L’éruption du Calbuco (Chili) aura eu au moins un mérite, celui d’occulter quelque peu le documentaire « Tazieff / Allègre, la guerre des volcans », réalisé par Éric Beauducel et diffusé le jeudi 23 avril à 21h35 sur France 5, dans le cadre de la collection Duels présentée par Annick Cojean.
Comme l’explique la chaîne de télévision dans sa présentation du documentaire, en 1976, l’antagonisme entre Haroun Tazieff et Claude Allègre faisait irruption dans les médias français. D’un côté, un volcanologue déjà connu du grand public, de l’autre un chercheur récemment promu directeur de l’Institut de Physique du Globe de Paris. Cet affrontement individuel naquit de la menace d’éruption, en Guadeloupe, du volcan de la Soufrière et du choix de faire évacuer ou non les 70 000 personnes potentiellement en danger. Deux conceptions de la volcanologie et de la gestion du risque naturel s’affrontèrent alors. Cette crise changera à jamais les deux hommes : Allègre puisera dans cet épisode le désir ardent d’égaler – sans jamais y parvenir – son adversaire dans la vulgarisation scientifique et dans les médias. Le volcanologue, lui, en gardera une rancoeur persistante. Un jour que je reconduisais Haroun Tazieff à l’aéroport de Limoges et que je m’osais à aborder le sujet, sa réponse fut brève et sèche : « Ne me parlez pas de cet homme ; c’est un escroc et un menteur ». C’est tout dire !
A mes yeux, faire réapparaître cette querelle est inutile. Aujourd’hui, il n’y a plus grand monde pour s’y intéresser et on peut se demander quel intérêt Eric Beauducel a trouvé en réalisant ce documentaire. Plusieurs parmi les principaux protagonistes ne sont plus là pour donner leur point de vue : Tazieff et Brousse ne sont plus de ce monde ; Allègre est malade ; Rose-Marie Chevrier et François Le Guern, fidèles lieutenants de Tazieff à la Guadeloupe, nous ont quittés.
Personnellement, je regarderai le documentaire en essayant de comprendre le but recherché par Eric (et François ?) Beauducel. S’agissant de la crise de la Soufrière, je préfère m’attarder sur les pages du livre « La Soufrière, à qui la faute ? » paru aux Presses de la Cité en 1977. Bernard Loubat et Anne Pistolesi, documents à l’appui à la fin de l’ouvrage, montrent parfaitement le déroulement des événements.