Vendée Globe : entre empreinte carbone et intérêt scientifique

Il y a quelques jours, je me trouvais aux Sables d’Ononne (Vendée), histoire d’aller jeter un coup d’oeil aux 40 embarcations Imoca des concurrents du Vendée Globe 2024. J’ai toujours admiré ces navigateurs qui se lancent dans une course de 45 000 kilomètres en solitaire autour du monde, sans escale et sans assistance, et dont le départ est donné aujourd’hui 10 novembre 2024..

Malgré une réservation sur Internet, j’ai dû faire la queue pendant près d’une heure avant de pouvoir accéder aux pontons. En patientant, je me disais que je participais à une sacrée empreinte carbone car la grande majorité des personnes autour de moi étaient venues, elles aussi, en voiture, et souvent de beaucoup plus loin que moi.

Des bateaux moins polluants.

En réfléchissant encore davantage, je me disais que la construction de ces monocoques de compétition de 18 mètres de long contribuait largement à cette empreinte carbone. J’ai donc fait une recherche sur Internet et une séquence diffusée sur France Info a apporté une réponse à la question que je me posais.

Même si ces bateaux fonctionnent à la voile, ils traînent dans leur sillage quelques tonnes de CO2. Lors de leur fabrication, pas moins de 600 tonnes d’équivalent CO2 sont envoyées dans l’atmosphère. À titre de comparaison, chaque Français en émet huit tonnes par an en moyenne. De plus, cette empreinte carbone de la construction des Imoca n’a cessé d’augmenter ces dernières années.

L’avenir semble malgré tout prometteur et devrait améliorer la situation au niveau de l’empreinte carbone car certains navigateurs ont trouvé des solutions pour la réduire. Près de Nantes, le skipper Armel Tripon (qui ne participe pas à ce Vendée Globe) fait construire son futur voilier de course avec des rouleaux de fibres de carbone mis au rebut par l’industrie aéronautique. Il en a récupéré gratuitement trois tonnes pour réaliser 70% de son bateau. Au final, les émissions de CO2 ont été divisées par deux. Le skipper compte aller plus loin avec la fabrication des pièces d’accastillage (les poulies permettant de manœuvrer le bateau) à partir de titane recyclé qu’il compte récupérer dans les hôpitaux car non utilisé pour les prothèses orthopédiques. Aujourd’hui, l’équipe d’Armel Tripon a déjà stocké deux tonnes de ce titane hors d’usage et s’apprête à mettre en place une filière industrielle pour le recycler.

Certaines des voiles qui se dressent fièrement le long des pontons des Sables d’Olonne sont fabriquées avec des matériaux non polluants. C’est ainsi qu’à Carnac (Morbihan), l’atelier All Purpose – l’un des fabricants de voile qui équipent des bateaux du Vendée Globe – intègre 50% de fibre de lin dans la fabrication de la grand-voile. Ce lin, récolté en Normandie, remplace en partie les fibres synthétiques et permet donc d’améliorer l’empreinte carbone. D’autres fibres naturelles sont à l’étude, comme le chanvre ou l’ortie dont les fibres étaient déjà utilisées au Moyen-Age pour faire des cordes d’arc.

L’intérêt scientifique.

Les skippers du Vendée Globe participent certes à une compétition sportive de très haut niveau, mais ils contribuent aussi à faire avancer la science environnementale. Un article paru dans le numéro de novembre 2024 du National Geographic nous apprend que pour la première fois, au cours de l’épreuve 2024, la moitié de la flotte sera impliquée dans un projet scientifique en collaboration avec l’IFREMER. Cela permettra à l’Institut français d’accéder aux zones méconnues de l’Atlantique Sud.

Les skippers seront en charge de trois missions : 1) larguer des bouées météo et des flotteurs du réseau mondial Argo permettant de déterminer en temps réel la température et la salinité de l’océan, ainsi que d’autres paramètres ; 2) effectuer des prélèvements d’eau, en particulier pour évaluer sa teneur en microplastiques et analyser l’ADN environnemental ; 3) réaliser des mesures visant à mieux comprendre l’évolution de la circulation océanique. (J’ai insisté à plusieurs reprises sur ce blog sur les profonds changements qu’entraînerait l’effondrement de l’AMOC).

L’objectif de ces différentes mesures est de mieux comprendre les effets du réchauffement climatique et l’impact de l’Homme sur l’Océan. [Photos: C. Grandpey]