Souvenirs intimes (2ème partie)

La suite de l’histoire a lieu en 1997 quand mon père retrouve Harry Kujawski à La Souterraine lors d’une soirée de présentation des actes du colloque de Guéret consacré au  » sauvetage des enfants juifs en Creuse pendant la guerre « . Au cours de cette soirée, il obtient l’adresse d’Israël Lichtenstein, devenu cancérologue à Jérusalem. Il lui écrit en août 1999 et reçoit peu après un appel téléphonique qui le bouleverse : son ancien élève promet de venir le revoir en Creuse au plus tôt.

Promesse tenue ! Le samedi 2 octobre 1999, mon père et ses deux anciens élèves se retrouvent au Masgelier où une salle de classe a été reconstituée, semblable à celle de 1941. Les deux enfants ont brillamment réussi leur vie professionnelle. Harry a enseigné la géophysique à l’Université de Bordeaux. Israël est devenu médecin-chef à l’hôpital Saint-Louis de Jérusalem. Au Masgelier, il est accompagné de son fils afin de lui transmettre la mémoire familiale.

 

Retrouvailles au Masgelier: le maître (à droite) et ses deux élèves

J’aurais aimé participer à cette rencontre essentielle à mes yeux, mais je me trouvais en Sicile, quelque part entre l’Etna et le Stromboli, en train d’effectuer des mesures et des observations sur ces volcans. Avoir raté cette rencontre a fait naître chez moi une frustration qui n’a cessé de grandir au cours des années suivantes….

Jusqu’au 10 mai 2011 où avait lieu à La Souterraine le baptême de la salle d’exposition de la Cité scolaire qui porterait le nom de.Jean-Baptiste Robert. Nommé directeur de l’Ecole de garçons en 1940, Monsieur Robert avait pris sous son aile bienveillante et clandestine des enfants juifs, auxquels il avait attribué de faux noms. En hommage à cet acte héroïque, le nom de Jean-Baptiste Robert a été gravé dans la pierre du Mémorial de Yad Vashem à Jérusalem après sa nomination en 2000. Cet hommage de Juste parmi les Nations que l’État d’Israël a rendu au directeur de l’École primaire supérieure de garçons rappelle le courage d’un homme pour défendre l’idéal inscrit au fronton de notre République : liberté, égalité, fraternité.

Monsieur Jean-Baptiste Robert

Mon père est décédé en 2002 et je n’ai pas retrouvé dans ses archives les coordonnées d’Israäl Lichtenstain. Je me suis donc rendu à cette cérémonie dans ma ville natale car je pensais qu’il me serait possible de rencontrer les personnes qui avaient permis de rétablir le contact entre mon père et ses anciens élèves juifs. J’avais vu juste et le soir même j’obtenais par téléphone les coordonnées d’Israël Lichtenstein, le « Zizi » auquel mon père était tant attaché.

Dès le lendemain, j’appelais le médecin à la retraite. Au cours d’une conversation téléphonique empreinte d’une grande émotion, il m’a fait part de son grand désir de me rencontrer, Il partait en voyage avec son épouse début juillet 2011 et il fallait donc aller à Jérusalem avant. Internet me fut d’une grande utilité pour acheter les billets d’avion et retenir un hébergement à Jérusalem. Le 15 juin, accompagné de mon épouse, je prenais un vol Air France à destination de Tel-Aviv d’où un minibus devait me conduire à Jérusalem Ouest où j’avais retenu un hôtel.

Dès notre arrivée à l’hôtel, j’appelai Israël Lichtenstein qui arriva rapidement et nous conduisit à son domicile où nous avons fait la connaissance de son épouse. La soirée passée dans un restaurant de Jérusalem a permis d’évoquer le passé. Mon père n’étant plus de ce monde, c’était une obligation pour moi de maintenir le lien qu’il avait commencé à tisser en 1941 au Masgelier.

Depuis juin 2011, je garde le contact avec Israël Lichtenstein et nous ne manquons jamais de nous adresser nos vœux au début de chaque année.

A suivre…

Souvenirs intimes (1ère partie)

La couverture du numéro de septembre du National Geographic France montre le Dôme du Rocher sur l’Esplanade des Mosquées à Jérusalem. Le sous-titre de la photo précise que c’est « un lieu saint sous hautes tensions ».

Cette photo fait remonter en moi le souvenir d’un voyage de quelques jours effectué à Jérusalem au mois de juin 2011, et que j’ai brièvement évoqué dans une note publiée le 26 juin de ce même mois.

Ce voyage est intimement lié à ma vie personnelle que, contrairement à beaucoup d’autres blogonautes, je n’évoque que très rarement sur ce blog.

L’histoire remonte à 1941, année où mon père – Gaston Grandpey – jeune instituteur (on ne parlait pas de professeur des écoles) est nommé au Masgelier, près de Grand-Bourg en Creuse où il restera de février à novembre 1941. On informe l’enseignant qu’il s’agit d’un poste particulier qui comporte certains risques. Ce n’est pas une école classique mais une maison qui abrite des enfants juifs de l’Œuvre de secours aux enfants, l’O.S.E., dissimulés à l’occupant dans ce coin perdu de la Creuse.

 

Le Masgelier en 1941

Les directeurs, Juifs eux aussi, assurent gîte et couvert. L’établissement possède trois classes mixtes.

La tâche qui attend le jeune instituteur est difficile et bien éloignée de la leçon modèle qu’on lui a enseignée à l’Ecole Normale. Point de matériel pédagogique, hormis de simples tables et des chaises.

Malgré cet environnement dépouillé, le travail s’organise car, si les enfants maîtrisent très mal le français, ils ont soif d’apprendre. C’est peut-être un moyen de soulager leur inquiétude. En effet, si certains reçoivent des nouvelles de leurs parents, d’autres apprennent leur départ dans des convois…

Parmi les jeunes pensionnaires du Masgelier figurent Harry Kujawski et Israël Lichtenstein, des élèves particulièrement doués et attachants. »Zizi » Lichtenstein, surtout, est un élève de huit ans qui sort du lot par la vivacité de son intelligence et son infatigable désir d’apprendre.

Quand, en novembre 1941, mon père quitte le Masgelier pour se rapprocher de sa future épouse – donc ma mère ! – ses élèves lui donnent en souvenir des photos dédicacées qu’il conservera précieusement.

« Zizi » Lichtenstein

A suivre…

Plus de pub sur ce blog ! // No more ads on this weblog !

A partir de maintenant, vous ne devriez plus être importunés par les écrans publicitaires qui figuraient au bas de mes notes. Je zappe les séquences publicitaires – parfois interminables – à la télévision; ce n’est pas pour en être encombré ici. Je souhaitais effectuer la démarche depuis pas mal de temps. Maintenant, c’est fait!

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From now on, you won’t be any more disturbed by the advertisements that used to appear at the bottom of my posts . I deliberately skip the ads – often desperately long – on television and I do not want to find them here! I wanted to do this for quite a long time and now it’s done!