Earth, Venus does not have tectonic plates. By looking at data from the Magellan mission, researchers discovered that the lithosphere – the outer layer of Venus’ surface – may be considerably thinner than previously thought and could let heat escape from the planet’s hot core. These regions of thin lithosphere appear to be allowing significant amounts of heat to escape, similar to areas where new tectonic plates form on Earth’s seafloor.

The researchers looked at images of round features – coronae – which Magellan saw on the planet’s surface, and by looking at the depths of ridges around them they could estimate the thickness of the lithosphere in these regions. They found that the lithosphere around these features was as thin as 11 kilometers deep.

This could help to explain why the surface of Venus looks so young. Indeed, it lacks the many old impact craters one expects to see on a planet of its age. There was a lot of volcanic activity in Venus’s past and there could still be volcanic activity today. One theory is that every few hundred million years the entire surface of the planet is melted and reformed in huge events called ‘resurfacings’ that would explain why Venus appears to be young. The thinness of the lithosphere allowing heat to flow through it supports that idea.

Such research about a planet where humans will never set foot on might look pointless. What is interesting is that Venus provides a window into the past to help us better understand how Earth may have looked over 2.5 billion years ago. It is in a state that might have occurred before a planet forms tectonic plates.

Sources : Planetary Science Journal, Nature Geoscience.

Image composite de Vénus réalisée à partir des données fournies par les sondes Magellan et Pioneer Venus Orbiter (Source: NASA)

Reconstitution en trois dimensions du Maat Mons, l’un des principaux volcans sur Vénus avec ses quelque 8 km de hauteur (Source: NASA)

Des volcans actifs sur Vénus ! // Active volcanoes on Venus!

Dans une nouvelle étude publiée dans la revue Nature Geoscience le 20 juillet 2020 des chercheurs ont identifié 37 structures volcaniques récemment actives sur la planète Vénus. L’étude fournit de bonnes preuves démontrant que Vénus est une planète géologiquement active. Cela va à l’encontre de l’idée largement répandue jusqu ‘à présent selon laquelle Vénus serait inactive d’un point de vue géologique car elle ne dispose pas de tectonique des plaques comme c’est le cas sur Terre.
Les recherches ont été menées par des scientifiques de l’Université du Maryland et de l’Institut de géophysique de l’ETH de Zurich en Suisse. Les auteurs de l’étude expliquent que « c’est la première fois [qu’ils] sont capables de désigner des structures spécifiques et de dire : Regardez, il s’agit certes d’un volcanisme ancien mais qui est bien actif aujourd’hui ; il est peut-être en sommeil, mais il n’est pas mort. « 

Les scientifiques savent depuis pas mal de temps que Vénus a une surface plus jeune que d’autres planètes comme Mars et Mercure dont l’intérieur est froid. Les preuves de chaleur interne et d’activité géologique sont visibles à la surface de Vénus sous forme de structures annulaires baptisées coronae qui se créent lorsque des panaches de matière chaude s’élèvent à travers le manteau et la croûte avant de percer la surface, de la même façon que se sont formées les îles volcaniques de l’archipel hawaïen.
Jusqu’à présent, on pensait que les coronae sur Vénus étaient probablement des signes d’activité ancienne et que Vénus s’était suffisamment refroidie pour empêcher la matière chaude issue des profondeurs de percer sa surface. De plus, les processus exacts par lesquels les panaches mantelliques ont formé les coronae sur Vénus ont fait l’objet de débats.
Dans la nouvelle étude, les chercheurs ont utilisé des modèles numériques d’activité thermomécanique sous la surface de Vénus pour créer des simulations 3D haute résolution de la formation des coronae. Leurs simulations fournissent une vue très détaillée de ce processus de formation.
Les résultats des simulations ont permis d’identifier des détails qui ne peuvent être présents que dans les coronae récemment actives. Ils ont pu comparer ces détails à ceux déjà observés à la surface de Vénus par la sonde Magellan de la NASA dans les années 1990. Cette comparaison a révélé qu’une partie de l’évolution des coronae sur la planète représente différentes étapes de leur développement géologique. L’étude fournit la première preuve que les coronae sur Vénus évoluent et que l’intérieur de la planète est donc toujours actif.
La plupart des 37 structures volcaniques actives forment un vaste anneau dans l’hémisphère sud de la planète, avec en particulier une impressionnante couronne baptisée Artemis qui mesure 2 100 km de diamètre. Les résultats de la dernière étude peuvent permettre d’identifier les zones cibles où des instruments pourraient être déposés lors de futures missions sur Vénus, comme la mission européenne EnVision prévue pour 2032.
Source: Presse scientifique internationale.

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 A new study published in the journal Nature Geoscience on July 20th, 2020 has identified 37 recently active volcanic structures on Venus. The study provides some of the best evidence that Venus is still a geologically active planet. This goes against the thought that Venus was essentially dormant geologically because it lacks the plate tectonics that gradually reshape Earth’s surface.

The research was conducted by scientists at the University of Maryland and the Institute of Geophysics at ETH Zurich, Switzerland. The authors say « this is the first time [they] are able to point to specific structures and say ‘Look, this is not an ancient volcano but one that is active today, dormant perhaps, but not dead. »

Scientists have known for some time that Venus has a younger surface than planets like Mars and Mercury, which have cold interiors. Evidence of a warm interior and geologic activity dots the surface of the planet in the form of ring-like structures known as coronae, which form when plumes of hot material rise through the mantle layer and crust. This is similar to the way mantle plumes formed the volcanic Hawaiian archipelago.

Up to now, it was thought that the coronae on Venus were probably signs of ancient activity, and that Venus had cooled enough to prevent deep hot material from piercing its surface. In addition, the exact processes by which mantle plumes formed coronae on Venus has been a matter for debate.

In the new study, the researchers used numerical models of thermo-mechanic activity beneath the surface of Venus to create high-resolution, 3-D simulations of coronae formation. Their simulations provide a very detailed view of the formation process.

The results helped the researchers identify features that are present only in recently active coronae.  They were able to match those features to those already observed on the surface of Venus by NASA’s Magellan spacecraft in the 1990s. This comparison revealed that some of the variation in coronae across the planet represents different stages of geological development. The study provides the first evidence that coronae on Venus are still evolving, indicating that the interior of the planet is still active.

Many of the 37 active volcanic structures reside within in a gigantic ring in the planet’s southern hemisphere, including a colossal corona called Artemis which is 2,100km in diameter. These results may help identify target areas where geologic instruments should be placed on future missions to Venus, such as Europe’s EnVision that is scheduled to launch in 2032.

Source: International scientific press.

De gauche à droite : Mercure, Vénus, la Terre et Mars (Source : Wikipedia)