Nouvelles techniques pour mieux comprendre les volcans // New techniques to better understand volcanoes

Une étude publiée intégralement dans Communications Earth & Environment le 16 septembre 2024 nous apprend que des chercheurs ont mis au point un nouveau dispositif pour observer les entrailles des volcans

Des scientifiques français ont fait passer au volcan de la Soufrière en Guadeloupe une sorte d’échographie. Cette nouvelle technique d’imagerie matricielle repose sur un réseau de géophones, des capteurs qui enregistrent à la fois les séismes proprement dits et le bruit sismique plus discret généré par le vent, l’océan et les activités humaines.

En analysant la façon dont toutes ces ondes se propageaient à l’intérieur du volcan les chercheurs ont pu reconstituer sa structure interne en 3 dimensions jusqu’à 10 kilomètres de profondeur et avec une précision de l’ordre d’une centaine de mètres. Au final, ils ont obtenu avec une résolution jamais atteinte, le plan de toute la tuyauterie de la Soufrière (voir image ci-dessous). On peut voir une cheminée légèrement tortueuse de 5 kilomètres de long et en dessous un réseau de poches de magma connectées entre elles. Les auteurs de l’étude n’hésitent pas à parler d’un outil révolutionnaire qui pourrait permettre à l’avenir de mieux prévoir les éruptions volcaniques.

Image tridimensionnelle de la Soufrière vue de l’est et du nord,

Dans des notes publiées en février, mai et juillet 2016, j’avais attiré l’attention sur une nouvelle technique – la tomographie muonique – destinée à mieux comprendre l’intérieur de certains volcans. Il y a une dizaine d’années, les volcanologues pensaient que la radiographie par les muons (particules cosmiques) serait un outil qui pourrait permettre de percer les mystères qui entourent l’activité volcanique.
La tomographie muonique a été utilisée pour la première fois par les Japonais pour visualiser la structure interne de volcans comme l’Asama, l’Iwate ou encore le volcan Satsuma-Iojima dans la préfecture de Kagoshima. Les scientifiques savaient que ce volcan dissimulait un réservoir magmatique, mais la nouvelle technologie a révélé que la quantité de magma était beaucoup plus grande que prévu.

De leur côté, les scientifiques français ont eux aussi utilisé la tomographie muonique dans le cadre du projet DIAPHANE sur le volcan de la Soufrière à la Guadeloupe. Des équipes du CNRS ont installé un capteur de muons cosmiques sur le flanc du volcan. La technologie a permis de « suspecter la présence d’importantes cavités » à l’intérieur de l’édifice volcanique.

Image de la Soufrière avec le projet Diaphane

Une autre application de la tomographie muonique  a eu pour cadre le Puy de Dôme en Auvergne. Le but du projet TOMUVOL était « la connaissance de l’historique du volcan de par sa structure pour prédire le comportement futur. » Une image du Stromboli (Sicile) a également été obtenue grâce à la tomographie muonique.

Si la tomographie muonique permet d’obtenir une image intéressante de l’intérieur des volcans, elle ne permet pas de mieux connaître le comportement du magma à l’intérieur des édifices. La mise en place des capteurs muoniques est longue et compliquée et il me semble difficile d’obtenir des images en temps réel permettant de faire des prévisions fiables.

Reste à savoir si la nouvelle technique d’imagerie matricielle permettra de mieux prévoir les éruptions.

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A study published in full in Communications Earth & Environment on September 16, 2024, reveals that researchers have developed a new device for observing the depths of volcanoes.
French scientists have conducted a type of ultrasound scan of the Soufrière volcano in Guadeloupe. This new matrix imaging technique relies on a network of geophones, sensors that record both the earthquakes themselves and the more subtle seismic noise generated by wind, the ocean, and human activity.
By analyzing how all these waves propagate within the volcano, the researchers were able to reconstruct its internal structure in 3D down to 10 kilometers deep and with an accuracy of around 100 meters. Ultimately, they obtained, with unprecedented resolution, a map of the entire conducts of the Soufrière volcano (see image above). A slightly twisting, 5-kilometer-long duct can be seen, and beneath it, a network of interconnected magma pockets. The study’s authors point out this is a revolutionary tool that could help better predict volcanic eruptions in the future.

In several posts published in February, May, and July 2016, I drew attention to a new technique—muon tomography—designed to better understand the interior of certain volcanoes. About ten years ago, volcanologists believed that X-ray imaging using muons (cosmic particles) would be a tool that could unlock the mysteries surrounding volcanic activity. Muon tomography was first used by the Japanese to visualize the internal structure of volcanoes such as Asama, Iwate, and Satsuma-Iojima in Kagoshima Prefecture. Scientists knew that this volcano concealed a magma reservoir, but the new technology revealed that the quantity of magma was much greater than expected.
For their part, French scientists also used muon tomography as part of the DIAPHANE project on the Soufrière volcano in Guadeloupe. Teams from the CNRS installed a cosmic muon sensor on the flank of the volcano. The technology made it possible to « suspect the presence of significant cavities » within the volcanic edifice. (see image above).
Another application of muon tomography took place at the Puy de Dôme in Auvergne. The goal of the TOMUVOL project was « to understand the volcano’s history through its structure in order to predict future behavior. » On image of the interior of Stromboli (Sicily) was also obtianed thanks to the muon technology (see image above).

While muography provides an interesting image of the interior of volcanoes, it does not provide a better understanding of the behavior of magma within the structures. Installing muon sensors is long and complicated, and I think it will be difficult to obtain real-time images that would allow for reliable predictions.
It remains to be seen whether the new imaging technique will allow for better eruption prediction.

2 réflexions au sujet de « Nouvelles techniques pour mieux comprendre les volcans // New techniques to better understand volcanoes »

  1. Bonjour Claude.

    Technique utilisée aussi par ailleurs avec la pyramide de Khéops, qui a permis de détecter des cavités inconnues à l’intérieur du monument.

    Si le schéma est à l’échelle, les poches de magma de la Soufrière semblent vraiment imposantes.

    Bonne journée.
    Frédéric

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    1. Bonjour Frédéric,
      J’avais parlé de la pyramide de Khéops dans mes articles consacrés à la muographie. En France, le premier test de cette nouvelle technique a été faite sur le château d’eau de Saclay. Sur les images, on voit très bien la structure de béton et l’espace vide à l’intérieur. Le problème, c’est la difficulté pour installer les capteurs en terrain volcanique et le temps qu’il faut pour obtenir des images.
      Amitiés.
      Claude

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