A la recherche du Moho // Looking for Moho

drapeau-francaisUne équipe scientifique a quitté Colombo, au Sri Lanka, et se dirige vers Atlantis Bank dans le SO de l’Océan Indien, pour percer le plancher océanique sur 1,5 kilomètres de profondeur et récolter des échantillons de roches. La première phase de l’expédition commencera dans les prochains jours et durera jusqu’à la fin du mois de janvier 2016. Si elle est couronnée de succès, l’équipe reviendra sur le site afin d’essayer d’atteindre le Moho.
La frontière entre la croûte et le manteau terrestre, appelée discontinuité de Mohorovicic, ou MOHO, au niveau de laquelle les ondes sismiques modifient leur vitesse de déplacement, se situe à environ 7 km sous la croûte océanique et entre 30 et 60 km de profondeur sous les continents. A Atlantis Bank, le manteau se trouve à 2,5 km au-dessus du Moho, ce qui le rend à priori plus facile à atteindre.
Le projet de forage, baptisé « Slow Spreading Ridge Moho » (SloMo), tentera d’atteindre la transition croûte-manteau à Atlantis Bank. L’expédition espère obtenir des données fiables qui permettront de répondre à certaines questions sur notre planète, par exemple comment la roche en fusion monte depuis l’intérieur de la Terre et se refroidit tout en formant une nouvelle croûte océanique.
Pendant les années 1960, les scientifiques impliqués dans le projet « Mohole », ont tenté de percer le plancher océanique au large de l’île de Guadalupe, au Mexique. Le projet a atteint seulement 183 mètres de profondeur avant d’être arrêté par manque de financement.
Entre 2002 et 2011, quatre forages sur un site du Pacifique oriental ont réussi à atteindre une zone de roche friable, très probablement du magma refroidi juste au-dessus du Moho. Mais le forage a été incapable de descendre plus profondément.
De même, les forages à proximité de Hess Deep se sont heurtés à des roches de croûte profonde trop résistantes au cours de l’expédition de 2013.
En 2015, l’équipe scientifique effectuera le forage dans la dorsale de l’Océan Indien car il semble que des quantités de lave moins importantes alimentent le plancher océanique dans la région.
Un objectif préliminaire est d’atteindre 1,5 km de profondeur, ce qui a déjà été réalisé. Pendant cette première phase, les scientifiques espèrent pouvoir étudier la géologie et la biologie de la zone. Les cartes géologiques disponibles semblent montrer que l’eau de mer a percolé sur plusieurs kilomètres de profondeur à Atlantis Bank et a déclenché des réactions chimiques qui ont donné naissance à de la serpentinite.
Si la première phase de la mission SloMo est une réussite, les scientifiques reviendront dans la région pour tenter de parvenir à des profondeurs allant jusqu’à 3 km. Après cela, ils emprunteront le navire japonais Chikyu doté d’une très haute technologie pour essayer d’atteindre vraiment le Moho.
Source: Woods Hole Oceanographic Institution.

Une note rédigée le 28 octobre 2013 abordait déjà la discontinuité de Mohorovicic et les efforts des scientifiques pour essayer d’en percer les secrets.

————————————-

drapeau-anglaisA group of scientists has departed Colombo, Sri Lanka, and is heading out for the Atlantis Bank, in the southwestern Indian Ocean, to drill through 1.5 kilometres of rock, collecting core samples on the way. The first phase of the expedition will commence in the next few days and last until the end of January 2016. If the start is successful the team will come back again to try and drill all the way down to the MOHO layer. .
The crust-mantle boundary named Mohorovicic discontinuity, or MOHO, at which seismic waves change their travel velocity is located about 7 km beneath the oceanic crust and between 30 and 60 km down beneath continents. At Atlantis Bank, the mantle is settled 2.5 km above the MOHO, making it easier to reach.atlantis bank
The drilling project, named « Slow Spreading Ridge Moho » (SloMo), will try to reach the crust-mantle transition at Atlantis Bank. The expedition hopes to provide good quality data to answer some questions about other properties of our planet, for example how molten rock rises from the interior and cools while forming fresh oceanic crust.
During the 1960s, scientists involved into the « Project Mohole », tried to drill into the sea floor off Guadalupe Island, Mexico. The project reached depths of only 183 metres before it was shut down due to too high expenses.
In the period between 2002 and 2011, four holes at a site in the eastern Pacific managed to reach an area of brittle rock, most likely a cooled magma sitting just above the Moho. But the drill was unable to pierce further. Similarly, drillers at the nearby Hess Deep were limited by tough deep-crustal rocks in the 2013 expedition.
The 2015 team of experts will conduct the drilling in the Indian Ocean Ridge instead, as much smaller lava quantities seem to feed the seafloor there.
A preliminary goal is set to penetrate to the depths of 1.5 km, and it has been done before. During this first phase, the scientists are hoping to explore the geology and biology of the area. Available geological maps suggest the seawater has percolated several kilometres deep at Atlantis Bank and triggered chemical reactions responsible for turning the rock into serpentite.
If SloMo’s first phase is successfully completed, experts will return to the area to try to reach depths up to 3 km. After that, the researchers will sail out on the Japanese state of the art ship Chikyu to try to drill all the way down to MOHO layer.
Source : Woods Hole Oceanographic Institution.

A previous note written on 28 October 2013 already tackled the Mohorovicic discontinuity and the efforts made by scientists to try and pierce its secrets.

Moho-blog

Percer les secrets du Moho…

drapeau francaisChaque semaine, les scientifiques de l’Hawaiian Volcano Observatory écrivent un article intitulé Volcano Watch sur un sujet différent. Cette semaine, ils attirent l’attention de leurs lecteurs sur la discontinuité de Moho.

Comme je l’écris souvent dans ce blog, nous savons souvent plus de choses sur les autres planètes que sur la nôtre! Nous savons beaucoup de choses sur la Lune ou sur Mars, mais les profondeurs des océans terrestres restent un mystère. Il en va de même avec la structure interne de la Terre. La raison est facile à comprendre : la surface de la Terre, les océans et l’atmosphère sont facilement accessibles à l’exploration directe. La même remarque est valable pour l’espace. Il est beaucoup plus difficile de pénétrer des roches solides que de se déplacer à travers l’atmosphère ou le vide de l’espace.
En conséquence, nos connaissances sur la structure profonde de la Terre jusqu’à son centre (6371 km sous la surface) s’appuient sur des mesures indirectes, en particulier sur la sismologie. En étudiant la trajectoire et la vitesses des ondes sismiques provoquées par les tremblements de terre, les sismologues ont conclu que la Terre ressemble à un œuf, avec trois couches principales : la croûte, le manteau et le noyau.

En 1909, Andrija Mohorovičić, un sismologue croate qui étudiait un tremblement de terre dans les Balkans, a observé une brusque augmentation de la vitesse des ondes de compression dans la zone qui marque la limite entre la croûte terrestre et le manteau. En l’honneur de son découvreur, cette discontinuité sismique a été nommée discontinuité de Mohorovičić. Maintenant, pour plus de facilité, elle est communément désignée sous le nom de Moho.
Le Moho est présent sous tous les continents et les océans, mais sa profondeur varie ; elle est, en moyenne, d’environ 35 km sous les continents et généralement de 6 km environ sous les océans. Bien que le Moho soit défini comme la limite entre la croûte et le manteau, la raison de la brusque augmentation de la vitesse des ondes de compression reste mal définie. La plupart des scientifiques pensent que  cette augmentation reflète un changement dans le type de roche, avec du basalte au-dessus du Moho et de la péridotite riche en olivine sous le Moho

Les géologues rêvent depuis longtemps de percer le Moho dans le manteau supérieur pour voir si cette discontinuité est due à un changement de composition des roches ou à d’autres facteurs. Cette tâche est assez difficile à réaliser. Un forage dans un secteur où la croûte est mince au fond de l’océan est en théorie plus facile à réaliser que le forage d’un continent. Mais forer à partir d’un navire est techniquement difficile, et la difficulté augmente avec la profondeur de la mer.
Le fond marin est relativement peu profond près des dorsales médio-océaniques où une nouvelle croûte se forme avec la montée du magma. Il est donc tentant de forer près d’une dorsale. Cependant, la croûte nouvellement formée dans ces zones est chaude, et l’équipement de forage ne ​​peut pas faire face à de telles températures. L’astuce consisterait à trouver un endroit où le Moho n’est ni trop chaud ni trop profond pour pouvoir percer.
La première tentative pour percer le Moho a eu lieu en 1961, au large des côtes du Mexique. Le trou le plus profond a pénétré sur 183 mètres le fond de l’océan, en sachant que les 179 mètres supérieurs étaient constitués de sédiments. Dans les années suivantes, seuls quatre forages sont descendus à plus de 1 km dans la croûte océanique ; le plus profond a atteint 2,1 km au large des côtes de l’Equateur.
En Septembre 2012, un nouveau navire de forage scientifique doté de technologies de pointe – le Chikyu – a réussi à forer plus profond. Le Chikyu représente la contribution du Japon à un effort de recherche international « dédié à une meilleure compréhension scientifique de la Terre par des forages, des carottages et la surveillance de ce qui se passe sous le plancher océanique. » Le but final du Chikyu est de forer le Moho jusque dans le manteau.
Des recherches sont en cours pour sélectionner un emplacement de forage pour le Chikyu . Trois sites sont à l’étude : un au large des côtes du Mexique où a déjà eu lieu le forage de 1961, un au large de la côte ouest du Nicaragua, qui a également déjà été foré, et un dans l’Arc Nord de l’archipel hawaïen qui s’étire à environ 400 km au nord et parallèlement aux îles Hawaii.

 

drapeau anglaisEvery week, scientists at the Hawaiian Volcano Observatory write an article named Volcano Watch about a different topic. This week, they draw their readers’ attention to the Moho.

As I often write in this blog, we often know more about the other planets than about our own one! We know a lot about the Moon or Mars but the depths of the oceans are still a mystery. It is just the same with the inner structure of the Earth. The reason is easy to understand: The Earth’s surface, the oceans, and the atmosphere are readily accessible to direct exploration. The same is true of space. It is much more difficult to penetrate solid rocks than it is to move through the atmosphere or the vacuum of space.

As a consequence, our knowledge about the Earth’s deep structure to its centre (6,371 km below the surface) is based on indirect measurements, particularly on seismology. By studying the paths and speeds of seismic waves caused by earthquakes, seismologists have concluded that the Earth looks like an egg, with three main layers: the crust, the mantle, and the core.

In 1909 Andrija Mohorovičić, a Croatian seismologist studying a Balkan earthquake, identified an abrupt increase in the speed of compressional waves that marks the boundary between the Earth’s crust and the mantle below. In honour of its discoverer, this seismic discontinuity was named the Mohorovičić discontinuity. Now it’s commonly referred to as the Moho.

The Moho is present under all continents and oceans, but its depth varies—with an average depth of about 35 km under the continents and typically 6 km under the oceans. Although the Moho is defined as the boundary between the crust and mantle, the reason for the abrupt increase in compressional wave speed is uncertain. Most scientists think that the wave-speed increase reflects a change in rock type from basalt above the Moho to denser, olivine-rich peridotite below the Moho.

Geoscientists have long wanted to drill through the Moho into the upper mantle to see whether the Moho is caused by a compositional change or by something else, a task that is quite difficult to perform. Drilling where the crust is thin on the sea floor is obviously a more attractive target than drilling on a continent. But drilling from a ship is technologically difficult, and the difficulty increases with the depth of the water.

So a place where the sea floor depth is at a minimum would seem to be the place to drill. The seafloor is relatively shallow near the mid-ocean ridges, where new crust forms from rising magma. So drilling near a ridge seems attractive. However, the young, newly formed crust near ridges is hot, and drilling equipment cannot tolerate the expected temperatures. The trick is to find a place where the Moho is cool enough to drill, yet not too deep to drill.

The first attempt to drill to the Moho was in 1961, off the coast of Mexico. The deepest hole penetrated 183 metres into the sea floor, with the upper 179 metres consisting of sediments. In the following years, only 4 holes penetrated more than 1 km into the oceanic crust; the deepest of these was 2.1 km off the coast of Ecuador.

In September 2012, a new state-of-the-art scientific drilling ship – Chikyu – managed to drill deeper. The Chikyu is part of Japan’s contribution to an international research effort “dedicated to advancing scientific understanding of the Earth through drilling, coring, and monitoring the subseafloor.” The Chikyu is designed to ultimately drill through the Moho into the mantle.

Planning is currently underway to select a drill site for the Chikyu. Three sites are under consideration: the site off the coast of Mexico that was drilled in 1961, a site off the west coast of Nicaragua that has also been previously drilled, and the North Arch of the Hawaiian Archipelago. The North Arch is about 400 km north and parallel to the Hawaiian Islands.

 Moho-blog